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jours, si le remède était toléré, puis, quelque temps après, à 20 centigrammes. Le malade, après l'emploi de ces préparations, me promit de me donner de ses nouvelles, peut-être même de venir à Paris.

Le motif qui me détermina à la prescription qui précède, dérive d'un fait que j'ai observé il y a quelques années.

Mlle Lacroix, âgée de vingt-trois ans, se présenta, en février 1849, à mes consultations cliniques. Elle était atteinte, aux deux yeux, de blépharite ciliaire. De plus, les cornées étant le siége d'opacités nombreuses, de points crétacés d'un blanc mat, les uns isolés, les autres formés en groupe, leur ensemble apportait à l'exercice de la vision une atteinte grave. Comme le centre des cornées était surtout envahi, les pupilles s'étaient dilatées, afin de permettre aux rayons lumineux d'arriver plus abondamment au fond des globes. Je diagnostiquai des taches métalliques. Ma conviction fut entière quand j'appris que, dans le cours d'une kératite, dont Mile Lacroix avait été affectée, il y avait quelques mois, à Charleville, les yeux avaient été fréquemment bassinés avec une solution d'extrait de Saturne. Remettant à une époque ultérieure les tentatives nécessaires pour l'ablation des collections saturnines, je résolus d'attaquer en premier lieu la blépharite. Je preserivis des frictions, tous les soirs, sur les bords palpébraux, avec une pommade dans laquelle je fis entrer 20 centigrammes de précipité rouge de mercure, pour 6 grammes d'axonge. Comme cette préparation avait été bien supportée, je lui substituai, huit jours après, une pommade plus énergique : 75 centigrammes d'oxyde rouge, 15 centigrammes de tuthie préparée, 15 centigrammes de camphre, 6 grammes de beurre et une goutte d'huile de rose. Mlle Lacroix ne reparut plus à la consultation Dix mois après, à la fin de 1849, je la vis figurer de nouveau, un jour, au nombre des malades présents dans la salle d'attente du dispensaire. J'annonçai aux médecins qui assistaient à la clinique que j'allais leur montrer un fort bel exemple de dépôts métalliques à la cornée; je leur fis part des principales dispositions qu'ils offraient. Quel fut mon étonnement quand rien de ce que j'avais constaté les premières fois n'existait plus! Les taches d'un blanc mat avaient disparu; quelques néphélions subsistaient seuls; la vue avait éprouvé une amélioration très-grande. Dans l'espèce, il faut admettre que les corps étrangers étaient assez superficiellement placés pour que le larmoiement abondant que provo

qua la pommade en eût opéré le déchatonnement. On doit tenir compte aussi du mouvement que fit naître ce même agent dans les amas lymphatiques épanchés dans les cornées; car l'expérience démontre que les pommades à l'oxyde rouge de mercure sont l'un des meilleurs moyens qu'on puisse employer pour la résolution des taies. Ne faut-il pas invoquer, enfin, un phénomène noté par Sommering, par Winslow, par Wenzel, par mon savant maître le professeur Rosas (de Vienne), que la cornée laisse transsuder à travers sa substance une rosée émanant de l'humeur aqueuse et qui vient se mêler aux larmes? Le refoulement, d'arrière en avant, qu'imprime aux collections kératiques cette évaporation continuelle, ne doit-il pas en seconder l'expulsion?

La rédaction des Annales d'oculistique, qui eut connaissance de cette observation, ne la considéra pas comme aussi exceptionnelle que je l'avais pensé; je m'en félicite au double point de vue de la science et de l'humanité. Les faits de guérison de taches métalliques sont loin d'être rares, dit l'un des rédacteurs du journal précédemment cité (tome XXIII). On voit fréquemment de larges dépôts plombiques, récemment fixés dans les cornées, disparaître spontanément ou sous l'influence de l'application des pommades. Nous avons vu, maintes fois, à la clinique de M. Cunier, les bons effets, presque instantanés, que l'on peut retirer, en pareille occurrence, de l'emploi du collyre à la teinture d'iode. »

Chez un peintre en bâtiment, du nom de Frimat, j'ai vu de nombreuses collections saturnines, à la cornée gauche chroniquement ulcérée, dépendre de ce que le malade s'était exposé, pendant quatre jours, à la poussière provenant du grattage de vieilles portes blanches. Je fis, avee une aiguille à cataracte et en plusieurs séances, l'extraction du sous-carbonate de plomb (blanc de céruse), et le malade fut infiniment soulagé. Les conséquences cliniques qu'on peut tirer de ce fait, dans le cours des kératites ulcéreuses, chez les ouvriers de certaines professions, sont trop palpables pour être mentionnées ici.

