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rait pas non plus augmenter sensiblement les sécrétions intestinale, biliaire et pancréatique. C'est à tort, selon nous, que Ditterich (1) avance que la bourgène provoque parfois des selles bilicuses, saturées de bile, comme il le dit. Ce qui a pu donner le change à cet observateur, c'est que les matières fécales qui ont longtemps séjourné dans le cœcum, ainsi que cela s'observe si souvent chez les vieillards, sont toujours plus ou moins colorées, et d'autant plus, suivant la remarque d'Osborne, que ce séjour a été plus prolongé. Il y a, de plus, à remarquer à ce sujet que certaines constitutions se montrent réfractaires à l'action de ce médicament; or, ce sont précisément, ainsi que notre regrettable ami feu le docteur A. Frédericq en avait déjà fait la remarque (2), les individus bilieux qui sont dans ce cas.

Le Rhamnus frangula a encore d'autres avantages: il est à la portée de tout le monde et sans valeur vénale; il ne produit jamais ni irritation des muqueuses, ni relâchement intestinal consécutif, ni des symptômes d'intoxication, à quelque dose qu'on l'élève; il n'a pas, comme l'aloès, les purgatifs salins, etc., l'inconvénient de donner lieu à un retard de selles consécutif; enfin, loin de déranger les fonctions digestives, il semble, au contraire, les rendre plus actives, sans que nous veuillons dire pour cela, avec Gumbrecht, qu'il possède une propriété tonique. Quoi qu'il en soit, toujours est-il, ainsi que l'avance M. J. Roques (3), que le Rhamnus n'excite jamais violemment les tuniques intestinales. C'est donc un purgatif doux, un évacuant pur et simple, qui opère sans occasionner dans l'économie aucun trouble momentané ou consécutif. Il peut remplacer avantageusement dans la plupart des cas, dans la médecine des pauvres surtout, l'aloès, la rhubarbe et autres purgatifs exotiques.

Les indications de ce médicament ressortent clairement de ce qui précède. Ainsi, lorsqu'on veut obtenir un simple effet évacuant, rien ne saurait remplacer la bourgène depuis cinq ans nous en avons fait l'expérience sur un grand nombre de personnes et sur nous-même. Mais une fois que l'on veut agir dynamiquement ou substitutivement sur la muqueuse gastro-intestinale, il faut avoir recours à d'autres agents.

Le Rhamnus est préconisé par les paysans dans le traitement de l'amygda

(1) Prag. Vierteljahrschr.; 1851, 3.

(2) L'Observateur des sciences méd.; 1832, no 5. (5) Phytographic médicale; Paris, tome III,

p. 203.

lite, de la goutte. Dans la première de ees maladies, nous ne lui avons pas reconnu plus d'efficacité qu'aux autres purgatifs, moins qu'au calomel, il s'en faut de beaucoup. Dans la goutte, il combat la constipation, sans avoir l'inconvénient d'irriter l'estomac comme le font un grand nombre d'autres purgatifs.

Dans la constipation habituelle des vieillards, non liée à un défaut de sécrétion biliaire, la bourgène convient d'autant mieux que son action purgative peut être maintenue pendant quelques jours sans être suivie de constipation. Toutefois, lorsque l'on veut que cette plante donne tout le bénéfice qu'on est en droit d'en attendre, il convient, ainsi que le remarque le professeur Marcus, de Würsbourg (1), de ne pas trop longtemps insister sur son emploi et de n'en pas forcer les doses. Ce précepte est, du reste, également applicable à la plupart des purgatifs, à ceux surtout tirés du règne végétal, l'économie s'accoutumant vite à leur action.

Gumbrecht qui, en 1843, a tiré de l'oubli le Rhamnus frangula, assimilait ce purgatif à la rhubarbe; il le préconise dans plusieurs maladies du bas-ventre, dans la pléthore abdominale, les hémorrhoïdes anomales, les affections hémorrhoïdaires, etc. Notre expérience personnelle ne nous autorise pas à attribuer à la bourgène une action particulière, spéciale sur ces affections.

