Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

seur et de lui par Gui de Plancy (1272, 1273, 1324). Enfin, deux mois plus tard, il fit à Blanche et à Thibaut hommage de Neufchâteau et de la châtellenie qui, jusque-là, n'avaient jamais relevé de Champagne (1283).

Telles furent les conséquences du mariage de Thibaut. Au dire d'un écrivain contemporain, Frédéric II aurait consenti à ce mariage (a). Le fait est-il vrai? Nous ne le saurions dire, et nous ne savons quel fonds l'on doit faire sur les assertions postérieures du prince allemand. Ce qu'il y a de certain, c'est que si Frédéric y consentit d'abord, il se repentit bientôt de ce consentement.

Nous avons encore une lettre datée de Nuremberg et du 13 juillet 1220, par laquelle Frédéric II s'excuse envers le pape Honorius de ne s'être point encore rendu en Italie, et, entre autres causes de ce retard, il lui signale les torts de Blanche de Navarre : « Ce qu'a fait la comtesse de Champagne n'a pas été » le moindre des obstacles qui ont empêché notre >> arrivée. Elle n'a tenu compte ni de notre volonté » ni de la grandeur de nos bienfaits, que Votre >> Sainteté n'ignore pas (b), ni d'une protestation » que nous avons adressée à l'illustre roi de France. » Elle a consommé le mariage de son fils avec la >> veuve du duc de Lorraine, et, sous prétexte de ce mariage, le nouvel époux étend des mains témé

(a) Chronicon Leodiense, ap. D. Bouquet, XVIII, 635 D. (b) Il s'agit ici du concours précédemment donné par Frédéric à Blanche contre le duc de Lorraine (voir plus haut p. 154, 155 et 158), et par conséquent contre le parti d'Erard de Brienne, dont les affaires étaient bien connues du pape.

>> raires sur des fiefs de notre patrimoine, qui meu» vent de l'empire et que nous tenons de l'Eglise » de Metz. Les principaux de l'Etat ont été forte>>ment émus et troublés en voyant un étranger en» vahir les biens de l'empire; ils nous ont conseillé >> et humblement supplié de retarder notre voyage >> jusqu'à ce que nous ayons trouvé un moyen sage » et sûr de maintenir intact l'honneur impérial (a). »

Si Frédéric avait réellement refusé de consentir au mariage de Thibaut et de Gertrude, il avait le droit pour lui quand il en témoignait son mécontentement. En effet, il était de principe en droit féodal que la femme, propriétaire d'un fief, ne pouvait se marier sans que l'époux choisi par elle eût été préalablement agréé par le suzerain de ce fief; autrement le suzerain pouvait confisquer le fief. Dans le cas particulier, le choix fait par Gertrude de Dabo ne pouvait être que désavantageux à l'empire, et l'empereur avait peu à compter sur la fidélité et sur les services d'un vassal qui devait sa puissance presque toute entière à des fiefs mouvants du roi de France.

Frédéric II était donc mécontent le 13 juillet, mais il dut l'être bien davantage encore quand il apprit ce que le duc de Lorraine avait fait le 30 du même mois.

(a) L'analyse de cette pièce a été publiée par M. HuillardBrébolles, Hist. diplomatica Friderici secundi, t. I, p. 802-806, cf. introduction, p. 272-273. Le texte original se trouve aux Archives de l'Empire sous la cote LL3; nous devons à l'obligeance de M. Huillard-Bréholles la copie du passage dont nous venons de donner la traduction.

Neufchâteau, qu'à cette date Mathieu avait mis dans la mouvance de Champagne, est situé sur la rive droite de la Meuse. Neufchâteau faisait par conséquent partie des contrées attribuées à l'empereur Lothaire, par le fameux traité de Verdun, en 843; il était dépendance de l'empire et en dehors du lot de Charlesle-Chauve, c'est-à-dire du royaume de France (a).

Le pape intervint; d'autres disent que Thibaut se dégoûta de sa femme qui était stérile (b). Ce que nous savons, c'est qu'au bout de deux ans, son mariage fut, pour cause de parenté, annulé par l'autorité ecclésiastique (c), et Gertrude, avec la liberté, reprit son douaire et ses états où le seul acte impor· tant de Thibaut avait tourné à la confusion de ce

(a) Dom Calmet, dans sa Notice de la Lorraine (2o édit., I, 190, 401-402, 420, II, 108, 189), nous apprend que les ducs de Lorraine tenaient des comtes de Champagne Châtenois (Vosges), Frouard (Meurthe), une partie de Grand (Vosges), Montfort (Vo-ges) et Neufchâteau. Nous savons la date à laquelle Neufchâteau devint fief de Champagne; Grand était, sous le règne de Thibaut V, chef-lieu d'une prévôté de Champagne (voir notre tome II, p. LV, art. 703). Mais quant à Châtenois, Frouard et Montfort, il n'y a pas de preuves que les ducs de Lorraine en aient fait hommage aux comtes de Champagne avant l'époque où le mariage de Jeanne de Navarre avec Philippe-le-Bel plaça le comté de Champagne entre des mains plus puissantes que celles des princes dont nous écrivons l'histoire. On ne peut à ce sujet tirer aucune conséquence des articles 3303 et 3525 de notre catalogue, quoi qu'en dise l'auteur de la compilation qui termine notre t. II (voir p. CXXXIII, CXXXVI-CXXXVIII).

