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famille, déchue de l'espoir flatteur d'épouser un prince puissant à qui elle était promise, de porter une brillante couronne à laquelle elle était destinée, en contracta une langueur, qui la conduisit au tombeau. Le comte Gui, que l'espoir de délivrer, ou du moins de conserver sa fille, avait engagé à ménager Philippe, se croyant, par sa mort, autorisé à rompre tous les engagemens qui l'attachaient à ce monarque, convoqua une assemblée à Grammont, à laquelle assistèrent l'empereur Adolphe, gagné par l'or des Anglais, le roi Edouard, le comte Gui, le duc Jean, le comte Henri de Bar, et le duc Albert d'Autriche, qui conclurent une alliance contre Philippe, roi de France, et Jean, comte de Hainaut, qui tenait son parti. Le roi Edouard était le chef et l'ame de cette confédération, et le comte Gui, qui en était comme l'agent, envoya l'abbé de Floreffe et l'abbé de Gembloux, pour porter, de sa part, la déclaration de guerre. Ce comte, par ce coup hardi, s'était mis dans une position telle qu'il ne pouvait reculer sans honte ni avancer sans danger: il prit donc toutes les mesures et il fit tous les efforts qu'il put, pour soutenir ses premières démarches: il se trouvait cependant dans un très-grand embarras. Ses peuples du comté de Namur, dont le séjour continuel qu'il faisait dans la Flandre, avait d'abord aliéné les cœurs, étaient d'ailleurs humiliés de la préférence marquée qu'il accordait aux Flamands, auxquels il donnait toutes les places et confiait toutes les affaires au préjudice et à la honte des naturels du pays, qui, dans le principe, avaient témoigné leur mécontentement par des plaintes et des murmures.

1297. Demarne

liv. 3, p.36

et suiv., édit de 1754

Tout l'argent du pays, disaient-ils, n'est donc destiné qu'à enrichir d'avides étrangers. La plus grande partie en sort continuellement pour être portée dans les coffres du prince, et le reste passe dans la bourse de ses créatures. Qu'avons-nous donc fait pour être traités avec si peu d'égards et de ménagemens ? il nous gouverne plutôt comme ses tributaires que comme ses sujets. S'il nous a retiré sa confiance, pourquoi lui conserverions-nous notre attachement? qu'attendons-nous ? que ne cherchons-nous un maître qui sache mieux apprécier nos services et mieux récompenser notre zèle ? Ces plaintes ou plutôt ces menaces, que les Namurois exhalaient déjà sans ménagement et sans crainte, annonçaient un soulèvement prochain: elles retentirent aux oreilles du comte Gui, qui crut que, dans les circonstances difficiles où il se trouvait, il fallait employer des moyens prompts, pour prévenir les effets de ces clameurs séditieuses : il envoya donc sans retard son fils Jean à Namur, où son arrivée répandit la consternation et la terreur. Ce prince, docile aux ordres et aux volontés de son père, signala son entrée dans Namur par des actes de sévérité qui comprimèrent les factieux il ne prononça cependant pas la peine de mort il se contenta de condamner les plus mutins, selon la gravité des délits, à des bannissemens plus ou moins longs, à des amendes plus ou moins fortes, ou à des pélerinages plus ou moins éloignés, selon la coutume de ce temps.

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Le mayeur et les échevins de Namur prétendirent que leur juridiction était lésée par ces actes, parce qu'ils soutenaient que les bourgeois n'étaient justiciables que de leur tribunal, et ils en dressè

rent

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rent leurs plaintes comme d'une atteinte portée à leurs droits; mais le comte y répondit par un arrêt, par lequel il déclare que la connaissance des crimes de félonie et de lèse-majesté était réservée à sa personne et à son conseil. La célérité qu'apporta le comte Gui dans cette affaire, pour arrêter les progrès de la rebellion, et la fermeté qu'y déploya le comte Jean pour en punir les auteurs, ne laissèrent pas aux factieux le temps de consommer leurs projets.

