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II. REVUE ANALYTIQUE ET CRITIQUE.

Médecine et Chirurgie.

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La diathèse syphilitique ne se double pas.
Question de la récidive du chancre induré.
La clinique et la théorie en présence.
hypothèse consolatrice. - Peut-on guérir de la
vérole? Recherche méthodique du chancre
induré de récidive. - Multiplicité des causes
d'erreur. — Indurations d'emprunt, etc.

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Le chancre induré, créant une diathèse, doit subir la loi des affections virulentes, c'est-à-dire placer l'économie sous une influence qui ne permet plus au virus de développer les mêmes phénomènes sur les Inalades infectés. C'est ainsi que le vaccin enlève aux sujets inoculés la faculté de subir une inoculation nouvelle, au moins dans un laps de temps que l'on s'efforce aujourd'hui de déterminer d'une façon précise; c'est ainsi que la variole préserve de la variole; que la rougcole, la scarlatine, etc., ne se reproduisent pas, à part de très-rares exceptions, sur les individus qui en ont été atteints une fois. Bref, les diathèses ne se doublent pas, d'une façon générale. C'est une loi tellement vraie, tellement acceptée, que, dans les cas où des récidives incontestables se sont produites, les pathologistes sérieux ont préféré chercher l'explication de ces faits exceptionnels dans une sorte d'extinction du tempérament morbide, plutôt que d'admettre une accumulation et une superfétation des diathèses.

C'est parce que l'on a supposé que l'influence vaccinale pouvait, après un certain temps, s'affaiblir et s'éteindre, que l'on a cherché dans une inoculation consécutive du virus une préservation nouvelle.

Eh bien, ce que fait le vaccin pour la Vaccine, ce que font la plupart des affections virulentes pour elles-mêmes, le chancre induré le produit également pour la syphilis. En donnant la vérole, il préserve d'une infection nouvelle. C'est, en effet, une règle générale, je pourrais presque dire absolue, que le chancre induré ne se produise qu'une fois sur le même sujet. Le chancre induré ne récidive pas, et la diathèse

syphilitique ne se double pas plus que les autres diathèses.

Que l'on interroge l'énorme quantité de malades qui se pressent dans nos salles et aux consultations du Midi; que l'on recherche, que l'on dépouille soigneusement leurs antécédents : je vous prédis en toute sûreté quels seront les résultats de cette statistique. C'est par milliers qu'il faudra compter les récidives pour la blennorrhagie; par centaines pour le chancre simple; mais pour les récidives du chancre induré, je prévois à coup sûr des colonnes vides et muettes.

C'est qu'en effet il ne m'a pas été donné de rencontrer un seul malade sur lequel le chancre infectant se soit manifesté à deux reprises, et se soit accompagné deux fois de l'évolution normale des accidents constitutionnels.

Je ne sache pas, d'ailleurs, que personne ait été plus heureux que moi. Sans doute l'on a cité et l'on cite encore quelques observations éparses et recueillies à grand'peine, dans lesquelles le chancre infectant parait s'être produit à deux reprises, avec son cachet d'induration spécifique.

Mais à toutes ces observations, il man. que, comme je l'ai dit ailleurs, soit un pied, soit une aile. Il s'agit moins, en effet, de prouver que les chancres développés sur un même individu aient pu, à des époques différentes, revêtir pour des raisons que j'examinerai plus loin les caractères propres au chancre induré, que de trouver des cas bien authentiques, où la syphilis ait présenté à deux reprises son ordre de développement naturel, où la vẻrole se soit réellement doublée, à la fois dans son accident initial et dans ses manifestations consécutives. Or, de semblables observations manquent encore à la science.

Il est donc faux que l'on puisse entasser vérole sur vérole.

Il est plus faux encore qu'une première infection prédispose à une nouvelle.

Ce n'est pas, Messieurs, que je nie la possibilité d'une récidive pour le chancre induré. Bien au contraire, j'y crois, et j'y crois fermement, quoique l'étude clinique

m'en ait, jusqu'à ce jour, refusé les preuves. Les grandes lois de la pathologie générale, en effet, qui dominent l'observation particulière, nous montrent l'extinction des diathèses, même de celles qui semblent influencer le plus profondément l'organisme, comme un fait sinon fréquent, au moins POSSIBLE. C'est ainsi que la fièvre typhoïde, que la variole et les différentes fièvres éruptives peuvent récidiver. C'est ainsi que l'influence vaccinale s'épuise et s'éteint après un certain temps, cédant à l'action pertubatrice du mouvement vital, et que le succès des revaccinations témoigne d'une réceptivité nouvelle de l'organisme.

