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» part de Marseille, nous aperçûmes dans le lointain >> les promontoires désirés de la Syrie, cette penta» pole maritime que possédèrent autrefois les Phi» listins, Gaza, Geth, Azot, Acaron et Ascalon. Com» bien n'avions-nous pas fait de prières, versé de » pleurs, poussé de soupirs dans l'attente de ce » jour qui brilla pour nous et qui, nous faisant ré» pandre des larmes de joie, nous montra la terre » d'où découlait le lait et le miel! Terre céleste et » digne de servir de demeure aux habitants des cieux! » Terre sainte promise aux Saints, source de notre

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régénération et lieu de notre rédemption, mère » des Saints Pères et patrie du Sauveur ! Nous abor» dâmes auprès de cette fameuse cité de Syrie que » l'antiquité nommait Acre, qui depuis s'est appelée » Ptolémaïs. Possédée par les ennemis, elle était déja assiégée par notre armée de terre et par nos » vaisseaux couronnés de fer; nos casques, sortis >> des coffres où ils étaient restés si longtemps cap» tifs, nos épées, nos boucliers brillaient au soleil » de l'éclat de la foudre. La splendeur de nos ar» mes, reflétée par les ondes, jouait pour ainsi dire » dans le sein de la mer, la brise folâtrait dans nos » drapeaux de soie (a). »

L'arrivée du comte de Champagne sous les murs d'Acre eut lieu le 27 juillet (b) 1490.

Gui de Lusignan, roi de Jérusalem, mis en liberté

(a) Albéric, ap. D. Bouquet, XVIII, 751-752.

(b) Ibn Alatir, Bibl. des Croisades, 1re édit., II, 511-512; 2e édit., IV, 282-283. Les auteurs du second volume des Hist. occ. des Croisades se trompent donc quand, p. 689, ils datent cet événement du mois de juin.

par Saladin, avait commencé le siége de cette ville à la fin d'août (a) 1189, et depuis onze mois la garnison se défendait avec succès (b). Au début, Gui n'avait avec lui que neuf mille soldats, mais peu à peu des renforts, arrivés d'Europe, étaient venus accroître le nombre de ses troupes. La Champagne, notamment, lui en avait envoyé. « La France tout entière, » dit un chroniqueur anglais du temps, « brille par » le goût des armes; mais la chevalerie de Cham>>pagne l'emporte sur celle des autres parties du » royaume. De cette province sort pleine de vigueur » une jeunesse guerrière, dressée de longue main >> aux combats par des exercices préparatoires et » par ces jeux où l'on simule des batailles : ces >> cœurs belliqueux ne désirent que la guerre (c). »

L'histoire nous a conservé les noms de quatre des croisés champenois qui précédèrent Henri II dans l'armée croisée : ce furent Erard, comte de Brienne;

(a) Le 28 août suivant Vinisauf, Itinéraire du roi Richard, livre Ier, chap. XXVI. (N'ayant pu nous procurer l'édition de Gale, nous nous sommes servi de la traduction contenue dans les Chronicles of the Crusades, BOHN'S ANTIQUARIAN LIBRARY, un volume in-8°, que nous a indiqué notre savant ami, M. L. Delisle); le 26 août suivant Boha Eddin, Bibl. des Croisades, 2e édit., IV, 244; le 22, suivant Benoît de Péterburg, ap. D. Bouquet, XVII, 496 B.

(b) L'Estoire de Eracles, empereur, livre XXV, chap. 11, ap. Hist. occ. des Croisades, II, 145, dit que le siége durait depuis un an; c'est une indication approximative.

(c) Vinisauf, livre Ier, chap. XXIX; voir le texte latin de ce passage dans Bongars, I, 1164.

André, seigneur de Ramerupt; Geofroi de Joinville, et Anséric de Montréal (a).

de

Cependant, les travaux du siége avaient fait peu progrès. Les Chrétiens assiégeants avaient à lutter à la fois contre la garnison de la ville et contre Saladin qui tenait la campagne. Quand débarqua le comte Henri, le vainqueur de Tibériade leur avait déjà fait éprouver, depuis le commencement du siége, deux grandes défaites (b).

Dans la première, 4 octobre 1189, le grand-maître du Temple et André de Ramerupt étaient restés parmi les morts (c).

La seconde avait fait des victimes moins illustres.

La famine l'avait provoquée. Dans le camp des Croisés une poule valait soixante sous, c'est-à-dire soixante francs de notre monnaie au pouvoir de trois cents; un œuf se payait douze deniers, soit un franc de notre monnaie au pouvoir de cinq. Il n'y avait ni bœuf ni mouton; les gens riches mangeaient du cheval, du mulet ou de l'âne; quant aux pauvres, ils étaient trop heureux lorsque le hasard leur faisait trouver une bête morte. Les sergents, c'est-à-dire les soldats roturiers qui combattaient à pied, perdirent patience :

(a) Gui de Bazoches dans Albéric, ap. D. Bouquet, XVIII, 751 B, Vinisauf, livre Ier, ch. XXXI.

