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matières alcalines, potasse et chaux, ou lorsqu'on l'a fait servir à absorber les émanations ammoniacales qui s'exhalent du fumier. Ces observations tendent à assimiler la tourbe aux humus, et paraissent en contradiction avec la composition exceptionnelle qu'on lui suppose.

J'ai fait quelques expériences sur une tourbe prise à Mennecy, dans les environs de Corbeil; elle était acide. Einoff attribue cette acidité de la tourbe à ce qu'elle contient de l'acide acétique et de l'acide phosphorique. Sprengell rapporte la réaction acide à la tourbe elle-même. Il est certain que par les lavages les plus prolongés, je n'ai pu lui enlever la propriété de rougir le papier de tournesol.

La tourbe, exposée à l'air, agit à peine sur lui. J'ai laissé de la tourbe fraîche en contact avec l'air, dans une cloche, sur le mercure, depuis le 16 août jusqu'au 20 octobre, sans que le volume de l'air ait changé d'une manière sensible, et sans qu'il se soit fait d'acide carbonique.

Si l'on traite la tourbe par l'eau, celle-ci ne se colore pas. Si l'on remplace l'eau par l'ammoniaque, celle-ci se colore en brun clair. Au contact de l'air, la liqueur se charge et se fonce de plus en plus. J'ai humecté de la tourbe fraiche avec de l'ammoniaque, et je l'ai introduite dans une cloche sur le mercure. L'absorption de l'oxygène s'est faite avec une grande rapidité, puis elle s'est ralentie; au bout de deux mois, il restait encore un peu d'oxygène qui n'avait pas été absorbé. Du reste, on va voir que par rapport à l'eau, à l'air, aux acides et aux alcalis, la tourbe se comporte comme le fait le terreau.

L'eau au contact de la tourbe ne se colore pas, l'ammoniaque donne une liqueur peu colorée; si l'on enlève alors tout ce qu'il y avait de soluble par des lavages, et qu'on fasse agir de nouveau l'air et l'ammoniaque, les liqueurs se chargent de nouveau. Si l'on traite la tourbe, d'abord par l'acide chlorhydrique, et ensuite par l'ammoniaque, on obtient alors immédiatement et sans qu'il soit besoin du contact de l'air, une liqueur très-foncée que les acides pré cipitent en abondance.

Ainsi, la tourbe comme le terreau contient peu d'humus libre; l'acide chlorhydrique met en liberté toute la portion d'humus bien plus abondante qui était combinée avec la chaux. Le résidu contient une matière propre à se transformer rapidement au contact de l'air et des alcalis. Du reste, l'humus extrait de la tourbe et précipité par les alcalis, a les mêmes propriétés que l'humus du terreau.

J'ai trouvé à la tourbe la même propriété

conservatrice qu'au terreau. J'ai pris, d'une part, 100 grammes de viande de cheval desséchée que j'ai humectée et qué j'ai abandonnée à elle-même. Tous les phénomènes de la putréfaction la plus active s'y sont développés. J'ai pris la même quantité de viande que j'ai humectée et que j'ai mélangée avec six fois son poids de tourbe fraiche; la décomposition s'est faite avec lenteur; la matière animale s'est détruite lentement, formant avec la tourbe un composé qui n'avait rien de l'odeur infecte de la viande putréfiée, et que l'on pouvait comparer à celle du fumier en fermentation.

M. Regnault a trouvé dans une tourbe 57 à 58 de carbone, 5,6 à 6,1 d'hydrogène, 30 à 32 d'oxygène. J'ai obtenu avec la tourbe de Mennecy 54,6 de carbone et 49 d'eau, c'est-à-dire un excès d'hydrogène. J'ai analysé la même tourbe, après l'avoir épuisée par l'alcool bouillant et par l'éther; elle m'a fourni :

