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l'infiltration tuberculeuse. D'autres, après avoir à tort considéré comme caractéristiques les corpuscules ou globules du tubercule que j'avais décrit le premier, reviennent à la doctrine soi-disant physiologique de la nature inflammatoire des tubercules. Comme si, dans l'état actuel de nos connaissances physiologiques sur la nutrition, dont l'inflammation n'est qu'un mode particulier, on pouvait donner autre chose qu'une définition purement conventionnelle de l'inflammation. Ou penset-on qu'en remplaçant le terme inflammation par celui d'irritation, nos connaissances du processus pathologique en seront améliorées ?

Eh bien, malgré les méfaits qu'on peut reprocher, non au microscope, mais à l'application prématurée des résultats, qui est inhérente à notre nature humaine, qui veut les progrès rapides, les services que le microscope a rendus sont immenses. On n'a qu'à comparer les ouvrages de pathologie interne ou de chirurgie qui ont paru avant et après la création de l'histologie pathologique. C'est surtout depuis cette époque que les médecins ont senti le besoin d'introduire dans l'observation clinique les méthodes scientifiques qui ont fait faire de si merveilleux progrès aux sciences physiques et chimiques. Tout en respectant et en utilisant les trésors d'expérience que nos prédécesseurs nous ont légués, les médecins ont jugé que les méthodes scientifiques pouvaient seules nous débarrasser de l'invasion intermittente du charlatanisme ou du scepticisme, aussi nuisibles l'un que l'autre au lit des malades. La valeur des grands hôpitaux, sous le rapport hygiénique, est certainement très-contestable, mais personne ne peut nier leur grande influence sur l'instruction. Aussi peut-on prédire que les nombreux pays qui dotent actuellement leurs hôpitaux de laboratoires, d'instruments de précision et de médecins capables de s'en servir, contribuent puissamment aux progrès rapides de

toutes les branches de la science médicale, dont le but suprême doit toujours rester la diminution et la guérison des maladies.

4. SUR LES PROPRIÉTÉS physiologiques et thérapeuti– ques du chloral; par M. le docteur WILLIÈME, correspondant.

Il y aura bientôt quarante ans que l'illustre professeur Liebig, étudiant l'action du chlore sur l'alcool, obtenait, en faisant passer un courant de ce gaz parfaitement desséché à travers de l'alcool anhydre, un composé nouveau auquel il donnait le nom de chloral.

Voici les réactions qui se passent pendant cette opération :

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Deux atomes de chlore se combinent à deux atomes d'hydrogène de l'alcool pour former de l'acide chlorhydrique, et il reste de l'aldehyde.

Six atomes de chlore continuant à agir sur l'aldehyde, lui enlèvent trois atomes d'hydrogène et se substituent à cet hydrogène déplacé. L'on obtient ainsi le chloral.

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Le chloral, débarrassé de l'acide chlorhydrique et des autres produits chlorés qui se forment pendant sa préparation, se présente sous l'aspect d'un liquide oléagineux, assez fluide, gras au toucher, d'une odeur pénétrante désagréable, d'une saveur d'abord grasse, puis âcre et brûlante, donnant naissance à des émanations que provoquent le larmoiement. Il se combine avec l'eau dans la proportion d'un atome de chloral pour deux atomes d'eau (Dumas), ce qui équivaut à huit parties en poids environ de chloral pour une partie d'eau

(Richardson). Cette combinaison donne lieu à un notable degagement de chaleur, et il en résulte un corps cristallisé en fines aiguilles blanches, ordinairement réunies en masses blanches, ressemblant beaucoup au carbonate d'ammoniaque du commerce, c'est l'hydrate de chloral.

L'hydrate de chloral a une odeur de melon mûr légèrement piquante; dissous dans dix parties d'eau, il a une saveur piquante, brûlant à la gorge, et une amertume analogue à celle du brou de noix; il se volatilise à l'air libre, peut se sublimer par la chaleur sans se décomposer; se dissout dans l'éther, l'alcool et environ dans son poids d'eau distillée. Sa solution aqueuse est transparente, parfois cependant un peu louche; une solution concentrée de potasse caustique la rend laiteuse et il se dégage du mélange une franche odeur de chloroforme; ce mélange laissé en repos se divise en deux couches, du chloroforme se dépose au fond du verre ou de l'éprouvette, et il surnage un liquide clair, incolore ou à peine coloré en jaune-orangé. Tels sont les caractères de l'hydrate de chloral pur. C'est de ce composé qu'on se sert pour les expériences et les usages thérapeutiques.

