Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

claration desquels la sentence avait été prononcée ; entre autres, sa requête nommait Thibaut (a). Un légat du pape vint en France pour examiner quel était le fondement des griefs allégués par le roi de Danemark, mais il manqua de fermeté, il craignit pour sa peau, il devint « comme un chien muet qui » ne sait point aboyer, » dit un contemporain (b); Célestin III n'eut pas l'énergie que devait plus tard montrer son successeur et temporisa (c); mais il y avait de ce côté, pour le monarque français, un danger permanent.

D'un autre côté, le péril n'était pas moindre. Richard, roi d'Angleterre, était à la tête d'une ligue des principaux barons du royaume qui s'étaient confédérés contre leur souverain, 1197. C'était Bau

(a) Rogerus de Hoveden, ap. D. Bouquet, XVII, 577 E-578 A. Il y a ici une difficulté chronologique. Suivant Roger de Hoveden, cette requête n'aurait été présentée qu'après le mariage de Philippe avec Agnès de Méranie (voir le passage auquel nous venons de renvoyer), or, Rigord (D. Bouquet, XVII, 46 A) nous apprend que ce mariage eut lieu au mois de juin 1196, et si nous en croyons les continuateurs de D. Bouquet (XVII, 59 n, et XIX, 319 n), ce serait le second dimanche après Pâques, 5 mai 1196, qu'aurait eu lieu le concile tenu à Paris pour juger si la plainte de Canut était fondée. Il est bien certain que ce concile dut se tenir le second dimanche après Pâques (D. Bouquet, XIX, 319 E); mais peut-être pourrait-on le dater de l'année 1197. Dans tous les cas, si on le place en 1196, il faut que Roger de Hoveden se trompe, quand il dit que la plainte de Canut, qui provoqua ce concile, fut provoquée elle-même par le mariage de Philippe-Auguste avec Agnès de Méranie.

(b) Rigord, ap. D. Bouquet, XVII, 38 D.

(c) Rogerus de Hoveden, ap. D. Bouquet, XVII, 578 A.

78

douin, comte de Flandre et de Hainaut, qui voulait reprendre la partie du comté de Flandre, cédée à Philippe-Auguste, à cause d'Isabelle de Hainaut, première femme de ce prince; c'était Raymond VI, comte de Toulouse; c'était Renaud de Dammartin, comte de Boulogne : il y en avait encore beaucoup d'autres que les historiens ne nomment pas (a). La campagne de l'année 1197 fut malheureuse pour Philippe-Auguste, qui conclut avec Richard une trève d'un an (b) et qui devait reprendre les armes l'année suivante.

Ce fut sur ces entrefaites que la mort de notre comtesse fit le monarque français juge de la question de savoir si Thibaut devait être admis à l'hommage. Philippe avait à la fois à récompenser dans Thibaut un des complaisants qui lui étaient venus en aide dans l'affaire d'Ingeburge, et à s'assurer en sa personne un appui pour recommencer la lutte contre une ligue formidable dont la trève avait seulement suspendu l'action : il crut devoir faire une exception aux règles, arma chevalier notre jeune comte (c); et, à Melun, au mois d'avril 1498, il recevait son hommage (453, 454).

(a) Rigord, ap. D. Bouquet, XVII, 46 E-47 E; Guillelmus Armoricus, ibid., 74 A; Rogerus de Hoveden, ibid., 582 C; Guillelmus Neubrigensis, ap. D. Bouquet, XVIII, 57 B; Radulfus Coggeshalæ, ibid., 79 A.

(b) Rogerus de Hoveden, ap. D. Bouquet, XVII, 584 B; Gervasius Dorobernensis, ibid., 678 B.

(c) L'Estoire de Eracles, empereur, livre XXVI, ch. xiv, ap. Historiens occidentaux des Croisades, II, 195. L'art. 481 de notre Catalogue se rapporte sans doute à l'aide que Thibaut se fit payer à cette occasion.

Le 29 juin, il s'alliait avec Philippe de Souabe, frère de l'empereur Henri VI et l'un des prétendants à la couronne impériale (a). Au mois suivant il rappelait, moyennant finance, les Juifs dans ses domaines (b). Par ces mesures, Philippe-Auguste se préparait les moyens d'entrer en campagne avec plus d'avantage à l'expiration de la trève. Richard, de son côté, n'avait pas vu diminuer le nombre de ses alliés. Un historien compte parmi les barons qui, en 1198, s'unirent à lui contre le roi de France, Henri le Guerroyeur, duc de Brabant (c); Baudouin II, comte de Guines (d); Geofroi III, comte du Perche; Louis, comte de Blois; Gautier, comte de Brienne. Il avait toujours dans son parti, comme l'année précédente, les comtes de Flandre, de Toulouse et de Boulogne (e). La guerre commença une fois les récoltes enlevées; Thibaut marchait dans les rangs de l'armée française. Tandis

(a) D. Bouquet, XVII, 49-50.

(b) Rigord, ap. D. Bouquet, XVII, 48 E-49 A.

