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si dissemblables en elles-mêmes malgré leur homonymie, ainsi que les remèdes qui les renferment ou qui en dérivent. De là naît l'impérieuse nécessité d'en faire un bon choix, afin d'arriver à des résultats, autant que possible, identiques ou similaires.

Ces motifs engagèrent l'Académie, en 1856, à mettre au concours la question que voici :

« Faire connaître des méthodes certaines et faciles à exécuter, pour déterminer la valeur réelle des opiums et des quinquinas jaunes, au point de vue des usages pharmaceutiques. »

Le mémoire que l'Académie reçut ne fut pas jugé digne du prix.

Prenant en considération l'importance et l'utilité du sujet, la Compagnie, dans sa séance du 30 octobre 1858, prit la résolution de remettre la question au concours.

Un seul travail lui est parvenu. Il porte pour devise: « Quæsivi, ut spero, inveni. »

C'est une simple notice, sans historique, sans examen ni critique des écrits parus sur le même objet, et dans laquelle l'auteur se borne à indiquer, sans les raisonner, un procédé pour l'essai des opiums et un pour l'essai des quinquinas jaunes. Dans l'un comme dans l'autre, il s'est placé au point de vue exclusivement économique ou commercial du titrage, c'est-à-dire, de l'évaluation des quantités de morphine et de quinine que chacune de ces substances renferme en particulier, absolument comme s'il s'agissait de les employer uniquement à l'extraction de ces alcaloides, ou comme si ceux-ci résumaient à eux seuls toute la valeur médicinale de ces médicaments. C'est assez dire qu'il n'a tenu aucun compte de la codéine, de la narcotine, de la cinchonine, du tannin ni des autres principes immédiats qui les constituent.

Or, il est avéré que les sels de morphine et de quinine ne peuvent pas remplacer complétement l'opium et le quinquina dans leurs nombreux usages pharmaceutiques. On sait, en effet, que si cette substitution est possible et même avantageuse dans quelques cas, il en est beaucoup d'autres où elle serait nuisible en produisant des effets tout différents de ceux sur lesquels on compte.

S'il en était autrement, il serait irrationnel de ne pas remplacer bientôt l'opium par la morphine dans le laudanum, et de ne pas substituer au décocté ou à l'extrait de quinquina, médicaments très-variables dans leur composition, certaines doses d'un sel de quinine, toujours si facile à fractionner.

Il n'est d'ailleurs pas démontré que les quantités de morphine et de quinine cherchées comme base d'évaluation des opiums et des quinquinas, sont dans un rapport direct et constant avec les proportions des autres principes immédiats que l'on désire retenir dans les préparations pharmaceutiques qui en proviennent.

La question posée ne peut donc pas être ainsi simplifiée, et il est aisé de comprendre déjà que le travail reçu ne remplit pas les intentions de l'Académie, qui demandait des méthodes d'estimation des opiums et des quinquinas jaunes considérés au point de vue de leurs usages pharmaceutiques. Ce que nous allons dire complétera la démonstration.

Notons d'abord, que l'auteur ne dit pas un mot de la proportion de morphine ou de quinine que les opiums et les quinquinas devraient contenir pour être considérés comme officinaux.

L'auteur se tait complétement sur la valeur des caractères physiques des opiums et des quinquinas, qui permettent cependant souvent de faire bientôt apprécier, ou du moins soupçonner, leur qualité bonne ou mauvaise. Ainsi, Weddel

prétend qu'en examinant attentivement la surface de la fracture transverse d'une écorce de quinquina, il est possible de préjuger, jusqu'à un certain point, sa composition chimique, c'est-à-dire qu'il existerait une relation entre les caractères chimiques des quinquinas et leurs caractères structuraux qui seraient constamment révélés par une forme spéciale de fracture.

Cette fracture est fibreuse ou à surface partout hérissée de pointes courtes, fines, égales et indépendantes les unes des autres; elle est filandreuse, c'est-à-dire présentant des filaments se prolongeant en filandres inégales et plus ou moins longues; enfin elle est subéreuse, ou à surface plus lisse, plus nette que les précédentes, et n'offrant guère de fibres qu'à la partie interne seulement.

La première modification de fracture indique une écorce plus riche en quinine que la seconde celle-ci en renferme plus que la troisième qui révèle la pauvreté en quinine avec prédominance de la cinchonine.

