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Réflexions. Un membre, exprimant son opinion au sujet de cette observation, est d'avis que l'existence d'une diathèse rhumatismale peut être acceptée ici; mais il ne reconnaît pas dans l'occurrence, de corrélation directe entre les douleurs rhumatismales et le vertige auquel l'appauvrissement du sang, produit par des saignées appliquées intempestivement à un homme sujet à la névropathie, pourrait bien ne pas être étranger, comme le prouvent le pouls dépressible, l'état du moral et les fonctions digestives languissantes et, en outre, l'influence des toniques qui auraient dû aggraver les phénomènes pléthoriques au lieu de les dissiper.

Quant à la diaphorèse hémicranienne dont il est fait mention plus haut, il ne peut l'admettre ici comme signe de pléthore, et il la considère plutôt comme étant la conséquence d'une névrose particulière telle qu'on en rencontre parfois chez certains sujets et dont lui-même offre un exemple. Ainsi il lui suffit de prendre des substances fortement acidulées, telles que les oranges encore aigres, de la salade un peu trop vinaigrée, ou des condiments excitants, tels que la moutarde, etc., etc., pour que le sommet de la tête seulement soit instantanément inondé de sueur.

Quoi qu'il en soit et quelle que soit ici la part d'influence de l'anémie dans la production des vertiges, et celle des toniques dans le traitement de la maladie du curé B..., toujours est-il que cette observation étant sujette à des interprétations diverses, n'offre pas un assez haut degré de certitude pour être admise comme preuve de l'existence d'un vertige spécial auquel on donnerait le nom générique de rhumatismal.

Quatrième observation. Un journalier, âgé de cinquante-cinq ans, sujet à des atteintes vagues de rhumatisme musculaire, éprouve des vertiges, depuis quinze jours, accompagnés de

douleurs gravatives aux tempes, dans les mouvements latéraux de la tête et du tronc, dans l'acte de se moucher et de se baisser ils augmentent quand il fait abus du tabac; le pouls est petit, facile à déprimer; le malade présente, en outre, quelques-uns des caractères de l'embarras gastrique. Un traitement et un régime appropriés à ce dernier genre d'affection, en font disparaître les symptômes. Néanmoins les vertiges et la douleur gravative du front et des tempes persistent et augmentent mème. M. Sovet prescrit un vésicatoire à la nuque et l'usage de pilules composées d'extrait de cévadille, de scamonée d'Alep, d'aloës et de rob de sureau : le mal cède comme par enchantement, car, trois jours après, la guérison est complète.

Réflexions. Un membre pense qu'on ne saurait admettre que toutes les douleurs vagues erratiques soient de nature rhumatismale: il est un très-grand nombre d'affections étrangères au rhumatisme où on les observe.

Si le rhumatisme, le principe rhumatismal attaque la constitution générale et peut se localiser dans des organes différents, on comprend sous combien de formes, avec quelle variété d'expression il peut se manifester, combien il est souvent difficile de le découvrir au milieu de ses déguisements, mais aussi combien il est facile de se tromper si l'on s'en rapporte à un seul symptôme.

Or, dans les faits cités par M. Sovet, à l'appui de son opinion sur la spécificité du vertige rhumatismal, on ne voit jamais que la douleur qui serve de guide à son diagnostic.

Voici comme il procède le malade a eu des douleurs scapulaires ou lombaires ou fémorales, donc il a été rhumatisé. Ces douleurs s'appaisent ou se mitigent par une médication appropriée; aussitôt surviennent des vertiges et ceux-ci

disparaissent quand les douleurs se manifestent de nouveau : donc le vertige est d'origine rhumatismale. Mais qu'on veuille lire ce qui, tant en France qu'en Angleterre, a été écrit sur les névralgies et on s'assurera que c'est bien ainsi qu'elles se comportent.

Qui ne sait que des affections douloureuses des articula-tions prises pour des inflammations n'étaient en réalité que: des névroses d'origine hystérique souvent les affections articulaires ou musculaires alternent avec d'autres accidents hystériques, des spasmes Valleix parle d'une hypertrophie douloureuse du col utérin qui se rencontre souvent dans la névralgie lombo-abdominale et qu'on prend pour un rhuma- tisme de la matrice.