Eh bien, pourquoi la diathèse syphilitique serait-elle la seule qui résistât aux modifications que la vie imprime à notre être? Pourquoi ce mouvement vital incessant, en vertu duquel les molécules assimilées hier seront expulsées demain, n'entraîne rait-il pas hors de notre économie le virus de la vérole et ne purgerait-il pas notre sang de ce fatal poison? Evidemment l'analogie nous force à croire que l'influence syphilitique peut s'éteindre, au moins sur certains sujets privilégiés, et dès lors, pouvant s'éteindre, elle peut se reproduire.

Une logique rigoureuse conduit donc à admettre la possibilité des récidives pour la vérole. Mais si l'on sort du domaine de l'analogie, si l'on abandonne la théorie consolatrice pour ne consulter que l'inexorable clinique, l'on se trouve en face d'une négation absolue. Jusqu'alors la diathèse syphilitique ne s'est pas doublée et la science ne possède pas encore, je vous le répète, un seul fait bien avéré d'unc syphilis de récidive.

Pour ma part, j'ai appelé de tous mes vœux et j'ai recherché ardemment ces cas de récidive. Car, voyez l'énorme portée qu'auraient de semblables faits. Si la syphilis peut se produire deux fois, c'est donc que l'influence d'une première infec tion peut s'éteindre, qu'une première diathèse peut s'épuiser; c'est donc que la vérole peut guérir, et guérir non-seulement dans ses manifestations, mais encore en tant que disposition morbide imprimée à l'économie. Or, vous savez que jusqu'à ce jour, l'on a regardé cette terrible maladie comme curable dans ses formes seulement, mais comme indestructible dans son fond. Quelle consolation, Messieurs, ce serait donner à l'humanité que de lui annoncer qu'elle a acquis enfin le droit de guérir absolument de la vérole!

Vidus Vidius qui disait que la vérole accorde des trèves sans jamais faire la

paix (magis inducias facit quam pacem); Hunter, M. Cazenave, et beaucoup d'autres encore, pensent que la diathèse, une fois établie, ne se détruit plus. Quant à moi, pour avoir à mon tour constaté cette triste vérité, je n'en conclus pas cependant à l'incurabilité absolue de la vérole, comme on a voulu me le faire dire. Je me demande si la vérole ne pourrait pas guérir, comme la variole, en ne laissant après elle qu'une modification préservatrice?

Ce n'est là, à vrai dire, qu'une hypothèse, ou, si vous le voulez, qu'une espérance. Car aucun fait n'est venu jusqu'à ce jour nous démontrer l'extinction de la diathèse.

Bien au contraire, les observations abondent pour prouver que la disposition morbide peut subsister pendant un laps de temps considérable et résister à ce mouvement continu de composition et de décomposition, d'où résulte la rénovation incessante de l'organisme. Je pourrais vous citer, pour ma part, sans parler de la syphilis héréditaire, des exemples de manifestations spécifiques non douteuses produites à quarante années de distance de l'accident originel.

Et néanmoins, pardonnez-moi d'insister ainsi sur cette palpitante question, neanmoins, dis-je, en dépit de cette effroyable ténacité de l'influence diathésique, je persiste à ne pas vouloir conclure de ces faits affligeants à l'incurabilité fatale et absoluc de la vérole.

Aussi ne saurais-je assez vous engager, Messieurs, à rechercher les faits qui peuvent porter la lumière sur le pronostic définitif de la syphilis, et surtout à les rechercher avec toute la rigueur d'appréciation, toute la sévérité de diagnostic nécessaire à la solution d'un des plus grands problèmes de la pathologie. Mille causes d'erreurs se présenteront sur votre chemin dans cette laborieuse investigation; permettez-moi de vous en signaler brièvement quelques-unes des plus insidieuses.

Je ne vous parlerai pas des cas, hélas trop nombreux, où vous n'aurez pour tout témoignage d'une infection antérieure, que les assertions toujours incertaines et les souvenirs plus ou moins confus des malades. Évidemment, ce seront là pour vous autant d'observations non avenues.