Mode d'administration. Gumbrecht (2) prescrivait le Rhamnus frangula de la manière suivante, en modifiant toutefois sa formule à raison des différentes indications :

P. Écorce sèche et vieille de bourdaine. 45 gr.
d'orange coupée menu
8

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2 litres.

Eau commune Faites bouillir pendant deux heures, ou mieux jusqu'à réduction de moitié, et vers la fin de cette décoction ajoutez :

Écorce d'orange 12 à 15 gram. Semences de cumin concassées. 12 grammes.

On doit prendre, le soir en se couchant, une petite tasse (de 60 grammes environ) de cette décoction.

Quant à nous, ne regardant l'addition de l'écorce d'orange et de graines de cumin que comme un surcroît inutile de besogne et de dépenses, nous ne faisons jamais usage de ces aromates. Il nous est avis qu'il faut simplifier et rapprocher de la médecine domestique, autant que possible, la préparation des médicaments tirés

(1) Prag. Vierteljahrschr.; loc. cit.

(2) Ann. de thérap., 1846, et Traité de mat. med. indigène, par le docteur Dubois, de Tournai; 1849, p. 512.

de la Flore indigène, alors surtout que c'est par leur bas prix et la facilité avec laquelle on se les procure qu'ils se recommandent à l'attention des praticiens. Nous prescrivons donc simplement les tiges sèches, non dépouillées de leur écorce et coupées menu, que nous faisons bouillir dans une quantité donnée d'eau (voir plus haut les doses) on avale une tasse de cette décoction saturée, que l'on peut édulcorer à volonté. Le plus souvent, deux heures après, a licu, sans coliques, une évacuation de matières fécales.

Tout le monde étant à même de vérifier journellement l'exactitude de ce qui préeede sur les propriétés purgatives de la bourgène, il serait inutile et fastidieux, pensons-nous, de rapporter ici des histoires de malades à leur appui.

(Annales méd. de la Flandre occid.)

Voici

Thérapeutique DU RACHITISME. les moyens employés contre le rachitisme par M. Hauner, dans son hôpital d'enfants. Comme moyens externes, il a recours aux bains (bains aromatiques avec la camomille, le calamus aromaticus, bains de foin, de tan, de drèche, de sable; bains ferrugineux), aux frictions sur le rachis avec le genièvre ordinaire, aux lotions avec le spiritus formicarum (1). A l'intérieur, il donne l'huile de foie de morue, qu'il regarde, avec M. Trousseau, comme le remède par excellence contre cette maladie; il l'administre de 1 à 3 drachmes, jamais davantage, aux enfants au-dessous de deux ans. Il prescrit, en outre, des toniques, et notamment l'extrait de quinquina préparé à froid, le ferrum pomatum (2), la teinture de rhubarbe aqueuse et vineuse. La racine de garance lui a toujours paru dépourvue de toute action. Comme M. Trousseau, il proscrit la viande et les légumes du régime des enfants rachitiques, pour les alimenter au moyen du régime lacté, corroboré de quelques substances farineuses de facile digestion. Aux enfants âgés de trois ans et davantage, il permet l'usage d'une quantité modérée de bonne bière et même d'un peu de vin vieux et généreux.

(Froriep's Tagesber, et Ann. med. de la Flandre occid.)

(1) L'esprit de fourmis se compose de : Fourmis. 1 partie. Alcool 2 Distillez une partie. (2) Le ferrum pomatum, plus connu sous les noms de Tinctura martis seu ferri pomata; teinture de malate de fer, teinture de fer cydonie,

NOUVELLE MÉTHODE DITE MÉTHODE PAR PINCEMENT, EMPLOYÉE PAR LE PROFESSEUR GERDY, POUR LE TRAITEMENT DES FISTULES A L'ANUS A ORIFICE SUPÉRIEUR TRÈS-ÉLEVÉ, OU COMPLIQUÉES D'UN DÉCOLLEMENT QUI REMONTE TRÈS-HAUT; par M. CARREAU, D.-M.-P.

Ainsi que l'indique ce titre, mon intention n'est point de faire l'histoire complète des fistules à l'anus. Je ne m'occuperai que des fistules compliquées de décollement qui remontent très-haut dans l'intestin, ainsi que de celles dont l'orifice supérieur se trouve à une distance que le doigt ne peut atteindre ou n'atteint que difficilement. Le traitement de ces variétés de fistules à l'aide des moyens ordinaires, c'est-à-dire l'incision et la ligature, est difficile, imparfait, et souvent fort dangereux pour le malade.

