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qui luy demeuroient, s'en alla à Soucin', ville du duché de Milan, laquelle l'accepta, et y fut logé sa personne avec sa maison, et aucuns gens de pieds pour sa garde le reste dudit camp fut logé et reparty sur le Cremonois l'espace de trois à quatre mois.

CHAPITRE IV.

Du roy de France, qui s'estant emparé de Milan, et voulant prendre Pavie, y fut batu, et fait prisonnier.

Or retournons au roy de France, lequel estoit dedans Milan triomphant avec son armée, en avoit prins la possession; il délibera donc de venir assieger Pavie, laissant grosse garnison dedans ledit Milan, avec gouverneur y commandant. Et de fait il marcha avec son armée plein de grand courage, et fit aussi marcher son bagage pour aller vers Pavie, disant en son langage: Tout sera en advantage pour mes avanturiers; car c'est leur vray mestier. Mes Suisses seront payez à lambandon pour un an et un jour. Et pour le faire court, il assiegea Pavie, faisant grandes batteries, rompant murailles et tours, presentant plusieurs assauts: mais les gens de l'Empereur, triomphants en valeur, les en repousserent. Et cependant monsieur de Bourbon partist pour

1 Soncino, sur l'Oglio; cette position était gardée par Charles de Lannoy et sa cavalerie. Le duc de Bourbon était allé solliciter des secours de l'archiduc Ferdinand.

2 François Sforza, duc de Milan, s'était d'abord retiré à Pizzighitone, puis à Cremone.

Allemaigne, et fit tant par promesses, et autres bonnes parolles, qu'il leva et amena dix à douze mil lansquenets, qui fut un grand bien pour l'Empereur, et pour les gens de guerre, qui pour lors estoient à son service en Italie'.

Estant donc arrivé, le camp se commença à r'assembler, dressant son chemin vers Pavie', afin de donner secours à ceux de dedans, lesquels estoient en grande necessité tant de vivres, que d'amonitions de guerre, et principalement de poudres. Il fut fait tel devoir par les gens de l'Empereur, qu'ils furent campez tout prez de celuy du roy de France, qui estoit campé dedans le Parcq*, tenant Pavie assiegée de tous costez.

Lesdits deux camps furent ainsi campez dix-sept ou dix-huit jours à tire du canon l'un de l'autre, se faisans journellement grosses escarmouches, où moururent de part et d'autre plusieurs gens de bien, et entre autres fut tué d'une arquebusade un

1 Le duc de Bourbon ramena 500 chevaux bourguignons, conduits par Guillaume de Vergy, baron d'Autrey, et 6,000 fantassins allemands commandés par Marc Sittich d'Embs et par le comte Nicolas de Salm. Un corps de volontaires, presque aussi nombreux, fourni par la noblesse immédiate et par les villes impériales, marchait sous les ordres de Georges Frundsberg, seigneur de Mindelheim; son fils Gaspard était enfermé dans Pavie, avecAntonio de Leyva.

2 Le duc de Bourbon arriva au milieu de janvier 1525, avec les renforts d'Allemagne.

3 Le mouvement de l'armée impériale commença le 25 jan~ vier 1525.

4 L'armée française était protégée, du côté de Lodi, par un fossé et un rempart; à droite par le Tessin et à gauche par le mur du vaste parc, qui entourait la maison de chasse des ducs de Milan à Mirbel.

conte de Vere Bourguinon, dont ce fut grand dommage'.

Or en ce temps fut conclud de trouver moyen de sçavoir le gouvernement et necessité qui estoit grande dedans la ville, et fut ordonné au capitaine Sucre, de se hazarder, avec Loquingan' et Escalignes, pour y mettre et les secourir de sacquelets de poudre, dont ils estoient en grande necessité, ce que par eux fut fait, et dont aucuns se jetterent dedans les fossez, ensemble leurs chevaux, qui fut un grand scandale pour les ennemys. Bien entendu

1 La famille bourguignonne de la Vere comptait plusieurs grands officiers des ducs de Bourgogne et des chevaliers de la Toison d'or. Mémoires pour servir à l'histoire de France, etc., p. 272 et 276.