(b) Chronicon Senoniensis abbatiæ, ap. D. Bouquet, XVIII, 695 B.

(c) Albéric, ap. D. Bouquet, XVIII, 791 A.

prince. Thibaut en effet avait, en 1221, de concert avec Waleran, comte de Luxembourg et de Limbourg (a) et avec Henri II, comte de Bar-le-Duc, assiégé inutilement la ville de Metz, dont il était comte du chef de sa femme, et qui refusait de reconnaître son autorité (5). On peut supposer que l'évêque de Metz ne fut pas étranger à la révolte et au triomphe des habitants. Cet évêque était Conrad de Scharfenberg, chancelier de Frédéric II (c), un de ses agents dévoués.

Les efforts de Blanche avaient donc été partiellement inutiles; mais deux résultats subsistèrent : ce furent l'hommage lige du duc de Lorraine et l'acquisition de la mouvance de Gondrecourt et de Neufchâteau.

Peu de temps après, la majorité de Thibaut IV termina la glorieuse régence de sa mère, 30 mai 1222. Blanche n'eut plus que son douaire à administrer; elle s'en acquitta paisiblement jusqu'à sa mort qui eut lieu près de sept ans plus tard, c'est-à-dire au mois de mars 1229 (d).

Nous avons raconté la vie politique de Blanche:

(a) Waleran était le second mari d'Hermesende de Namur, dont il a déjà été question au commencement de ce volume, voir notamment page 21.

(b) Chronicon sancti Vincentii Metensis, ap. D. Bouquet, XVIII, 678 E.

(c) Sur ce prélat, qui était en même temps évêque de Spire, voir Huillard-Bréholles, Hist. dipl. Friderici secundi, Introduction, p. 120.

(d) Sa mort est datée du 14 mars par Albéric (D. Bouquet, XXI, 599 J) et par le nécrologe d'Essommes, cité dans la Collec

nous parlerons plus tard de son administration, en même temps que de celle de son mari et de ses successeurs. De sa vie privée, tout ce que nous connaissons, ce sont les tentatives de séduction dont elle fut l'objet de la part de Gautier de Mussy, chanoine de Langres, homme fort célèbre en ce temps. On était alors en 1212. Il y avait à cette époque beaucoup d'hérétiques, rapporte le chroniqueur à qui nous devons cette anecdote, mais ce n'était pas à l'âme, c'était au corps de Blanche que ce chanoine en voulait. La comtesse le fit traduire devant la juridiction ecclésiastique. Gautier se présenta devant les juges du lieu, et, prévoyant une condamnation, déclara qu'il en appelait au pape, puis disparut (a).

Les goûts sérieusement littéraires de Blanche sont

tion de Champagne, t. 155, p. 290. Mais la date du 12 mars est donnée par quatre Nécrologes dont on ne peut ici contester l'autorité; ce sont ceux : 1o de Saint-Etienne de Troyes (Bibl. de Troyes, manuscrit no 1079); 2o de Notre-Dame-aux-Nonnains de Troyes (Collection de Champagne, tome 135, p. 291); 5o de la cathédrale de Meaux (Bibl. Imp., Lat. 5185 G; Du Plessis, Hist. de l'église de Meaux, II, 456); 4° de la cathédrale de Reims. (Bibl. de la ville de Reims, Nécrologe de la cathédrale, fo 62 v°; Varin, Archives administratives de Reims, 1, 544). - Suivant une légende pieuse conservée par Thomas de Cantimpré, Bonum universale de proprietatibus apum, II, 46, une abbesse d'Argensolles, monastère fondé par Blanche, aurait vu un ange armé d'un glaive qui menaçait la comtesse et elle aurait obtenu de Dieu la faveur de mourir au lieu de cette princesse. Cette abbesse est Ide, qui trépassa le 13 janvier 1226 (Gall. Christ., IX, 479 B). Elle aurait ainsi obtenu à Blanche un sursis de trois ans.

(a) Chronicon anonymi Laudunensis canonici, ap. D. Bouquet, XVIII, 715 A B. - Pour être complet nous dirons que, suivant un bruit répandu en Orient au XIIIe siècle, Blanche aurait été amou

« VorigeDoorgaan »