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dedans; il n'y a pas amaigrissement de ce membre, qui conserve un volume égal à celui du côté opposé.

Pendant la première enfance, une rougcole, de nombreuses indispositions, des digestions pénibles, de fréquents malaises, ont troublé la santé de cette enfant; elle avait souvent de la céphalalgie frontale et des étourdissements.

C'est vers l'âge de 10 ans que ces accidents sont devenus plus graves par leur fréquence et leur durée.

Ainsi un point douloureux au front signalait le début de l'accès, puis survenait un vertige, un tournoiement général; après avoir duré un quart d'heure cet orage se terminait sans aucun phénomène remarquable.

Vers le mois de décembre 1851, elle s'aperçut que les travaux à l'aiguille lui devenaient difficiles, qu'elle n'était plus aussi adroite; et enfin elle ne pouvait plus coudre du tout; elle vint alors à l'hôpital.

La chorée consiste chez elle en une agitation du bras gauche et de la jambe du même côté ; mais il est difficile d'apprécier la part qui revient pour la claudication à la chorée et à la coxalgie.

La main gauche est sans cesse agitée de mouvements désordonnés dans tous les sens; elle ne peut rester fermée, elle ne peut presser un objet avec force ni d'une manière continue; si on se fait serrer la main par les deux mains de l'enfant, on sent que sa main droite exerce une pression égale, uniforme, et que, de la part de la main gauche, la pression, d'abord presque aussi forte, devient bientôt inégale, les doigts étant agités de mouvements convulsifs.

L'intelligence et la mémoire sont conservées; il n'y a pas de lésion des organes des sens.

L'auscultation du cœur ne présente rien de remarquable; cette enfant n'a jamais eu de rhumatisme; la menstruation n'est pas encore établie.

Le 8 janvier, à cause d'un état saburral des premières voies compliqué de fièvre, on prescrit un vomitif :

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Le lendemain, on lui fait prendre du sirop de sulfate de strychnine; amélioration rapide, et guérison après dix-huit jours de traitement; sortie le 4 février.

Je dois l'observation suivante à l'obligeance de M. Clément Bonnefin, élève des hôpitaux.

104 OBS. Chorée récidivant depuis six ans, pas de rhumatisme, traitement par le sirop de sulfate de strychnine; guérison après vingt-trois jours de traitement. — L... (Émilie), âgée de 15 ans, entrée à l'Hôtel-Dieu, le 4 janvier 1842, salle Saint-Bernard, no 3, service de M. Trousseau; prise de chorée il y a sept ans, à la suite d'une grande frayeur (elle avait vu assassiner un homme), elle entra à l'hôpital des Enfants malades; traitée pendant trois

mois par les bains sulfureux et la gymnastique, elle sort incomplétement guérie. Elle y rentre bientôt après, la maladie ayant repris une nouvelle intensité ; elle y reste pendant quatre ans, ne s'absentant de l'hôpital que pour quelques jours.

Sortie de l'hôpital des Enfants, elle entre quize jours après à Necker, où elle est traitée pendant six mois par les bains froids et les préparations ferrugineuses; ces moyens n'amenèrent aucune amélioration; elle passe quatre mois à l'hôpital Bon-Secours, qu'elle quitta sans être guérie; quinze jours après, elle est admise à la Salpêtrière, où elle fait de la gymnastique pendant vingt-six mois; puis, dix jours après être sortie du dernier hospice, elle entre à l'HôtelDieu.

Cette jeune fille, quoique de petite taille, est d'une bonne constitution; elle a eu ses règles pour la première fois, il y a six mois; elles ont paru une fois seulement.

L'intelligence est peu développée, la mémoire très-fidèle; aucun antécédent de chorée dans la famille; on remarque un strabisme survenu, dit l'enfant, à l'âge de trois ans, à la suite de convulsions.

La face est grimaçante, l'articulation des sons très-difficile; la langue, sans cesse agitée, est à chaque instant mordue, et le corps est agité de mouvements dans tous les sens; les gesticulations sont plus désordonnées dans les membres supérieurs que dans les inférieurs; grande agitation des doigts, impossibilité de manger seule et de se livrer à aucun travail; les membres du côté droit ont plus de force que ceux du côté gauche; très-notable diminution de la sensibilité de ce dernier côté.

Quoiqu'elle n'ait jamais eu de rhumatisme, il y a du bruit de frottement au premier temps du cœur, un peu de bruit de souffle aux carotides; rien du côté de la respiration, si ce n'est dans l'inspiration, qui est saccadée et bruyante lorsqu'elle rit ou qu'elle pleure, de cette façon qui est si spéciale à la chorée, qu'il suffit d'entendre pleurer un enfant choréique pour reconnaître immédiatement la maladie.

Les fonctions digestives ne sont pas troublées, cependant l'appétit est diminué. Le 6 janvier, M. Trousseau prescrit le sirop de sulfate de strychnine, une portion d'aliments; elle prend 4 cuillerées de sirop; après la dernière, raideur dans les bras, dans les jambes et dans les masséters. Durée de la raideur, cinq à six minutes.

