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Hugues, seigneur de Saint-Hilaire-le-Grand, son fils

aîné (1193).

Blanche consacrait ainsi les loisirs de la trève à enlever à Erard les alliés qui lui restaient et à en chercher de nouveaux pour elle-même.

Un autre des partisans qu'elle détacha de son adversaire, fut le comte de Nevers Hervé. Ce dernier n'était pas du nombre des barons qui avaient donné à Erard un concours actif, mais il lui apportait un appui indirect en refusant de se prononcer contre lui, et en soutenant contre Blanche, pour des intérêts étrangers à ceux d'Erard, une lutte très-vive, bien que nous ne sachions pas que, dans cette lutte, on ait jamais eu recours aux armes. Hervé prétendait se faire céder par Blanche les châteaux de Neuilly-Saint-Front, d'Oulchy et de Cys. Devenu comte de Nevers par un mariage, il était, de son chef, baron de Donzy, et petit-fils de Geofroy de Donzy (a) qui avait cédé à Anseau de Traînel ses biens de NeuillySaint-Front et d'Oulchy. On a vu, dans notre tomeIII, pages 33-35, quelles circonstances avaient amené cet abandon, et comment un échange avait transféré au comte de Champagne les droits d'Anseau de Trainel sur ces deux localités (1079). On peut supposer qu'Hervé, voulant profiter des embarras de Blanche, songea quelque temps à employer la force, car la veuve de Thibaut III dut recourir à l'alliance du duc de Bourgogne et de l'évêque de Langres pour empêcher le comte de Nevers d'établir, près

(a) La succession des barons de Donzy se trouve dans l'Art de vérifier les dates, II, 585-587.

de Neuilly-Saint-Front, une forteresse à Grisolles, février 1213 (810, 811) et 1216 (954). Les deux parties convinrent de renvoyer la décision de cette contestation à trois arbitres : le duc de Bourgogne, Gaucher de Châtillon, comte de Saint-Pol, et Robert de Courtenay. Ces arbitres devaient établir, par une enquête, si Hervé avait les droits qu'il prétendait. Blanche s'engageait, en cas d'affirmative, à lui céder en échange des biens de même valeur; en cas de négative, à lui donner, non la valeur actuelle de ces châteaux, mais la valeur qu'avaient les biens de Geofroi de Donzy, à Neuilly et aux environs, quand Geofroi en avait fait l'abandon à Anseau de Traînel, avril 1217 (1059).

Pour expliquer de pareilles conditions, il fallait une position aussi difficile que celle où se trouvait Blanche. Erard avait recommencé la guerre Blanche voulait à tout prix obtenir la neutralité d'Hervé, et d'abord, malgré de si grands sacrifices, elle n'obtint pas davantage. Philippe-Auguste arracha bien au comte de Nevers la promesse de s'engager, par lettres, à aider la comtesse de Champagne contre le prétendant qui voulait la dépouiller, et témoigna une grande joie de ce succès; mais, une fois hors de la présence du roi, le comte oublia tout. Le duc de Bourgogne déclara qu'il ne rendrait pas de décision tant qu'Hervé n'aurait pas tenu cette promesse, juillet 1217 (1080). Ce dernier devait désirer vivement une sentence qui ne pouvait que lui être avantageuse; il s'obstina cependant : et tout ce qu'il accorda au bout de trois mois fut l'engagement d'employer la force contre ceux de ses vassaux qui, après avoir fait hommage à la comtesse de Champagne et au duc

de Bourgogne en réservant l'hommage du comte de Nevers, se seraient postérieurement rendus coupables de forfaiture envers la comtesse de Champagne ou le duc de Bourgogne. La comtesse et le duc durent prendre envers lui un engagement semblable (1092). Ce traité, sans désigner formellement les vassaux champenois soulevés, atteignait évidemment quelques-uns d'entre eux, mais une partie seulement; ce n'était pas ce qu'Hervé avait promis. Il ne céda qu'en juillet 1218. Il jura d'aider de bonne foi la comtesse et le comte de Champagne contre Erard de Brienne, Philippine et tous les descendants du comte Henri II; il abandonna ses prétentions sur Neuilly, Oulchy et Cys, prétentions dont l'enquête prescrite par le traité d'avril 1217 avait démontré l'inanité (1079), et, en dédommagement, la veuve de Thibaut III lui céda le droit de garde que les comtes de Champagne avaient eu jusque-là sur l'abbaye de Saint-Germain d'Auxerre, et y ajouta un don de 500 marcs d'argent qui auraient aujourd'hui une valeur commerciale de 130,000 francs, juillet 1218 (1145). Telles furent les dures conditions par. lesquelles il fallut passer pour enlever à Erard l'appui d'Hervé, comte de Nevers.