(c) Il avait pris le parti d'Otton de Brunswick, neveu de Richard Coeur-de-Lion, adhérent de ce prince et concurrent de Philippe de Souabe, qui était l'allié de Philippe-Auguste (Art de vérifier les dates, II, 25, 364; III, 104).

(d) Art de vérifier les dates, II, 787.

(e) Rogerus de Hoveden, ap. D. Bouquet, XVII, 588 D. Cette seconde ligne est postérieure au mois d'avril. Par le traité d'Hesdin conclu en ce mois, le comte de Boulogne s'était réconcilié avec Philippe-Auguste (L. Delisle, Catalogue des actes de Philippe-Auguste, nos 529-532); depuis, il s'allia de nouveau avec les ennemis de ce prince, et la guerre faite en conséquence de cette alliance eut lieu au mois de septembre suivant.

par

que le comte de Flandre attaquait Philippe-Auguste le Nord et assiégeait Saint-Omer, qui se rendit le 13 octobre (a), le monarque français faisait face au roi d'Angleterre sur les frontières de la Normandie. La campagne débuta par la soumission du comte de Blois qui, au château de Vernon, en présence et sous la caution de Thibaut, prit l'engagement solennel de ne pas faire la guerre à PhilippeAuguste, 1 septembre 1198 (b); mais la suite fut moins heureuse. Quelques jours après, le roi de France fut battu près de Vernon. Le 28 du même mois, Richard, qui venait de lui prendre deux chàteaux, le vainquit de nouveau près de Gisors. Philippe faillit se noyer dans sa fuite et laissa beaucoup de prisonniers entre les mains de son adversaire. Parmi eux se trouvèrent deux vassaux du comte de Champagne, Humfroi de Balham et Poincard de Chateau-Porcien (c).

Cette guerre, suspendue par une trève au mois de

(a) Gervasius Dorobernensis, ap. D. Bouquet, XVII, 678 D. (b) L. Delisle, Catalogue des actes de Philippe-Auguste, no 537. Dans notre Catalogue (456), nous avons par erreur daté cette charte de Verneuil. L'original porte Vern., ce qui pourrait laisser de l'indécision, mais Roger de Hoveden (D. Bouquet, XVII, 588 E) nous apprend qu'au commencement du mois de septembre PhilippeAuguste se trouvait à Vernon, résidence qu'il avait abandonnée pour Mantes à la fin du même mois : Rogerus de Hoveden, ap. D. Bouquet, XVII, 589 A; Radulfus de Dicelo, ibid., 657 C; voir aussi notre Catalogue, nos 457, 459.

(c) Rogerus de Hoveden, ap. D. Bouquet, XVII, 588 E-589 B; Radulfus de Diceto, ibid., 657 CD. Parmi les morts, Roger de Hoveden (D. Bouquet, XVII, 590 B), place Milon du Puiset, comte de Bar-sur-Seine, c'est une erreur, Milon ne mourut qu'en

novembre suivant (a), ne fut pas terminée par la mort de Richard Coeur-de-Lion, 6 avril 1199 (b); mais dès lors elle changea de caractère, et PhilippeAuguste n'ayant devant lui que l'inerte incapacité de Jean-sans-Terre, n'eut plus à se préoccuper de défense et combattit pour conquérir. Sa première acquisition fut le comté d'Evreux dont il s'empara les armes à la main, 1199 (c); et, au mois de mai 1200, une des conditions du traité du Goulet fut la cession de ce comté au roi de France par Amauri,

1218, Art de vérifier les dates, II, 591. Le passage de Roger de Hoveden, où il est question de la mort de Milon du Puiset, est une addition postérieure. Ce passage, qui commence au mot Philippus (D. Bouquet, XVII, 589 D) et qui finit aux mots mortuus est (590 B), fait double emploi avec le récit précédent (D. Bouquet, XVII, 588 E-589 B), et ne doit pas appartenir à la rédaction primitive.

Si nous en croyons les auteurs de l'Art de vérifier les dates, II, 621, Thibaut, dans cette guerre, aurait pris le parti de Richard Coeur-de-Lion. Mais il n'y a en faveur de cette opinion d'autre autorité à alléguer que celle de Mézeray, ou un passage très-vague de Roger de Hoveden, qui nous dit qu'en 1197 les Champenois, les Flamands et les Bretons se rangèrent du côté de Richard Coeur-deLion (D. Bouquet, XVII, 582 C); or ce texte s'explique par l'entrée du comte de Brienne dans le parti hostile au roi de France, et n'ôte rien à la force des diplômes qui démontrent authentiquement la présence de Thibaut auprès de Philippe à Vernon et à Mantes pendant le mois de septembre 1198, c'est-à-dire, au plus fort des hostilités; voir Delisle, Catalogue des actes de Philippe-Auguste, nos 537, 539, 540, notre Catalogue, nos 456-459, et la note b de la page précédente.

(a) Rogerus de Hoveden, ap. D. Bouquet, XVII, 590 DE. (b) Rogerus de Hoveden, ibid., 596 A.

(c) Rigord, ap. D. Bouquet, XVII, 50 D; Guillelmus Armoricus, ibid., 74 E.

« VorigeDoorgaan »