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M. Lanszwert, d'après les indications fournies par M. Liebig, permettent d'énoncer dès à présent.

1o La pression barométrique est plus forte au bord de la mer que dans l'intérieur la différence est de 5mm ;

2o La température moyenne de l'année, prise à 9 heures du matin, donne, en faveur de la côte, une différence de deux tiers de degré C. en plus. Les températures extrêmes y varient dans des limites plus resserrées. Ainsi, à Ostende, on obtient comme moyenne de la variation diurne 5o,18, tandis qu'à Liége, cette même variation est de 7°,85. C'est surtout au printemps qu'on observe cette uniformité plus grande dans la température, et, pour en citer un exemple récent, nous avons eu à Ostende, pour la dernière quinzaine d'avril, une variation diurne moyenne de 6o, et à Bruxelles, cette variation a été de 11o,6.

En été, le thermomètre, au bord de la mer, n'atteint jamais le même degré de chaleur que dans l'intérieur. En hiver, c'est l'inverse. La différence, dans ces deux cas, est souvent notable. Ainsi, en 1855, le jour le plus froid de l'hiver, le thermomètre, à Ostende, marquait 12°, et à Liége 20°. Pendant l'été de la mème année, le maximum de chaleur, à Ostende, était de + 27°,95, et à Liége de + 30o,30.

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On trouve ainsi vérifié, sur une petite échelle, ce que M. de Humbold et d'autres savants avaient dit de la différence entre le climat maritime ou constant et le climat continental ou excessif.

3o L'air de la mer contient aussi plus de vapeur aqueuse que celui du continent, et cela devait être; car la force des courants atmosphériques ou vents, au bord de la mer, exercerait sur l'évaporation cutanée une influence funeste, si un certain degré d'humidité ne s'opposait à une évaporation

exagérée. Les expériences d'Edwards, consignées dans son intéressant ouvrage sur les influences des agents physiques sur la vie, rendent très-bien compte de cette différence.

En faisant passer une quantité donnée d'air à travers de l'acide sulfurique concentré, ou bien à travers du chlorure de calcium complétement sec, on s'assure de la proportion de gaz aqueux. Au moyen de ce procédé, on constate qu'un litre d'air, à 0o de température et à 76 centimètres de pression. renferme, au bord de la mer, 30 centimètres cubes, ou 08,81 en poids, de vapeur aqueuse. Mais, ce résultat n'est pas en concordance avec les indications du psychromètre qui donne, pour Ostende, 74,9 d'humidité relative, et 7,17 de tension de la vapeur aqueuse; tandis que pour Bruxelles, ces chiffres sont respectivement de 83,8 et 7,77. Cette différence est due à l'agitation constante de l'air de la mer, agitation qui favorise singulièrement, comme on sait, l'évaporation.

A Ostende, on compte, en moyenne, 184 jours de pluie donnant 634mm d'eau; à Bruxelles il y a 200 jours de pluie, donnant 696mm d'eau, et à Liége 201 jours pluvieux et 839mm d'eau.

On est généralement disposé à croire que le rivage de la mer est habituellement plongé dans des brumes ou des brouillards; c'est au point que M. Andral, ainsi qu'on l'a vu plus haut, attribue à cette circonstance une influence puissante sur la production des tubercules pulmonaires. Or, rien n'est plus erroné que cette idée; car nous trouvons que, dans l'année 1854, il y a eu à Ostende 37 jours de brouillard, tandis qu'à Bruxelles il y en a eu 73 et à Liége 145. En 1855, il y a eu, à Ostende, 49 jours de brouillard, à Bruxelles, 68 et à Liége 157.

4o D'après M. Pouillet, l'océan doit verser dans l'aimosphère une grande quantité d'électricité positive. C'est là un fait que deux années d'observations, faites au moyen de l'électromètre de Peltier, viennent de prouver. Au bord de la mer, l'air est toujours électrisé positivement, et ce n'est que pendant les orages, et seulement au moment où ils passent au zénith, que l'instrument indique la présence du fluide négatif. En général, ces moments sont de trèscourte durée, et, dans toutes les autres conditions météorologiques, l'électromètre indique constamment de l'électricité positive. Sous ce rapport, il y a une différence avec ce qui s'observe à l'intérieur du continent; mais, jusqu'ici, il n'a pas été possible d'établir le degré précis de cette diffé

rence.

