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un accommodement avec eux, en lui remontrant que ce peuple était assez animé pour lui manquer, et assez fort peut-être pour lui résister; mais ce prince impérieux répondit hautement au comte de Flandre, que les menaces et la puissance de ses ennemis n'étaient pas capables de l'ébranler ni de l'intimider, et qu'il saurait défendre ses droits contre leurs faibles efforts.

Dès que cette réponse insultante fut connue à Bruges, les habitans sentirent qu'il ne fallait plus perdre le temps en vaines délibérations et en pourparlers inutiles. Les Flamands de ce temps-là, dit le père Demarne, étaient aussi vifs à exécuter une résolution, que prompts à la prendre : ils jurèrent donc dans le jour même la ruine de l'Ecluse. Le comte de Flandre, qui était dans ce moment à Courtrai, informé de cette brusque résolution, se 19 rendit à Bruges, où, ayant assemblé le peuple, il Bemploya tous les moyens de persuasion pour désarmer sa fureur; mais les Brugeois, aussi peu intimidés des menaces du comte, que peu touchés de ses prières, déclarèrent énergiquement qu'ils ne renonceraient à leur entreprise qu'à condition que le comte révoquerait la donation qu'il avait faite : ils voulaient une réponse prompte, précise; et comme ils virent que le comte hésitait, ces ardens Flamands, sans tergiversation, sans délibération et sans $ discussion ultérieure, forcèrent le comte lui-même à les accompagner dans leur expédition.

Cependant le comte de Namur, qui était fermement décidé à opposer une vigoureuse défense aux Brugeois, avait eu soin de fortifier solidement la ville, et il fit en effet une vive sortie, dans laquelle

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Tome III.

9

1323.

ibid.

il repoussa les assiégeans, qui y perdirent un bott nombre de leurs meilleurs soldats. Cet échec ne les déconcerta pas; et il ne leur fallait que l'intervalle de quelques jours pour réparer leurs pertes, et reprendre leurs projets. Ils reviennent donc devant l'Ecluse, l'assiégent, l'emportent, la saccagent; massacrent la garnison et emmènent le comte de Oudegh., Namur à Bruges. Le comte de Flandre, effrayé de cette catastrophe, trouva le moyen de se sauver à Paris, où il se proposait de concerter les moyens de reprendre les armes, et de châtier les Brugeois. Le comte de Namur, de son côté, voyant que les Brugeois étaient sourds aux propositions qu'il leur avait faites pour obtenir sa délivrance, chercha, comme avait fait le comte de Flandre, le moyen de se tirer des mains d'un peuple sans frein et sans raison, qui ne répondait à ses propositions que par des insultes ou des menaces: il confia son projet à un chevalier de Bruges, nommé Jean de l'Epine, qui pratiqua dans un mur voisin d'une fosse d'aisance, une ouverture par laquelle le comte

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Chr. Zant
Meyer, ad

fliet.

an. 1323.

se sauva.

Jean, échappé de sa prison par cette espèce de stratagême, vint s'embarquer dans les environs de l'Ecluse, où un vaisseau était préparé pour le conduire à Boulogne: il y aborda heureusement, et il en partit promptement pour se rendre à Paris, où le comte Louis l'attendait. Les deux comtes réunis pensèrent à prendre les mesures les plus efficaces pour tirer une prompte vengeance de l'affront qu'ils venaient d'essuyer.

Les rebelles, qui ignoraient le départ du comte de Namur, continuaient leurs affreux brigandages

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dans les campagnes, ravageant les propriétés, abattant les châteaux, massacrant les seigneurs : ils avaient même étendu leur fureur sur leurs échevins, et tous ceux qui avaient en le malheur de tomber dans leurs mains, avaient été cruellement immolés à cette aveugle rage.