Accepterez-vous davantage comme preuve d'une infection antérieure un témoignage médical, ab ore medico? Mais Vous savez que, pour tel praticien, tout accident vénérien constitue la vérole, la blennorrhagic comine les végétations, et les végétations comme le chancre simple;

que, pour tel autre, il n'y a point de diagnostic à établir entre une éruption syphilitique et cette éruption dite résineuse, qui succède à l'emploi du cubèbe ou du copahu. Et ainsi de tant d'autres doctrines étranges, contre lesquelles il faudra toujours vous tenir en garde.

Je suppose enfin que vous-mêmes, avec les idées que vous avez puisécs à cette école, vous soyez appelés à deux reprises à consulter le même malade, et qu'à deux époques différentes vous croyiez reconnaitre un chancre induré. Voyons encore les causes d'erreurs qui se présentent à vous dans ce cas tout exceptonnel.

La première infection est-elle bien certaine? — S'il s'est produit des accidents constitutionnels, nul doute à cet égard.

Mais si le chancre seul a été constaté, et qu'un traitement mercuriel ait été administré dès le début, la certitude diminue. Il se peut, en effet, que la nature du chanere, souvent si difficile à bien déterminer exactement, ait été mal jugée, et que le traitement ait été administré en pure perte, contre une diathèse qui n'existait point, contre des accidents qui n'avaient pas à se produire.

Autre cause d'erreur. Un chancre induré se produit, puis, à quelques mois et même à quelques années d'intervalle (vous savez quelle peut être la persistance de l'induration), un second chancre se manifeste sur la cicatrice du premier. LE NOUVEAU VENU PREND LA BASE DE SON PRÉDÉCESSEUR, en sorte que sous l'ulcération actuelle, vous retrouvez l'ancienne induration. C'est un chancre simple, avec une base d'emprunt indurée. Voyez quelle source de confusion!

Mais il y a plus, et ceei ressort d'une observation rigoureuse. C'est que, lorsqu'un nouveau chancre se produit sur une ancienne cicatrice indurée, il réveille en quelque sorte le travail spécifique qui avait donné naissance à l'engorgement initial, et, pardonnez-moi cette expression, exhume en quelque sorte l'induration primilive!

Puis, ajoutez ce surcroit de complication. Des accidents constitutionnels se produisent, je suppose, après chacun des deux chaneres. Les rapporterez-vous également à l'un et à l'autre comme à deux sources d'infection différentes? Pour de certaines écoles, il n'y aurait ici aucun embarras. Chacun des chancres serait l'origine de symptômes qui l'ont suivi.

Mais vous, pathologistes plus sérieux, Vous ne me ferez pas ce singulier partage. Dans le plus grand nombre des cas, la

nature même des accidents vous éclairera sur leur véritable source, car les symptômes que vous verrez succéder au second chancre appartiendront en général par leur caractère à une époque plus avancéc de la diathèse, à une vérole plus âgée. Voici, cependant, une condition toute spéciale qui pourrait encore ici troubler yos convictions. Admettez que les deux chancres se soient produits à une courte distance l'un de l'autre, par exemple à une ou deux années d'intervalle. Chacun d'eux est suivi, après quelques semaines, de ces formes d'éruptions superficielles, érythémateuses, qui caractérisent d'une façon tellement significative le début, l'exorde de la diathèse. Ne semble-t-il pas qu'il y ait là entre chacun de ces chancres et l'éruption qui l'accompagne une relation de cause à effet? Rien de plus rigoureux, en apparence, rien de plus acceptable. Et partant, voilà deux chancres également infectants, produits à une ou deux années l'un de l'autre, et suivis tous deux des accidents propres à la diathèse, dans l'ordre de manifestation classique, avec les caractères d'àge et de forme les mieux déterminés ; conséquemment, voilà des véroles surajoutées.

Eh bien, non, il n'y a pas là de superfétation. Il n'y a qu'un simple fait de coïncidence. Ce qui s'est produit après le second chancre se serait produit sans lui, et n'est, en somme, qu'une conséquence du premier. Il faut bien savoir, en effet, qu'en certains cas qui sont loin d'être rares, les éruptions précoces de la vérole récidivent, avec ou sans traitement, dans le cours des premières années; la roséole peut renaître deux et trois fois dans les quinze, vingt et vingt-cinq premiers mois; les papules muqueuses se reproduisent bien au delà, et très-souvent d'une façon fort rebelle. Or, vous comprenez que si, dans cette évolution normale de la diathèse, un accident vénérien quelconque, soit par exemple un second chancre, vient à se manifester, il ne constitue qu'une coïncidence et demeure sans action sur le développement des phénomènes. C'est un symptôme surajouté, intercalé, et rien du plus. Ce n'est point une source d'infection nouvelle, ce n'est pas un second germe de

diathèse.