La disposition anatomique de la fin de l'intestin fait voir que c'est avec raison que l'on doit redouter l'hémorrhagie dans ces cas particuliers. En effet, les artères hémorrhoïdales supérieures, terminaison de la mésentérique inférieure, conservent souvent, en se perdant sur la muqueuse intestinale, un calibre considérable jusqu'en bas. Cela a lieu surtout chez les personnes sujettes aux hémorrhoïdes. On peut donc les diviser dans l'opération de la fistule, et produire une hémorrhagie d'autant plus inquiétante qu'elle remonte plus haut.

Du reste, les exemples d'hémorrhagie consécutive à l'incision ne sont pas rares dans les livres des auteurs qui la pratiquaient pour ces sortes de fistules. J.-L. Petit en cite un remarquable, dont voici l'analyse. L'accident se manifesta chez un malade opéré par un jeune chirurgien. Le tamponnement fut appliqué; mais, l'hémorrhagie continuant au-dessus du tampon, le sang qui distendait l'intestin faisait éprouver au malade un besoin violent d'aller à la garde-robe. Il fallut enlever l'appareil. Le malade évacua une grande quantité de sang. Nouveau tamponnement, nouveau besoin d'évacuer aussi impérieux que le premier. Le malade s'affaiblissait et présentait tous les symptômes d'une hémorrhagie abondante. Le jeune chirurgien, justement effrayé, crut devoir recourir à l'application d'un bouton de vitriol, qu'il maintint appliqué sur l'endroit d'où sortait le sang. Par ce moyen, l'hémorrhagie s'arrêta, mais il

c'est le suc de coings qui a fermenté avec la limaille de fer. Pr. Succ. cydon. 15 p. 1 p.

Lim, ferri

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Digere per dies aliquot, evapora ad remanentiam partium octo, adde

Alcoholis partem dimidiam.

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Le Dran, qui suivait la même pratique que J.-L. Petit, opérant avec le bistouri une fistule qui remontait à plus de quatre travers de doigt au-dessus de l'anus, vit survenir, six heures après, une hémorrhagie abondante. Il fallut, pour l'arrêter, porter sur le vaisseau divisé une compressc imbibée d'eau styptique, laquelle fut maintenue en place avec le doigt pendant une demi-heure, c'est-à-dire jusqu'à ce que l'hémorrhagie fut arrêtée.

Que serait-il advenu dans les deux cas que je viens de rapporter, si le vaisseau divisé eût été placé au-dessus de la portée du doigt? On peut présumer avec raison que les malades auraient succombé à l'hé morrhagie.

Sauveur Morand reconnaît que l'opération de la fistule, faite à l'ordinaire par incision, peut, si elle est portée fort haut dans le boyau rectum, occasionner de fortes hémorrhagies et même dangereuses ; » puis il décrit avec soin l'application du tampon. Toutefois, il ne paraît pas avoir cu toujours pleine confiance dans ce moyen hémostatique, car il ajoute plus bas : « J'ai sauvé un malade dans le plus grand danger de perdre la vie, par suite d'une hémorrhagie affreuse à la suite d'une opération de la fistule. Je fis entr'ouvrir le rectum par des mains intelligentes, et le plus que cela fut possible. Je tâchai de m'assurer de l'ouverture de l'artère par mon doigt index, porté dans l'anus jusqu'à l'endroit où je sentis le battement. Ayant fortement appuyé le doigt sur cet endroit, et l'ayant reconnu par la cessation de l'hémorrhagie, j'eus le courage d'y porter un bouton de feu que j'avais fait préparer, et j'arrêtai le sang.» (Opuscules de Chirurgie, p. 157.)

Ce chirurgien fut très-heureux de reconnaître le point précis d'où sortait le sang; sans quoi il lui eût fallu cautériser une grande étendue de l'intestin rectum, et le remède cût été pire que le mal. La nécessité de recourir à l'emploi de moyens aussi violents et aussi terribles après l'usage du bistouri, explique suffisamment l'abstention de beaucoup de chirurgiens dans des cas semblables.