Mais le comte Louis était déjà arrivé à Gand, à la tête d'une armée formidable, pour réprimer ces horribles excès. Les rebelles, aussi étonnés qu'effrayés d'apprendre au même moment et le départ du comte Jean, et l'arrivée du comte Louis, envoyèrent des députés à ce prince pour implorer leur grâce. Le comte Louis avait donné toute sa confiance à un abbé de Vezelai, qui avait eu l'art de s'insinuer si adroitement dans les bonnes grâces de ce jeune prince, que toutes les affaires principales du pays ne se faisaient point sans l'avis et l'aveu du favori, de manière, dit Oudegherst. qu'il pouvait se vanter d'être d'effet, ce que le comte était de titre et de nom. C'est donc à cet abbé que les députés de Bruges s'adressèrent, avec une bonne somme d'argent, pour obtenir leur pardon. Le comte, gagné par l'abbé, le leur accorda pour une somme de soixante mille livres, au moyen de laquelle nonseulement il pardonna, mais il approuva leurs excès, en ordonnant que les sentences qu'ils avaient portées depuis la mort du comte Robert, sortiraient leurs pleins effets, nonobstant opposition ou appellation contraire. Le comte, qui sentait lui-même que, par cette molle condescendance, il avait compromis et prostitué son autorité, tàcha, pour la déguiser, d'y donner une couleur favorable, en déclarant qu'il lui était apparu par suffisantes informa

1324. Oudegh. ch. 150.

tions que ceux qui avaient été tués pendant les troubles, avaient eux-mêmes causé leur mort, et qu'au surplus les excès passés, n'étant que l'effet d'une commotion populaire, n'exigeaient pas une punition aussi rigoureuse et aussi exemplaire, que les délits commis par des particuliers.

Cette dangereuse indulgence augmenta l'audace des Brugeois, qui, sous prétexte que les gouverneurs s'étaient vanté qu'ils se vengeraient des ou trages qu'ils avaient essuyés, s'ameutèrent à un très-grand nombre, sous la conduite de quelques chefs, qu'ils créèrent capitaines, et se répandirent dans les campagnes, où ils renouvelèrent tous les excès de l'année précédente; pillages, massacres, incendies. Le comte Louis, qui s'était retiré dans le Réthelois, fut obligé de revenir précipitamment dans la Flandre, où, par l'avis de l'abbé, son grand-gouverneur, comme l'appelle Oudegherst, il accorda aux rebelles, aussi facilement que la première fois, une paix avantageuse, dont les conditions furent que, par considération pour la bonne affection que ceux de Bruges lui avaient toujours portée, il leur pardonnait tout ce qu'ils pouvaient avoir méfait depuis la paix dernière; qu'ils seraient obligés de cesser et de destituer tous les capitaines et officiers qu'ils avaient créés de leur autorité privée; qu'ils se garderaient à l'avenir de retomber dans de semblables excès sous peine de paix brisée et enfreinte; qu'ils ne pourraient plus, par son de cloches ou autrement, convoquer aucune assemblée, que par l'exprès consentement du comte ou de son lieutenant. Ces conditions furent rédigées et arrêtées à Courtrai, le jour de S. Jean-Baptiste, 1524.

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Le comte Louis, croyant que par ce moyen la paix était solidement rétablie, était retourné dans son comté de Réthel, ayant laissé le gouvernement de la Flandre à Philippe d'Axelle. Les séditieux, 1325, que la présence du souverain aurait pù contenir saisirent le premier moment de son absence pour ranimer le feu de la rebellion; mais cette nouvelle insurrection avait pris un caractère plus alarmant : les Brugeois avaient attiré à leur parti les villes de Furnes, Nieuport, Bergues, Dunkerque, Cassel et toute la West - Flandre, et Robert de Cassel, on=cle du comte Louis, qui ne désirait qu'une occasion favorable pour envahir la souveraineté, était soupçonné de favoriser secrètement les Brugeois.

Les seigneurs, de leur côté, par une cruelle représaille, brûlaient les maisons des particuliers, et tous les partisans du peuple, qui tombaient dans leurs mains, étaient impitoyablement livrés aux bourreaux qui les décapitaient et les exposaient sur des roues élevées. Ces cruelles exécutions ne faisaient qu'augmenter l'animosité et l'acharnement des Brugeois. Le comte Louis, voyant donc que les forces et la fureur du peuple prenaient tous les jours un accroissement plus effrayant, vint, accompagné du comte de Namur et de quatre cents chevaliers, à Courtrai, où il rencontra six Brugeois qui avaient été envoyés dans cette ville pour en attirer les habitans à leur parti: le comte les fit arrêter; mais les Brugeois, instruits de cet événement, envoyèrent une force considérable pour arracher leurs concitoyens des mains de leurs ennemis. Le comte, pour leur empêcher l'entrée de la ville, fit mettre le feu aux faubourgs: ce feu, poussé et animé par un vent

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