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Chimie médicale et pharmac.

MÉMOIRE SUR UNE NOUVELLE COMBINAISON DE L'IODE ET SUR SON APPLICATION EN MÉDECINE; lu à la Société de médecine par M. Socquet, médecin de l'Hôtel-Dieu, et par M. GUILLIERMOND, pharmacien, membre du Conseil d'hygiène et de salubrité.

L'iode est un médicament qui, depuis longtemps, a pris dans la thérapeutique un rang qu'il ne peut perdre désormais. Son action favorable, dans un grand nombre de maladies chroniques, est journellement proclamée par tous les médecins : c'est ainsi que les symptômes tertiaires de la syphilis, les scrofules, les affections tuberculeuses du poumon, le rachitisme, le carreau, le goître, etc., ont été heureusement modifiés ou complétement guéris par l'iode. Mais ce médicament étant très actif, l'on a dù rechercher quelle était la forme pharmaceutique sous laquelle il manifesterait tous ses effets sans amener à sa suite de fâcheux désordres. Jusqu'à ce jour ce problème n'avait point été complétement résolu. Nous pensons avoir levé, sous ce rapport, toutes les difficultés dans la nouvelle combinaison iodique que nous proposons.

La propriété singulière que possède la solution aqueuse de tannin de dissoudre l'iode, propriété qui a été remarquée par l'un de nous, M. Socquet, nous a donné l'idée de la mettre à profit pour l'administration thérapeutique de cet agent précieux. Nous venons soumettre à l'appréciation des praticiens le résultat des recherches que nous avons entreprises dans ce but.

Nous avons divisé notre travail en trois parties, dans lesquelles nous traiterons successivement.

4o Des propriétés chimiques de la nouvelle combinaison :

2o De ses préparations pharmaceuti

ques;

3. De son usage dans diverses malaladies.

Propriétés et nature chimiques de la nouvelle combinaison.

Le tannin dissout l'iode, mais cette dissolution ne peut avoir lieu sans l'intervention de l'eau; en effet, si l'on triture ensemble de l'iode et du tannin, on n'apercevra aucune réaction, les deux substances seront mêlées et ni l'une ni l'autre ne se trouvera altérée; si l'on ajoute de l'alcool à leur mélange, elles se dissou

(1) Si on mélange le tannin et l'iode sans y mettre de suite la quantité d'eau nécessaire, où

dront, mais on ne remarquera encore ancun autre phénomène chimique, quelque prolongé que soit le contact. Avec l'eau, au contraire, une réaction vive se mani→ feste presque subitement; ces deux corps forment entre eux une pâte molle et élastique qui s'attache au fond du mortier dans lequel on opère, et finit par se dissoudre à l'aide d'une douce chaleur, dans une petite quantité d'eau. i.e tannin peut ainsi dissoudre des quantités considérables d'iode il peut en absorber jusqu'à la moitié de son propre poids. Ce qu'il y a de remarquable dans la dissolution de l'iode par le tannin, c'est que, si l'on s'arrête à une certaine proportion entre ces deux substances, on verra qu'il s'effectue entre elles une véritable combinaison chimique.

Sept grammes de tannin, un gramme d'iode, trois cents grammes (1) d'eau, forment, même à froid, une solution dans laquelle la présence de l'iode ne peut plus être accusée par le contact de l'amidon seul.

Cette solution, que nous appellerons iodo-tannique, est d'abord louche et laisse déposer sur les parois des vases qui la contiennent une substance cristalline; si l'on sépare cette substance par la filtration, la liqueur devient tout à fait limpide et le dépôt se change sur le filtre en une masse résineuse, élastique; celle-ci est soluble dans l'eau bouillante et l'alcool froid; la liqueur en retient si elle est assez étendue d'eau, elle ne s'en dépouille complétement qu'en la faisant concentrer par l'évaporation. La quantité de cette substance qui généralement peut être séparée de la solution iodo-tannique, peut être évaluée au sixième en poids du tannin employé.