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Cet humus est-il absolument de la même nature que celui du terreau? Je n'ai pu y voir de différence. Ce que je puis assurer, c'est qu'il est tout aussi propre à favoriser la végétation. J'ai semé des haricots dans une terre factice, dépourvue de matières organiques, mais dans laquelle j'avais fait entrer du sulfate de chaux et un peu de phosphate de chaux. Je l'ai partagée en deux parts dans chacune desquelles j'ai semé des haricots. Une fois que les feuilles ont été développées, j'ai arrosé tous les jours, les uns avec une solution d'humate d'ammoniaque, les autres avec une solution d'humate de chaux provenant de la tourbe. Ils ont tous bien végété, mieux, peut-être,

ceux qui ont été arrosés avec l'humate de du sol, en modérant et régularisant la déchaux. composition des matières animales putrescibles.

S'il est vrai que la tourbe contient le pourri blanc avec excès d'hydrogène, d'après la manière dont elle se comporte avec l'eau et les alcalis, il doit arriver que celuici soit bientôt modifié et ramené aux conditions du terreau charbonneux. Si l'on considère les services que l'humus, répandu dans les terres, rend à la végétation, on doit regretter que la tourbe, qui est si abondante en certaines localités, ne soit pas plus fréquemment employée comme adjuvant des autres engrais. Modifiée convenablement et par l'air et par les alcalis, elle rendrait, sans contredit, des services importants à l'agriculture.

Suivant quelques observateurs, la cendre de tourbe ne contient jamais de phosphates, ce que l'on attribue à ce que la tourbe est le résultat d'une putréfaction acide, au milieu de l'eau, qui entraîne tous les phosphates en dissolution. Cependant Berzélius cn a trouvé dans une tourbe. J'ai constaté leur présence dans la tourbe de Mennecy, dans laquelle, il est vrai, sont en petite quantité.

ils

Propositions résultant des faits et des cxpé

riences rapportés dans ce mémoire.

1o Le tissu ligneux qui se décompose au contact de l'air humide se change en humus, et forme en même temps de l'acide carbonique qui peut être absorbé par les racines des plantes.

2o La proportion de carbone dans l'humus du terreau et des engrais ne dépasse jamais 56 à 57 pour 100 de carbone. C'est la limite extrême que peut atteindre la décomposition du ligneux au contact de l'air et de l'humidité.

3. L'humus pur contient deux et demi pour 100 d'azote qui paraissent essentiels à sa composition.

4° L'humus est à peine altérable au contact de l'air.

50 L'humus, à peine soluble dans l'eau par lui-même, acquiert de la solubilité par sa combinaison avec la chaux; mais l'agent principal de sa dissolution est le carbonate d'ammoniaque, qui peut réagir également et sur l'humus libre et sur l'humus engagé dans une combinaison calcaire.

6o L'humus, rendu soluble, est absorbé par les racines des plantes. Il sert directement à la nourriture du végétal.

7° L'humus a, de plus, une action favorable sur la végétation, en attirant et retenant l'humidité de l'air et l'ammoniaque, en facilitant la dissolution du phosphate de chaux, en améliorant les qualités physiques

8° La tourbe, modifiée au contact de l'air, de la chaux et des matières alcalines, a tous les caractères et les propriétés du terreau. Elle est extrêmement propre à fa voriser la végétation, après qu'on lui a ajouté les matières salines, chlorures, sulfates et phosphates alcalins et terreux, dont elle est habituellement dépourvue.

9° L'engrais par excellence est celui qui contient en même temps des sels terreux et alcalins, des sels ammoniacaux, de la matière animale putrescible, de l'humus tout formé et des débris végétaux en voie de transformation.

10o Dans l'appréciation d'un engrais, il faut prendre en considération, non-seulement la quantité d'azote fourni par l'analyse, mais aussi l'état sous lequel cet azote existe dans l'engrais, savoir; à l'état de sch ammoniacal ou de matière animale putrescible, à l'état de sel ammoniacal soluble, ou de phosphate ammoniaco-magnésien.

