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Il est donc permis de présumer que cette grave complication était le résultat de l'ulcération, de l'usure des parois vaginales déterminée par la pression longtemps continuée d'un corps dur que l'on n'avait pas eu le soin d'ôter à de courts intervalles, ainsi que j'en avais fait la recommandation formelle.

Quoi qu'il en soit, il fallait, sans tarder, procéder à son extraction. La malade souffrait extrêmement et ne pouvait se permettre aucun mouvement, quelque léger qu'il fût, sans éprouver dans la vessie des douleurs intolérables.

Désirant prévenir l'incurabilité d'une fistule urinaire qui était la conséquence inévitable de l'agrandissement de l'ouverture à travers laquelle le corps étranger s'était glissé dans la vessie, je m'ingéniai d'abord à trouver le moyen de briser la cuvette et de retirer ses débris par le canal de l'urèthre.

Malheureusement elle était en ivoire, substance tenace, qui résiste à l'action de tous les instruments inventés pour le broiement de la pierre.

Force fut donc d'avoir recours à l'instrument tranchant et de procéder à l'extraction du pessaire en élargissant l'ouverture par laquelle il avait pénétré dans le réservoir des urines, et qui s'était resserrée sur la tige qui supportait la

cuvette.

L'opération fut tentée avec l'assistance de M. le docteur Vanhuevel, médecin en chef de l'hospice de la Maternité, le 5 mai 1847.

Mais il fallut bientôt y renoncer. Les moindres mouvements communiqués au pessaire provoquaient des douleurs atroces, probablement par l'effet du frottement sur les parois de la vessie des incrustations dont la cuvette était hérissée. Nous résolûmes donc d'avoir recours à l'éthérisation.

Le 8 du même mois, la malade fut soumise aux vapeurs de l'éther. Il en résulta d'abord une exaltation extrême, mais des plus gaies, et qui s'exhalait en propos pleins d'allégresse et en éclats de rire immodérés.

Cependant, au bout de quelques minutes, cette explosion d'hilarité cessa brusquement, pour faire place à un état d'insensibilité complète.

Je glissai alors un bistouri boutonné, courbe sur le tranchant, le long de la tige de l'instrument, en me guidant au moyen du doigt indicateur de la main gauche, et, parvenu dans la vessie, j'agrandis, d'environ un pouce et demi, l'ouverture de la paroi vagino-vésicale.

L'extraction du corps étranger se fit alors avec facilité,

Le reste du traitement offrit peu d'intérêt, sauf cette circonstance que nous fimes quelques essais en vue d'éviter la fistule urinaire, qui devait être la conséquence naturelle de cette opération.

Ainsi une sonde fut maintenue pendant plusieurs jours dans l'urèthre, mais le tout en vain,

La malade a continué à perdre les urines par cette voie anormale.

Je déclinai franchement aux parents mon impuissance à guérir cette infirmité, en les engageant à s'adresser à d'autres praticiens, qui n'éprouveraient peut-être pas, comme moi, le découragement où me jetait la certitude intime que toutes les tentatives faites à cette fin seraient complétement inutiles.

Un accident de cette nature est fort rare; pour ma part, mon érudition, trop

bornée sans doute, ne rappelle à ma mémoire aucun exemple d'un pessaire de cette espèce, fourvoyé dans la vessie et extrait au moyen d'une opération chirurgicale.

Si un cas semblable se représentait, que faudrait-il faire pour éviter la fistule urinaire, ou plutôt pour ne pas confondre en un même cloaqué la vessie et le vagin, effet inévitable de la division de la paroi vagino-vésicale ?

Briser dans l'intérieur de la vessie, par les voies naturelles, un morceau d'ivoire, il n'y faut pas songer.

Mais ne pourrait-on pas séparer la tige de la cuvette et extraire ensuite celleci au moyen de la taille sus-pubienne? Les dangers de cette opération peuventils être encourus dans l'espoir d'amoindrir chez une jeune fille le malheur d'une infirmité si dégoûtante? Ou bien cette cuvette d'ivoire pourrait-elle être isolée dans l'intérieur de la poche et soumise à l'action d'agents chimiques qui la réduiraient à l'état de gélatine, ainsi que cela a été proposé dans l'espoir de dissoudre les pierres dans la vessie?

Voilà toutes questions aussi importantes que difficiles à résoudre, et qui engageront peut-être un jour quelque médecin plus habile à rechercher une voie nouvelle dans cette partie de la médecine urinaire, progrès qui rendrait à l'humanité un très-grand service, surtout en Belgique, où les pessaires à tige sont en grande vogue, malgré des accidents graves que ma position m'a permis de constater plusieurs fois et dont celui qui vient d'être narré n'est pas le moins déplorable par les tristes conséquences dont il a été suivi.