Outre le danger de l'hémorrhagie on risque, en opérant au-dessus de la portée du doigt, de blesser le péritoine et d'amener une péritonite. En effet, dans un point aussi élevé, le chirurgien ne peut

pas même, à défaut des yeux, se servir de l'indicateur pour guider l'instrument. Si donc il veut inciser jusqu'au fond du trajet, la pointe et même le tranchant du bistouri peuvent très-bien pénétrer dans la cavité péritonéale. M. le professeur Roux, dont la bonne foi va de pair avec le talent, a signalé un accident de ce genre que je transcris tel qu'il est rapporté dans le compte rendu de la Société de chirurgie du 10 mai 1853.

L'illustre chirurgien fut averti de la production de l'accident par l'écoulement immédiat d'une quantité notable de sérosité citrine limpide. Il exerça immédiatement une compression convenable à l'aide d'une mèche volumineuse introduite dans le rectum, et le malade put guérir, mais après avoir présenté tous les symptômes d'une vive péritonite, qui cédèrent à un traitement énergique. Si une telle lésion peut survenir entre des mains aussi habiles, il est à présumer qu'elle a dû avoir lieu plus d'une fois dans la pratique de chirurgiens opérant comme lui par incision, mais moins exercés au maniement du bistouri et moins versés dans les connaissances chirurgicales.

Pott, dans ses OEuvres chirurgicales, traduites de l'anglais (tome 2, pages 360 et suivantes; Paris, 1777), établit en règle absolue, que l'on ne doit pas inciser audessus du doigt, et cela pour deux motifs : le premier, c'est la crainte de l'hémorrhagie, que l'on doit, dit-il, éviter par tous les moyens possibles; le second, c'est l'inutilité de l'opération.

Voici les paroles de ce chirurgien :

« Si toute la, portion du sinus qui est à la portée du doigt introduit dans l'anus, c'est-à-dire toute cette partie qui est principalement affectée par l'action des muscles de l'anus et du rectum, est bien divisée ; si la plaie, ainsi faite, est pansée de manière à ne produire aucune irritation inflammatoire: si elle n'est pas fréquemment farfouillée et examinée, et si l'on prend le soin convenable de la constitution du malade; la longueur du sinus ajoutera fort peu à la difficulté qui accompagne la guérison, tout ce qui est hors de la portée du doigt s'affaissera et se guérira bien, et le cas sera en très-peu de temps exactement le même que si toute la cavité n'eût eu que la longueur du doigt.»

Les assertions de Pott, au sujet de la guérison possible avec une incision comme celle qu'il indique, auraient eu plus de poids si elles avaient été étayées par des observations précises. Supposons d'abord que l'orifice interne se trouve précisément au fond du décollement, comme cela exis

tait chez le malade qui fait le sujet de la sixième observation du Mémoire de Desault; l'orifice était à cinq pouces environ de l'anus. Quel succès pourrait-on espérer d'une opération qui laisserait au-dessus d'elle un trajet dans lequel les matières intestinales auraient toujours la possibilité de s'introduire? et dans le cas où l'orifice interne se trouverait compris dans l'incision, ne resterait-il pas au-dessus un sinus à parois calleuses, revêtues le plus Souvent à l'intérieur d'une membrane organisée semblable à la membrane maqueuse, et ayant par conséquent peu de tendance à s'unir avec elle-même par sa surface de contact? De plus, généralement les parois opposées de la cavité sont loin d'être en contact assez immédiat pour que le recollement s'opère, et c'est là un des principaux buts que l'on se propose en pratiquant la section de la paroi fistuleuse. Ainsi donc, contrairement aux assertions de Pott, et suivant les opinions des autres auteurs, la division du trajet fistuleux dans toute sa hauteur est nécessaire pour la guérison des fistules profondes.