Des historiens modernes ont parlé avec une indignation sincère des grands seigneurs qui, à des époques plus récentes, ont, après des troubles et au début d'une période d'apaisement, vendu à beaux deniers comptants leur concours au rétablissement de l'ordre par l'action triomphante de la royauté. Le cœur humain a été le même dans tous les temps, et, au moyen âge comme plus tard, le nombre des dévouements a toujours été en raison directe des

sommes employées à les payer. Si Blanche l'emporta sur Erard de Brienne, elle le dut à ses finances presqu'autant qu'à son bon droit. Ce furent ses libéralités qui stimulèrent le zèle des vassaux de Champagne restés fidèles à leur suzerain; ces libéralités lui obtinrent l'hommage et l'appui de plusieurs barons qui étaient restés jusque-là indépendants des comtes de Champagne; elles furent un moyen puissant pour séparer d'Erard une partie des barons qui s'étaient attachés à sa fortune.

Nous avons déjà indiqué un don fait à Lambert de Châtillon, un des agents les plus zélés de Blanche (a). On pourrait dresser une longue liste des récompenses et des encouragements analogues par lesquels Blanche stimulait l'ardeur ou s'assurait la fidélité des vassaux de Champagne restés dans son parti. En avril 1215, elle accordait à un des fils d'Odard d'Aulnay, maréchal de Champagne, des biens situés à Goncourt (913). L'année suivante, Pierre, comte d'Auxerre, recevait d'elle 400 marcs d'argent qui, aujourd'hui, équivaudraient à 26,000 fr. (971). En mars 1217, elle donnait, en augment de fief, 15 livres de rente à Aubert de Darney (1053); En août 1218, elle nommait prévôt de Saint-Quiriace de Provins un fils du chambellan Robert de Milly (1158); en décembre 1218, elle faisait présent de la forteresse de Saint-Jean-sur-Tourbe à Gaucher de Nanteuil (1175); en février 1219, elle accordait Maffrecourt à Odard d'Aulnay (1184); en avril suivant, Hugues, comte de Vaudémont (b), lui

(a) Voir plus haut p. 113 (1021).

(b) Hugues II, comte de Vaudémont (Art de vérifier les dates,

faisait hommage lige pour une rente de 60 livres (1192); en juin, P'once de Mont-Saint-Jean, beau-frère de Milon de Noyers, dont il avait épousé la sœur Sybille (a), et, par alliance, neveu d'Erard de Brienne, se faisait donner par Blanche 20 livres de rente en augment de fief et 300 livres une fois payées (1206); en mars 1220, Henri des Bordes obtenait, en augment de fief, les droits du comte de Champagne sur le marché d'Amillis (1259), et, au mois de juillet suivant, il y joignait, par une libéralité nouvelle, les droits du comte sur 29 hommes et 3 femmes habitant cette localité (1284). En même temps, Blanche et Thibaut accordaient à Henri, comte de Grandpré, la jouissance révocable à volonté de Château-Porcien (1286). Peu de temps auparavant, Blanche avait autorisé Gaucher de Châtillon, comte de Saint-Pol, à couper 200 arpents de bois dans une forêt dont elle avait la gruerie, et, au lieu du tiers auquel elle avait droit, elle s'était contentée d'un marc d'or (1254).

Elle attacha à sa cause, par le lien de la vassalité, les barons suivants, qui jusque-là ne lui devaient pas hommage et qui reçurent d'elle:

Thomas de Coucy, 50 livres de rente, avril et août 1215 (915, 927);

III, 40-41), tirait son nom d'un village du département de la Meurthe, arrondissement de Nancy, canton de Vézelize. Il était. dès 1201, vassal du comté de Champagne. Voir notre tome II, p. XXI, art. 269.

(a) Duchesne, Hist. de la maison de Vergy, p. 126-127; Plancher, Hist. de Bourgogne, II, 331.- Mont-Saint-Jean, Côted'Or, arrondissement de Beaune, canton de Pouilly-en-Montagne.

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