(Bulletin général de thérapeutique.)

DE L'HYPERTrophie douloureuse des ORTEILS; par M. CHASSAIGNAC, chirurgien de l'hôpital Saint-Antoine.

Il est une affection dont nous ne connaissons pas d'exemples décrits par les auteurs; affection que nous n'avons observée pour notre part que deux fois, et

deux fois chez des jeunes sujets. Dans le premier cas nous n'avions pas très-bien compris le phénomène pathologique que nous avions sous les yeux, et nous n'avons pas recueilli l'observation. Ce que nous pouvons dire, c'est que la maladie existait chez une jeune fille non encore réglée, qu'elle consistait en une sorte d'hypertrophie de l'extrémité du quatrième orteil du pied droit, qu'elle était accompagnée de douleurs vives que nous avions attribuées à la pression des chaussures, l'orteil étant placé hors de rang et nous ayant paru pouvoir être comprimé par le tassement dû à un soulier trop étroit. Nous avons quelques raisons de croire que les accidents ont disparu à l'époque de la puberté; mais tout ce qui se rattache à ce fait ne nous a laissé que des impressions mal arrêtées. Toutefois, si incomplète que füt cette première observation, une trace nous en est restée, qui s'est ravivée en présence d'un fait que nous avons actuellement sous les yeux et qui nous a vivement frappé. Nous avons fait quelques études à ce sujet et nous venons en exposer le résultat à nos confrères.

Pour mieux faire apprécier la portée de ces réflexions, nous rapporterons le fait avec tous ses détails, puis nous rappelle rons l'attention sur les circonstances les plus remarquables qu'il présente.

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OBS. Puech (Antoine), cuisinier, âgé de 17 ans, galerie Montpensier, 40. Entré le 2 juillet 1852, à l'hôpital Saint-Antoine, salle Saint-François.

3 juillet. Depuis un an le malade ressent dans le troisième orteil du pied gauche des douleurs qu'il ne peut rapporter à aucune cause déterminée. Ces douleurs se sont tout d'abord accompagnées d'un accroissement de volume qui est surtout devenu considérable depuis quatre mois. Quant à la nature de ces douleurs, il parait qu'elles étaient intermittentes, plus vives le matin que dans tout autre moment du jour, et ressemblant assez bien à celles que l'on détermine en pinçant la peau. Actuellement on constate une hypertrophie de l'orteil ne dépassant pas l'articulation de la première avec la deuxième phalange. Les tissus ont l'apparence des tissus infiltrés; il n'y a aucun indice d'alteration, soit de la deuxième, soit de la troisième phalange; enfin les douleurs n'existent que dans les points correspondant à la matrice de l'ongle. Mais cet ongle est à peine altéré dans sa forme, il ne l'est ni dans sa coloration, ni dans sa texture, il n'est pas incarné; de sorte que l'on est porté à considérer cette affection comme une névralgie hypertrophique des tissus,

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Le 12, l'orteil hypertrophié ne diminue pas de volume, sa coloration ne diffère en rien de celle des orteils voisins; la douleur est toujours très-vive; elle répond toujours et exclusivement à la matrice de l'ongle. Cataplasmes laudanisés.

Le 13, le malade fait autour de l'orteil des onctions avec une pommade composée de mi-partie extrait de belladone et mi-partie axenge.

Le 23, il n'y a rien de changé dans l'état du malade. M. Chassaignac l'ayant fait voir à la Société de chirurgie, M. Michon pense qu'il s'agit d'une tumeur blanche de l'orteil. M. Cullerier d'un éléphantiasis; mais M. Chassaignac ne croit pas ces opinions suffisamment fondées.

