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LA FRANCHISE DE TERVUEREN. -On ignore complétement à quelle époque le bourg de Tervueren obtint des priviléges; on sait seulement, par le texte de la charte de Duysbourg, dont, les premiers, nous publions le texte, que les bourgeois de cette localité en possédaient déjà, en l'an 1226. A cette époque, le souverain y était représenté par un maire nommé Danekin.

L'année même qui ouvrit le quatorzième siècle, Jean II donna, ou plutôt vendit, quelques immunités à sa résidence favorite. « En considé<ration des grands services et charges que les bourgeois avaient sup< portés pour lui, et dans l'intention de venir à leur aide», il les déclara libres de toute taille, de toute exaction, et de tout service pécuniaire, sauf pourtant dans les cas extraordinaires dont parlent les actes de cette nature: le voyage à la cour impériale, la chevalerie ou le mariage d'un enfant du duc, la captivité de celui-ci. Il mit les bourgeois en possession des immunités dont jouissaient les habitants de Louvain, leur confirma leur marché hebdomadaire et déclara qu'ils seraient exempts de tonlieu dans tout le Brabant. En retour de ces faveurs, que Jean II fit approuver par son oncle, Godefroid, seigneur d'Aerschot, les bourgeois furent astreints à payer une somme de 1,500 livres payement. Jean III sanctionna, le lundi avant la Pentecôte, en 1541, cette charte, qui fut également confirmée par l'archiduc Maximilien, le 20 novembre 1486, et par son fils Philippe, le 26 septembre 1495.

1 Johannes Dei gratia dux Lotharingiæ, Brabantiæ ac Lymburgiæ, salutem in Domino sempiternam. Ad noticiam presentium et posterorum volumus pervenire quod nos considerantes multimodis serviciorum oneribus quibus burgenses nostri de Fura per nostros progenitores et per nos sunt gravati, considerata nichilominus gravitate qua nobis ex benignitate sua solita mox impendunt, volumus eisdem digna super hiis vicissitudine respondere, eosdem ex eorum in perpetuum successores et heredes, ab omni tallia et exactione necnon ab omni servicio pecuniali nobis et nostris successoribus et heredibus in posterum exhibendis, pro nobis et eisdem nostris successoribus et heredibus in posterum absolvimus et quitamus et super hiis esse volumus liberos et exemptos. Concedentes eisdem libertatem eamdem qua nostri burgenses Lovanienses perfruuntur, salvo tamen quod si nos aut nostros successores vel heredes ad curiam Domini Romanorum Regis trans Alpes transferre, filium vel filiam nuptui tradere et filium militem facere contingit, quod dicti nostri burgenses et eciam pro captivitate in hiis nobis moderate et prout racionabiliter sustinere poterunt, succurrere et servire tenebuntur. Concedimus eciam eisdem nostris burgensibus et ex favore conferimus, renovando forum ebdomedale in villa nostra de Fura predicta et quod eo plenissime gaudeant et fruantur prout hactenus de eodem sunt gavisi, quodque per totam terram nostram iidem nostri burgenses ab omni telonio absoluti sunt liberi perpetuis temporibus et exempti, propter que iidem nostri burgenses nobis dare et solvere debent et tenentur mille et quingentas libras pagamenti in Brabantia communiter per tempora currentes terminis infrascriptis, ininstanti videlicet trecentas libras, in festo Nativitatis Domini proxime centum libras, et de anno in annum semper Nativitatis dominice festo, centum libras, donec de totali summa pecunie predicta nobis fuerit integre satisfactum. Et ut hec mea concessio et renovacio robur obtineat perpetue firmitatis, predictis nostris burgensibus nostras presentes litteras tradidimus nostri et dilecti nostri avonculi domini Godefridi de Brabantia,

