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frère utérin de Marie, mourut à Paris. L'enterrement se fit à Notre-Dame; le roi de France, le comte de Blois, assistèrent à la cérémonie. Marie s'y trouva également avec son jeune fils, et après l'inhumation, qui se fit dans l'église même, ils reconduisirent Philippe dans son palais. Aussitôt après, le roi, la comtesse et le chapitre de la cathédrale de Paris établirent à Notre-Dame quatre chapelains à perpétuité; deux furent dotés par le monarque, Marie et le chapitre en dotèrent chacun un (a). La charte émanée de Marie nous a été conservée. La pieuse comtesse dit que, si elle fait cette fondation dans la cathédrale de Paris, c'est parce que son frère Geofroi y est enterré (b).

La grande préoccupation de Marie de France, pendant sa régence, fut le mariage de son fils ainé et de sa seconde fille. Nous avons déjà parlé des conventions faites à ce sujet entre Henri le Libéral et Beaudouin V, comte de Hainaut. Henri II devait épouser Elisabeth, fille de Baudouin V, comte de Hainaut; Marie de Champagne devait être femme de Baudouin VI, fils du même comte, et, plus tard, son successeur dans les comtés de Hainaut et de Flandre auxquels il devait joindre l'empire de Constantinople. Le 13 mai 1179, Beaudoin V jurait solennellement d'observer ces traités (c). Le 28 avril de l'année suivante, il donnait en mariage à PhilippeAuguste la fiancée du jeune comte de Champagne. Un clerc attaché à la personne de Baudouin V, et

(a) Rigord, ap. D. Bouquet, XVII, 21 A B.

(b) Catalogue n° 343.

(c) Voir notre tome III, pages 106-107.

qui nous a raconté en détail la vie de son maître, nous dit quelques mots de la violence morale qu'il aurait fallu faire à Baudouin pour obtenir qu'il manquât à son serment. Toutefois, il semble que le plus grand souci du comte de Hainaut fut la dot considérable que l'on demandait (a): mais on pouvait bien faire un sacrifice, et sur le chapitre de la conscience et sur celui de la bourse, quand il s'agissait d'un si bon parti. Le roi de France était certes un plus haut personnage que le comte de Champagne, et plus d'un baron disait qu'en épousant la fille du comte de Hainaut Philippe se mésalliait (b).

Henri le Libéral était alors en Terre-Sainte. A son retour le temps lui manqua, mais sa mort eut à peine mis l'administration de la Champagne entre les mains de Marie de France, que cette princesse, appuyée par les frères de son mari, transmit ses réclamations au comte de Hainaut. Baudouin V, beaufrère et, du chef de sa femme, héritier présomptif de Philippe, comte de Flandre, était l'allié naturel de ce dernier, et ne formait, pour ainsi dire, avec lui qu'une personne morale. Or, le comte de Flandre, dans sa lutte avec le roi, avait besoin d'alliés ; aussi les deux comtes se hâtèrent-ils de donner réparation à Marie de France. Le 14 mai 1181, jour de l'Ascension, les comtes de Flandre et de Hainaut se trouvaient à- Provins, où étaient réunis la plupart des adversaires de la politique adoptée par

(a) Gislebertus Montensis, Hannoniæ chronicon, ap. D. Bouquet, XVIII, 364.

(b) Gervasius Doroberuensis, Chronicon de rebus Angliæ, ap. D. Bouquet, XVII, 661 B.

Philippe-Auguste notamment, Adèle, mère de ce prince, Hugues, duc de Bourgogne, les comtes Thibaut de Blois, Etienne de Sancerre et Henri de Barle-Duc. Marie de France, près de laquelle ces illustres visiteurs s'étaient rendus, obtint le renouvellement des engagements pris au sujet du mariage projeté entre Baudouin VI et Marie de Champagne. Quant à Henri II, on convint qu'au lieu d'Elisabeth il épouserait Yolande, fille plus jeune du comte de Hainaut. Ces deux mariages devaient se faire aussitôt que possible.