J'arrive maintenant à un auteur qui employait à peu près indifféremment la ligature ou l'incision pour toutes les variétés de fistules. Le Mémoire de Desault sur l'opération de la fistule à l'anus contient, il est vrai, des exemples de guérison de fistules remontant au-dessus de la portée du doigt dans l'intestin. Mais le procédé dont il se sert pour pratiquer la ligature, outre qu'il exige un grand nombre d'instruments, n'est exempt d'aucun des inconvénients de cette méthode appliquée à une telle distance de la marge de l'anus. Il avoue lui-même qu'il est très-difficile de percer l'intestin et de passer le fil de plomb; et, quoiqu'il prétende que son action n'est pas aussi lente qu'on le pense, on peut voir, par la lecture de ses observations, que ce reproche de lenteur est bien mérité. En effet, dans l'une d'elles, la section ne fut complète que le quarantedeuxième jour; dans une autre, la ligature ne tomba qu'au bout de 63 jours. Un autre inconvénient inhérent à la ligature, sont les douleurs intolérables qu'elle

cause.

Voici l'opinion de M. le professeur Velpean relativement à cette méthode : « Il faut un espace de 30 à 40 jours pour trancher toute une bride, de façon qu'au moment où la ligature tombe, la fistule se trouve ordinairement cicatrisée. Mais que de fois est-on obligé de l'enlever avant le temps, à cause des douleurs qu'elle produit, de la lenteur de ses effets, de l'im

possibilité où sont les malades de la supporter! En 1824, M. Bougon voulut la mettre en pratique à l'hôpital de perfectionnement, sur un adulte courageux bien constitué. Le malade la garda trois semaines, en se plaignant des plus vives souffrances à chaque degré de constriction qu'il fallait exercer. A cette époque, la bride, quoique peu étendue, n'était pas coupée à moitié; et comme les douleurs allaient croissant, on crut devoir en venir à l'excision, qui eut un prompt succès. »

La pratique chirurgicale présentait donc sur ce point une lacune importante à combler ; il s'agissait de trouver un moyen exempt de dangers et de difficultés. M. le professeur Gerdy a exposé à la Société de chirurgie, dans la séance du 10 mai 1853, une méthode qui réunit au plus haut degré ces deux conditions: il l'appelle méthode par pincement, parce qu'en effet la section des parois de la fistule s'opère au moyen de la pince entérotome de Dupuytren. Deux fois déjà l'application en a été faite avec le succès le plus complet. C'est ce nouveau mode de traitement que je me propose de décrire, tel que je l'ai vu pratiquer par mon savant et excellent maître.

L'instrument employé par M. Gerdy est la pince entérotome de Dupuytren.

Il l'applique de façon qu'une des branches pénètre dans le trajet fistuleux, l'autre étant située dans la cavité du rectum parallèlement à la première. Alors, au moyen de la vis située extérieurement, il serre de manière à pincer fortement la paroi fistuleuse comprise entre les mors de l'instrument. Il se passe ici le même phénomène que dans l'entérotomie pour les anus contre nature. Les parties ainsi comprimées se mortifient et se séparent des parties voisines par un travail d'élimination. Dès lors la section est opérée et le résultat atteint. Il y a communication directe contre le fond de la fistule et la cavité rectale.

Le manuel opératoire est d'une exécution facile. Le malade n'a nullement besoin d'être préparé à l'opération; il est couché au bord de son lit, sur le côté correspondant à la fistule, le tronc fléchi sur le bassin, la cuisse de dessus plus rapprochée du ventre que celle qui repose sur le lit, afin de mettre par là l'orifice fistuleux et l'anus à découvert. Un aide est chargé d'écarter les fesses en soulevant celle qui est opposée à la fistule. On s'est bien assuré préalablement par le toucher et avec le stylet explorateur, de la situation et de la direction du trajet fistuleux. Dans le cas où l'orifice interne de la fistule complète se trouve à peu de distance de

la marge de l'anus, on incise d'abord l'espace compris entre les deux orifices avec le bistouri et la sonde cannelée. Le chirurgien saisit l'entérotome, dont les mors' sont tenus convenablement écartés et dont la face externe a été graissée, puis il l'introduit doucement, aussi haut que possible, et en suivant la direction du trajet.

Alors on rapproche les deux branches au moyen de la vis de pression: la constriction doit être poussée jusqu'à ce que le malade commence à souffrir vivement. Alors on s'arrête, sauf le lendemain à l'augmenter de nouveau, si on le juge convenable.