En 1582, Jeanne et Wenceslas étendirent les droits des habitants de Tervueren. Les bourgeois ne purent plus être arrêtés hors de la franchise; les échevins et les bonnes gens de leur conseil » furent autorisés à lever une accise, « aussi grande ou petite qu'ils le jugeraient convenable, sur tous les objets que l'on apporterait au marché, et à taxer les vins qui seraient livrés à la consommation à Tervueren. On imposa à tout bourgeois habitant à Tervueren ou à un demi-mille à l'entour, l'obligation de mettre en vente au marché de Tervueren ses grains, ses bestiaux, etc., avant de pouvoir les envoyer ailleurs. L'établissement d'un serment de la draperie fut autorisé, ainsi que la création de deux wegemeesters (maitres des chemins), qui seraient nommés par le châtelain et les échevins, et qui percevraient les revenus de la franchise, de concert avec deux autres bons compagnons légitimes (ou plutôt légaux, wettige, c'est-à-dire aptes, capables), à charge d'en rendre compte tous les ans. Dans tous les cas se rapportant à l'une des stipulations de la charte, les amendes devaient dorénavant se partager, par moitié, entre le duc et la franchise, à moins qu'il ne s'agit d'un attentat aux droits du souverain. Si, plus tard, la franchise était entourée de murs (gevest), le châtelain devait avoir la garde de toutes les clefs des portes, et, clause qui prouve combien on se défiait, à cette époque, de la population de nos cités, la non-exécution de cette dernière condition entraînerait nécessairement l'abolition de la charte 1.

Tervueren florissait alors, grâce surtout à la présence presque continuelle de la cour; en 1427, sa cote dans l'aide, cote qui fut fixée comme zweergelt, ou centième de la valeur des biens, ne s'éleva qu'à 59 1/2 couronnes, au lieu de 216 couronnes, qui formaient le taux de sa cote, suivant la base ordinaire. Une mortalité excessive y enleva une grande partie de la population, en l'année 14573. Pendant le règne de Maximilien d'Autriche, les habitants et ceux de Duysbourg voulurent s'exempter de contribuer dans les aides, mais on repoussa leurs prétentions, parce que le subside avait été voté par les États pour la défense du pays, et non pour être donné au prince 3. Toutefois, on leur confirma leurs anciennes immunités et on déclara qu'ils seraient toujours exempts de logements militaires et de l'obligation de prendre les armes, sinon dans

domini de Arschot et de Virson sigillorum patrocinio communitas. Datum Bruxelle, in die Epiphanie Domini anno ejusdem Mo tricentesimo. Registres aux chartes de la chambre des comptes, no III, fo 164.

1 Registres aux chartes de la chambre des comptes, no VI, fo 38. Chronycke van Nederlant.

3 Want die penningen van desen accord nyet en syn le reputeren voer beede mynen genedigen heere geconsenteert, maer geordonneert totten besorge en bescudde van den gemeynen lande, enz. Comptes des aides de Brabant aux Archives du royaume.

les cas d'un heervaert général ou levée en masse; puis, comme les échevins et les autres magistrats de Tervueren sollicitèrent une franchise absolue dans ces derniers cas, on la leur accorda, à condition qu'ils payeraient leur part dans les aides, et qu'en cas de besoin les bourgeois les plus habiles et les plus robustes prendraient les armes pour garder le château (11 janvier 1484-1485) 1. Le 20 novembre 1486, Maximilien confirma les priviléges que les ducs Jean II et Wenceslas avaient octroyés à Tervueren; mais les habitants ayant, en l'année 1488, embrassé le parti de Philippe de Clèves et des Bruxellois contre le gouvernement tyrannique du roi, ces lettres restèrent sans effet, parce qu'elles n'avaient pas été expédiées après avis du conseil des finances et de la chambre des comptes, ni vérifiées sous le sceau du grand conseil. Lorsque, après le traité de 1489, les bourgeois crurent pouvoir s'en servir, le maire de Vilvorde, le receveur général de Brabant et d'autres officiers du prince en contestèrent la validité; toutefois, sur de nouvelles réclamations adressées par eux au prince, celui-ci confirma de nouveau leurs libertés (17 décembre 1491). En outre, on leur octroya une exemption d'aide pour trois années; puis, en considération de ce que le bourg avait été pillé et en partie brûlé, on leur accorda une remise du quart de leur cote (qui s'élevait à 42 livres) dans l'aide courante. Les biens de l'hôpital, ceux du Saint-Esprit et ceux de Michel Peeters avaient particulièrement souffert.

