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vait prévoir que la ville de Paris serait aisé1795. ment subjuguée.

La victoire de la convention sur les sansculottes, qui la harcelaient depuis long-tems, fut complette. Un décret autorisa les sections de Paris à prononcer le désarmement ou l'incarcération de tous les agens de la terreur, domiciliés dans leurs arrondissemens. C'était encore un ferment de discorde qui devait agiter les Parisiens. La joie de satisfaire des haines particulières s'exerça librement pendant huit jours. La vengeance aveugle frappait indistinctement avec les atroces buveurs de sang, une foule d'amis purs de la liberté et de patriotes dignes de ce nom. Les mêmes actes arbitraires s'exerçaient dans les départemens. L'opinion publique, désormais affranchie de toute contrainte, ne se déchaînait point contre cette foule d'instrumens serviles du gouvernement révolutionnaire sans attacher une juste et publique indignation aux inventeurs et aux soutiens de cet exécrable gouvernement.

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Non seulement la convention entière paraissait épouvantée de voir ses anciens protégés à la discrétion de leurs ennemis; mais ses membres n'envisageaient pas sans inquié tude le sort dont on les menaçait lorsqu'ils rentreraient dans la vie privée : ce sentiment aug. mentait en eux le desir de se perpétuer dans leur magistrature.

AN 3.

CHAPITRE XX.

Les émigrés d'Allemagne fondèrent quelque ́espoir sur le mouvement du 1. prairial.

Le bizarre espoir que, pour le succès de leurs projets contre-révolutionnaires, fondaient sur le renouvellement du corps législatif les émigrés, tant ceux qui étaient rentrés en France depuis le 22 germinal, que leurs associés en Allemagne et en Italie, corncidait avec les prétentions des conventionnels, en persuadant aux hommes les mieux intentionnés, que la liberté allait courir les plus extrêmes dangers, si toute la représentation nationale se trouvait renouvelée à la fois. On voyait dans le corps législatif des hommes ulcérés par le souvenir du régime révolutionnaire, portant dans le sénat des opinions peut-être subversives du gouvernement républicain...

Il circulait dans Paris une lettre datée de Ulm, le 20 prairial, ne laissant aucun doute que les derniers mouvemens de Paris n'eussent été, en grande partie, l'ouvrage de l'Angleterre, de l'Autriche et des émigrés : ces derniers paraissaient tellement surs de leurs succès, qu'ils triomphaient d'avance.

« Voilà le moment de notre gloire, disait-on 1795. dans cette lettre : dans quinze jours nous sommes maîtres de Paris et de la France entière; l'armée autrichienne est prête; des préparatifs immenses sont faits, depuis Loerach jusqu'à Coblentz et dans Mayence. » Le Rhin devait être passé en plusieurs endroits, pour attaquer les Français. On attendait le signal de la grande opération; c'était un courrier qui devait arriver de Bâle, et apporter la nouvelle que le grand coup était frappé à Paris.

Quels furent les agens de ces intelligences? faut-il les chercher parmi les ouvriers du faubourg Saint-Antoine ? Assurément ces hommes n'envoyaient aucun courrier en Allemagne; leur insurrection avait donc des moteurs secrets, dont ils n'avaient peut-être pas euxmêmes connaissance ? Le courrier attendu arriva au quartier-général du comte de Clairfayt, dans la nuit du 10 au 11 prairial; mais il apportait la fâcheuse nouvelle que l'insurrection n'avait eu aucun succès. Aussitôt les différens corps, rapprochés du Rhin, reçurent des contre - ordres, mais dans tous les autres points qui environnent la France, l'impulsion donnée produisait son effet; elle influait sur les réactions du Midi, sur les efforts faits par les princes italiens pour pénétrer en France, et sur-tout sur les mouvemens des vendéens et des chouans ; ils reprirent bientôt les armes.

CHAPITRE X X I.

Nouveau complot formé par les émigrés.

POUR tirer de ces efforts partiels tout le
parti possible, les émigrés imaginèrent un
nouveau plan dont voici la substance : l'em-
pereur devait fournir onze millions de flo-
rins, les canons et les munitions nécessaires.
Au moyen de ces secours, les émigrés seuls
se chargeaient de pénétrer en France. Un ordre
de la cour de Vienne devait forcer tous les
individus sortis de France depuis la révolu-
tion, quelles que fussent les causes de leur
émigration, de se rendre à l'armée de Condé,
dans un tems déterminé, sous peine de ne
trouver asyle nulle part; les deux frères de
Louis XVI étaient compris dans la loi géné-
rale. On statuait que, sous l'autorité de l'em-
pereur,
les mouvemens de l'armée étaient
dirigés par un conseil d'émigrés, présidé par
le prince de Condé, proclamé régent de
France, si les deux frères de Louis XVI ne
se rendaient pas à l'armée.

Le projet des émigrés était de forcer le territoire de Suisse, près de Bâle, de s'emparer de Befort dans le Sundgaw, et de s'établir dans

AN 3

le cœur de la Franche-Comté, tandis que l'ar1795. mée impériale ferait sur le Rhin les mouvemens nécessaires pour occuper les armées de la république, et les empêcher de se porter vers la Suisse et la Franche-Comté.

Aussitôt que le prince de Condé aurait forcé le territoire helvétique, l'armée autrichienne devait passer le Rhin et pénétrer en Alsace et en Lorraine, pendant que les émigrés rentrés colporteraient, dans l'intérieur de la république, des proclamations royales, dans lesquelles, en protestant contre les abus de l'ancien régime, on déclarerait que le but de l'armée royale était de rétablir la constitution de 1791; que les acquéreurs de biens nationaux tant domaines de la couronne que biens du clergé et des émigrés, ne seraient point troùblés dans leur jouissance, pourvu qu'ils eussent réellement payé le prix de leur acquisition, et qu'on observerait religieusement ce que l'ordre et la tranquillité publique pouvaient exiger. Tous les ennemis du nouveau régime devaient se réunir pour faire envisager au peuple ces conditions comme beaucoup plus avantageuses qu'on ne pouvait l'attendre, au milieu de la pénurie universellement éprouvée.

Les émigrés se flattaient que cette perspec tive, attirant sous leurs drapeaux la foule des individus ayant à se plaindre du gouvernement révolutionnaire, les mettrait bientôt

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