Yolande ne devait pas être de sitôt nubile; mais dès que Marie de Champagne eut douze ans, et alors Baudouin VI en avait quatorze (a), la comtesse de Champagne demanda pour sa fille le mari qui avait été promis. Pendant l'avent 1185, le comte de Hainaut se trouvait à Sens, près du roi, qui l'avait fait appeler; la comtesse de Champagne, soutenue par l'archevêque de Reims, par les comtes de Blois et de Sancerre, ses beaux-frères, et par le duc de Bourgogne, somma le comte de Hainaut de consentir à la réalisation immédiate du mariage projeté entre Baudouin VI et Marie de Champagne. Le comte de Hainaut voulut résister. « J'ai promis, » disait-il, « j'en conviens, que mon fils épouserait Marie de Champagne, mais c'est à condition que le jeune » comte de Champagne épousera Yolande, ma fille. » Cette dernière n'est pas nubile. Si le mariage de » mon fils se fait immédiatement, quelle garantie ai»je qu'Henri de Champagne épousera Yolande ? »>

(a) Il était né au mois de juillet 1171. Art de vérifier les dates, III, 32.

« Vous avez pour garantie, » lui répondit-on, « le serment qu'on vous a prêté et ceux qu'on va » vous prêter encore. » Lui qui avait si bien tenu son serment au sujet du mariage projeté entre sa fille Elisabeth et le même Henri de Champagne, savait quelle était la valeur d'une pareille sûreté, mais il fut obligé de céder. On le combla de promesses, et et il se rendit à Troyes où, le jour de l'octave de l'Epiphanie, 13 janvier 1186, furent arrêtés les dernières conventions relatives au mariage de Baudouin VI et de Marie de Champagne. Henri II, qui avait déjà 19 ans, jura qu'il épouserait Yolande quand elle serait en àge; Marie, comtesse de Champagne, et beaucoup de barons de Champagne joignirent leur serment à celui du jeune comte, et Guillaume, archevêque de Reims, oncle de ce dernier, déclara se porter caution que cet engagement solennel serait exécuté. Nous verrons ce qui en arriva. En attendant, Baudouin VI et Marie de Champagne, qui avaient à peu près l'âge où, aujourd'hui, l'on fait sa première communion, se marièrent à Château - Thierry; la noce fut célébrée à Valenciennes. Marie de Champagne se fit, toute jeune, remarquer par sa piété, ses prières, ses veilles, ses jeûnes et ses aumônes, et eut plus de bonheur que la plupart des femmes de son temps; car, nous dit un contemporain qui vivait à la cour de Hainaut, on voit rarement un homme se contenter d'une seule femme, et Baudouin, méprisant toutes les autres, s'attacha à elle seule et l'aima d'un amour ardent (a).

(a) Gislebertus Montensis, Hannoniæ chronicon, ap. D. Bouquet, XVIII, 583 E-384 C.

L'année suivante, les événements prouvèrent que les inquiétudes du comte de Ilainaut n'étaient pas mal fondées. Il était neveu de Henri, comte de Namur et de Luxembourg, dont il avait la sœur pour mère, et qui, en juin 1163, lui avait assuré sa succession; mais le comte de Namur qui, en 1163, n'avait pas d'enfants de Laurence de Flandre, sa première femme, avait, en 1166, épousé Agnès de Gueldre qui, contre toute attente, lui donna une fille en 1186 (a). La naissance de cette enfant, qu'on appela Ermesende, changea les dispositions du comte de Namur à l'égard de son nevcu. En dépit de la donation de l'année 1163, le comte de Namur ne se préoccupa plus que des moyens d'assurer sa succession à Ermesende. Pour y parvenir, il fallait lui trouver un mari assez puissant pour tenir tête au comte de Hainaut, quand la succession du père de la pauvre enfant s'ouvrirait. Le comte de Namur songea au prince champenois. Manassés, comte de Rethel, son neveu, vassal de ce dernier, servit d'intermédiaire. Le jeune comte de Champagne qui, le 13 janvier 1186, avait solennellement juré d'épouser Yolande de Hainaut, promit, le 29 mars 1187, de prendre pour femme Ermesende, qui n'avait pas encore un an, et le comte de Namur s'engagea à lui laisser tout son héritage. A cette nouvelle, le comte de Hainaut envoya des ambassadeurs à l'Empereur qui les reçut à Toul, le 17 mai suivant. « C'est de moi,» répondit Frédéric Barberousse, que le comte de Namur tient ses fiefs, et

(a) Art de vérifier les dates, III, 114.

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