Le 26 septembre 1494 et le 5 octobre 1495, l'archiduc Philippe prolongea, pour un nouveau terme de six ans, la remise de toute leur cote dans l'aide, dont jouissaient les populations de Tervueren et de Duysbourg. Plus tard, les habitants essayèrent d'obtenir de nouveau cette faveur. Ils obtinrent d'abord, pour six années, remise des deux tiers de leur cote, puis, pour les six années suivantes, remise de la moitié seulement (16 mars 1508-1509). Ils étaient, disaient-ils dans une requête de cette époque, très-pauvres ; ils n'avaient d'autres biens que ceux qu'ils tenaient à cens du souverain, et dont on ne pouvait tirer autant de profit qu'ailleurs, parce que le gibier de la forêt de Soigne y causait de grands dommages. En outre ils avaient pris à leur charge certains anniversaires et fondations des ancêtres du souverain, ‹ à quelle fin ils ont consenti « à ce qu'une accise fût mise, qu'ils payent encore, à leur grande < charge. › A raison de tout cela et d'une somme de 1,500 florins du Rhin payée par eux, exemption d'aide leur avait été accordée; mais, à

1 Registres aux chartes de la chambre des comptes, no V, fo 161. - Le conseil privé, en 1640, et le conseil de Brabant, en 1650, confirmèrent les immunités d'impôts dont jouissaient les habitants de Tervueren et de Duysbourg, immunités qui firent l'objet d'un accord entre ces localités et les États de Brabant, daté du 22 décembre 1666.

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cause des grandes affaires survenues dans ces pays pendant quelques années, on les avait obligés à payer, ce qui leur causait un double tort. On leur remit la moitié de leur cote, pour quatre années, à partir de 1510, et le tiers, pour les quatre années suivantes (lettres patentes données à La Haye, le 25 juin 1509). Ils obtinrent encore le 12 mai 1531, remise de la moitié de leur cote (cote qui s'élevait alors à 152 livres par an); le 10 août 1537, remise du quart, en considération de la décadence de leur prospérité et des torts que leur causaient les animaux sauvages; le 1er septembre 1540, remise de la moitié ; le 19 octobre 1545, mise d'un tiers; le 7 mars 1549-1550, remise de 90 florins carolus, paran. Le 28 juillet 1580, messire Florent T'Serclaes et les autres propriétaires principaux du bourg obtinrent l'autorisation de permettre le remboursement de redevances et de cens appartenant à la Table du SaintEsprit, jusqu'à concurrence de 550 florins, afin de faire face à différentes dépenses. Les guerres religieuses troublaient alors le pays, et particulièrement Tervueren, où, m'a-t-on dit, un temple calviniste s'établit près de l'église, dans une auberge qui en retint le nom de Geuse kercke. En 1617, la population avait subi une si forte diminution, qu'elle était réduite à 400 âmes, le quart à peu près de ce qui existait en 1455; mais, en 1767, elle était remontée à 1,170 habitants. Dans l'intervalle, le bourg fut plusieurs fois ravagé, notamment en 1655. En 1668, les Français mirent Tervueren à contribution, et enlevèrent, dans le bois de Soigne, une grande quantité de bestiaux que les paysans des villages voisins y avaient conduits. Au mois de décembre 1683, ils assaillirent le bourg à l'improviste, y tuèrent plusieurs habitants et y brûlèrent environ la moitié des maisons'. En 1733, un incendie consuma toutes les maisons formant le pourtour de l'église vers le sud, et, le 25 avril 1763, 11 maisons et un pavillon du château furent également brûlés; ce dernier malheur, qui coûta la vie à deux personnes, fit sentir le danger des toits de chaume. Une ordonnance du conseil de Brabant, en date du 30 mai 1765, les proscrivit, du moins dans les nouvelles constructions, à la demande de l'administration locale. La révolution brabançonne et la révolution française causèrent un tort immense au bourg qui, après avoir connu quelques beaux jours sous le règne du roi Guillaume, retomba dans l'atonie, après les événements de 1830.