Ce dépôt ayant été lavé à l'eau froide et épuisé complétement, ne retient aucune trace d'iode. Ce métalloïde reste entièrement dans la solution qui surnage le dépôt; celui-ci a une couleur brune, presque noire, rougit faiblement le papier tournesol, forme un sel insoluble avec la potasse, précipite la gélatine et les solutions d'alcaloides; enfin, il conserve les propriétés du tannin, mais d'un tannin altéré et qui constitue sans doute un nouvel acide qui a des rapports avec l'acide métagallique; la solution iodo-tannique conserve sa transparence indéfiniment si elle en est entièrement dépouillée..

La solution iodo-tannique dans laquelle l'iode se trouve combiné est d'un brun tirant sur le rouge; sa couleur s'affaiblit

aura à supporter une vapeur légère mais acide qui remplira le laboratoire.

peu de temps après qu'elle a été préparée, elle finit ensuite par devenir permanente; un papier bleu réactif trempé dans cette solution prend une couleur rouge plus intense que dans une dissolution équivalente de tannin pur; elle précipite les sels de fer en noir, elle sépare la gélatine et les alcaloïdes de leur dissolution, enfin elle se comporte comme la dissolution de tannin, mais elle offre un avantage sur celle-ci, c'est de se conserver sans altération. La présence de l'iode y est tout à fait dissimulée, le goût et l'odorat ne peuvent la faire reconnaître, elle ne tache point la peau, enfin elle coagule très-bien l'albuinine ainsi que les sérosités morbides et le sang.

Nous avons dit que la solution iodotannique pourrait absorber une quantité d'iode égale en poids à la moitié du tannin employé; cette nouvelle solution, que nous appellerons tannique iodurée, est fortement colorée; elle a l'odeur de l'iode, elle ne perd point les propriétés inhérentes à la présence du tannin; elle est soluble dans l'eau en tontes proportions et ne forme par la suite aucun dépôt dans le véhicule.

Quelle est la nature chimique de la combinaison qui se forme entre le tannin et l'iode?

Pour arriver à la connaitre, nous avons cru devoir soumettre la solution iodotannique à l'action des agents suivants : 4" à l'action de la chaux; 2 à l'action de la gélatine; 3° à l'action de l'acétate de plomb; 4" enfin à l'action du calorique.

4o La chaux a formé dans la dissolution un dépôt de tannate de chaux qui a été séparé par le filtre: la liqueur filtrée a été évaporée et nous avons pu nous convaincre qu'elle contenait tout ou la majeure partie de l'iode à l'état d'iodure de calcium;

2o La gélatine forme dans la solution iodo-tannique un précipité gris abondant (1), nous avons mis de la gélatine autant qu'il en a fallu pour séparer la totalité du tannin. Le dépôt de tannate de gélatine a été reçu sur un filtre et lavé à grandes caux jusqu'à ce que la réaction du chlore et de l'amidon ne fit plus connaitre la présence de l'iode; le dépôt de tannate de gélatine, qui avait été lavé soigneusement et dépouillé de tout l'iode soluble à l'eau, a été calciné après avoir été mêlé avec une solution de potasse caustique concentrée, son charbon a été ensuite traité par l'alcool et celui-ci ayant été

(1) Quoique la gélatine ait séparé le tannin, la liqueur surnageante retenait toujours l'iode à l'état de combinaison.

évaporé n'a pas fourni trace d'iode. L'iode était donc resté en entier dans la solution, mais fortement embarrassé d'une dernière quantité de tannate de gélatine dont il était difficile de l'isoler.

3o L'acétate de plomb dissous dans l'eau distillée a fait naître dans la solution iodo-tannique un précipité jaune qui a été reçu sur un filtre: additionné d'une nouvelle quantité d'acétate de plomb, il s'est formé dans la dissolution un nouveau précipité, mais qui cette fois était blanc. II parait que, dans cette réaction, l'iode abandonne d'abord le tannin pour se précipiter avec le plomb, et que la précipitation du tannate de plomb ne vient qu'après. L'iodure formé a été traité par l'eau bouillante et filtré immédiatement; par le refroidissement, nous avons vu se former les écailles brillantes qui, d'après l'observation intéressante de M. Boullay, sont particulières à l'iodure de plomb, et qui, par des cristallisations successives, auraient pu être débarrassées du tannate de plomb dont elles devaient être forcément imprégnées;

4° Nous avons fait évaporer la solution iodo-tannique, nous l'avons essayée avec le papier amidonné pendant tout le temps de sa concentration et nous avons remarqué que tant qu'elle restait humide elle ne donnait pas de réaction iodée; mais qu'aussitôt qu'elle approchait du point où elle devait se dessécher, un peu d'iode était mis à jour.

