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cheval se transformåt en une inflammation chronique de la muqueuse nasale; elle perdit son contagium spécifique et devint une rhinite pure et simple. Comme les saignées générales, les sangsues appliquées sur la membrane de Schneider, en un mot, tout l'appareil antiplogistique connu, n'avaient pour effet que de précipiter la terminaison fatale, on concéda que cette phlegmasie chronique pouvait dégénérer en phthisie nasale, expression plus sonore et moins répugnante que le terme vulgaire de morve et qui avait l'avantage, dans le sens du principe doctrinal, de maintenir intacte la localisation solidiste.

Les sectateurs de l'école physiologique se contentèrent de mots, mais ils n'étudièrent point les faits. Loin d'éclaircir le diagnostic de la morve à son début, leur logomachie n'a fait qu'embrouiller davantage la question, en la surchargeant de termes qui ne traduisent que des idées spéculatives.

On se méprendrait singulièrement sur notre pensée, si l'on croyait y voir une négation des affections catarrhales de la muqueuse du nez et d'autres maladies, n'appartenant point au catarrhe, et qui ont leur siége dans les cavités nasales; mais une sécrétion catarrhale dépend de causes variées et toutes ne peuvent être placées sur la même ligne. Dans la gourme, le jetage est abondant, il se produit encore et se circonscrit à un naseau, avec glandage, lorsque la carie d'une arrière molaire supérieure s'est transmise à la lamelle osseuse qui sépare l'alvéole du sinus maxillaire, et dans d'autres cas qu'il serait oiseux d'énumérer. Le point essentiel est que le catarrhe morveux doit son origine à une cause spécifique, distincte de tous les jetages avec lesquels il pourrait être confondu, que cette cause est objective, qu'elle tombe sous les sens. Le chancre morveux a sa physionomie propre, et une

ulcération avec une perte profonde de substance ne se produit pas sans être précédée de phénomènes locaux qui l'annoncent de près et souvent de loin.

Il y a une quarantaine d'années, le professeur Dupuy, nullement engoué de l'école physiologique, suivit les traces de Laennec; demandant les secrets de la morve à l'anatomie pathologique, il découvrit des dépôts tuberculeux dans la muqueuse nasale. Dupuy ne fit point d'application de sa découverte au diagnostic de la maladie chez l'animal vivant, il n'en tira parti que pour constater la réalité de l'existence de la morve après la mort. S'égarant sans cesse dans des spéculations systématiques, cet auteur aboutit à considérer le tubercule comme la cause prochaine d'un grand nombre de maladies chez les animaux domestiques. Cette idée préconçue lui valut une réputation de rêveur, et le public vétérinaire confondant le vrai avec le faux, oublia Dupuy et son tubercule.

Ce produit morbide n'en constitue pas moins un fait; il est le point de départ des phénomènes locaux, caractéristiques de la morve chronique. Les granulations tuberculeuses sont répandues dans le tissu cellulaire sous-muqueux à l'état de granulations discrètes ou agglomérées; elles ont un reflet blanc, nacré ou jaunâtre, suivant qu'elles sont isolées ou groupées; leur volume varie de celui d'une tête d'épingle au diamètre d'une lentille; elles soulèvent la muqueuse et se présentent sous forme d'élevures qui rendent la membrane inégale, raboteuse au toucher. Elles tombent donc sous les sens, puisqu'elles sont accessibles à la vue et au doigt explorateur. Afin de bien les voir, on place la tête du cheval morveux de manière à ce qu'un rayon de soleil tombe sur la cloison nasale; les points tuberculeux s'y présentent sous forme de taches opaques. Les dépôts tuberculeux n'ont pas pour siége

exclusif le septum du nez, ils sont aussi répandus dans la région supérieure des cavités nasales et sur les cornets.

Les tubercules et les chancres morveux ont une corrélation intime. Les dépôts peuvent persister plus ou moins longtemps à l'état que l'on a appelé de crudité; lorsqu'ils subissent la métamorphose caséeuse, ils se ramollissent, détruisent la muqueuse sus-jacente, entrainent ses débris et se mélangent à la matière du jetage. Le ramollissement ne se fait que successivement; sur la même muqueuse, on peut rencontrer des chancres cicatrisés, des chancres récents et des tubercules crus. Ces chancres à fond blanc sale, d'un aspect lardacé, à bords irrégulièrement découpés, se forment après la destruction de la muqueuse; ils correspondent toujours aux points où siégent des granules groupées. Les granulations miliaires discrètes subissent la même transformation, avec cette différence que la perte de substance est moins étendue et moins profonde; celle-ci se réduit à la lésion de continuité que l'on a appelée excoriation et que les anciens vétérinaires invoquaient pour caractériser le passage de la morve du premier au deuxième degré.