Le chloral jouit d'une propriété très-importante; sous l'action des alcalis caustiques, des bases fortes en général, on en obtient du chloroforme en même temps qu'un formiate.

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Selon Liebreich, 1 gramme de chloral anhydre réclame, pour sa transformation totale, 0,271 gramme d'alcali hydraté, c'est-à-dire, un peu plus du quart de son poids, et les quantités de chloroforme et d'acide formique qui résultent de cette transformation d'un gramme, sont respectivement de 0,810 et 0,312 gramme.

I. Action du chloral sur les animaux.

giques du chloral.

Propriétés physiolo

Bien que l'action des alcalis sur le chloral fût connue depuis longtemps (1), on n'avait pas songé jusqu'ici à l'utiliser. Il était réservé au docteur Oscar Liebreich, chimiste-assistant à l'Institut pathologique de Berlin, et professeur libre (Privat-Docent) de chimie et de matières médicales à l'Université, d'en faire le point de départ d'une découverte qui aura, croyons-nous, une grande portée en thérapeutique.

Considérant que le sang renferme des alcalis, le raisonnement l'amena à penser que le chloral introduit dans le torrent circulatoire pourrait bien se dédoubler là comme dans un vase inerte; et s'il en était ainsi, on devait obtenir par l'introduction de ce principe dans l'économie tous les effets du chloroforme. Il soumit donc à l'expérimentation physiologique des grenouilles et des lapins, en leur injectant sous la peau une certaine quantité d'hydrate de chloral dissous dans l'eau. Ses prévisions se réalisèrent entièrement. Il vit ces animaux être pris d'abord de somnolence et d'un affaiblissement marqué des contractions musculaires, puis d'un sommeil profond avec relâchement complet des muscles. La sensibilité diminuait à mesure que l'hypnotisme faisait des progrès : la sensibilité réflexe etait encore conservée dans les premiers moments de l'expérience; puis survenait une anesthésie tellement prononcée que l'on pouvait, sur les animaux endormis, inciser la peau, couper un membre, sans qu'ils fissent le moindre mouvement. Les pupilles, plus contractées et mobiles au début de l'expérience, finissaient par se dilater pendant la période de l'anesthésie. Il nota surtout, avec le

(1) Voir Traité de chimie organique, par JUSTUS LIEBIG. Bruxelles, 1813; p. 211.

plus grand soin, le ralentissement progressif de la respiration et des battements du cœur. La dose de chloral n'avaitelle pas été trop élevée, les phénomènes observés e dissipaient graduellement dans un ordre inverse à celui de leur apparition; avait-elle, au contraire, été excessive, la mort arrivait pendant l'anesthésie : les pulsations du cœur deve naient de plus en plus rares, puis cessaient tout à fait, bien que toutes les cavités de l'organe fussent remplies de sang (1).

Ces effets sont, comme on le voit, absolument semblables à ceux du chloroforme, sauf toutefois la période d'excitation. qui se produit le plus ordinairement au début du narcotisme par les inhalations de ce dernier.

S'appuyant sur ces résultats obtenus chez les animaux, le docteur Liebreich se crut autorisé à essayer, avec prudence, le mème agent sur l'homme. Il employa pour ses premières expériences une dose de 1,35 gramme d'hydrate, dose qui avait été parfaitement supportée par des lapins. Cette quantité, injectée sous la peau du bras, amena chez deux malades un sommeil de trois heures; un troisième ne dormit qu'une demi-heure.Trouvant que la dose nécessaire pour provoquer, chez l'homme, un sommeil prolongé et l'anesthésie devait être telle qu'il serait difficile de l'administrer par la méthode hypodermique, il songea à rechercher si le médicament n'agirait pas tout aussi bien en le donnant par la bouche. Chez le premier sujet auquel il le fit prendre de cette façon, il s'arrêta encore à la dose de 1,35 gramme. Il s'ensuivit un sommeil de plus de cinq heures.

Tels étaient les faits signalés par le docteur Liebreich dans sa communication à la Société de médecine de Berlin,

(1) Voir Das Chloralhydrat, ein neues Hypnoticum und Anestheticum, etc., von OSCAR LIEBREICH. Berlin, 1869.

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