Mais le comte, voyant que la principale cause du mécontentement des Namurois provenait de l'absence de leur souverain, prit avec la comtesse Isabelle, son épouse, le parti de céder le comté de Namur à Jean, leur fils aîné. Il sentait qu'il était d'autant plus important dans ce moment de s'assurer de la fidélité de ses peuples, qu'ayant provoqué la France, il devait prendre toutes les mesures et toutes les précautions nécessaires pour pouvoir résister avec honneur et avec succès à une puissance aussi formidable. Cette résolution était très-sagement combinée : il fallait calmer et apaiser les factieux; il leur donna à cet effet un souverain particulier, dont la présence satisferait à leur vou, et il n'y avait plus de prétexte de soulèvement: il fallait les réprimer et les contenir; il leur proposa un prince expérimenté dont la fermeté arrêterait leur fougue, et il n'y avait plus de moyen ni d'espoir de succès. Ces motifs engagèrent le comte et la comtesse à conclure l'acte de cession, qui fut publié à Namur, où le prince ne tarda pas à faire son entrée et son installation, au grand contentement des Namurois.

Le comte Gui, délivré des inquiétudes et des embarras qu'il avait conçus de ce côté, donna tous ses soins aux préparatifs qu'exigeait la guerre qu'il avait entre

Tome III.

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1397.

prise contre la France. Le roi Philippe, indigné de la
témérité de son vassal, vole aux frontières de la Flan-
dre avec une armée de soixante mille hommes d'infan-
terie et de dix mille de cavalerie, qu'il partagea en
deux corps: il confia l'un à Robert, comte d'Artois,
pour
faire la conquête des places maritimes, et re-
tint l'autre pour pénétrer dans l'intérieur de la pro-
vince. Robert, maître des premières villes, attaqua
Tes Flamands dans les plaines de Furnes, où il périt
seize mille Flamands. Cette victoire fut suivie de la
prise de Furnes, qui fut livrée au pillage et aux
flammes. Nieuport et Dixmude, épouvantés par cet
exemple, se rendirent au vainqueur.

Le roi, de son côté, avait dirigé sa marche sur Lille, où Gui s'était renfermé. Ce comte, craignant de tomber dans les mains d'un roi irrité, se sauva à Gand, laissant la défense de Lille à Robert de Béthune, son fils. La résistance était opiniâtre : déjà depuis trois mois les assiégés repoussaient si vigoureusement les efforts des Français, que le roi, voyant que la longueur du siége commençait à rébuter son armée, était sur le point de l'abandonner. Le comte de Hainaut, par des conseils pleins de vigueur, réveilla l'ardeur et ranima l'espoir du roi et du soldat. Les assiégeans reprirent les travaux avec une nouvelle activité, et les assiégés, se voyant si vivement pressés, forcèrent Robert de Béthune à rendre la place. Ce prince obtint par la capitulation, la liberté de se retirer à Gand auprès de son père, avec toute la garnison. La prise de Lille entraîna la conquê te de Douai et de Courtrai, qui aimèrent mieux ouvrir leurs portes au roi que de tenter une résistance probablement inutile, ou certainement dangereuse.

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Cependant Robert d'Artois avait emporté toutes les places maritinies, et Philippe, maître de Lille, eut bientôt réduit sous sa domination la plupart de celles de l'intérieur. Gui, dépouilié de ses états, abandonné ou trahi ou joué par ses alliés, éprouva le sort ordiI naire des petits princes, qui, en servant par intérêt ou par ambition la cause des rois, dont ils se croient les égaux, commencent par en être les instrumens, et finissent par en être les victimes.

Le pape Boniface VIII, qui, sous le titre de médiateur, cherchait à devenir le juge, ou plutôt le dominateur des rois, profita de ces circonstances pour tâcher de ménager un accommodement entre les rois de France et d'Angleterre. Le ton impérieux avec lequel le pape invitait les deux monarques à accepter sa médiation, leur inspirait la plus grande défiance. Cepen1 dant Edouard, forcé par la nécessité, traita avec Philippe, qui consentit à conclure une trève de deux ans, par laquelle il fut arrêté que Marguerite, sour du roi de France, épouserait le roi Edouard, et qu'Edouard, fils du roi d'Angleterre, épouserait IsaI belle, fille du roi Philippe.

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Les succès des armées françaises dans la Flandre avaient déterminé la plupart des alliés à se détacher de la ligue. Les intrigues du comte de Hainaut et l'or du roi de France lui portèrent le dernier coup, en gagnant, et ce qui est plus sûr encore, en divisant les alliés. Jean conseilla à Philippe d'envoyer à Cologne, Meyer. où Adolphe s'était retiré, Jacques de Châtillon, seigneur de Leuze et de Condé, pour engager d'un côté l'empereur, au moyen d'une grosse somme, à abandonner la cause des Flamands, et exciter d'un autre côté le duc Albert d'Autriche à déclarer la

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