5o L'ozonomètre, à son tour, indique une légère différence entre les résultats obtenus au bord de la mer et ceux qu'on observe dans les stations météorologiques à l'intérieur. D'après ce que nous avons remarqué, sous ce rapport, l'air marin serait un peu plus riche en ozone la proportion serait comme 6,2 4,5 ; mais ce point réclame encore de nouvelles observations.

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Voilà, Messieurs, pour ce qui concerne les propriétés physiques de l'atmosphère maritime. Quant aux propriétés chimiques, les différences ne sont pas moins appréciables. Voici en quoi ils consistent :

1o Les proportions d'oxygène et d'azote sont les mêmes au bord de la mer que partout ailleurs; mais il n'en est pas ainsi pour l'acide carbonique. La proportion de ce gaz, dans l'air de la mer, est infiniment petite, el ne va pas au delà de 0,030 centimètres cubes par litre d'air réduit à la température de 0o et à 76cent de pression; tandis qu'à l'intérieur du

continent, cette proportion atteint normalement 0,38 centimètres cubes (Dumas et Boussingault).

2o A l'état de calme parfait, l'air de la mer ne renferme pas de particules salines, du moins la chimie n'en découvret-elle point; mais pour peu que la mer soit agitée, et surtout pendant le flux, on en constate invariablement la présence. Il est en effet tout simple que l'agitation de l'eau et de l'air entraîne alors une notable quantité de molécules aqueuses qui flottent d'une manière mécanique dans l'atmosphère, où la chimie les découvre aisément. Deux mille litres d'air passant à travers une solution d'azotate d'argent, ont donné lieu à un précipité de 0,3906 grammes de chlorure d'argent.

Le raisonnement nous indique que ces molécules doivent nécessairement renfermer des traces de tous les sels dissous dans l'eau de mer; mais jusqu'ici il nous a été impossible d'y constater la présence de l'iode, malgré la quantité énorme d'air - 3000 litres qui a été soumise à une analyse rigoureuse, suivant le procédé de M. De Luca. M. Chatin en trouverait indubitablement; mais alors se présenterait la question de savoir si l'air marin en renferme davantage que l'air continental.

Malgré ce résultat négatif, s'ensuit-il qu'il faille nier, d'une manière absolue, la présence de l'iode dans l'air de la mer? Nous ne le pensons pas, car la chimie constate la présence de ce métalloïde dans les plantes qui croissent dans les dunes, loin des limites que la mer atteint. Elles ne le prennent donc pas à l'eau dont elles sont éloignées: le sol où elles croissent n'en renferme pas non plus. On peut, me semble-t-il, admettre que les admirables appareils de distillation dont la nature a pourvu les plantes, leur permettent de l'accumuler petit à petit jusqu'à en faire provision, Or, nous savons que

l'air, sous l'influence d'une certaine agitation, enlève des molécules d'eau à la surface de la mer, et que le vent les transporte au loin: il parait donc rationnel d'admettre que chacune de ces molécules d'eau de mer renferme des traces infinitésimales d'iode que les plantes des dunes absorbent et gardent.

Il est encore possible que le mode d'alimentation, propre aux habitants du littoral, entre pour une certaine part dans l'immunité dont ils jouissent à l'égard de la phthisie. A Ostende comme tout le long de la côte, il n'y a guère de ménage d'ouvriers ou de pauvres qui ne mange, au moins trois ou quatre fois la semaine, du poisson, au repas principal. Il est bien vrai que ce poisson est de l'espèce la plus commune, mais il n'en contient pas moins une certaine proportion d'azote (1), des corps phosphorés, et, quelques-uns, tels que les moules, de l'iode et du chlore.

Les travaux industriels auxquels se livre notre classe ouvrière, la navigation, la construction navale et tout ce qui en dépend, les gros ouvrages du port, se font à l'air libre, au milieu des grands courants atmosphériques, dont l'action sur les fonctions de la peau a été si bien démontrée par notre regrettable collègue le docteur Fourcault (2). Ces travaux consistent dans une gymnastique, en quelque sorte constante, des muscles des parties supérieures du corps, par conséquent de ceux qui concourent à la respiration. Or, nous savons, et notre collègue M. Crocq nous a rappelé, combien un pareil exercice est salutaire pour les organes thoraciques.

On trouvera, je pense, Messieurs, dans les conditions clima

(1) Gregory. Annalen der Chemie und Pharmac., tome LXIV.

(2) Fourcault. Causes générales des maladies chroniques; spécialement de la phthisie pulmonaire. Paris, 1844.

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