2 Du Bellay (an. 1521 p. 352), cite « le seigneur de Bellaing « qui se nommoit Sucre pour s'être retiré avec madame du Reu, << dans le chasteau de Hesdin, après la prise de la ville par M. de « Bourbon, duc de Vendosme. » Cette famille Sucre existait encore à la fin du xviie siècle, puisque nous voyons François Joseph de Cambry, seigneur de Viescourt, épouser Marie Catherine de Sucre de Bellaing, fille de Philibert, seigneur d'Oisy, et de Marguerite de Poele. Suivant Goethals, ces époux sont inhumés dans l'église de Raismes, près de l'abbaye de Vicogne. Bellaing est non loin de Valenciennes. Gollut revendique le capitaine Sucre comme Bourguignon (p. 1572, 1578 et 1583), co qui nous paraît une erreur. André de Sucre, probablement fils de celui cité dans le texte, occupa ensuite un rang élevé; il figure, avec les principaux seigneurs, aux fêtes et tournois donnés à l'occasion de l'arrivée du prince Philippe, dans les Pays-Bas (Gollut, p. 1663, 1665 et 1667); devenu roi, ce prince l'admit au nombre des gentilshommes de sa maison. Gachard, Relations des ambassadeurs vénitiens. Archives gén. Comptes de la trésorerie des guerres, an. 1563, n° 25,546.

3 De la famille bruxelloise de Locquenghien.

4 Au nombre des officiers italiens, qui accompagnaient le prince d'Orange au siége de Florence, Brantôme cite « le seigneur Sca« lingo. » T. I, p. 97. V. Du Bellay, p. 570.

que ceux de Pavie firent dire à monsieur de Bourbon qu'ils asseuroient encor la ville pour un mois.

Lors fut conclud par une veille de saint Nicolas l'an 1524', de lever le camp à la minuit, et se vestir chacun d'une chemise blanche par dessus son harnois', et de rompre les murailles du Parcq en trois ou quatre lieux, et de taster s'il y auroit moyen d'offencer l'ennemy, et en cas de faute, marcher le chemin de Milan, là où le roy avoit laissé dix mil frantaupins3, lesquels l'on avoit proposé de surprendre. Toutesfois les murailles dudit Parcq furent rompuës, nos escadrons entrerent dedans au poinct du jour, qui faisoit grande bruine. Les sentinelles des François avoient esté prinses et tuées par les Espaignols et Italiens, qui firent bresches. Si j'ay bonne memoire, ils furent six escadrons, sçavoir, trois de pieds, et trois de gens de chevaux.

Premier, le seigneur don Fernand de Gonsaga menoit les chevaux legiers à l'avangarde. Le seigneur de Bourbon la bataille. Don Fernand de Lannoy, vice-roy de Naples, l'arriere garde ‘.

L'avangarde des gens de pieds, c'estoist le sei

La bataille de Pavie se donna le 24 février 1525. Robertson, t. 11, p. 182. Sismondi, Histoire des républiques italiennes, t. vIII, p. 75. Le même, Histoire des Français, t. xi, p. 301.

2 On a vu que de ce stratagème est venu le mot camisade.

3 Soldats destinés à faire les mines; les mineurs fouillant la terre comme les taupes. Au xve siècle, on appelait aussi francs-taupins, la milice créée par Charles VII, sous le nom de francs-archers, et supprimée vers 1480 par Louis XI. Daniel, 1° C, 180.

4 L'avant-garde de l'armée impériale était commandée par Alphonse d'Avalos, marquis del Guasto.

5 Charles de Lannoy, vice-roi de Naples.

gneur Fabrice de Maramaul', avec les Italiens, et six pieces d'artillerie, lesquels s'advancerent tant, que par les ennemis furent repoussez, et perdirent lesdites six pieces de canons.

Le seigneur marquis de Piscara menoit la bataille avec les Espaignols. Et le seigneur Heer George2 avec les Allemands menoit l'arriere garde, lesquels à grosse diligence secoururent le seigneur Maramaul, et furent les François repoussez, et grande multitude d'iceux tuez, à cause de leur desordre; car incontinent que le roy François, prince vertueux et vaillant, et de grand courage, fut adverty que nostre artillerie estoit perduë, et que l'on crioit France, France par tout son camp, il fit marcher à toute diligence toute son armée, pensant ne se trouver à temps à la bataille, et sçavoit bien qu'il estoit beaucoup plus fort que son ennemy, et l'on disoit par tout son camp, que ce n'estoit qu'allarmes accoutumées, estant veritable que cinq à six jours auparavant l'on ne cessoit, jours et nuits de faire allarmes.

Le roy oyant le bruit, comme dit est, voulut venir à ladite artillerie, laquelle avoit esté regaignée, fit marcher la bataille où elle estoit; mais il fut rencontré de nostre susdite bataille, là où il y avoit sur les aisles quatre cens arquebusiers espaignols, lesquels firent grand massacre des François et l'on commença lors à crier victoria, victoria, Espaigne, Espaigne.

1 Le calabrais Fabricio Maramaldo, dont il sera souvent parlé dans la suite.

2 Georges Von Frundsberg, Freundsberg ou Frauensberg, seigneur de Mindelheim, de Petersberg et de Stertzingen, en Souabe. Jacq. Buonaparte, Sac de Rome, p. 191, 193. Du Bellay, liv. III, p. 415. Brantôme, t, 1, 96 et suiv.

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