11o Les analyses des engrais fermentés faites jusqu'ici sont défectueuses, en ce que l'on n'a pas tenu compte de la perte qui résulte de l'action du carbonate de chaux sur les sels à base d'ammoniaque, pendant la dessiccation des engrais. Il en résulte que les tables représentant la proportion d'azote dans les engrais, et qui ont élé publiées, ne peuvent donner que des approximations.

12° La valeur comparative des engrais ne peut être évaluée en tenant compte seulement de la quantité d'azote qu'ils fournissent à l'analyse, parce que, d'une part, les matières azotées ne sont pas les seuls éléments actifs des engrais, et d'autre part, parce que la valeur des engrais dépend beaucoup de l'état sous lequel l'azote y est contenu; et, comme conséquence :

Il n'est pas possible d'établir une table d'équivalence pour les engrais.

13° Enfin, il faudra joindre à tous ces faits l'observation remarquable de Mulder qui a prouvé que l'humus condense et transforme en ammoniaque l'azote de l'air atmosphérique.

(Journ, de pharm, et de chim.)

OBSERVATIONS SUR L'ÉTHÉRIFICATION, par Th. GRAHAM. Traduit du journal anglais de la Société médicale de Londres. - Dans le procédé ordinairement suivi pour éthérifier l'alcool en distillant ce liquide avec l'acide sulfurique, on reconnaît deux changements chimiques distincts: 1o la formation de l'acide sulfovinique (sulfate double

d'éther et d'eau); 2° la destruction de ce composé et la mise en liberté de l'éther. Ce dernier phénomène ou la séparation de l'éther est rapporté à son évaporation, dans les circonstances de l'expérience, au milieu d'une atmosphère de vapeurs d'eau et d'alcool, et avec le concours de l'eau qui le remplace comme base auprès de l'acide sulfurique. Cependant l'observation faite par M. Liebig que l'éther n'est pas dégagé par un courant d'air passant au travers d'un mélange d'acide sulfurique et d'alcool, vient contrarier cette théorie en prouvant que le fait seul de l'évaporation ne suffit par pour séparer l'éther.

Ces considérations diverses m'ont conduit à rechercher si l'éther ne pourrait pas se former sans distillation, et je suis arrivé à des résultats qui paraissent modifier considérablement l'idée qu'on se forme de l'éthérification.

L'alcool employé dans les expériences qui suivent avait toujours une densité de 0,841, correspondant à 85 p. 100 d'alcool absolu.

1re EXPÉRIENCE.

Un volume d'huile de vitriol fut mêlé à quatre volumes d'alcool. Le mélange fut fait graduellement et avec précaution, de manière à prévenir l'élévation considérable de la température, et porté ensuite dans un tube de verre ayant 1 pouce de diamètre, 6p. 6 de longueur, sur laquelle toutefois, le liquide n'occupait que 5 p. 2: un espace de 1 p.4 restait donc vacant pour l'expansion par la chaleur. Après avoir scellé hermétiquement ce tube, je le plaçai dans un digesteur bain-marie, et je l'exposai sans crainte pendant une heure à une température croissante depuis 140o jusqu'à 178 centig.

Aucun incident ne survint, mais le liquide, mesuré après refroidissement, occupait 5 p. 25 dans le tube, au lieu de 5 p. 20. Il se trouvait, de plus, partagé en deux couches, l'une supérieure occupant 1 p.75, l'autre inférieure occupant 3 p. 5.

Le premier de ces deux liquides était parfaitement transparent et incolore; en ouvrant le tube, je le reconnus pour de l'éther si entièrement exempt d'acide sulfureux qu'il n'affectait pas la couleur jaune d'une goutte de solution de bichromate de polasse. Quant au fluide inférieur, il avait une légère teinte jaune, quoique parfaitement transparent. Il contenait un peu d'éther, mais il consistait principalement en un mélange d'alcool, d'eau et d'acide sulfurique. Le sel obtenu par la neutralisation de ce liquide à l'aide du carbonate de soude ne noircissait pas par la chaleur,

d'où l'on peut inférer qu'il n'y avait que peu ou pas d'acide sulfovinique.