Le 28, l'hypertrophie remonte vers la base de l'orteil qui n'est cependant pas douloureuse, mais dont la phalange semblerait un peu augmenter de volume. Les douleurs sont toujours localisées au niveau de la matrice de l'ongle; elles sont extrêmement vives.

Le 16 août, M. Giraldès explore attentivement l'orteil à la faveur de l'anesthésie; il incline à admettre qu'il s'agit ici de la maladie de la dernière phalange de l'orteil, consécutivement à laquelle serait survenue l'hypertrophie des tissus mous.

Le 6 septembre. Un fait assez curieux à noter est la sécrétion sudorale abondante qui s'opère à la surface dorsale de l'orteil, sécrétion qui se manifeste par des gouttelettes de sueur qui perlent surtout au pourtour de l'ongle; après de nombreuses tentatives, on va procéder à l'emploi des préparations de morphine.

Le 28, malgré quelques applications de morphine les douleurs persistent, avec autant d'intensité que dans les premiers temps. On a pu s'assurer, pendant une anesthésie produite par le chloroforme, que les douleurs qu'il accuse dans son orteil ne sont pas simulées; car c'est en ce point que la sensibilité s'est éteinte le plus tard, et qu'elle a le plus rapidement

reparu.

Le 5 octobre, l'ongle de l'orteil hypertrophié qui, lors de l'entrée du malade, ne s'était accru que dans une faible proportion, a pris un développement relativement considérable.

Le 25, avant d'en arriver à l'amputation de l'orteil, M. Chassaignac pratique sur sa face dorsale une forte cautérisation au fer rouge, dans le but de modifier sa sensibilité, et par suite de remédier à l'hy

pertrophie, si toutefois celle-ci est bien névralgique. Les mesures comparatives prises sur l'orteil malade et sur l'orteil sain correspondant, ont donné une différence à peu près du double à l'avantage de l'orteil malade.

Le 6 décembre. Jusqu'à présent la face dorsale de l'orteil douloureux a été le siége d'une suppuration assez abondante, consécutive à la brûlure déterminée par le fer rouge; la cicatrisation de cette brûlure n'est même pas complète, et il y a encore une petite surface occupée par des bourgeons charnus exubérants. Toutefois, la perturbation apportée dans la sensibilité névralgique de l'orteil par la cautérisation, a suffisamment cessé pour permettre au malade de reconnaître actuellement que les douleurs qui persistent toujours conservent leur caractère primitif.

C'est toujours une hyperesthésie presque incompréhensible, et allant jusqu'au point de faire crier le malade par le plus simple contact. A part cela, la santé générale est bonne. L'orteil continue à être pansé à l'occlusion. Dix semaines après la cicatrisation définitive de la brûlure, les accidents névralgiques persistant avec la même intensité, l'opération fut décidée et exécutée par le procédé ovalaire légèrement modifié. Elle fut suivie d'un plein succès.

L'orteil enlevé ayant été fendu sur toute sa longueur et les trois phalanges sciées suivant leur axe, on découvrit dans l'extrémité unguéale de la dernière phalange une espèce de noyau ossiforme qui était comme enkysté, et sur lequel M. Lebert nous remit la note suivante :

« Ce noyau, exempt de toute continuité de substance avec le tissu osseux de la phalange, est entouré d'une membrane fibro-celluleuse hypertrophiée. Il est entièrement formé par un tissu spongieux aréolaire, dans lequel le microscope fait reconnaître les corpuscules et les autres caractères du tissu osseux. »

Ce malade a été présenté à la Société de chirurgie dans les premiers mois de l'année 1855, à l'état de guérison parfaite.

