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mais vous avez tout au moins fait preuve d'une faiblesse extrême. Ce n'est pas dans vos AN 3. mains que doit être remis le timon de l'Etat. Au milieu de tant d'orages menaçans, il a besoin de pilotes habiles et courageux.

>> La constitution, faite par vous-mêmes, veut qu'un corps législatif vous succède; elle n'a pas exprimé que certains d'entre vous entreraient dans la formation de ce corps. Nous ne prétendons pas vous en exclure, nous réclamons seulement une liberté entière, lorsque les nouveaux législateurs seront élus. Nous voulons que les électeurs puissent vous nommer, mais qu'ils n'y soient pas contraints. Feriez-vous à la nation l'injure de croire que vous seuls êtes en état de la représenter? Il devrait vous suffire peut-être que nous vous ayons témoigné combien votre décret du cinq fructidor, amalgamé par vous à la constitution, nous paraît tyrannique, pour que vous abandonniez le projet de nous représenter malgré

nous.

» Mais enfin, vous regardez vos fonctions comme instituées ou pour votre profit, ou pour celui de la nation. Si c'est pour votre profit, de quel front osez-vous nous parler de liberté ? Si c'est pour le nôtre, n'êtes-vous pas coupables de nous ravir le droit d'en disposer? Répondez à ce dilemme : ou vos fonctions sont un bénéfice, ou elles sont une charge;

si elles sont un bénéfice, chacun doit en jouir

1795. à son tour; place à d'autres: si elles sont une charge, chacun doit la porter successivement. Nous serions injustes, si nous ne rejetions pas le sacrifice même volontaire de vos droits à un remplacement.

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Le parti jacobin de la convention, réuni à celui du ventre, ne pouvait guères répondre à ces argumens par de bonnes raisons; on résolut d'employer le secours des armes.

On avait vu, dit à ce sujet l'auteur du livre intitulé Les Crimes de la Révolution, le machiavélisme des comités exciter sous main, aux époques de prairial, les émeutes des sansculottes, pour avoir occasion de les comprimer. La niême astuce meurtrière mettait peutêtre en œuvre tous les provocateurs de l'ancien régime qui appuyaient adroitement les réclamations d'une partie des Parisiens, contre les principes violés par les décrets des 5 et 13 fructidor, et tous ces meneurs eurent l'adresse d'échapper à l'explosion de vendémiaire.

S'il n'est pas clairement démontré que les agitateurs marchaient d'accord avec les comités conventionnels, pour opérer un mouvement, il est certain, du moins, que ceuxci le desiraient avec ardeur. Voici le résultat d'un entretien qu'un particulier eut avec le député Greg. place du Carrousel, à dix heures' du soir, le 12 vendémiaire. Il observait à Greg.

que la convention était dans la position où s'était trouvé le roi au 10 août, et que si la masse des Parisiens tentait de détruire la convention, elle réussirait. Oui, reprit le député ; mais au 10 août, les sections des faubourgs se dé clarèrent contre le roi ; d'ailleurs, les choses auraient tourné différemment, si la cour eût fait tirer quelques coups de canons sur la multitude par les guichets du Louvre, et braquer l'artillerie sur toutes les issues, ce que nous ferons aujourd'hui. Les sections des faubourgs pensent différemment que les sections de la ville. Le particulier répondit : Vous avez raison, jamais une insurrection ne réussira par des hommes bien frisés, bien poudrés et en bas de soie blancs.

Je ne garantis pas cette anecdote ; mais un mois avant les événemens de vendémiaire > un député me tint à-peu-près les mêmes propos. Il savait qu'il y aurait une insurrection, qu'elle serait comprimée de manière que le plus grand nombre des conventionnels resterait dans le nouveau corps législatif, et que ceux qui s'opposeraient à cette mesure, seraient traités de royalistes et d'ennemist publics.

AN 3.

1795.

CHAPITRE XXIII.

Ouverture des assemblées primaires pour le renouvellement du corps législatif.

Dès le 20 fructidor, où s'ouvrirent les assemblées primaires, on pouvait prévoir que Paris serait le théâtre d'un orage politique; d'un côté, les suppôts du régime de la terreur désarmés ou incarcérés par les sections, d'après les ordres formels de la convention nationale, rendus à la liberté et prenant hautement le titre de patriotes persécutés, voulaient souffler, dans les assemblées sectionales, leurs fureurs anarchiques; de l'autre, des hommes presque inconnus, poussaient les sections à des mesures inconsidérées.

Ce fut avec ces mots si puissans, sur la multitude, de souveraineté du peuple, de danger de la patrie, d'usurpation, de tyrannie, de résistance à l'oppression, que les esprits étaient échauffés. Par un concert trop extraordinaire et trop uniforme, pour n'avoir pas été préparé, on vit les mêmes propositions faites et adoptées, au même instant, presque dans toutes les sections; la garantie de la liberté des opinions; une confédération

de sauve-garde et de secours non-seulement pour tous ceux qui parleraient dans l'assem- Ax 3. blée, mais pour tous les orateurs des autres assemblées primaires, soit de Paris, soit de la France entière; la communication avec les armées et les départemens, la déclaration de la permanence sectionale; la défense aux comités civils et aux commandans de bataillon d'exécuter aucun ordre sans en avoir référé à l'assemblée primaire ; les reproches les plus sanglans faits à la représentation nationale.

L'objet de cette ligue offensive et défensive ne regardait pas la constitution; les assemblées l'adoptaient avec nn concert unanime; son unique but était de discuter, avec une entière indépendance, le décret de réélection. Le but des royalistes, en chassant les membres de la convention, pouvait être de les remplacer par des hommes attachés à l'ancien régime; mais, comme j'ai déjà dit, leur arrière-pensée se cachait avec art sous le voile du bien public; ils poussaient le peuple à une insurrection, persuadés que l'épée une fois hors du fourreau, il serait facile de pousser où l'on voudrait une multitude égarée.

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