Voilà, sans doute, bien des causes d'erreurs; voilà matière à bien des diagnostics erronés! Et cependant, Messieurs, je suis loin de vous avoir signalé toutes les conditions qui peuvent égarer sur ce point le jugement des praticiens les plus expérimentés.

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Mais je prévois la question qui surgit en votre esprit. Que se produira-t-il dans le cas où un individu bien ct dûment vérolé se trouvera au contact d'un chancre induré, dans les conditions favorables à la contagion?

Nous pouvons indiquer ici deux ordres de faits pour résoudre ce problème : les faits d'inoculation artificielle et ceux de contagion physiologique.

Jusqu'à ces derniers temps l'on s'était borné aux résultats fournis par la lancette, préjugeant par voie d'analogie ceux que devait fournir la contagion. Mais aujourd'hui les recherches récentes entreprises sur les rapports de forme entre les symptômes originels et les symptômes transmis, nous permettent d'aborder directement la question par ses deux faces.

Eh bien interrogeons en premier lieu l'inoculation.

Voici, je suppose, un sujet syphilitique. Il a contracté un chanere infectant, puis il

a

présenté consécutivement différents symptômes non équivoques de syphilis Constitutionnelle. Dans ces conditions, Vous venez à lui inoculer le pus d'un chancre induré. Que va-t-il se produire? De deux choses l'une ou bien votre inoculation restera stérile, sans résultat; ou bien elle développera un chancre à base molle, analogue, au moins comme aspect et comme forme, au chancre simple.

Je m'explique, et je développe cette double proposition.

C'est un fait d'observation que, dans la majorité des cas, les inoculations faites avec le pus du chancre infectant sur les malades vérolės, ne donnent lieu à aucun résultat. L'insertion du pus syphilitique sur des sujets syphilitiques, ne produit que rarement la pustule et l'ulcération chancreuse.

En général, ces sortes d'inoculations ne provoquent d'autre phénomène local qu'une légère inflammation, tenant, d'une part, au traumatisme produit par la lancette, et, d'autre part, à l'introduction sous l'épiderme d'un liquide irritant; c'est tout au plus si cette inflammation s'accompagne

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Si vous suivez ce chanere dans ses différentes périodes, depuis son origine jusqu'au moment de sa cicatrisation, jamais, à aucune époque, vous ne parviendrez à saisir sous la base de l'ulcération quelque chose d'analogue à l'induration spécifique du chancre infectant.

Ce n'est pas tout encore si vous explorez les ganglions correspondants à la région sur laquelle le chancre s'est développé, jamais vous n'y constaterez d'altération analogue à celle qu'y développerait un accident primitif de nature infectieuse. C'est vous dire que vous ne retrouverez avec ce chancre ni les pléiades spécifiques, ni cette adénopathie dure et indolente qui accompagne d'une façon si constante l'uleère induré.

L'absence de ce double signe, induration de la base et retentissement ganglionnaire, différencie de la façon la plus absolue l'ulcération ainsi produite par l'inoculation du pus syphilitique sur un sujet diathésé, du chancre qui lui sert d'origine en fournissant le virus qui la développe. Elle la rapproche, d'autre part, à ne consulter que l'aspect et la forme, de la variété molle de l'accident primitif.

Ainsi, Messieurs, l'inoculation iterative du pus d'un chancre induré sur un sujet syphilitique ne produit pas un second chancre induré; elle ne développe qu'une ulcération à base molle.

Ce chancre, produit dégénéré d'un chancre infectant sur un organisme préalablement infecté, a été comparé dans ces derniers temps, soit à la varioloïde, soit à la fausse vaccine. L'on a tenté d'établir que la syphilis pouvait modifier son propre virus, alors qu'elle affecte pour la seconde fois un sujet déjà contaminé; que, se bornant dans cette inoculation iterative à un simple effet local, elle se métamor

phosait sur place en une nouvelle entité morbide susceptible de se reproduire et de se propager dans son espèce. A l'appui de cette théorie, l'on a invoqué, comme je viens de vous le dire, l'exemple de la variole ou de la vaccine, se modifiant sur les sujets variolés ou vaccinés, en de nouveaux types pathologiques, qui, sortes de germes hybrides, prennent une existence indépendante et des formes spéciales. En un mot, l'on a fait du chancre, résultat de l'inoculation d'un chancre infectant sur un sujet syphilitique, l'analogue de la varioloïde et de la fausse vaccine : d'où la dénomination de chancroïde que Jui a donnée l'auteur de cette doctrine, notre élève et ami, le docteur Clerc (1).