Le 10, il y a de l'amélioration.

Du 29 janvier au 6 février, quoiqu'elle ait complétement cessé d'être agitée, elle continue à prendre du sirop; elle en prend chaque jour de 7 à 10 cuillerées, qui ne produisent que peu de raideurs.

Du 6 au 10 février, on suspend l'usage du sirop; l'appétit est revenu, l'enfant a engraissé; la sensibilité et la force musculaire sont égales des deux côtés du corps.

Depuis le 15 février jusqu'au 17, elle prend chaque jour 4, 5, 7 cuillerées.

Le 17 on supprime la strychnine.

Elle a été reprise de chorée deux mois après, le 24 avril, mais moins forte

ment qu'en janvier.

L'action rapide de la strychnine fait supposer que, si on avait pu reprendre ce médicament de temps à autre, cette récidive n'aurait pas eu lieu.

Cette observation montre encore l'action plus prompte et plus efficace de la strychnine que de la gymnastique.

Enfin une grande disposition à la chorée sans rhumatisme.

La strychnine ne réussit pas toujours aussi bien; l'observation suivante en fournit une preuve; mais en même temps que nous ne trouvons plus le résultat thérapeutique, nous constatons aussi l'absence de l'effet physiologique.

C'est un cas que l'on pourrait rapprocher de ceux où l'on voit la syphilis résister à l'action du mercure, et dans lesquels aussi l'action physiologique ne se produit pas.

105 OBS.-B... (Auguste), âgé de 13 ans, entre à l'hôpital le 7 juin 1850, salle Saint-Louis, no 7.

Cet enfant est d'un tempérament lymphatique; son intelligence est peu développée. Il est malade depuis deux mois. On l'a traité chez lui par les bains froids. C'est la deuxième fois qu'il est atteint de chorée. La première attaque a commencé il y a un an, a duré cinq mois, et a cédé sous l'influence du traitement que nous venons de mentionner. Il n'a jamais eu de rhumatismes ni aucune autre maladie. Depuis un mois environ, la maladie a pris chez lui une intensité nouvelle, et c'est ce qui l'a déterminé à entrer à l'hôpital.

La marche chez lui est assez gênée, la jambe droite est beaucoup plus faible que la gauche; les membres supérieurs sont agités de mouvements incessants, et la face est contractée par des grimaces presque continuelles; les lèvres se séparent et se dilatent, ce qui lui donne l'air d'un fumeur.

Aucun bruit anormal au cœur; on lui fait prendre du sirop de strychnine. Le 5 juillet, il a de la fièvre, de la douleur au côté gauche, et on entend à l'auscultation des râles crépitants fins, au niveau de l'angle inférieur de l'omoplate. Vomitif, 30 centigrammes de sulfate de cuivre.

Les mouvements choréiques continuent malgré la fièvre.

Jusqu'au 25 juillet, il a pris chaque jour 10 à 14 cuillerées de sirop, sans ressentir un seul jour les plus faibles raideurs; cependant ce même sirop avait produit des raideurs à la dose de 2 ou 3 cuillerées chez d'autres enfants. Au gout il était même plus amer que celui que l'on donnait pendant le mois précédent; mais nous avons remarqué que, pendant les chaleurs, qui ont été si fortes pendant les mois de juillet et août 1852, la strychnine produisait peu d'effet physiologique, et que la chorée était beaucoup plus difficile à traiter; qu'elle résistait à tous les moyens, aux bains sulfureux, à la gymnastique, et aussi à la strychnine.

Chez cet enfant, ce dernier médicament n'ayant rien produit, on l'envoie le 15 juillet prendre des leçons de gymnastique; il est soumis à ce traitement

depuis le 23 juillet jusqu'au 17 octobre, et sort guéri le 17 octobre, après un traitement qui a duré cent trente-deux jours.

2o Gymnastique. -De tous temps les exercices gymnastiques ont été employés en médecine. Ils faisaient partie de l'hygiène des peuples anciens beaucoup plus que de notre temps.

Cœlius Aurelianus recommandait contre l'épilepsie, l'usage de la marche, du chant. Les nourrices des enfants épileptiques devaient sauter et jouer au ballon.

Celse, Galien, Alexandre de Tralles, Aétius recommandent, dans la même maladie, la marche prolongée ou la course en char.

Antyllus, Oribasc, Asclepiade, Erasistrate, Themison, plus tard, Eraste, Baïro, Solenander, Horstius, Thiermayer, etc., ont eu recours à ces mêmes moyens dans différentes maladies.

Les moines et les prêtres chargés au moyen âge du traitement religieux de la danse de Saint-Guy employaient la gymnastique. Après la messe dite, on réunissait les choréiques et on les faisait danser en rond; en éxécutant une musique religieuse, on chantait des noëls ou des complaintes qui obligeaient à danser

en mesure.