On était loin de s'attendre à la lésion que l'autopsie de l'orteil malade a fait constater comme cause des phénomènes singuliers observés chez ce malade. Ce n'est pas sans de longues hésitations que l'on se décida à prendre le parti rigoureux auquel cependant le malade a dû sa guérison. Si le corpuscule osseux dont il a été question n'eût point été enkysté dans l'extrémité de la phalange, sa présence se serait sans doute trahie par une mobilité

insolite dans ce lieu, et même peut-être par quelques indices de crépitation. Mais rien de semblable n'a jamais existé, et soit que le malade fût examiné dans l'état de veille, ce qui était à la vérité fort difficile à cause de son excessive sensibilité, soit dans le sommeil anesthésique et avec la liberté qu'on en retire pour l'exploration, rien n'a pu faire soupçonner l'existence d'une cause anatomique aussi étrange. Nous serions même fort en peine, à l'heure qu'il est, de dire à quelle classe de lésions doit être rattachée cette forme particulière de production osseuse enkystée. Mais il y a du moins à tirer du fait cette conclusion importante sous le rapport pratique, que, dans les cas qui se présenteraient avec des symptômes analogues, on devrait, avant de recourir à l'amputation, pratiquer soit sur la face dorsale, soit sur la face palmaire, en suivant les indications du point le plus douloureux, une incision profonde qui, en éclairant sur la nature du mal, permettrait d'éviter une mutilation moins fâcheuse encore par ce qu'elle fait perdre que par les dangers auxquels elle expose. On sait, en effet, que l'ablation qu'on pratique pour des doigts surnuméraires ou pour des difformités entraîne plus souvent qu'on ne serait porté à le penser des accidents funestes; et il est très-positif que les amputations de doigt ou d'orteil pratiquées sur ces organes dans un état actuel d'inflammation ou de suppuration, donnent des résultats généralement moins fâcheux que les amputations pratiquées sur des tissus qui n'ont jamais subi les atteintes de l'inflammation de sorte qu'il sera peut-être un jour établi qu'on atténue les effets du traumatisme par le développement à un certain degré d'une inflammation artificielle préalablement aux mutilations chirurgicales. Une phlegmasie antécédente peu éloignée ou actuelle serait une immunité : ce serait la vaccination du traumatisme chirurgical.

(Revue médico-chirurgicale de Paris.)

SUR LA CIRRHOSe de la mamelle ; par A. WERNHER, professeur à Giessen. — Le diagnostic des tumeurs en général a fait, dans ces derniers temps, des progrès réels, et cependant on confond encore, sous le nom de cancer, des affections très-diverses des glandes mammaires en particulier. OBS. Ch. F., 50 ans, non mariée, remarqua, il y a huit mois, une petite tumeur au sein droit et s'adressa au professeur Wernher. Elle se rappelle avoir reçu un coup dans cette région à l'âge de

18 ans; mais cet accident n'eut pas de suites.

Les deux seins sont identiquement semblables; on perçoit au toucher une petite tumeur mobile, irrégulière, granuleuse, sans adhérence à la peau ni aux muscles sous-jacents. Les glandes de l'aisselle ne sont pas engorgées; cependant le sein malade est le siége de douleurs qui durent assez longtemps, surtout vers le soir. Sur la demande de la malade, cette tumeur fut enlevée; elle était enchâssée dans la glande, mais non enkystée, et elle se composait entièrement de granulations de la grosseur d'une tête d'épingle, contenant chacune un noyau jaunâtre. La tumeur était divisée en lobes et en lobules unis entre eux par un tissu cellulaire très-dense. Chaque granulation renferme une bouillie épaisse, jaunâtre, composée de nombreuses gouttelettes de graisse, de formations épithéliales, semblables aux cellules de l'épithélium glanduleux, et de petites concrétions calcaires.

Cet examen fait voir que la tumeur a été produite par une hypertrophic des dernières terminaisons des tubes lactifères.

Les parois de ces derniers étaient tumé fiées, leur cavité élargie, et ils contenaient une matière analogue au lait, quoique la malade ne fût pas et n'eut jamais été enceinte.

Il faut donc considérer cette tumeur comme bénigne et entièrement différente des tumeurs cancéreuses, avec lesquelles on pouvait la confondre avant l'extirpation. L'auteur la compare à la cirrhose du foie et du poumon, à cause de sa densité et de l'absence de tissu graisseux.

Dans les réflexions dont l'auteur fait suivre son observation, il compare les caractères anatomiques de la cirrhose mammaire à ceux des autres tumeurs du sein, et pense que la présence des granulations, leur petitesse et surtout leur régularité pourront suffire pour la faire reconnaître.

(Gazette médicale de Paris.)