Le point principal à observer dans cette expérience, c'est le succès complet d'un procédé d'éthérification dans lequel il n'y a ni distillation ni formation sensible d'acide sulfovinique, et dans lequel on emploie une très-grande proportion d'alcool, c'està-dire deux équivalents pour un seul d'acide sulfurique. Quand on diminue la proportion d'alcool, les résultats sont moins favorables, ainsi qu'on va le voir.

2o EXPÉRIENCE.

Un mélange d'un volume d'huile de vitriol et deux volumes d'alcool fut enfermé dans un tube de verre, et chauffé comme précédemment. Le liquide prit une couleur brune terreuse par réflexion, et rouge, par transmission. Au bout de vingt-quatre heures sculement, on put apercevoir une pellicule mince d'éther flottant à la surface d'un liquide foncé.

3o EXPÉRIENCE.

Avec une proportion encore plus faible d'alcool, c'est-à-dire volumes égaux d'huile de vitriol et d'alcool, ce qui approche des proportions adoptées dans le procédé ordinaire, j'obtins, à une haute température, un liquide noir et opaque, épais et gommeux, sans couche sensible d'éther, après refroidissement.

J'eus occasion de reconnaître, après cette expérience, que les cristaux de bisulfate de soude, contenant un faible excès d'acide, pouvaient éthérifier environ deux fois leur volume d'alcool dans un tube fermé, avec la même efficacité que l'acide sulfurique de la première expérience, quand on élève la température au même degré. Les deux liquides trouvés dans le tube sont également sans couleur, sans apparence d'acide sulfureux, et ne renfer ment qu'une quantité minime d'acide sulfovinique. Les cristaux de bisulfate de soude qui avaient pris naissance dans une solution aqueuse, et qui ne renfermaient aucun excès d'acide avaient encore un pouvoir éthérifiant sensible, mais de beaucoup inférieur.

4 EXPÉRIENCE.

Je fis un mélange d'huile de vitriol avec une proportion encore plus forte d'alcool, c'est-à-dire un volume du premier pour huit du second, ou à peu près un équivalent d'acide pour quatre d'alcool. Ce mélange fut enfermé dans un tube et chauffé pendant

une heure entre 140° et 158° C., température qui paraissait suffisante pour l'éthérification. En l'exposant une heure de plus à la même température, je n'obtins pas sensiblement plus d'éther. La colonne de ce liquide, mesurée dans le tube, avait 1p.25, et le liquide acide inférieur 2p.5. Les deux liquides étaient parfaitement incolores.

Il paraît, en conséquence, inutile de dépasser la température de 158° dans ce procédé d'éthérification, et il paraît aussi que la proportion d'alcool peut s'élever jusqu'à huit fois le volume de l'huile de vitriol, sans qu'on obtienne moins d'éther.

p.

Se EXPÉRIENCE.

J'employai les proportions de la première expérience (1 vol. d'acide et 4 d'alcool), et je chauffai le mélange à la température de la dernière expérience, c'est-à-dire à 158. Le liquide supérieur, ou éther, mesurait 1 1 dans le tube; le liquide inférieur, 2 p. 65. Ce dernier avait une légère teinte jaune, comme l'éther nitreux, mais à peine appréciable. Neutralisé par la craie, il donna: sulfate de chaux, 83,11; sulfovinate de chaux, 4,91. Ce dernier sel était soluble dans l'alcool, et cristallisait en plaques minces. On voit donc qu'ici encore, dans un procédé qui a parfaitement réussi à produire de l'éther, l'acide sulfovinique ne s'est présenté qu'en quantité tout à fait insignifiante.

Les nouveaux résultats obtenus à 158° C. à l'aide d'autres proportions, 1 volume d'acide par exemple, et 1 ou 2 volumes d'alcool, furent tout à fait semblables à

ceux qu'avaient fournis les expériences 2 et 3 à la température la plus élevée de 178°. Dans aucune de ces expériences il ne parut se former de gaz oléfiant, les tubes ont toujours pu être ouverts sans danger, au moins après refroidissement.

