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DE MÉDECINE,

DE CHIRURGIE ET DE PHARMACOLOGIE,

PUBLIÉ

Par la Société des Sciences Médicales et Naturelles

DE BRUXELLES.

SOUS LA DIRECTION D'UN COMITÉ

COMPOSÉ DE

MM. DIEUDONNÉ, D.-M., Rédacteur principal, Vice-Président de la Société, Membre
du Conseil central de salubrité publique et du Conseil supérieur d'hygiène,
Secrétaire de la Commission de statistique du Brabant, Correspondant de l'A-
cadémie royale de médecine, etc.

CROCQ, D.-M., Secrétaire de la Société, membre de plusieurs sociétés savantes.
JOLY. D.-M., Chirurgien de l'hôpital Saint-Pierre, Médecin légiste du Tribunal
de Bruxelles, Membre du Conseil de salubrité, etc.

LEROY, Pharmacien, Collaborateur au Journal de Chimie médicale, de phar-
macie et de toxicologie de Paris, Membre de la Commission médicale de Bruxel-
les, du Conseil central de salubrité publique, etc.

RIEKEN, D.-M., Médecin de S. M. le Roi des Belges, Membre correspondant
de l'Académie royale de médecine de Belgique et de plusieurs Académies et
Sociétés savantes régnicoles et étrangères.

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DE

MÉDECINE.

(JUILLET 1853.)

I. - MÉMOIRES ET OBSERVATIONS.

MÉMOIRE SUR LES NÉVROSES FÉBRILES; par M. le docteur LIÉGEY, Membre correspondant, à Rambervillers (Vosges). (Suite. Voir notre tome XVI, p. 333.)

TUMÉFACTIONS RHUMATISMALES.

Je dirai tout d'abord que, pour moi, le gonflement rhumatismal, que j'ai si souvent observé depuis que règne notre constitution médicale, n'est autre chose qu'une expression ou plutôt qu'un effet névralgique. A-t-on lieu de s'étonner de cet effet d'une névrose, lorsqu'on en a vu tant d'autres?

Je commencerai ce chapitre par une observation relative à une jeune femme de notre ville, qui vient de me consulter (13 octobre dans la matinée). Avant de dire pour quels accidents elle me consulte aujourd'hui, je relaterai ce que je savais déjà sur son compte.

OBSERVATION 1re. Cette femme, âgée de 38 ans, d'un tempérament lymphatique nerveux, vivant dans l'aisance, d'une constitution délicate, régulièrement et de bonne heure menstruée, était, depuis sa première jeunesse, sujette éprouver des douleurs d'estomac (douleurs gastralgiques). Mariée il y a quinze ans, elle a eu six enfants, dont les deux derniers ont succombé à des pyrexies dans l'espace de trois ans ; l'un, le dernier, à une forme croupale il y a un an. Étant enceinte de cet enfant et dans les premiers temps de la grossesse, elle commença à éprouver une névralgie faciale qui, avec des variations dans l'intensité des douleurs, continua jusqu'au septième mois environ. Ces douleurs n'existaient jamais pendant le jour, débutaient au commencement de la nuit, mais non chaque nuit, et duraient, quelquefois très-supportables, il est vrai, jusqu'au matin. Aucun traitement ne fut fait, si ce n'est l'avulsion de deux dents, ce qui ne produisit qu'une suspension passagère de la névralgie. Mais une suspension moins passagère, sans être pourtant bien durable, avait lieu de temps en temps, lorsque les gencives se tuméfiaient, suppuraient du côté affecté, ou qu'il se développait des aphthes sur des points variables de la muqueuse buccale. L'effet de ces petites crises n'eût peut-être point été passager, si la malade avait pris quelques précautions; si, par exemple, elle s'était moins. exposée au froid et avait eu une habitation moins insalubre.

Vers le septième mois, les douleurs faciales cessèrent, mais pour être remplacées par des douleurs sciatiques plus vives, non continues sans être périodiques, siégeant dans le membre droit. Il y eut bientôt claudication. Bien que le genou n'offrit d'abord point de gonflement, il était plus douloureux que le reste du membre; les douleurs ne tardèrent même pas à s'y confiner entièrement. Il en était ainsi lors de ma première visite, au mois de mai 1850.

En outre de ce qui précède, j'appris que les douleurs continues offraient des exacerbations périodiques (type biquotidien). Je constatai au genou un gonflement datant de la veille, disait-on, gonflement qui, accompagné d'une extrême sensibilité au moindre mouvement, à la moindre pression, sans changement de couleur à la peau, tantôt fraiche, tantôt chaude et moite, offrait toute la physionomie du rhumatisme articulaire aigu. Je constatai aussi des signes d'embarras gastro-intestinal, une fréquence assez grande du pouls, dont le développement était médiocre.

Je ne fis rien appliquer loco dolenti qu'une feuille de coton ; je prescriviş le repos absolu, que la malade n'avait gardé précédemment que pendant les paroxysmes. Je fis prendre un éméto-cathartique, qui donna lieu à de nombreuses évacuations dont l'effet fut la transformation des rémittences en intermittences à peu près franches; car, pendant ces intermittences, il ne se produisait aucune douleur spontanée, et, chose remarquable, le gonflement diminuait.