DE L'EMPLOI DU TANNIN DANS UN CAS D'ALBUMINURIE COÏNCIDANT AVEC UNE HYPER

TROPHIE DU COEUR; observation recueillie par M. HENRI VAN HOLSBEEK, interne de M. A. UYTTERHOEVEN, chirurgien en chef de l'hôpital Saint-Jean.

Le 6 décembre 1853, Declerck, Marie, âgée de 41 ans, lymphatique, cuisinière, entra à l'hôpital. Elle fait remonter l'origine de sa maladie à deux mois, époque à laquelle les menstrues ont cessé de fluer.

Les symptômes observés sont les suivants : la peau est d'un blanc mat, rénittente, se laissant déprimer par une pression forte; elle est douloureuse au toucher, et la dépression produite disparaît promptement. Céphalalgie, insomnie, syncope, palpitations du cœur, accablement extrême, dyspnée très-grande, toux, expectoration de crachats blancs, muqueux, peu abondants; douleurs dans différents points du thorax, surtout à sa base et à la région précordiale. Dilatation de la poitrine moins sensible à l'application de la main; les battements du cœur sont plus forts, la matité précordiale plus étendue que dans l'état normal, les bruits du cœur plus sonores. On observe, de plus, de la matité à la base du thorax à droite et à gauche, l'absence du bruit respiratoire à la base des deux poumons, du souffle broncho-hydrique et une légère égophonie à droite.

Lèvres pâles, décolorées; bouche mauvaise; haleine fétide; langue décolorée

à sa pointe et à ses limbes, couverte d'un enduit blanc jaunâtre à sa base; soif, anorexie, pesanteur épigastrique, coliques légères, selles plus abondantes qu'à l'ordinaire.

Chaleur générale diminuée; pouls petit, fréquent.

Urines peu abondantes, pâles, à peine odorantes, précipitant abondamment de l'albumine quand on les traite par l'acide nitrique.

On prescrit les diurétiques.

Tous les symptômes vont en s'aggravant, et il y a imminence d'une fin prochaine.

Sachant que le tannin jouit d'une action spécifique et arrête les hémorrhagies des divers tissus, nous pensâmes qu'il pourrait bien prévenir le passage de l'albumine du sang par les reins; que, de plus, par la propriété qu'il a de diminuer la force et la fréquence des contractions du cœur, il conviendrait dans le traitement de l'hypertrophie de cet organe, nous nous décidâmes à tenter son administration.

Le 14 décembre, la malade prend vingt grains de tannin dans une potion. Pour activer l'évacuation du liquide épanché, on prescrit le régime lacté et des frictions répétées deux fois dans le jour avec :

Infusi artemisia absinthii,

Tinct. laur. camphoræ,
Alcohol 30°,

La potion est bien supportée.

#j.
Zj.

3ij.

La dose de tannin est augmentée tous les jours de cinq grains.

Le 30 décembre, la malade prend quarante grains de tannin. Amélioration notable respiration facile, appétit, selles régulières, urines plus abondantes, moins albumineuses; anasarque sur le point de disparaître.

Le 5 janvier 1854, la malade prend un gros de tannin. Le moment paraît convenable pour prescrire un régime tonique et l'usage des pilules suivantes : Pulv. scillæ, zij.

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Le 1er février, la malade entre en pleine convalescence. L'anasarque a complétement disparu; les urines ne contiennent plus qu'une très-faible quantité d'albumine.

Le 15, la malade se dit guérie et demande son exeat.

Les urines sont en quantité normale, bien qu'elles soient encore un peu pâles et faiblement odorantes; traitées par l'acide nitrique elles ne donnent plus de précipité ce qui porte à croire qu'elles ne contiennent plus d'albumine.

Les symptômes de l'affection organique du cœur sont en partie dissipés.
Cette observation nous a paru intéressante au point de vue de la thérapeutique

d'une maladie contre laquelle échouent la plupart des médications. Nous ne voulons pas, de ce fait unique, tirer des conclusions générales; notre but sera atteint si, en attirant l'attention des praticiens sur une médication nouvelle, nous les décidons à l'expérimenter de leur côté.

GRENOUILLETTE OPÉRÉE PAR L'INCISION AVEC AUTOPLASTIE; Observation recueillie dans le service de M. A. UYTTERHOEVEN, chirurgien en chef de l'hôpital SaintJean, par M. Henri Van HolsBEEK, élève interne.

Il importe fort peu aux chirurgiens de savoir ce qui a valu à cette maladie une pareille dénomination, si c'est une certaine ressemblance de cette tumeur avec le goître aérien de la grenouille, ou quelque analogie entre le croassemen de ce batracien et la prononciation altérée du malade.

