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En vue de s'opposer à la résorption purulente, l'administration du sulfate de quinine à haute dose ne devra pas être négligée.

Traitement de la méningite et de l'encéphalite. — Ces affections ne sont pas aussi fréquentes qu'on l'a prétendu, et parce qu'un malade atteint de fièvre 1yphoïde aura éprouvé du délire pendant plus ou moins de temps, on ne sera pas en droit de conclure pour cela qu'il a une méningite ou une encephalite. Ce délire n'est la plupart du temps que sympathique.

La méningite et l'encéphalite sont des complications formidables de la fièvre typhoïde et au premier abord, la méthode antiphlogistique paraîtrait devoir ici faire merveille..... Détrompez-vous!.....

Dans une épidémie de fièvres typhoïdes, qui régna au couvent de la présentation de la sainte Vierge à Tours, plusieurs religieuses furent prises de méningite, je les saignai et je fis répéter chez quelques-unes d'elles la saignée jusqu'à trois et même quatre fois. Toutes celles auxquelles j'ordonnai la soustraction d'une plus ou moins grande quantité de sang moururent; mais celles que je soumis à une médication que je vais faire connaître guérirent.

Je purgeai largement, abondamment et autant que possible avec le calomel que je donnai à doses réfractées.

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2 décigrammes.

Sucre en poudre . 4 grammes.

Pour vingt paquets; un toutes les heures.

Je continuai cette médication pendant plusieurs jours; puis je fis raser le cuir chevelu et appliquer deux vésicatoires, l'un qui prenait depuis la naissance des cheveux au front jusqu'au sommet de la tête, l'autre qui partait du sommet de la tête, au point de rencontre du premier, jusqu'à la naissance des cheveux à la nuque. Dès que la vésication avait été obtenue, je faisais enlever l'épiderme et je pansais cette énorme plaie avec :

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Si les vésicatoires se séchaient, cessaient de suppurer, j'en faisais immédiatement appliquer d'autres.

Tout récemment encore, j'ai obtenu au couvent du Sacré-Cœur de Marmoutier (près Tours), un magnifique succès chez une religieuse affectée de fièvre typhoïde grave avec complication de méningite. J'ai employé le calomel à doses réfractées, j'ai eu recours à l'application des vésicatoires sur la tête. Dès qu'ils ont été secs, je les ai fait remplacer par de nouveaux, et j'ai mis ce moyen en usage jusqu'à trois fois chez la même personne. Une guérison complète a couronné cette médication énergique.

Je n'ai cependant pas que des succès à enregistrer et je compte également quelques revers. Tout dernièrement j'ai perdu à la colonie de Mettray un jeune détenu, R....., âgé de quatorze ans, atteint de fièvre typhoïde fort grave compliquée de méningite; trois jours après l'explosion des accidents cérébraux, cet enfant succombait.

J'ajoute bien entendu à tous les moyens que je viens de faire connaître les vésicatoires à la partie interne des jambes ou à la partie interne et inférieure des cuisses.

J'ai également recours à l'usage des boissons délayantes.

Je n'ai presque jamais expérimenté l'application de la glace sur la tête dans les cas de méningite ou d'encéphalite, parce que je suis encore à constater un fait de guérison bien authentique à l'aide de ce moyen. Sans admettre les idées théoriques qui font rejeter à M. de Larroque cette médication si vantée et surtout si répandue de nos jours, je la repousse parce que je ne lui reconnais pas d'avantages réels.

Pour être complet, et surtout pour me poser au point de vue d'une saine et judicieuse pratique, je dois confesser que généralement ces applications réfrigérantes se pratiquent horriblement mal.

Les médecins qui ont recours à ce moyen placent d'habitude une vessie remplie de glace pilée, ou de neige, ou d'eau très-froide sur le cuir chevelu du malade préalablement rasé, et ils laissent ce liquide réfrigérant en permanence pendant quinze, dix-huit, vingt-quatre et même trente-six heures ; ils ont seulement soin de renouveler l'application du froid, dès que la température du liquide s'est un peu élevée.

Cette manière de faire est des plus vicieuses, et sans aucun doute est en grande partie cause de tous les insuccès que les praticiens qui l'emploient ont à enregistrer. Cette application continue d'eau froide sur la tête fait tomber le sujet dans une sorte de collapsus qui entraîne constamment la mort.

Pour être utiles, il faut que les applications réfrigérantes soient continuées pendant une heure, je suppose, puis suspendues pendant une heure, pour être reprises ensuite, ensuite suspendues, et continuées ainsi et suspendues ainsi alternativement jusqu'à effet salutaire, ou plutôt jusqu'à ce que la réaction se manifeste.

Si le malade était plongé dans un état d'adynamie très-prononcée la méthode réfrigérante devrait être repoussée, car la réaction ne pourrait plus s'effectuer.

