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retraite après l'incendie de nos habitations retentissent des cris de leur désespoir; nous vous conjurons d'y mettre un terme. »

Plusieurs députés demandaient en même tems la parole pour appuyer la pétition des habitans de Bedouin Goupilleau ( de Montaigu,) monte à la tribune. Envoyé dans le département de Vaucluse depuis la journée du 9 thermidor, il avait vu de ses propres yeux une partie des horreurs dont se plaignaient les victimes infortunées des anarchistes. Il avait lu, sur des poteaux placés autour des maisons que Maignet avait condamnées aux flammes, des affiches qui défendaient d'approcher de ces décombres sous peine de mort. Il savait que non - seulement les manufactures de Bedouin avaient été brûlées, mais qu'on avait jeté dans les flammes soixante milliers de soie ouvrée ou non ouvrée; que des barils de poudre avaient été apportés, pour faire sauter une église neuve respectée par l'incendie ; que des bâtimens nationaux, remplis de grains et de farines, n'avaient pas même été ménagés. Il racontait un fait encore plus horrible.

Une fille de dix-huit ans, nommée Anne Saumont, se transporte chez le député Maignet, pour réclamer la liberté de son père. D'où es-tu, lui demande le barbare? De Bedouin, répond la jeune fille. Aussitôt elle est

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arrêtée; et, le lendemain, elle monte à l'é1794. chafaud avec toute sa famille. Goupilleau ajoutait qu'auprès d'Orange, il avait fait combler une fosse remplie de cadavres, et six autres destinées à recevoir douze mille victimes, auxquelles le 9 thermidor sauva la vie. On avait déjà fait venir quatre milliers de chaux pour les consumer. D'autres députés fournissaient de nouveaux traits de barbarie commis par la commission populaire d'Orange. Elle avait fait guillotiner une femme de quatre-vingtdix ans, sourde, muette et aveugle, et un grand nombre d'enfans au-dessous de seize

ans.

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CHAPITRE IX.

Rappel dans la convention des soixante-treize députés emprisonnés par Robespierre..

ON

N savait que tout détruire, pour tout asservir, était le système des anarchistes ; mais jamais on n'avait articulé à la tribune autant de preuves multipliées de leur profonde scélératesse. L'impression faite par ce tableau, se lisait dans tous les yeux et sur la contenance de tous les spectateurs. On avait vu, dans d'autres circonstances, les montagnards

couvrir

par des vociférations éclatantes la voix de leurs accusateurs; mais alors l'évidence de AN 3. leurs crimes, ou plutôt l'embarras dans lequel se trouvaient plusieurs de leurs chefs spécialement inculpés, les réduisait au silence. Les efforts de la montagne se réunissaient pour sauver Barrère, Voulant, Collot, Billaud, Amard, Vadier, David, et les autres membres des comités de gouvernement attaqués par Lecointre, et dont le supplice aurait entraîné la destruction complette du parti robespierrien.

Dans cette perplexité, tandis que d'une part les montagnards cherchaient à atténuer peu-àpeu l'horreur qu'inspiraient leurs collègues, ils affectaient de l'autre une fausse modération pour abuser de la bonne foi de leurs antagonistes.

Les républicains en profitèrent pour faire décréter qu'il serait donné aux habitans de Bedouin les secours nécessaires pour réédifier leurs maisons, rétablir leurs manufactures, et que leurs persécuteurs seraient poursuivis devant les tribunaux. Profitant de leurs avantages, un décret fut rendu le 18 frimaire qui rappelait dans le sein du corps législatif les soixante-treize députés incarcérés l'année précédente, pour avoir signé, après la journée du 2 juin, une protestation dont j'ai déjà parlé, et que je crois devoir insérer, parce

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qu'elle peint l'état où se trouvait la convention, 1794 et qu'elle est peu connue.

« Les représentans du peuple français soussignés, considérant qu'au milieu des événemens qui provoquent l'indignation de la république entière, ils ne peuvent garder le silence sur les attentats commís envers la réprésentation nationale, sans s'accuser euxmêmes d'une honteuse faiblesse ou d'une complicité encore plus criminelle;

» Considérant que les mêmes conspirateurs qui, depuis l'époque où la république a été proclamée, n'ont cessé d'attaquer la représentation nationale, viennent enfin de consommer leurs forfaits, en violant la majesté du peuple dans la personne de ses représentans, en dispersant, en enchaînant quelques - uns d'entreux, et en courbant les autres sous le joug de la plus audacieuse tyrannie;

:

>> Considérant que les chefs de cette faction, enhardis par une longue impunité, forts de leur audace et du nombre de leurs complices, se sont emparés de toutes les branches de la puissance exécutive, des trésors, des moyens de défense et des ressources de la nation, dont ils disposent à leur gré et qu'ils tournent contre elle;

Qu'ils ont à leurs ordres les chefs de la force armée et les autorités constituées de Paris, que la majorité des habitans de cette

ville, intimidée par les excès d'uné faction que la loi ne peut atteindre, effrayée par les As 3. proscriptions dont elle est menacée sans cesse, non-seulement ne peut pas réprimer les ma nœuvres des conspirateurs, mais que, souvent même par respect pour la loi, qui commande l'obéissance aux autorités constituées, elle se voit forcée de concourir en quelque sorte à l'exécution de leurs complots;

» Considérant que telle est l'oppression sous laquelle gémit la convention nationale, qu'aucun de ses décrets ne peut être exécuté, s'il n'est approuvé ou dicté par les chefs de cette faction; que les conspirateurs se sont constitués les seuls organes de la volonté générale, et qu'ils ont rendu le reste de la représentation nationale, les instrumens passifs de leur volonté ;

>> Considérant que la convention nationale après avoir été forcée d'investir d'une autorité illimitée les commissaires qu'elle a envoyés dans les départemens et aux armées, et que cette faction a exclusivement désignés, n'a pú réprimer les actes arbitraires qu'ils se sont permis, ni même formellement improuver les maximes incendiaires et désorganisatrices que la plupart d'entr'eux ont propagées;

>>Considérant que non-seulement la convention nationale n'a pu faire poursuivre ni les dilapidateurs de la fortune publique, ni les

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