Les premiers ducs de Brabant confièrent la gestion de leur domaine de Tervueren à un receveur particulier, dont l'office fut ensuite réuni à celui du receveur de Vilvorde. A Tervueren, on percevait un vieux et

1 Relations véritables du 29 décembre 1683.

2 Archives communales.

un nouveau tonlieu, lequel s'affermait en même temps que les taxes semblables levées à Louvain. En 1403, le gruut geld ou droit sur la drêche coûta aux brasseurs 14 livres, soit 11 gros 2 esterlings. Les assises, que la duchesse Jeanne donna à la franchise, lui furent confirmées par Antoine de Bourgogne. Celui qui, sans être bourgeois de Tervueren, y achetait des biens, payait un florin par an; le droit d'entrée dans la bourgeoisie s'élevait à 40 escalins noirs, un tiers pour le duc, un deuxième tiers pour la franchise et le dernier tiers pour les échevins eux-mêmes.

En vertu d'un privilége octroyé, le 13 novembre 1456, à Christophe de Beringen, maire de Vilvorde, celui qui remplissait ces fonctions pouvait nommer un lieutenant pour semoncer (maenen) les échevins de Tervueren'. Le 18 mai 1747, messire Charles-Philippe de Baudequin usa encore de cette faculté; plus tard, on la lui enleva. Le document où nous puisons ce dernier détail ajoute qu'elle paraissait une usurpation; l'octroi de 1456 prouve le contraire, mais, suivant toute apparence, on ignorait alors l'existence de cette pièce. En 1780, un maire particulier fut nommé pour Tervueren et Duysbourg. L'échevinage de Tervueren existait depuis très-longtemps; une charte de l'an 1270 mentionne les échevins Walter Lifkint, Henri Do, Jean de Bodinghem, Walter de Cupen, Jean Papa ou De Pape et Daniel de Blensberge. Le sceau communal, qui fut appendu aux chartes de Cortenberg des années 1312 et 1572, à l'union des villes du Brabant de 1555 et au règlement pour le duché, de l'an 1422, représente un lion rampant, La légende porte: S. OPIDI FURENSIS DUCIS BRABANCIE. Nous le donnons ici, au verso, d'après l'exemplaire de la charte de 1572 qui fait partie des archives communales de Léau, actuellement déposées aux archives du royaume. Les armoiries modernes sont d'argent à un lion rampant, d'azur, couronné de même. Outre les échevins, il y avait deux wegemeesters ou wechmeesters. En 1427, Gérard Nigant et Herman Vandendike, qui avaient été élevés à ces fonctions, s'étant adressés à la ville de Louvain pour obtenir une décision sur une affaire qui les embarrassait, se virent, pour cette cause, condamnés à faire chacun un pèlerinage à Bâle ou à payer 8 florins du Rhin; selon les magistrats de Bruxelles, ils auraient dû prendre leur recours vers eux, comme mandataires de la chefville dont Tervueren dépendait. L'affaire n'était pas de nature judiciaire, sans quoi le débat n'aurait pas été soulevé. Tervueren, en effet,

Au quatorzième siècle, la maheria (mairie) de Tervueren payait au domaine 14 livres payement par an.

2 Voyez leurs comptes aux Archives du royaume, registre no 12786 des Archives de la chambre des comptes.

T. III.

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