ANÉVRYSME TRaumatique de L'artère cuBITALE DATANT DE 26 JOURS; INJECTION DE PERCHLORURE de fer; infLAMMATION PHLEGMONEUSE; MENACES D'HÉMORRHAGIE PAR LA PLAIE; LIGATURE DE L'ARTÈRE HUMÉRALE; HEMORRHAGIE PAR LA PLAIE DE LA TUMEUR ANÉVRYSMALE; ligature de l'ARTÈRE CUBI TALE AU-DESSUS DE LA TUMEUR; INFLAMMATION GRAVE DE L'AVANT-BRAS: GUÉRISON; par M. ALQUIÉ, professeur.

Le nommé Louis Méjean, âgé de 50 ans, demeurant à Valleraugue (Gard,, exerçant

la profession de tailleur et jouissant habituellement d'une bonne santé, entra à l'hôpital le 16 juillet.

Le 20 du mois de juin dernier, cet homme étant à la campagne occupé à couper des branches mortes avec une serpette, se donna involontairement à la main gauche un coup de cet instrument. I en résulta une blessure qui, partant du pli du poignet, descendait verticalement sur l'éminence hypothénar, dans la longueur d'un pouce et demi environ; l'artère cubitale fut ouverte, car au même instant se déclara une hémorrhagie abondante : le sang était rouge et sortait par saccades. Le frère du blessé, qui était présent, s'empressa d'appliquer avec son mouchoir un bandage compressif; l'hémorrhagic put être arrêtée. Le médecin de Valleraugue, appelé aussitôt, continua la compression, en remplaçant le mouchoir par des bandelettes de diachylon, des compresses et une bande ; les deux artères de l'avantbras furent également comprimées à leur partie inférieure, au moyen de compresses épaisses et d'une bande fortement serrée. Get appareil fut laissé en place pendant neuf jours; le 29, la plaie n'étant pas cicatrisée et donnant lieu de temps en temps à un léger suintement sanguin, l'appareil fut réappliqué avec soin.

Le 16 juillet, c'est-à-dire vingt-six jours après l'accident, le blessé entre dans les salles de la clinique chirurgicale. A cette époque, on constate qu'il existe à la partie supérieure de l'éminence hypothé nar une tumeur du volume d'une noix, sur laquelle existe encore une petite plaie suppurante. La tumeur est le siége de battements isochrones à ceux du pouls, qui diminuent d'intensité quand on comprime isolément la radiale ou la cubitale, mais qui cessent tout à fait quand ces deux artères sont comprimées à la fois; la compression de l'artère humérale amène le même résultat. Du reste, la main est légèrement tuméfiée et d'une couleur violacée, par suite de la gêne qu'a éprou vée la circulation veineuse. On se contente d'appliquer sur la tumeur des compresses inbibées d'eau froide.

Le 20, M. Alquié, l'habile chirurgien en chef, pratique une injection dans la tumeur avec une solution de perchlorure de fer, dans la proportion de moitié de perchlorure et moitié d'eau. L'artère cubitale avait été comprimée une demi-heure avant l'opération; on fit pénétrer le liquide par la petite plaie qui existait sur la tumeur, et comme on ne s'était pas servi de la seringue de Pravaz, il est assez difficile de dire la quantité de liquide qui a pénétré

dans le sac anévrysmal : la note que nous avons sous les yeux la porte à deux grammes, tandis que la quantité de sept gouttes est indiquée dans une autre relation. On laisse sur la tumeur une compresse imbibée de la solution de perchlorure de fer. Une vive sensation de brûlure succède à l'opération; les battements de la tumeur diminuent, mais ne cessent pas. Pansement simple; un compresseur est préparé en cas d'hémorrhagie.

21 et 22. Vives douleurs qui vont en augmentant; les pulsations de la tumeur sont plus fortes ; elle est tendue, plus volumineuse; il y a de la fièvre.

25 et 24. Une rougeur érysipélateuse, accompagnée de gonflement et de tension, a envahi la main et tout l'avant-bras jusqu'au coude; elle est surtout plus prononcée autour de la tumeur : tout semble faire craindre un phlegmon érysipélateux.