Nous avons pris une solution négative, contenant cinq grammes d'iode, trente grammes de tannin et un litre d'eau, et bien neutre au papier amidonné, nous l'avons distillée dans une cornue de verre jusqu'à réduction de quatre-vingts grammes; les eaux distillées ont été reçues et fractionnées par cinquante grammes; elies ont toutes été essayées au papier tournesol et n'ont pas décelé la plus petite quantité d'acide; l'iode n'avait point non plus pénétré jusqu'à elles. Le liquide, qui était resté dans la cornue, ayant été retiré, a laissé une petite quantité de l'acide brun que nous avons signalé plus haut, et ne s'est plus troublé depuis; il était trèsacide et ne donnait pas de réaction bleue avec l'amidon.

On peut tirer, pour conséquence, des agents auxquels nous avons soumis la solution iodo-tannique, sur sa constitution chimique, que pendant le contact de l'eau. de l'iode et du tannin, une portion de l'eau se décompose; qu'il y a formation d'acide hydriodique et qu'une proportion de tannin est transformée, par le fait d'une oxydation, en un tannin particulier moins

soluble que le tanuin ordinaire, et que le tannin non altéré forme avec l'acide hydriodique une combinaison soluble et stable, que la distillation même ne peut pas altérer. Au point où en sont nos travaux nous ne pouvons donner cette théorie que comme une probabilité, nous réservant de revenir plus tard sur un sujet qui, au point de vue chimique, nous parait intéressant et pourra peut-être amener les chimistes à se prononcer sur la nature d'un corps encore peu connu.

(Gazette médicale de Lyon.),

DÉTERMINATION DE LA FORCE DES PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES CONTENANT DE L'ACIDE PRUSSIQUE; par JAMES ROBERTON.

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Il n'est pas de préparations médicinales qui soient plus sujettes à varier, et qui cependant exigent plus de stabilité dans leurs compositions, que celles qui renferment de l'acide prussique. L'eau distillée de laurier-cerise, qui est d'un usage si fréquent en pharmacie, présente sous ce rapport, des variations extrêmes et très-fâcheuses pour la pratique mé dicale.

Un réactif simple, qui donnerait le moyen d'évaluer de temps en temps la force des divers composés cyaniques, et qui joindrait l'exactitude de la détermination à la facilité de l'emploi, serait à la fois très-utile et très-précieux pour les pharmaciens. MM. Fordos et Gélis ont indiqué, il y a quelque temps, un procédé cyanométrique dont l'objet était simple ment de déterminer la valeur commerciale du cyanure de potassium. L'auteur a examiné avec soin ce procédé qui repose sur l'action décomposante de l'iode à l'égard des cyanures alcalins, et en cherchant à généraliser son emploi, il a vu qu'il pouvait parfaitement s'appliquer à la détermination et au dosage de toutes les préparations pharmaceutiques renfermant de l'acide prussique.

On prépare une solution titrée d'iode (15 centigrammes pour 30 grammes conviennent parfaitement); on introduit cette solution dans une burette de GayLussac, et on la verse goutte à goutte dans une certaine quantité de la liqueur à examiner, jusqu'à ce qu'on aperçoive une teinte jaunâtre persistante même après l'agitation. On n'a alors qu'à lire la quantité de solution normale qu'il a fallu employer pour avoir la force comparée de la préparation soumise à l'examen. Ce procédé ne donne pas seulement la valeur comparée des diverses solutions cyaniques, mais il fournit aussi la proportion

en centièmes de l'acide cyanhydrique qu'elles renferment. Car chaque équivalent de cyanogène absorbe exactement un équivalent d'iode. L'auteur a trouvé ce procédé d'une grande utilité pratique, et il le recommande à tous les pharmaciens qui voudront essayer leurs préparations cyaniques.