La réaction pour être avantageuse doit toujours être modérée; si elle était trop intense, il faudrait la maîtriser à l'aide d'une petite évacuation sanguine.

Du reste, je le répète, je n'aime pas ce moyen, et je n'en ai pas vu de bons effets, même appliqué comme je viens de le décrire.

Traitement de la fièvre intermittente. Le sulfate de quinine est le remède par excellence de cette complication, et j'avoue que je n'en connais pas de meilleur, que la fièvre soit simple ou qu'elle revête le caractère pernicieux; seulement, les doses varieront dans l'un ou dans l'autre cas.

Si la fièvre intermittente est simple, six à huit décigrammes de sulfate de quinine suffiront pour faire disparaître cette complication chez les adultes; trois à cinq décigrammes, chez les enfants. Il sera bon de renouveler cette dose au bout de quelques jours.

Si la fièvre intermittente revêt le caractère pernicieux, il faudra administrer deux grammes chez les adultes, et cinq décigrammes à un gramme aux enfants. Ces doses seront continuées pendant trois jours au moins. Il sera bon de continuer ensuite pendant quelque temps avec une dose moindre.

DU RÉGIME ALIMENTAIRE.

Il est un point sur lequel je tiens à apporter le tribut de mon expérience et qui n'est pas assez connu, ou plutôt qui est très-controversé, c'est celui du régime alimentaire dans le traitement de la fièvre typhoïde.

Ouvrez la plupart des livres qui traitent de cette maladie, et vous y verrez que la diète la plus austère, la plus rigoureuse est de précepte, et que ceux qui s'éloignent de cette manière de faire exposent leurs malades aux plus redou tables accidents.

Voici, en dépit de ces auteurs et de leurs recommandations, quelle est la conduite à laquelle je me suis astreint et qui m'a donné d'excellents résultats.

Durant les premiers jours, c'est-à-dire pendant que l'excitation est portée à son summum d'intensité, je laisse les malades à une diète sévère, je les purge, et je leur permets des boissons froides et acidules; mais dès que cette excitation s'est éteinte, je leur fais administrer soit du bouillon de poulet, soit du thé de bœuf (beef tea), soit du bouillon de bœuf coupé, et je leur en donne trois ou quatre tasses en vingt-quatre heures. Je continue ainsi pendant tout le cours de la fièvre typhoïde, à moins qu'il ne surgisse quelque grave complication soit méningite, soit péritonite, soit perforation intestinale, etc., qui me force à interrompre cette alimentation.

Dès que les accidents febriles se sont amendés, que la convalescence s'est établie, que la peau a perdu de sa chaleur et de sa sécheresse, que le pouls de 120 à 130 pulsations est tombé à 80 et même à 60; qu'un amendement notable des autres phénomènes s'est produit, que l'amaigrissement excessif du visage s'est manifesté, je ne crains pas de prescrire de légers potages, puis j'arrive insensiblement, au bout de quelques jours, à faire manger aux convalescents quelques fragments d'échaudé avec un peu de confiture; je conseille un œuf à la coque (le jaune seulement), un peu de poisson, quelques légumes frais, puis bientôt j'arrive aux viandes blanches, veau, poulet, perdreau, etc., je permets quelques compotes de fruits, et enfin lorsque le mieux est parfaitement établi, que les rechutes ne sont plus à craindre, je donne des viandes noires grillées ou rôties (bœuf, mouton, pigeon, lièvre, etc.).

L'usage du vin rouge mouillé, très-mouillé même est employé au début de la convalescence. Je fais mettre d'abord une cuillerée à bouche de vin de Joué ou de Bourgueil (crus de Touraine très-justement renommés et bien préférables au vin de Bordeaux qui ne s'accommode pas de l'eau), dans une verrée d'eau sucrée ou non; puis tous les deux ou trois jours je mets une cuillerée de plus, jusqu'à

ce que je sois arrivé à faire prendre au convalescent un quart de vin pour trois quarts d'eau.

Si les forces tardent trop à revenir, je fais prendre après les repas une cuillerée à dessert de vin d'Espagne (Rota, Malaga ou Alicante).

Il arrive chez quelques sujets, au moment où on les soumet à l'alimentation, que le pouls prend tout à coup une extrême fréquence; de soixante à soixanteet douze fois qu'il battait par minute, il s'élève alors à cent vingt-huit ou cent trente-deux fois. Ne vous effrayez pas, si la peau conserve sa fraîcheur, si les fonctions s'exécutent bien, et continuez l'alimentation; bientôt cette fièvre factice tombera et tombera d'autant mieux que le pauvre convalescent recouvrera plus de forces, plus de vigueur.