(b) Gui de Bazoches dans Albéric, ap. D. Bouquet, XVIII, 752 BC.

(c) L'Estoire de Eracles, empereur, liv. XXIV, chap. xvIII et XIX, ap. Historiens occidentaux des Croisades, II, 129-130; Ibn Alatir et Emad Eddin, ap. Bibl. des Croisades, 2e édit., IV, 249, 251; Vinisauf, livre Ier, chap. xxx, cf. Bongars, I, 1165; Benedictus Petroburgensis, ap. D. Bouquet, XVII, 496 C.

ils se croyaient invincibles et comptaient que la victoire amènerait la fin de leurs maux; la prudence de leurs chefs leur semblait lâcheté ou trahison. Le 25 juillet 1190, ils sortirent au nombre de dix mille et pénétrèrent dans le camp des Musulmans, qui les enveloppèrent et les taillèrent en pièces on prétend qu'une centaine seulement échappèrent; le nombre des morts, évalué à quatre ou cinq mille par les uns, était de dix mille suivant les autres (a).

Henri Il arriva deux jours après cette bataille; il amenait avec lui des munitions de bouche et des machines de guerre, envoyées par le roi de France (b). Il fut suivi de près par un nombre considérable de guerriers, parmi lesquels on remarquait plusieurs Champenois: Manassès de Garlande, Erard de Chassenay, Gautier d'Arzillières, Jean de Montmirail, Jean d'Arcis (c). Les chefs des Croisés crurent que le jeune comte saurait mieux qu'eux maintenir la discipline, et il fut élu généralissime en attendant

(a) Gui de Bazoches dans Albéric, ap. D. Bouquet, XVIII, 752 CD; L'Estoire de Eracles, empereur, liv. XXV, ch. x, ap. Historiens occidentaux des Croisades, II, 150-151; Jacques de Vitry dans Bongars, I, 1121; Benedictus Petroburgensis, ap. D. Bouquet. XVII, 510 AB; Vinisauf, livre I, chap. XL; Boha Eddin dans la Bibl. des Croisades, 2e édit., IV, p. 267. C'est par suite d'une faute de copie que L'Estoire de Eracles, empereur, date cette bataille du 15 juillet; le chroniqueur dit en même temps que cette bataille eut lieu le jour de Saint-Jacques, qui est le 25 juillet.

(b) L'Estoire de Eracles, empereur, liv. XXV, chap. x, ap. Hist. occ. des Croisades, II, 150.

(c) Vinisauf, livre Ier, chap. XLII.

l'arrivée des rois de France et d'Angleterre (a).

On continua péniblement les opérations du siége. Notre comte était placé entre Conrad, marquis de Montferrat, et Gui de Dampierre, après lequel venaient Erard, comte de Brienne, Henri, comte de Bar-le-Duc, Guillaume, comte de Châlon, Robert, comte de Dreux, Philippe, évêque de Beauvais, Thierri, archevêque de Besançon, et Thibaut, comte de Blois (b). Le prince champenois dressa devant la la place des machines de guerre qui lançaient des pierres et qui, par leur hauteur et leur force, étonnèrent beaucoup les Musulmans, mais dans une sortie ces derniers les incendièrent. Henri ne se rebuta pas; il établit deux nouveaux pierriers et devant eux une palissade qui devait les protéger, puis comme ces palissades n'étaient pas à l'épreuve du feu, il leur substitua une colline en terre que les assiégés virent avec effroi s'avancer peu à peu vers eux. Ceci se passait au mois d'août (c). Mais les assiégeants n'avaient pas à leur disposition les forces nécessaires. L'empereur, dont le nom seul avait un si grand prestige, était mort en Cilicie le 10 juin; et Frédéric, duc de Souabe, son fils, qui avait pris après lui le commandement des croisés allemands et qui arriva au commencement d'octobre, amena

(a) Ibn Alatir, ap. Bibl. des Croisades, 2e édit., IV, 286; Vinisauf, livre I, chap. XLIII, cf. Bongars, I, 1169-1170. (b) Radulfus de Diceto, Imagines Historiarum, ap. D. Bouquet, XVII, 636 D.

(c) Boha Eddin, ap. Bibl. des croisades, 2e éd. IV, 286-287; Ibn Alatir, Bibl. des croisades, 1re éd., II, 51; 2 Schehab Eddin, ibid., 634-635.

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