25 et 26. Tous les symptômes susindiqués persistent; de la fluctuation existe autour de la tumeur; un point noir se montre dans le lieu où a été introduit le trocart; fièvre, anorexie et céphalalgie.

27. Un liquide purulent s'échappe de la tumeur; ulcération de la peau remontant vers l'avant-bras. (Cataplasmes; onctions mercurielles; pansement de la plaie avec la décoction de quinquina.)

28. Les symptômes inflammatoires diminuent, mais les battements de la tumeur persistent; on aperçoit au fond de la plaie quelques caillots mous qui sont agités par l'ondée sanguine; diarrhée.

29. On pratique la ligature de l'artère humérale vers la partie moyenne du bras. Les battements de la tumeur cessent austitôt après la ligature; pas de refroidissement du membre.

2 août. Réapparition des battements dans la tumeur; les pulsations deviennent plus fortes les jours suivants; la plaie de la main n'est pas cicatrisée.

7. Une hémorrhagie abondante a eu lieu pendant la nuit, l'écoulement de sang s'est effectué par la plaie de la tumeur anévrysmale. Le savant professeur se décide alors à pratiquer la ligature de la cubitale, à la partie inférieure de l'avantbras; une petite branche artérielle, mise à découvert par l'incision, est également liée cessation immédiate des battements de la tumeur et de l'hémorrhagie.

16. Les fils de la ligature se sont détachés, mais une inflammation profonde s'est emparée de la gaine des muscles de l'avant-bras; écoulement d'une grande quantité de pus par la plaie de la ligature. (Cataplasmes; frictions mercurielles; manuluves émollients, etc.)

Les jours suivants, la suppuration est moindre, les symptômes inflammatoires diminuent, la tumeur s'affaisse et tend à disparaitre; la plaie qui la recouvrait est en voie de cicatrisation.

1er septembre. Le malade va de mieux en mieux, mais la plaie de la dernière ligature n'est pas encore cicatrisée et fournit toujours du pus; l'engorgement de l'avant-bras persiste et s'accompagne d'un reste d'inflammation. La résolution s'opère cependant peu à peu; les plaies se cicatrisent; le malade recouvre graduellement ses forces, et, le dimanche 18 septembre, il peut enfin sortir de l'hôpital, entièrement guéri.

M. L. Saurel, rédacteur de la Revue therapeutique du Midi, à laquelle nous empruntons cette observation, la fait suivre des réflexions suivantes :

4o On peut d'abord se demander si une opération chirurgicale immédiate était bien nécessaire au moment où le malade est entré à l'hôpital; aucun danger prochain n'existait alors, l'accident était de date récente, la tumeur anévrysmale présentait une plaie non encore cicatrisée, et il n'aurait peut-être pas été impossible d'obtenir son obliteration, si l'on avait mis en usage une compression exacte et méthodique sur les deux artères de l'avant-bras.

2o Les adversaires de la méthode de M. Pravaz auraient mauvaise grâce de se prévaloir contre elle de l'insuccès que M. Alquié a obtenu dans ce cas. Cette opération, en effet, n'était pas indiquée chez Méjean; de plus, elle n'a pas été pratiquée selon les règles établies par l'inventeur. La coagulation du sang par le perchlorure de fer n'était pas indiquée, car il s'agissait d'une tumeur anévrysmale datant de 30 jours seulement, non encore cicatrisée et située dans une partie trèssensible c'étaient là autant de conditions qui devaient amener l'inflammation et peut-être la gangrène. M. Alquié, il est vrai, n'a pas injecté le perchlorure de fer pur, il l'a étendu de son volume d'eau; mais par cela même la coagulation du sang devenait impossible, et c'est ce qui a eu licu. On a eu tous les inconvénients de l'opération, sans en avoir les avantages; d'ailleurs, je le répète, on n'a pas suivi dans l'opération les règles tracées par M. Pravaz. Cette observation devra donc être mise hors de cause quand on débattra les avantages et les inconvénients du perchlorure de fer.

3o La coagulation du sang n'ayant pas réussi, et une hémorrhagie par la tumeur anévrysmale étant imminente, il était nécessaire, puisque l'on ne pouvait plus

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