Ni l'acide phosphorique glacial, ni le biphosphate de soude cristallisé, n'ont éthérifié l'alcool, même en élevant la température à 182°. Le chlorure de zinc luimême n'a produit, à la même température, qu'une légère trace d'éther, et encore n'était-elle perceptible qu'au sens de l'odo

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Ce mélange fut enfermé dans un tube de verre et chauffé à 145° C. pendant une heure. Il prit alors une couleur foncée, brune verdâtre et opalescente, avec une petite quantité d'une matière d'apparence gommeuse. Aucune couche d'éther ne se forma à la surface du liquide. Le tube fut ouvert et le liquide partagé en deux couches égales. Une de ces parties fut mêlée avee la moitié de son volume d'eau, l'autre avec moitié de son volume d'alcool. Les deux liquides furent enfermés dans des tubes et exposés de nouveau à 143° pendant une heure.

On devait s'attendre, avec l'idée qu'on se forme généralement de la théorie de l'éthérification, sur l'acide sulfovinique et sur rait plus d'éther libéré et produit dans l'eau qui met l'éther en liberté, qu'il y aucelle des deux mixtures à laquelle on avait ajouté l'eau. L'observation montra le contraire. L'éther séparé ne forma, dans ce dernier cas, qu'une pellicule mince qui exigea même plusieurs jours de repos pour se séparer distinctement. Dans l'autre liquide au contraire, auquel j'avais ajouté de l'alcool, la formation de l'éther fut considérable, et je vis apparaître une colonne de ce liquide excédant quelquefois la moitié du volume initial de l'alcool ajouté. Cette expérience montre que l'acide sulfovinique est à peu près incapable par lui-même de fournir l'éther, même en le traitant par l'eau, mais qu'il peut éthérifier l'alcool qu'on lui ajoute, tout comme le bisulfate lui-même ou quelque autre sel acide de l'acide sulfurique.

Les conclusions que je pourrais hasarder de ces expériences sont les suivantes :

Le procédé le plus direct et le plus normal pour la préparation de l'éther paraît être d'exposer un mélange de vitriol et de 4 à 8 fois son volume d'alcool à 85o centésimaux, à une température de 160° C. pendant un temps court. Eu égard à la volatilité de l'alcool, on y parvient en employant la pression, en opérant, par exemple, dans un tube de verre fermé et scellé. L'acide sulfurique paraît alors exercer sur l'alcool une action comparable à celle qu'il présente dans son mélange en petite proportion avec les huiles essentielles. L'huile de térébenthine, mêlée avec 1120° de son volume d'acide sulfurique, subit une complète transformation en deux autres hydro

gènes carbonés, le térébène et le colophène, dont l'un a son point d'ébullition beaucoup plus élevé et sa densité de vapeur plus considérable que l'huile de térébenthine d'où il dérive. Cet hydrogène carboné ne se combine pas pour cela avec l'acide, dont la simple et remarquable action de contact

suffit pour lui faire éprouver cette augmentation dans son poids atomique et sa densité de vapeur, sans autre dérangement de composition.

Il en serait de même pour l'hydrogène carboné de l'alcool sa densité se trouve doublée dans l'éther par une action de contact du même acide. Le chlorure de zine avec l'alcool produit, à une température élevée, une destruction de ce dernier présentant le même caractère, mais accompagnée de divers hydrogènes carbonés d'une densité plus considérable, et sans oxygène.

Cette théorie de l'éthérification doit être considérée comme une expression de la théorie de contact qui a été si longtemps et si heureusement invoquée par Mitscherlich. La formation de l'acide sulfovinique ne paraît pas être une gradation nécessaire dans la production de l'éther, car nous avons trouvé que le procédé d'éthérification le plus avantageux consistait dans l'emploi du bisulfate de soude ou de l'acide sulfurique mêlé à une grande proportion d'alcool et d'eau, ce qui est la condition la plus défavorable à la production de l'acide sulfovinique. Il parait que la combinaison de l'alcool avec l'acide sulfurique sous la forme d'acide sulfovinique, diminue grandement les chances d'éthérification du premier; car lorsqu'on augmente, dans les expériences précédentes, la proportion d'huile de vitriol, ce qui tend à augmenter la proportion d'acide sulfovinique, la proportion d'éther diminuc rapidement. La conversion préalable de l'alcool en acide sulfovinique paraît done être actuellement un obstacle plutôt qu'un auxiliaire à sa transformation en éther.