Un membre de notre Commission a vu, à diverses reprises, des névralgies cutanées qu'on prenait pour des rhumatismes musculaires. Dans un cas, la peau des cuisses était tellement sensible que le plus léger attouchement faisait crier le malade avait perdu l'usage des deux extrémités inférieures, on * les croyait frappées de paralysie. Du jour au lendemain, sans l'emploi d'aucun remède (la sensibilité de la peau n'avait pas permis d'employer des frictions), la douleur disparut et les membres recouvrèrent leur pouvoir.

Mais revenons au sujet de la quatrième observation. Quelque confiance que puisse inspirer l'extrait de cévadille obtenu par l'alcool bouillant, on a peine à croire que par son intermédiaire on puisse amener la guérison complète d'un rhumatisme chronique ancien endéans les trois jours.

On connaît les bons effets obtenus de la cévadille dans les névralgies. Ne serait-ce pas en modifiant l'action de la cinquième paire que M. Sovet aurait obtenu ici la cessation des vertiges et de la céphalalgie? La vraisemblance de cette opi

nion est d'autant plus grande que chez le sujet dont il s'agit le tabac augmentait les vertiges.

Il est vrai que M. Sovet place sur la même ligne le rhumatisme et la névralgie. Mais cette identité n'étant pas encore complétement démontrée, la Commission a cru devoir rester dans l'expectative jusqu'à plus ample information.

Cinquième observation. Un fermier, âgé de trente-trois ans, tempérament sanguin, accusant exactement les mêmes symptômes que le malade qui fait l'objet de la quatrième observation, à l'exclusion cependant des phénomènes gastriques, éprouve, au moment où il consulte M. Sovet, des vertiges tellement violents, qu'il est obligé de s'accrocher aux meubles chaque fois qu'il essaie de mouvoir la tête. Il accuse, en même temps, une douleur compressive du front et des tempes et une sorte de paresse morale.

Le même traitement est suivi du même succès.

Réflexions. Les remarques présentées à l'occasion de l'observation précédente sont également applicables à celles-ci. Recommandée contre les douleurs rhumatismales, la cévadille n'a peut-être jamais été efficace que dans les cas où on a affaire à la forme névralgique du rhumatisme, au rhumatisme nerveux. Il est à remarquer, en outre, qu'il associe cette substance aux drastiques qui, en modifiant, dans certains cas, puissamment l'état des voies gastriques, agissent sur les centres nerveux.

Sixième observation. Une fermière, tempérament lymphatico-nerveux, soixante-deux ans, n'ayant jamais été malade, si ce n'est par suite d'une sciatique traitée, il y a quelques mois, à l'aide des émissions sanguines locales, des vésicatoires et des bains, se plaint, depuis plusieurs années, de douleurs ar

ticulaires et musculaires passagères, contre lesquelles elle s'est abstenue de réclamer les secours de l'art.

En 1854, elle est atteinte d'un rhumatisme musculaire d'une très-grande acuité. Traité sans succès par les antiphlogistiques, les révulsifs, les narcotiques à l'intérieur et par la méthode endermique, et enfin par le sulfate de quinine, il cède à l'usage interne de la vératrine qui portée à une dose trèsforte, par suite d'un malentendu, produit un commencement d'empoisonnement. La guérison est complète le vingt-quatrième jour.

Cinq mois après, elle est affectée de vertiges très-violents, s'exaspérant par les mouvements latéraux de la tête, du tronc ou des yeux signes négatifs de congestion cérébrale; voies digestives en bon état. Persuadé qu'il avait affaire au vertige rhumatismal, M. Sovet prescrit l'application d'un vésicatoire sur chaque épaule et une potion composée de vin de colchique et de sirop de rhubarbe. Le mal cède promptement à cette médication.

Réflexions. Le caractère rhumatismal de l'affection que nous venons de décrire peut s'accepter, mais il pourrait bien se faire, comme le remarque l'un des membres de la Commission, que les vertiges dont la malade fut atteinte après la cessation de ses douleurs fussent de nature vératrineuse au lieu d'être rhumatismale.

Quoi qu'il en soit, malgré notre confiance dans les lumières de notre estimable et judicieux confrère, le docteur Sovet, nous avouons que cette observation ne porte pas pour nous le cachet de la certitude. Ainsi, nous voyons une femme atteinte d'abord d'une affection rhumatismale névralgique, puis musculaire qui cède à un traitement long et compliqué, mais qui cinq mois plus tard se représente, d'après M. Sovet, sous forme de ver

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