En 1827, Louvet Lamare fit sauter à la corde une jeune choréique, sans négliger les moyens internes; il ne voyait là qu'un moyen de rompre des habitudes vicieuses.

Jolly, en 1836, présente la gymnastique comme moyen unique de traitement de la danse de Saint-Guy.

Récamier eut l'idée, dans beaucoup d'affections convulsives, d'appliquer la cadence, et il pensa que si on pouvait amener les contractions musculaires à se produire suivant une certaine mesure on obtiendrait par une sorte d'habitude des alternatives régulières de contractions et de relâchement, c'est-à-dire la guérison. Il traitait ainsi les choréiques de Paris. A l'heure où l'on bat la retraite, les tambours se réunissent sur la place Vendôme, et, de là, vont se répandant dans les rues voisines, Récamier envoyait les malades de sa clientèle à la place Vendôme et il leur faisait suivre, comme malgré eux, ce rhythme vif et régulier que nous connaissons; cela n'était applicable qu'aux chorécs peu graves. On peut, comme le conseillait M. Bonneau, remplacer le tambour par n'importe quel instrument, le métronome, par exemple; on commence par faire exécuter, au commandement, des mouvements d'un bras ou d'une jambe, à chaque temps de la mesure, puis on essaye les mouvements d'ensemble, d'abord les mouvements rapides qui sont de tous les plus faciles parce qu'il n'y a pas, entre les mouvements d'intervalle où l'incertitude choréique puisse survenir; puis on fait exécuter des mouvements d'ensemble avec lenteur.

Le bégayement peut être traité de la même façon, en faisant chanter ou lire, mais en ne prononçant chaque syllabe qu'à chaque mesure du métronome. Nous n'avons pas vu la gymnastiqne employée exclusivement à l'hôpital des Enfants, où MM. Blache et Bonneau traitent la chorée par les bains sulfureux

et la gymnastique; quand nous aurons parlé des bains sulfureux nous pourrons alors comparer les deux méthodes dont nous avons été à même d'apprécier les résultats; c'est-à-dire : 1° celle de M. Trousseau qui prescrit la strychnine, 2o celle des autres médecins de l'hôpital des Enfants, qui emploient les bains sulfureux et la gymnastique.

Nous allons immédiatement indiquer rapidement en quoi consistent les exercices gymnastiques, puis nous citerons une observation comme exemple d'efficacité de la gymnastique.

Les exercices gymnastiques sont passifs ou actifs. Voici en quoi consistent les exercices passifs: le malade est fixé sur son lit dans le décubitus dorsal, maintenu dans l'immobilité 10 à 15 minutes; puis on exécute des massages répétés sur les membres et la poitrine, des frictions nombreuses sur le tronc en avant, en arrière, le long du dos, sur la nuque, etc. Chaque séance dure une heure ou une heure et demie, on recommence chaque jour.

Les mouvements actifs consistent dans des exercices exécutés par le malade lui-même sous les ordres d'un professeur. Ces exercices sont la marche, la course, les bras lancés en avant, en haut, en bas, etc., tout cela, en chantant différents airs très-simples, mais d'une mesure très-accentuées puis viennent les mots, les cordes, le trapèze, etc.

La gymnastique est ordonnée ou non ordonnée.

Dans la gymnastique ordonnée, le gymnasiarque règle par sa volonté les mouvements des enfants, tandis que la gymnastique non ordonnée n'est autre qu'une gymnastique spontanée dans laquelle le malade entièrement libre de lui-même se livre à tous les mouvements qu'il peut faire, marche, saute, etc. Dans la gymnastique ordonnée, le gymnasiarque se place au-devant des individus qu'il veut exercer, puis il fait un mouvement et il oblige sa troupe à le répéter après lui. S'il allonge le bras, s'il porte la tête en avant, s'il chante, s'il pousse un cri, les enfants aussitôt allongent le bras, portent la tête en avant, chantent ou poussent un cri, et tout cela se fait ou doit se faire en mesure. En s'aidant ainsi de la voix du gymnasiarque, de l'exemple de ceux qui vous environnent, on arrive à régulariser, à ordonner ses mouvements; on le comprend, cette gymnastique ne peut être employée qu'au déclin de la maladie.

Nous n'entrons pas dans de plus amples détails, nous renvoyons pour la description des appareils à l'ouvrage de M. Laisné, l'habile gymnasiarque de l'hôpital des Enfants.

D'autres exercices peuvent aussi être employés avec succès, tels que l'escrime, la boxe, la canne, le bâton; nous y rangerions même l'équitation à la condition que le choréique sera dans une période de guérison qui lui permettra de se maintenir sur le cheval. Et même je préfère ces derniers exercices à la gymnastique proprement dite, parce que les malades n'emploient que la somme de leur force sans l'outrepasser, tandis que lorsqu'ils sont pendus à une corde, ou arrivés au haut d'un mat, ils sont obligés de se forcer pour achever le mouvement commencé.

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