Le jelage ou le catarrhe morveux reconnait les dépôts tuberculeux pour cause. Irritant la muqueuse, il se forme à leur pourtour une hypérémie fournissant les matériaux de la supersécrétion, tandis que, parfois, une transsudation liquide. infiltre toute la muqueuse.

Nous résumant, nous posons comme conclusion à la première question, que le glandage et le jetage sont des symptômes de morve chronique, quand ils sont déterminés par des dépôts tuberculeux dans la muqueuse nasale soit d'un seul ou des deux côtés. Quelle que soit la période de la maladie, récente ou ancienne, dès qu'on les aperçoit, fut-ce à la pre

mière visite, leur présence autorise le sacrifice du malade, car l'on a la certitude de ne point commettre une erreur, attendu que le tubercule ne se lie à aucune autre affection des cavités nasales.

Le signe que nous indiquons peut laisser en défaut dans une circonstance qui n'est pas commune. Les cavités nasales du cheval ne sont accessibles qu'en partie à l'exploration; si les dépôts tuberculeux, au lieu d'être disséminés, occupent en totalité la région supérieure des cavités nasales, où le sens de la vue ne peut les atteindre, et que le doigt pénétrant plus avant que les yeux, ne sente pas les inégalités raboteuses de la membrane, alors seulement on n'a point de certitude, et il faut surseoir à l'abatage. Il reste cependant encore un moyen de lever le doute; il consiste à mettre cette région à découvert, en y appliquant une couronne de trépan.

Ce rapport sera discuté dans une prochaine séance.

6 SUITE de la discussion du rapport de la Commission chargée d'examiner la question soumise à l'Académie par le Gouvernement au sujet de la récidive de l'ophthalmie dite militaire. Propositions de M. VLEMINCKX

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relatives à celle question (1).

Avant d'aborder cette partie de l'ordre du jour, M. le Président rappelle que la discussion ouverte sur les propositions de M. Vleminckx a été close dans la dernière séance, mais que ce membre, qui s'était réservé aux termes de l'art. 74 du règlement, la faculté de résumer la discussion, entend, en invoquant une des phrases terminales de son dernier discours, qu'il doit lui être permis de répondre, dans le cours de son

(1) Voir Bulletin, tome II, deuxième série, page 259.

exposé, aux objections qui ont été présentées contre la doctrine qu'il défend. Si, ajoute M. le Président, cette pensée, que je dois soumettre à l'appréciation de l'Académie, venait à prévaloir, il s'ensuivrait que la discussion, dont la clôture a été prononcée, doit être rouverte, car il est de principe, que le résumé d'un débat n'est que l'exposé sommaire et succinct des opinions émises par ceux qui y ont pris part.

MM. Vleminckx, Crocq et Didot ayant été successivement entendus sur cet incident, M. le Président met aux voix la question de savoir si la Compagnie considère la discussion comme ayant été close ou si elle entend la rouvrir.

L'Assemblée se prononce pour la reprise de la discus

sion.

M. VIeminckx: Messieurs, avant d'entamer le fond de la question, j'ai besoin de déblayer le terrain de quelques matériaux inutiles qui m'ont paru l'encombrer. J'ai entendu résonner à plusieurs reprises à mes oreilles, à propos des arguments que l'honorable M. Thiry et moi, nous avons eu l'honneur de vous soumettre, ces mots étranges : « C'est de la théorie que cela!» Que partout ailleurs on tint un semblable langage, je le comprendrais à certains égards; mais qu'ici, au sein de votre Compagnie, on parle avec dédain de ce qui s'appelle théorie, qu'on vous sollicite à ne pas en faire et à la mépriser, c'est plus que de la légèreté, Messieurs, c'est presque de l'aberration. De la théorie ! mais l'honorable membre auquel je fais allusion, sait-il bien ce que c'est? En vérité, je me surprends à en douter. Sait-il que la théorie, c'est la loi des faits, la conclusion de l'expérience, la seconde partie de l'éternel et bel axiome: Bien observer et bien conclure? Assurément non. Que serait-il, que serions-nous, nous tous, tant que nous sommes, sans une connaissance plus ou moins parfaite

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