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LA DÉCADE

PHILOSOPHIQUE, LITTÉRAIRE

E T

POLITIQUE.

AN XI de la République Française.-2me TRIMESTRE

10 ventose.

PHYSIOLOGI E.

par

SYSTEME PHYSIQUE ET MORAL DE LA FEMME, P. ROUSSEL, de l'Institut national de France. Edition deuxième et posthume, augmentée de l'Eloge historique de l'auteur, par J. L. ALIBERT, médecin de l'hôpital de Saint-Louis. Prix, 4 fr., et 5 fr., franc de port. A Paris, chez Crapart, Caille et Ravier, libr., rue Pavée-. Saint-André-des-Arcs, no 12.

(SECOND EXTRAIT.)

Ex rendant compte, dans notre premier extrait, de l'ouvrage du docteur Roussel, nous éprouvions un sentiment bien différent de celui dont nous sommes affectés en parlant à nos lecteurs, de son éloge historique. Lorsque nous nous occupions du Systéme physique et moral de la femme, nous étions sans cesse rappelés au talent, au mérite et à la réputation de son auteur, enfin à tout ce qui nous reste de lui, mais en rendant compte de son éloge, nous sommes à chaque instant reportés au souvenir de sa perte et au sentiment de nos regrets.

Si quelque chose peut adoucir l'amertume de la disposition où nous nous trouvons en écrivant cet article, c'est An XI. me. Trimestre.

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le plaisir que nous fait éprouver la lecture de l'éloge his torique de Roussel par le C. Alibert. Dans les ouvrages où le sentiment a quelque part, il est aisé d'en saisir la couleur, dès le début, car les premières idées en portent toujours l'empreinte et en prennent la nuance.

L'éloge historique du docteur Roussel commence par cette idée touchante et pleine de vérité. Nous la rapportons, parce que si le style du C. Alibert prévient pour son talent, le sentiment dont il est animé ne prévient pas moins pour son cœur.

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« Il est, dit-il, une alternative bien cruelle dans la des» tinée de l'homme sensible; il faut que la mort vienne » l'arracher aux plus chers objets de son affection, ou qu'il leur survive pour les regretter. J'avoue que cette » désolante pensée plonge souvent mon ame dans une pro» fonde mélancolie; elle a dû naturellement renaître dans le cœur de ceux qui ont le bonheur inestimable de con» naître et d'apprécier le doctenr Roussel. »

Après nous avoir donné quelques détails sur les premières années, les premières études et les premiers progrès de Roussel, après avoir parlé de son intime liaison avec Bordeu, l'un des médecins qui ont le plus honoré leur siècle et leur patrie, il nous montre Roussel livré à toute la douleur que lui occasionna la mort inattendue de son ami et de son protecteur, et cherchant à se distraire, en ouvrant son cœur à des sentimens qui pouvaient remplacer, par degré, celui d'une perte aussi cruelle. Nous aimons à présenter à nos lecteurs les réflexions et les propres expressions du panégyriste.

« Dans cette affreuse solitude du cœur, où laisse la >> privation soudaine d'un ami, il ( le docteur Roussel) dot » chercher à se distraire de ses chagrins, par des travaux » utiles et par son zèle ardent pour l'humanité. On dit » que les premiers penchans de la vie influent d'une ma» nière puissante sur le genre d'idées que nous adoptons. » Croira-t-on que l'amour fut en quelque sorte le génie de >> Roussel? Il était très-jeune encore que ce sentiment

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» s'était éveillé dans son ame. C'est alors que son imagi>> nation inspirée commença à méditer sur les goûts, les » mœurs, les passions et les habitudes des femmes, et qu'il >> fit une étude constante de leur constitution physique et » des attributs moraux qui en dérivent. Bientôt il coordonna >> les faits qu'il avait recueillis, et en composa un corps de » science aussi intéressant que le sujet. Je ne chercherai point à analyser ce livre, où tout est à sa place, où tout >> brille de ses véritables couleurs. Je craindrais de ternir » cette glace polie qui reproduit si bien à mes regards le » chef-d'œuvre des Dieux et de la Nature!... Avec quel >> art n'a-t-il pas disserté sur l'empire de la beauté, à laquelle, peut-être, il fut plus sensible qu'aucun autre » homme! Avec quel charme il a su retracer et la grace

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naïve qui enchaine, et l'adroite coquetterie qui appelle, » et la pudeur mystérieuse, cette prompte et délicate com» binaison de l'instinct, qui répond au desir même en le >> repoussant, et tant d'autres caprices aimables qui dou>> blent le prix de la conquête, en prolongeant le rêve de » l'illusion la plus enivrante! Des artistes célèbres ont peint l'auteur d'Emile couronné par des enfans. Je vou» drais qu'on représentât l'auteur du Systéme physique et » moral de la femme, recevant le même hommage de ce » sexe enchanteur dont il a dévoilé l'organisme avec tant » de finesse et tant de pénétration.