L'entérotome ainsi appliqué est laissé en place. On entoure seulement de charpie la partie de l'instrument située au-dehors de l'intestin, afin que ses aspérités ne blessent pas le malade. Si la douleur qu'il éprouve devenait trop vive, il suffirait, pour la faire cesser, de diminuer les tours de vis. On voit que cet instrument permet d'augmenter ou de diminuer à volonté le degré de pression. Il faut s'assurer, le jour qui suit l'application, que l'instrument est bien resté en place et qu'il tient solidement.

En général, la section de la portion comprise entre les mors est achevée le cinquième jour de l'application, et on trouve entre eux un lambeau étroit d'intestin mortifié. Si la partie inférieure du trajet fistuleux ou son orifice étaient trop étroits pour laisser pénétrer l'une des branches de l'entérotome, on l'agrandirait au moyen du bistouri dans une étendue convenable. Dans le cas où l'orifice d'une fistule interne serait placé trop haut pour que l'on pût y introduire l'une des branches de l'entérotome, on inciserait sur le point où plus tard devra se former l'orifice externe de la fistule, et on introduirait l'une des branches par cet orifice artificiel. Il faut éviter de pincer la peau, parce que ce pincement est toujours douloureux. Si donc on avait affaire à une fistule borgne externe, et que son orifice fût à une certaine distance de l'orifice anal, on commencerait par inciser la portion de téguments située entre eux.

L'application de l'entérotome n'empêche pas le malade d'aller à la garde-robe ; il suffit d'enlever la charpie dont est garnie l'extrémité externe de la pince.

On peut, au moyen de la pince entérotome, guérir d'un seul coup un trajet fistuleux dont on n'atteint pas le fond avec le stylet; le cinquième jour de l'application, l'instrument se détache, et il suffit alors de panser comme à la suite de l'incision.

La seule contre-indication de l'opération, c'est lorsqu'on a affaire à un sujet phthisique, parce qu'ici, comme dans la fistule simple, la plaie n'aurait nulle tendance à la cicatrisation.

Il est difficile quelquefois de pouvoir pincer toute l'étendue des parties jusqu'au fond du trajet. Cette difficulté se présente surtout lorsque la direction du sinus est oblique par rapport à celle de l'intestin. Alors, en effet, le défaut de parallélisme des deux cavités empêche l'application des branches l'une sur l'autre après leur introduction. Il faut dans ce cas faire l'opération en plusieurs temps. C'est ainsi que dans sa première observation, M. Gerdy fit trois applications successives.

On devrait agir de même si le sinus fistuleux était coudé, ou si encore le fond de la fistule formait plusieurs culs-de-sac considérables.

Le traitement consécutif à l'opération par pincement est le même que celui des fistules opérées par incision. On introduit dans le rectum une mèche de charpie que l'on a soin d'engager entre les lèvres de la plaie, et que l'on porte, autant que possible, jusqu'au-dessus des limites de l'incision. Cette mèche est renouvelée tous les jours; seulement on en diminue la grosseur à mesure que la plaie diminue de profondeur et se cicatrise de dehors en dedans.

L'introduction de la mèche satisfait à deux indications principales l'une c'est d'empêcher le recollement des lèvres de la solution de continuité, l'autre d'appliquer les parois décollées en contact et d'aider ainsi à leur adhésion. On peut ajouter encore que sa présence entretient une irritation qui favorise le travail de cicatrisation.

Lorsque la constitution du malade a été fortement altérée par les douleurs et la suppuration qui accompagnent ordinairement ces fistules, on y remédie par une alimentation fortifiante et par l'administration des toniques.

Il reste à démontrer maintenant que la méthode par pincement est exempte de tous les inconvénients qui peuvent se présenter avec les deux autres.

En effet, avec la pince, plus d'hémorrhagie à redouter; qu'importe au chirur gien que des vaisseaux considérables soient compris dans la section qu'opérera l'instrument? Lorsque l'escarrhe se détachera, l'ouverture des vaisseaux sera cicatrisée. La crainte d'un tel accident ne sera donc plus un obstacle à la guérison de ces sortes de fistules. On a vu que c'était principalement sur la possibilité de voir leurs

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