On conçoit que je dus faire usage d'un antipériodique. Administré pendant trois jours à dose médiocre, le sulfate de quinine mit fin aux douleurs et le gonflement disparut, ainsi que les phénomènes fébriles, mais ce fut pour peu de temps.

En effet, en moins de douze heures, de nouvelles douleurs avec agitation febrile et un nouveau gonflement s'étaient produits; mais ce gonflement, qui acquit bientôt un développement considérable, s'accompagnait de rougeur, de chaleur locale continue, et le mouvement fébrile était également continu. Il était évident qu'un phlegmon se formait. Sept jours après le début du nouveau gonflement, la fluctuation y étant manifeste, surtout au-devant de la rotule, où la peau, amincie, faisait saillie, je fis une incision qui, séance tenante, donna issue à un bon demi-verre de pus bien lié. Pour hâter la collection purulente, j'avais fait appliquer un large vésicatoire volant sur la tuméfaction.

Après l'incision, il y eut un grand et prompt soulagement, ou plutôt la cessation à peu près complète des douleurs. Le foyer fournit encore, mais de moins en moins, du pus pendant quelques jours, puis la plaie se cicatrisa. Alors cette jeune femme, absolument exempte de douleurs et de fièvre, et dont le sommeil et l'appétit étaient revenus, n'avait plus qu'à recouvrer ses forces; ce qui ne tarda pas à être effectué sous l'influence d'une alimentation graduellement plus substantielle, substituée à la diète sévère.

Telle est la première partie de l'histoire de cette femme. En voici la seconde : Depuis la guérison de l'abcès, cette femme resta bien portante jusque vers le commencement de juillet dernier; du moins, pendant tout ce temps, elle n'éprouva autre chose que des douleurs légères, rares et fugaces au rachis,

à la tête ou dans les membres, et quelques douleurs gastralgiques également passagères. Mais le sixième jour après chacune des trois dernières époques menstruelles, dont la durée ne fut que de deux jours au lieu de quatre que duraient les précédentes, elle éprouva, chaque fois dans l'après-midi, des vertiges rapidement suivis d'une syncope passagère, faisant place à des douleurs gastralgiques assez vives, mais également passagères.

Le 7 octobre, vers cinq heures du soir, ces accidents, pour la première fois, furent précédés d'un frisson. Ils furent les mêmes le 9, vers le milieu du jour, et le 11, dans la matinée.

Le 15, l'accès qui, on le voit, se reproduisait sous le type tierce, fait défaut. Néanmoins, la malade me dit qu'elle ne se trouve guère mieux pour cela. Elle se sent affaiblie, sa bouche est mauvaise, son estomac embarrassé, l'appétit presque nul; elle éprouve de temps en temps des douleurs, soit à l'échine, soit le long du membre inférieur autrefois malade.

Ce que je constate est en harmonie avec ses plaintes. Elle a l'attitude d'une personne fatiguée; son visage amaigri, bien plus pâle que de coutume, offre une teinte jaunâtre, sa langue un enduit blanc sale; la peau est fraîche aux mains; le pouls bat environ 90 fois par minute et plus faiblement qu'à l'état normal; il existe de la constipation.

Je conseille à cette malade de prendre l'ipécacuanha à dose vomitive, des lavements légèrement laxatifs, de la limonade, de se mettre au lit et de le garder une grande partie de la journée, de ne prendre que de légers aliments, de se faire frictionner, avec de la flanelle, le tronc et les membres, de porter de la laine sur la peau, et je lui recommande d'observer, mais sans s'en inquiéter, les heures auxquelles des accidents pourraient survenir. Il est convenu que j'irai la voir dans deux jours.

Le 16, je vais en effet chez elle dans l'après-midi. Je la trouve au lit; elle vient d'avoir un accès plus léger que les autres, mais elle me dit que le 14, dans l'après-midi, et le 15, également dans l'après-midi et vers la même heure, un accès plus prononcé, consistant, comme le dernier, en violents battements du cœur précipités, précédés d'un tremblement, d'un sentiment de froid, a eu lieu. L'accès a donc changé de forme, puisque l'exaltation fonctionnelle du cœur, les convulsions de cet organe ont remplacé la diminution fonctionnelle, la forme syncopale. A tout moment elle bâille et elle m'apprend qu'il en a été ainsi après chacun des autres accès; que, depuis bien longtemps, même bien avant le premier accès, elle avait aussi des bâillements chaque matin, ce qui ne lui était pas habituel antérieurement. Elle m'avoue qu'elle n'a rien fait de ce que je lui ai conseillé; qu'au lieu de garder le lit, elle a continué à se livrer à quelques occupations du ménage; qu'elle a même eu l'imprudence, deux heures après m'avoir consulté, de manger de la pâtisserie, et que c'est un instant après cette imprudence que le premier des trois derniers accès a commencé. Je réitère la prescription d'un lavement laxatif et des autres moyens, à l'exception de l'ipécacuanha, parce que je crois préférable de commencer l'emploi des antipériodiques. En conséquence, la malade prendra ce soir 8 grammes de quinquina

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