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Nous sommes obligés de dire qu'on croirait que c'est le docteur Roussel lui-même qui parle dans le charmant paragraphe que nous venons de citer; il n'est pas possible d'avoir mieux saisi le style, la finesse, la grace, et de s'être mieux pénétré de la manière de l'écrivain, objet de l'éloge. L'idée de représenter l'auteur du Systéme physique et moral de la femme recevant une couronne de ce sexe enchanteur, comme Rousseau a été présenté couronné des enfans, n'a pas été perdue. Cette idée fait le sujet d'une estampe que l'on prépare pour être mise à la tête. du premier volume qu'on doit publier des Œuvres posthumes de Roussel.

par

Le Systême physique et moral de l'homme, qui fait pendant au Systéme physique et moral de la femme, et qui est, pour ainsi dire, le complément de tout le systéme, sera la matière d'un premier volume qui ne tardera pas à paraître. Le médecin Alibert, en regrettant que le public ne puisse jouir encore de la totalité des ouvrages du docteur Roussel, nous en donne une idée dans le morceau suivant. C'est celui qui nous fait le mieux connaître sou talent et son génie.

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« Roussel, par la sagacité de ses recherches, et par le » charme pénétrant de son style, a su donner à la science des phénomènes de la vie une évidence, pour ainsi dire, géométrique, qui peut seule la faire avancer; rien n'a » été oublié dans un cadre si vaste. Après avoir rapide»ment démontré combien la nature a mis de sagesse, » d'harmonie, d'ensemble et d'accord dans la conforma» tion de chaque étre animé,il procède à l'examen le plus approfondi de celle de l'homme; il prouve l'influence » suprême qu'elle lui donne dans ce vaste Univers qui >> contient à peine son activité. Avec quel intérêt ne lit» on pas ses considérations sur le cerveau et le système » nerveux, sur les glandes et le tissu cellulaire ? Quel profit n'a-t-il pas tiré de la doctrine de Stahl, et de celle » de Bordeu sur la théorie du sang et sur celle des tempéramens? Les hommes, dans l'état de société, re»çoivent une multitude d'impressions des lieux, du climat » et des lois politiques, impressions qu'Hippocrate avait » aperçues, et dont aucune n'a échappé à la plume savante » de notre médecin-philosophe. Dans la seconde partie de » son ouvrage, il parle surtout du principe qui anime et > fait mouvoir les parties vivantes. Il analyse tous les prodiges de l'entendement et de la pensée. Il déroule les » lois mystérieuses de la sensibilité, d'où dériveut comme » d'une source intarrisable et commune, tous les phéno » mènes de l'économie morale et physique de l'homme. Sa » théorie des sentimens, surtout, a été retracée avec le pinceau qui lui convenait. Cette sublime esquisse ne con

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tient en général que des réflexions grandes et nobles; » l'auteur n'a pris dans son sujet que ce qui est véritable»ment utile et intéressant ; et on peut dire de lui ce qu'on » a dit de peu d'écrivains, il est aussi habile à peindre que » la nature l'est à créer. »

Ce morceau écrit avec beaucoup de chaleur, d'intérêt et de mouvement, est fait pour accroître le desir qu'on a de connaitre les œuvres posthumes du docteur Roussel. M. Alibert parle surtout d'une note de ce médecin sur les sympathies. C'est une nouvelle carrière ouverte à la médecine et à la philosophie, mais dans laquelle il leur serait impossible de marcher l'une sans l'autre.

Roussel était persuadé qu'il existait entre les individus, certains rapports moraux dont les effets étaient les mêmes que certains rapports physiques par lesquels des corps s'attirent, se repoussent, se mêlent, se confondent on restent constamment séparés. Il soupçonnait dans le monde moral des lois d'affinité, comme les chimistes croient en apercevoir dans le monde physique. Il faut lire encore dans M. Alibert lui-même, la manière dont il développe les idées de Roussel.

« Il y a environ trois ans, dit-il, qu'à ma sollicitation, »il (M. Roussel) fit insérer dans les actes de la Société » médicale, une note curieuse sur les sympathies. Il avait » été spécialement déterminé à s'occuper de cette matière, » à l'occasion de huit lettres publiées sur le même sujet, » à la suite d'une excellente traduction de Smith, par une » dame qui tient à la fois le sceptre de la beauté et le » flambeau de la philosophie. Roussel pensait que ce rap» port en vertu duquel les divers organes qui constituent » un corps vivant, exercent les uns sur les autres une in»fluence souvent indépendante de toute connexion physique, n'avait pas été encore assez profondément mé» dité, parce qu'on ignorait peut-être la valeur et l'étendue » d'un semblable phénomène. Il voulait en conséquence » qu'on poursuivit cette étude dans les êtres privés de sys» teme nerveux D et qu'on recherchât surtout comment

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