(Journal de pharmacie et de chimie.).

Histoire naturelle médicale..

GENRE

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SUR LES USAGES MÉDICAUX DU VIOLA; par M. E. TIMBAL-LAGRAVE. La note qui suit est extraite d'une monographie intéressante que vient de publier M. E. Timbal-Lagrave, sous le titre d'Etudes pour servir à l'Histoire botanique et médicale du genre Viola.

Deux plantes du genre Viola sont usitées en médecine : la première appartient au premier groupe (Nominium; elle est connue sous le nom de violette tout simplement; la seconde fait partie du troisième groupe (Melanium); elle est usitée sous le nom de pensée.

On a employé, dès les premiers temps de la médecine, l'or pixar de Théophraste, qui est le Viola purpurea de Pline, Viola martia purpurea de G. Bauhin, synonyme rapporté par Leymerie (Dict. des Drog., t. II, p. 601), et le Viola odorata (Linné). Codex, 1818 et 1837, ainsi que de tous les auteurs modernes.

Plusieurs parties du Viola odorata (L.) ont été vantées par plusieurs médecins; les premières fleurs comme pectorales adoucissantes, légèrement antispasmodiques dans les affections aiguës de la poitrine; les feuilles comme émollientes et les racines comme émétiques, légèrement purgatives; les racines furent analysées par Caventou, qui y trouva un peu d'émétine, et confirma ainsi leurs propriétés.

De nos jours, on a abandonné l'usage des feuilles et des racines, qui ont dû céder à des médicaments plus énergiques et d'un effet plus certain.

Les racines de Viola nous offrent un fait remarquable et qui mérite d'être signalé : les racines des espèces à fleurs vernales odorantes ont une odeur et une saveur nauséabonde très-prononcée, tandis que les espèces à fleurs inodores ont les racines inodores et insipides. 2 grammes de poudre de racine de Viola hirta (L.), cspèce inodore, n'ont produit aucun effet sur l'estomac; parcille dose de Viola odorata (L.) a donné, d'après M. Soyer-Wile

met, deux vomissements et trois selles; la même dose de Viola tolosana (Timb.) a donné un vomissement et une forte nausée; bien certainement ces dernières répondent à l'analyse de Caventou, tandis que les premières doivent être dépourvues d'émétine.

L'usage des fleurs s'est conservé; il est même l'objet d'un négoce assez étendu et le sujet de nombreuses fraudes que le temps semble avoir consacrées. Si l'on examine avec attention les fleurs répandues dans le commerce et les pharmacies, on verra bientôt que, non-seulement le Viola odorata (L.) ne s'y rencontre jamais, mais qu'il est remplacé par des fleurs appartenant au troisième groupe, Melanium

ou Pensée.

Cette substitution, qui se pratique depuis longtemps dans le commerce, est très-vicieuse et ne peut durer; les pensées sont des médicaments essentiellement dépuratifs et ne sauraient, par conséquent, remplacer le Viola odorata (L.) doué de propriétés bien différentes, qui résident dans l'arome ou dans un principe adoucissant et pectoral contenu dans les pétales.

S'il arrivait que le Viola odorata (L.) fût rare, qu'il fût difficile à trouver, et qu'une substitution fût jugée utile, les seules propres à être employées seraient les espèces à fleurs odorantes, telles que les Viola suavis (Bieberstein); suavissima (Jordan); tolosana (Timbal); propinqua (Jordan). Le Viola tolosana (T.) seul, à Toulouse, peut être substitué, mais il est bien plus rare que le Viola odorata (L.), à moins qu'on ne prit sa variété ou monstruosité à fleurs doubles, qui est très répandue.

M. Soubeiran (Traité de pharmacie, t. I, p. 341) a, un des premiers, signalé la substitution des Viola sudetica (Wildenow) et calcarea (Linné). M. Guibourt (Histoire naturelle des drogues simples, t. III, p. 610) désigne comme substitué le Viola tricolor (Linné), ce qui n'est pas exact. Ces savants auteurs ont peu insisté sur la différence des propriétés de ces plantes, et n'ont pas donné les caractères distinctifs de ces fleurs, pour mettre les pharmaciens en garde contre ces différentes substitutions.