La grenouillette est une maladie assez importante, et bien qu'elle ne soit pas généralement dangereuse au dire de Boyer, elle est assez gênante pour les malades pour qu'ils demandent à en être débarrassés. Quoique les anciens n'aient que très-imparfaitement connu la nature de ce mal; que les uns en aient fait une tumeur enkystée avec Celse et Ambroise Paré; que d'autres, avec Aétius, l'aient rapporté à la dilatation variqueuse des veines sub-linguales, ou au cancer avec Aboul' Kasem, ou l'aient considéré avec Paracelse comme un aposthème des vaisseaux de la langue, comme un abcès ordinaire avec Aranzi, ils n'en ont pas moins essayé de le guérir par tous les moyens qu'on met encore tous les jours en usage. Munnicks et, après lui, Lafaye et Louis attribuaient la grenouillette à une dilatation, soit du conduit de Warthon lui-même, soit des conduits excréteurs de la glande sous-maxillaire qui viennent s'y rendre, ou enfin de ceux de la glande sub-linguale. Sabatier, tout en admettant l'opinion émise par Louis, localise la tumeur dans un des conduits de Warthon, et, d'après lui, la dilatation serait causée par une accumulation de salive.

Pour Dupuytren et Breschet, la grenouillette n'était autre chose qu'un kyste séreux pouvant se développer dans ce point comme ailleurs.

M. Nélaton et quelques chirurgiens modernes sont venus à leur tour expliquer la formation de la grenouillette. D'après eux, il y aurait d'abord dilatation du conduit de Warthon, puis rupture de ce conduit, extravasation de la salive. et formation d'un kyste accidentel.

Ces détails historiques nous ont paru mériter l'attention des lecteurs, par la raison qu'ils nous rappellent que la nature de cette affection est encore obscure. Observation. Blemaer, Céline, 33 ans, ménagère, lymphatique, bonne constitution, bien réglée, n'ayant jamais été malade, se présente, le 26 mars 1854, à notre consultation gratuite.

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Il y a cinq semaines, la malade aperçut au-dessous de la langue et sur les côtés du frein, une petite tumeur. Elle n'y prêta pas, les premiers jours, une bien grande attention; mais la tumeur acquit bientôt un si grand volume, qu'elle conçut des inquiétudes fort sérieuses.

M. Uytterhoeven examine la malade en présence de MM. Henriette, Testelin, Bougard, Koepl et plusieurs élèves.

La tumeur a la grosseur d'un œuf de poule; elle est oblongue, lisse, dépres sible, rénittente et élastique, blanchâtre et légèrement transparente. Les mouvements de la langue sont embarrassés, la parole modifiée, la déglutition difficile et la respiration même un peu gênée.

M. Uytterhoeven, après avoir considéré que le but à atteindre n'est pas seu lement de vider la tumeur et de faire cesser les incommodités qu'elle cause, mais d'empêcher qu'elle ne se forme de nouveau, expose succinctement les différents moyens mis en usage par les chirurgiens anciens et modernes pour arriver à ce résultat.

Après avoir pris en considération les conseils des médecins présents à la consultation, il se décida pour l'incision avec autoplastie, procédéde M. Jobert de Lamballe.

La malade est assise sur une chaise, la tête appuyée contre la poitrine d'un aide. M. Uytterhoeven détache la muqueuse qui tapisse la face externe du kyste, et passe de chaque côté des points de suture, comprenant la muqueuse de la bouche et la membrane interne de la tumeur. Il incise ensuite dans l'intervalle des points de suture, et noue les fils qu'il a passés, de manière à renverser de dedans en dehors la membrane interne du kyste, qui vient en quelque sorte border les lèvres de la plaie, et à lui faire contracter des adhérences avec la portion de la muqueuse buccale restante.

La malade revient le lendemain à la consultation. État de la plaie très-satisfaisant; aucune altération de la santé générale.

Le 1er avril, les fils sont tombés, et le 5 du même mois, la cicatrisation est parfaite.

Cette observation nous paraît mériter l'attention des praticiens à cause du procédé opératoire qui a été mis en usage.

II. REVUE ANALYTIQUE ET CRITIQUE.

Médecine et Chirurgie.

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CATHARTINE (Principe Actif du nerprun, SON EMPLOI COMME PURGATIF). La catharfine, sur laquelle M. Strohl vient de faire quelques expériences, n'est pas, comme on pourrait le croire, le principe actif du séné, mais bien le principe actif du nerprun, auquel, par conséquent, il eût été à désirer qu'il eût conservé le nom de rhamno-cathartine, qui lui avait été donné par M. Winckler. La cathartine qui a été isolée par M. Hepp, pharmacien en chef de l'hôpital de Strasbourg, est une substance légèrement jaunâtre, d'une saveur

amère, ayant une apparence de cristallisation, soluble dans l'eau et l'alcool faible, insoluble dans l'alcool absolu et l'éther, et contenue dans le marc beaucoup plus que dans le suc. Expérimentée chez les enfants par M. Wieger, elle a donné, à la dose de 9 centigr., plusieurs selles dans trois cas sur cinq; à la dose de 10 centigr., en moyenne deux selles dans trois cas sur quatre; à la dose de 15 centigr., en une fois, huit à neuf selles copieuses après un temps assez long, et après la même dose, donnée en trois fois, dix selles quatre

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