Il est un fait bien acquis, c'est que l'écorce qui renferme la plus grande proportion de quinine est le quinquina-Calisaya (jaune royal), et l'expérience a appris que les écorces qui, après lui, en renferment davantage, sont précisément celles dont la structure se rapproche le plus de la sienne : à savoir, celles dont le derme est réduit au seul liber par l'exfoliation successive des tuniques plus extérieures ou, du moins, par leur adjonction au périderme (1).

D'autre part, l'expérience a aussi démontré que les quinquinas gris (qui paraissent n'être que les écorces des jeunes

(1) Pour Weddell, la partie morte de l'écorce est le périderme; la partie vive, plus intérieure, est le derme. Le derme est donc l'écorce, moins son périderme, ou toute la partie de l'écorce comprise entre le périderme et le bois.

branches de plusieurs espèces différentes de Cinchona, plus tard rouges ou jaunes) contiennent, en moyenne, une plus grande proportion de cinchonine que de quinine, parce que leur liber n'a pris encore que peu de développement; tandis que les écorces âgées qui ont conservé la tunique cellulaire qu'elles avaient étant jeunes, sont plus chargées en quinine.

En somme, Weddell est arrivé à conclure que la quinine a de préférence son siége dans le liber; que ce n'est pas dans ses fibres mêmes à cavité presque nulle, ni dans les laticifères qui lui sont extérieurs qu'elle se trouve, mais dans les cellules au milieu desquelles les fibres sont répandues; et elle y abonde d'autant plus que ces cellules sont plus minces, tandis que lorsqu'elles sont très-épaisses entre les fibres, elles sont plutôt riches en cinchonine.

Quant à la cinchonine, elle occupe plus particulièrement la tunique cellulaire extérieure au liber, où elle existe toujours en quantité proportionnelle à son épaisseur, tandis que la quinine y est en proportion inverse.

Le rapporteur regrette que le temps lui ait manqué pour consigner ici les résultats remarquables auxquels il croit être parvenu dans l'étude physique des quinquinas jaunes, non pas, comme Weddell, par l'examen de la fracture, mais par l'examen de la couleur de ces écorces.

Bien que nous sachions parfaitement que les caractères physiques des quinquinas ne peuvent pas être toujours rigoureusement infaillibles, et que l'analyse chimique sera toujours le meilleur juge de leur valeur, on comprendra aisément par ce qui précède que ces caractères sont trop importants à consulter pour qu'il soit permis de les négliger entièrement dans un travail répondant à une question de concours relative à l'estimation de ces écorces.

L'Académie apprendra sans doute avec surprise que l'aspirant au prix n'indique aucune précaution pour former les portions d'opium et de quinquina qui doivent servir aux essais. Il doit savoir cependant, que les divers pains d'une même caisse d'opium, et les différentes écorces d'un même suron de quinquina sont loin d'être identiques dans leur composition. Parmi celles-ci, il ne distingue pas celles qui sont encore revêtues de leur périderme d'avec celles qui en sont dépourvues, comme si les deux principaux alcaloïdes des quinquinas jaunes n'y avaient pas chacun son siége de grande prédilection, et comme s'il n'était pas en quelque sorte possible, dans plusieurs cas, de former, d'une seule et même écorce, deux parts distinctes, dont l'une renfermerait toute la quinine et l'autre, toute la cinchonine.

Lorsque la formation d'un échantillon sur lequel on se propose d'opérer, peut faire varier si considérablement le résultat d'un essai chimique, il importe assurément d'y apporter beaucoup de soins et de précautions. Non-seulement l'auteur de la notice n'en dit pas un mot, mais croira-t-on qu'il est également muet sur la quantité d'eau que les opiums du commerce peuvent recéler, et qui peut cependant s'élever jusqu'à cinquante-trois pour cent? Or, il est évident qu'un même poids d'un même opium rendra une préparation pharmaceutique d'autant plus active que cet opium sera plus sec, et d'autant moins qu'il sera plus humide. De là, des degrés d'action si variables, qu'ils pourront aller jusqu'à s'augmenter du double.

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Du reste, à part la question d'achat, pour laquelle le dosage de l'eau est indispensable afin de ne pas payer la partie surabondante de ce liquide au même prix que l'opium dans son état convenable; si l'on ne tient pas compte de l'eau que n Suppl.

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