Dans nos maisons de droguerie, à Toulouse, j'ai toujours trouvé le Viola calcarea (L.); il provient des Alpes et surtout du Dauphiné. Dans les maisons de Paris c'est, au contraire, le Viola sudetica (Wild.) qu'on expédie ordinairement; il vient des montagnes d'Auvergne, des sources de la Loire, à Pierre-sur-Haute, à Burzet, où l'on en fait un grand commerce.

tricolor (L.), quoique distinguées depuis longtemps, appartiennent au mêmegroupe, jouissent des mêmes propriétés, et doivent être considérées comme dépuratives; il est même probable, comme je chercherai à le prouver en parlant des pensées, qu'elles possèdent cette propriété à un plus haut degré.

Il n'y a pas de Viola qui puisse remplacer le Viola odorata (L.) pour la préparation du sirop de violettes, où l'on tient à conserver surtout l'arome et la couleur; le Viola tolosana (Timb.) donne bien l'arome, mais sa couleur est très-faible; c'est donc la seule préparation qu'on doive employer; quand on voudra faire usage du Viola odorata (L.), on sera sûr alors qu'il n'y a pas substitution, et s'il y en avait il ne pourrait être remplacé que par quelques espèces analogues quant aux propriétés médicamenteuses.

La seconde est la Violette pensée, Viola tricolor (Linné). On en connait, en matière médicale, deux espèces : celle dite cultivée Viola tricolor, var. a. hortensis (de Candolle), et celle des champs ou sauvage, Viola tricolor, var. € arvensis (de Candolle).

Le Viola tricolor, var. hortensis (DC.), est très-peu répandu dans le commerce; il doit être rejeté de la matière médicale, comme toutes les substances simples cultivées loin de leur lieu natal.

Le Viola tricolor, var. arvensis (DC.), est la Pensée sauvage de tous les auteurs de botanique médicale; mais depuis quel ques années les différentes variétés du Viola tricolor de Linné et de De Candolle ont été soumises à un examen scrupuleux, et non-seulement les variétés distinguées par de Candolle sont devenues des espèces, mais encore on en a ajouté de nouvelles qui sont adoptées par le plus grand nombre des botanistes.

Ce démembrement du Viola tricolor des anciens auteurs, déjà pressenti par de Candolle, jette beaucoup de vague pour trouver le type que les auteurs désignent inconsidérément par Viola tricolor arvensis (L.); car ce type devra se trouver différent dans les espèces qui habitent des climats et des contrées diverses.

Mais si l'on remarque que le Viola ar vensis de tous les auteurs, soit de botanique, soit de matière médicale, est une plante annuelle, on aura un premier indice que le type médical est dans les Viola annuels, et l'on devra exclure les espèces vivaces ou cespiteuses journellement vendues pour des pensées sauvages; ainsi, les Viola sudetica (Wild); lutea (Smith); mons

Ces deux plantes, très-voisines du Viola ticola (Jordan).

Les Viola annuels sont des plantes vulgaires, c'est-à-dire faciles à trouver; elles habitent tous nos champs cultivés. Puis que c'est là qu'est le type médical, à quelle espèce doit-on donner la préférence? Ici l'embarras est grand, car chaque pays a une espèce propre qui peut représenter le Viola arvensis (de Candolle). Ce sera à Toulouse le Viola Timbali (Jord.), espèce que j'ai le premier signaléc en 1848; à Lyon, le segetalis et arvensis (Jordan.); à Angers et le centre de la France, l'agrestis (J.); à Montpellier et tout le Midi, le nemausensis (Jord.); dans le Jura et les départements voisins, le gracilescens (Jord.); à Grenoble, le Viola calcarea (L.), la variété à fleurs jaunes; à Paris et le Nord, agrestis et segetalis (Jord.); enfin dans la Lorraine, ce sera l'arvatica (Jord.).