La fabrication de l'éther a atteint une sorte de perfection artificielle dans le beau procédé à distillation continue que l'on suit actuellement. Le premier mélange d'alcool et d'acide sulfurique est converti en acide sulfovinique (sulfate d'éther et d'eau), lequel sel acide paraît être l'agent qui éthérifie tout l'alcool ultérieurement introduit. Le bisulfate de soude avec un léger excès d'acide agit de la même manière sur l'alcool, et sa substitution au sulfate acide d'éther aurait un certain intérêt au point de vue théorique, quoique ne produisant aucun changement d'une importance pratique dans la préparation de l'éther.

L'acide sulfurique ne paraît pas se prêter à l'éthérification de l'alcool amylique. M. Balard, en distillant ces substances ensemble, a obtenu une variété d'hydrogènes carbonés, dont quelques-uns d'une grande densité, mais il n'a pas obtenu d'éther. L'action transformatrice de l'acide sulfurique parait alors dépasser le but, et aller au delà de la formation de l'éther. J'ai varié

l'expérience en chauffant l'alcool amylique dans un tube clos à 176° avec l'huile de vitriol à laquelle 1, 2, 3, 4 et même 6 équivalents d'eau avaient été ajoutés, sans obtenir autre chose que les hydrogènes carbonés de Balard. Leur formation fut abondante, même dans les cas de l'acide le plus hydraté, et le liquide ne fut que modérément coloré.

(Journ, de pharm, et de chim.)

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Note relative au mémoire de M. GRAHAM; par M. BUIGNET. L'expérience dont il vient d'être question dans le travail précédent est certainement une des plus curieuses qu'on ait faites sur l'éthérification. Les chimistes accueilleront avec le plus vif intérêt les détails de ce procédé ingénieux où l'éther se trouve obtenu sans distillation, sans formation sensible d'acide sulfovinique et à l'aide de proportions d'alcool et d'acide sulfurique complétement différentes de celles qui sont habituellement employées. Bien que ce procédé ne paraisse pas avoir une grande importance pratique puisqu'il exige l'action d'une force comprimante qui n'est pas toujours sans danger, il y a tout lieu de croire, néanmoins, qu'il sera mis à profit pour éclairer un point encore si obscur et pourtant si intéressant de la science.

Déjà, sur l'avis que je leur avais donné de ce mémoire, MM. Lhermite et Personne, l'un agrégé, l'autre préparateur à l'école de pharmacie de Paris, ont tenté quelques expériences qui forment la contre-partie de celles de M. Graham et qui viennent confirmer les résultats de son important travail.

Dans le tube où ce chimiste plaçait le mélange d'alcool et d'acide, ils ont placé une certaine quantité d'acide sulfovinique préparé et purifié par leurs soins, et ils l'ont soumise pendant une heure à une température comprise entre 140° et 178° C. L'expérience ne leur a pas fourni d'éther.

M. Soubeiran m'a rappelé, à ce sujet, une expérience qu'il a signalée dans son mémoire sur la fabrication de l'éther. Il a remplacé le mélange d'alcool et d'acide sulfurique qui sert à la fabrication ordinaire, par 15 kil. d'acide sulfurique qu'il a étendu avec 7 kil. 112 d'eau, de manière à avoir un mélange qui entrât en ébullition un peu au-dessus de 140°. Il a chauffé, et quand le thermomètre a marqué 140°, ce qui est la température la plus favorable à la préparation de l'éther, il a fait arriver lentement un courant d'alcool; mais il n'a passé à la distillation que de l'alcool.

Nul doute qu'en variant et multipliant

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