Cette accélération du pouls dont je parlais tout à l'heure, existe quelquefois même avant qu'on ait commencé à alimenter les malades, et fait croire à certains praticiens, même fort habiles, que leur client est en très-grand danger, et qu'il faut éloigner toute pensée de nourriture. Erreur, préjudiciable au malade, car avec une alimentation légère et progressive, les accidents auraient bientôt disparu!... A mesure que par la nutrition le malade réparera ses pertes, cette accélération de circulation fera place au calme et à la régularité des battements du cœur et du pouls.

On rencontre aussi quelquefois certains individus chez lesquels l'appétit était très-prononcé au début de la convalescence, et qui, au bout d'un temps plus ou moins long, tombent dans un dégoût complet pour les aliments; les fonctions digestives ne s'exécutent plus; il y a chez eux des accidents de dyspepsie. Chez ces malades, un éméto-cathartique ou un léger purgatif suffisent ordinairement pour rétablir l'équilibre, mais en même temps qu'on a recours à ces évacuants, on doit suspendre l'alimentation pour la reprendre ensuite avec tous les ménagements que comporte cet état saburral des voies digestives que l'on vient de combattre.

On fera bien de conseiller à ces malades quelques toniques, quelques stimulants de concert avec une bonne alimentation.

Voilà pour le régime alimentaire un exposé aussi bref que possible. Mon intention n'est pas d'entrer dans tous les détails des recommandations à adresser aux malades et aux parents des malades, sur les dangers auxquels une indigestion peut entraîner et entraîne. Il est de toute évidence qu'un acte de gloutonnerie, qu'un écart de régime se paient ordinairement par une rechute terrible, et que la mort en est souvent la conséquence. Cela doit suffire!... J'ai vu à la colonie de Mettray de malheureux enfants, qui, ne comprenant rien à la sévérité du régime qu'on leur imposait, périssaient victimes de leur désobéissance et de leur infraction à la diète qu'on leur avait infligée!... Ces accidents, il faut l'avouer, arrivent plus fréquemment dans les hôpitaux que dans la pratiq ue civile.

Malgré les ressources d'une excellente nourriture bien variée, il y a quelques convalescents chez lesquels une désespérante débilité non-seulement physique,

mais encore intellectuelle, persiste pendant un temps infini. Contre la débilité physique, il faut recourir aux stimulants, aux toniques, à une alimentation azotée, viandes noires rôties ou grillées, au changement d'air, aux promenades en voiture, à la campagne, etc., etc... Contre la débilité intellectuelle, il faut savoir attendre et faire attendre, procurer des distractions aux malades, etc. Tout le secret est là!... Parfois cependant, quoi qu'on fasse, cette débilité intel lectuelle persiste et rend certains individus comme hébétés, idiots, imbéciles, sans mémoire, tandis qu'ils étaient très-intelligents avant leur maladie. Cest cas sont rares, j'en ai vu quelques exemples néanmoins.

DES SOINS HYGIÉNIQUES.

Il faut autant que possible éloigner des typhiques les personnes saines et les séquestrer pour ainsi dire, afin de ne pas propager la maladie et de ne pas la transmettre aux proches, aux amis qui ne l'auraient pas encore eue. Loin de nous, l'idée de priver ces malheureux des consolations de l'amitié et des soins de ceux qui les aiment et les entourent; mais il faut en tout une sage pru

dence.

Il est de précepte de renouveler sans cesse l'air des chambres dans lesquelles ils se trouvent, et de les ventiler.

Les moyens désinfectants tels que les aspersions de chlorure de chaux liquide, les fumigations faites avec les vinaigres aromatiques, avec le benjoin, l'encens, le goudron, etc., peuvent être regardés comme nuls et sans effets.

Une excessive propreté est de rigueur, il faut changer de linge très-souvent aux malades (linge de corps et linge de lit), surtout lorsque dans la période adynamique ou dans la période ataxique les urines et les matières fécales sont rendues involontairement. Il faut aussi avoir soin de laver et d'éponger soigneusement les parties qui baignent dans ces matières excrémentitielles.

Dès que la convalescence est établie, il faut tous les jours lever les malades, les sortir de leur lit pour les placer soit sur une chaise longue, soit sur un autre lit. On expose ensuite leurs matelas à l'air ou à l'action des rayons solaires.

Dès qu'ils sont transportables et que leur position de fortune le permet, il faut les faire conduire à la campagne pour respirer un air pur et embaumé (du mois de mai au mois d'octobre bien entendu).

Lorsqu'ils sont plus forts, on leur conseille des promenades en voiture pour commencer, puis plus tard des promenades à pied.

Il faut leur recommander de se vêtir chaudement même pendant l'été, parce qu'ils sont tellement émaciés, tellement épuisés, qu'ils ont peu de chaleur vitale. On leur donnera également le conseil d'éviter l'action des rayons solaires sur la tête; aussi devront-ils se munir durant leurs promenades de larges chapeaux de paille.

Si quelque catastrophe, si quelque malheur vient à frapper la famille d'un typhique, ou le typhique lui-même pendant sa maladie, il faut lui cacher à

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