Il est très-probable que ces plantes, bien distinctes pour les botanistes, ne peuvent pas avoir les mêmes propriétés, ou tout au moins au même degré, le sol et le climat qu'elles habitent étant tout à fait différents.

On considère dans le commerce tous les Viola à fleurs bleues comme Viola odorata ou violette ordinaire, et celles à fleurs jaunes, comme des pensées. Pour ces dernières on préfère les espèces vivaces ou cespiteuses, parce qu'elles donnent plus de fleurs et sont plus grandes. On a vendu, il y a quelques années, à Toulouse, le Viola Timbali Jord., qui est le vrai type médical pour Toulouse; mais on lui a substitué maintenant le Viola monticola (Jordan), qui abonde dans la chaîne centrale des Pyrénées, et descend dans toutes les vallées; étant demi-vivace, il fleurit presque toute l'année.

Je crois que la préférence donnée aux espèces vivaces ou cespiteuses, quoique éloignées du type médical des auteurs, ne nuit pas au médicament, et me parait préférable; c'est même dans ce groupe que je propose de le prendre; les plantes vivaces offrent en général des sucs propres et médicamenteux plus concentrés, plus élaborés; leurs racines plus fortes, plus profondes ou plus étendues, puisent une plus grande quantité de substances nutritives; la plante vit plus longtemps, trois à cinq ans; ajoutez à cela l'habitat; elles préfèrent les hautes montagnes, les lieux couverts de détritus; tandis que les espèces annuelles, réduites longtemps à une simple rosette radicale, poussent en peu de temps leurs tiges, fleurissent et meurent en quelques mois, quelquefois un mois ou deux suffisent à leur entier développement.

Et adoptant cette opinion, quoique éloi

gnée, comme je l'ai dit, du type médical ancien, il se présente une espèce qui peut offrir à la médecine les propriétés qu'elle désire; je veux parler du Viola sudetica (Wild.) ou le Viola calcarea (L.), qu'on substitue improprement au Viola odorata (L.); ils seraient alors à leur véritable place; ces plantes sont très-répandues dans le commerce, peuvent être vendues à un très-bas prix; elles sont vivaces, habitent les hautes montagnes, remplissent en un mot toutes les conditions qu'on désire dans ce médicament.

Quand on voudra administrer le Viola odorata (L.), il faudra, comme je l'ai dit, formuler le sirop de violettes, qui seul ne peut se falsifier, à l'exclusion de tout autre produit.

Il me reste à indiquer quelques caractères tirés des fleurs desséchées des divers Viola que j'ai signalés, afin de mettre les pharmaciens en mesure de savoir quel est le Viola qui lui est vendu.

D'abord, le Viola odorata (L.) a les fleurs bleu foncé, l'éperon ou le prolongement du pétale inférieur, en sac obtus, dépassant peu les appendices du calice.

Le sudetica (Wild.) a les fleurs plus grandes, moins colorées, surtout à la base des pétales; l'éperon est grêle, long et aigu, dépassant deux fois les appendices du calice.

Le calcarea (L.) a les fleurs comme le sudetica, un peu plus foncées en couleur, et les pétales plus ovales, plus arrondies; l'éperon est gros, conique et obtus, trois fois plus long que les appendices du calice.

Les Viola annualis Timbila (J.), agrestis (J.), segetalis (J.), arvatica (J.), gracilescens (J.), ont les fleurs blanc jaunâtre, avec les pétales supérieurs légèrement bleutés ou concolores, ne dépassant pas les sépales du calice; éperon grèle, mince, égalant à peu de chose près les appendices du calice.

Le lutea (Smith) a les fleurs grandes, jaunes, concolores; l'éperon ne dépasse pas les appendices du calice.

La Viola monticola (J.), qui se vend en ce moment à Toulouse, a les fleurs grandes, blanc-soufrées, avec une tache jaune plus vive sur le pétale inférieur, à la gorge de la corolle, l'éperon est grèle et dépasse peu les appendices du calice.

Le calcarea (L.), à fleurs qu'on vend à Grenoble pour des pensées, a les mêmes caractères que celui à fleurs bleues, sauf la coloration.

(Répertoire de pharmacie.)

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