Quelle que soit la valeur de ces vues théoriques, le fait est constant et reste acquis à la science. Non plus que la diathèse, l'induration ne se répète pas sur le même sujet. Un vérolé peut prendre de nouveaux chancres: mais ces chancres ne seront jamais semblables à l'ulcération qui a servi d'origine à la vérole. Voilà le résulLat brut de la clinique, isolé de toutes les interprétations doctrinales qu'il peut recevoir.

Ce résultat, Messieurs, nous le devons à l'inoculation, cette arme puissante qui, depuis Hunter, a ouvert à notre science tant de voies inabordables. Examinons maintenant si les données qu'elle nous fournit sont conformes à ce que nous apprend la contagion.

Les difficultés inséparables de toutes les recherches sur la contagion augmentent encore et se multiplient par les exigences des questions doctrinales. Voyez, en effet, que de conditions réunies doivent présenter les observations de ce genre pour servir à élucider le grave problème que nous étudions actuellement. Il ne s'agit plus seulement ici de rencontrer deux sujets qui tiennent la contagion l'un de l'autre il faut, de plus, que ces deux sujets satisfassent à certaines conditions toutes particulières. Il faut que l'un d'eux, antérieurement à la contagion actuelle, ait éprouvé différents accidents de syphilis, et cela d'une façon non équivoque; que l'autre, au contraire, vierge de tout antécédent suspect, porte actuellement un chancre bien et dûment induré.

Aussi, Messieurs, est-il extrêmement rare de trouver un couble infecté qui se présente à l'observation avec cet ensemble de circonstances. Et comme les recherches

(1) Du chancroïde syphilitique, mémoire lu à la Société des sciences médicales de Paris, le 27 octobre 1834.

sur la contagion, comme les confrontations des malades infectés l'un par l'autre sont de date toute récente, vous comprendrez facilement que la science soit encore pauvre sur ce point. Pour ma part, je n'ai, jusqu'à ce jour, que deux faits à vous citer, deux faits observés cette année même, et que MM. Caby et Fournier, attachés à cette question de la contagion du chancre, ont eu l'heureuse chance de rencontrer.

Voici ces deux observations :

L'un de mes anciens malades, que j'avais traité pendant plusieurs mois dans mon service, en 1845, pour un chancre induré suivi d'accidents constitutionnels (roséole, plaques muqueuses buccales; adénopathie cervicale postérieure, alopécie), eut des rapports avec une fille publique dans le courant de mai 1856. Il y avait, au minimum, deux mois à cette époque, que notre malade n'avait vu d'autre femme.

Quelques jours après le coît, un double chancre se manifesta sur le prépuce, l'un sur la face cutanée, et l'autre sur la face muqueuse de cet organe.

Le malade ne fit pas de traitement dans les premiers jours. Lorsqu'il se présenta à notre examen, les chancres dataient de dix jours environ. Ils présentaient la largeur d'une pièce de cinquante centimes; leur base était exempte de toute dureté; elle était même remarquablement souple, dépourvue de toute rénitence inflammatoire.

Les glandes de l'aine gauche étaient légèrement tuméfiées et douloureuses.

Le diagnostic ne fut douteux pour personne. Il s'agissait bien ici de chancres simples, au moins pour les caractères extérieurs, restriction que je ne me lasse pas de répéter, et dout vous comprendrez bientôt toute l'importance.

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Ces chaneres se cicatrisèrent sans accidents sous l'influence de simples pansements au vin aromatique. L'adénite céda rapidement. Aucune médication générale ne fut prescrite. Le malade, attentivement suivi, n'a présenté jusqu'à ce jour aucun accident nouveau de syphilis.

Pendant que nous guérissions notre malade au Midi, mon interne recherchait et trouvait la femme qui nous était indiquée comme origine de la contagion. Or, savez-vous ce qu'il constatait sur cette femme? Un chancre induré type de la grande lèvre, avec une induration énorme, chondroïde. Ce chancre, au dire de la malade, remontait déjà à plusieurs semaines. Il s'accompagnait d'une adénopathie spé

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