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tion solide et d'une expérience personnelle étendue. Je ferai cependant une seule observation. M. Mascarel semble croire qu'il est commun de voir l'éclampsie éclater brusquement et sans qu'aucun symptôme précurseur puisse en faire prévoir la prochaine invasion. Sans nier l'existence de ces cas, je les crois fort rares; je dirai même que, pour mon compte, toutes les fois que j'ai pu observer les malades avant le début de la maladie, j'ai toujours, plus ou moins longtemps avant l'apparition des accès, constaté quelques-uns des phénomènes qui ont été regardés par presque tous les auteurs comme précurseurs des convulsions éclampsiques. Je citerai comme ceux qui me semblent avoir la plus grande importance la céphalalgie occipitale ou frontale, des troubles variés de la vision, le malaise épigastrique, les vomissements. La réunion de plusieurs d'entre eux mé ́rite surtout d'être prise en sérieuse considération. Une observation attentive peut et doit conduire à un traitement préventif qui aura souvent, j'en ai la conviction, un succès complet.

Tout ce qui se rapporte à la marche et à la terminaison de la maladie, à son diagnostic et à son pronostic est étudié avec détail. En disant qu'il est rare de ne voir qu'un seul accès se manifester, l'auteur est dans le vrai; mais cela peut arriver, et alors le retour à la santé est ce qu'on observe le plus communément. Il n'est pas impossible cependant qu'une première attaque soit mortelle. J'ai eu la douleur de perdre de cette manière, il y a quinze ans, la première femme qui s'était confiée à mes soins dans ma pratique particulière. En moins de trois minutes, et malgré tout ce que je pus faire, elle avait définitivement cessé de vivre.

Relativement au pronostic, notre confrère considère les convulsions comme un des accidents les plus graves qui peuvent compliquer la grossesse ou le travail de l'accouchement. La vie de la mère et celle de l'enfant sont sérieusement mises en question. Il est encore incontestable que cette gravité augmente avec la multiplicité, le rapprochement de l'intensité des accès, selon qu'il y a perte complète ou incomplète de la connaissance après chacun d'eux, que la santé du sujet est plus mauvaise et qu'on a plus tardé à faire intervenir un traitement convenable. Pour lui encore, et en cela il partage l'opinion commune, le danger est plus sérieux quand le travail est si peu avancé, qu'on se trouve dans l'impossibilité de hâter la prompte terminaison de l'accouchement. Il est encore généralement admis que la gravité est

d'autant plus grande que la grossesse est moins avancée. A ce sujet, je ne puis que répéter ce que je disais en 1854 à l'Académie dans le mémoire que j'eus l'honneur de lui lire :

« Pour mon compte, je serais presque tenté d'établir une proposition contraire, en admettant toutefois qu'un traitement énergique et convenable soit employé en temps opportun. Les chances de salut ne sont pas en effet, comme on l'a écrit presque partout, dans la prompte dilatation du col et dans la déplétion de l'utérus; ce résultat, qu'on est malgré soi porté à désirer, et pour lequel on se livre trop souvent à des manœuvres dangereuses, n'entraîne pas habituellement, comme on l'avait espéré, la cessation des phénomènes convulsifs. Loin de là, on les voit souvent se multiplier avec une énergie nouvelle, et les faits nombreux qu'il m'a été donné d'observer m'ont prouvé qu'ils avaient alors plus habituellement une terminaison fatale; de sorte qu'à mon avis l'éclampsie qui survient pendant le cours du travail, comme aussi celle qui n'apparaît qu'après la délivrance, constiture pour la mère un accident beaucoup plus sérieux que celle qui éclate pendant la grossesse, alors que la contractilité utérine n'a pas encore été mise en jeu. Cette proposition est d'ailleurs conforme à l'opinion d'un homme dont le nom fait justement autorité dans la science (je veux parler de Rhamsbotham). ›

Puis j'ajoutais que l'observation qui avait été le point de départ de ma communication était entièrement favorable à cette manière de voir, et qu'il me serait facile d'en citer plusieurs autres qui, sous ce rapport, parlaient entièrement dans le même sens.

Depuis, le nombre de mes observations s'est accru, et m'a naturellement confirmé dans ma croyance.

Les relevés statistiques fournis par les auteurs, celui de Merriman et de plusieurs autres, ne laissent aucun doute sur les dangers qui entourent le produit de la conception pendant le cours de l'éclampsie. L'intensité et surtout la durée des accès sont beaucoup plus importantes à considérer sous ce rapport que leur fréquente répétition. Un seul, comme on l'a vu, peut être mortel. Il me semble cependant que, toutes choses étant égales d'ailleurs, la vie du fœtus est d'autant plus facilement compromise que la grossesse est plus près de son terme. Cette opinion, qui paraitra peut-être singulière quand on songe à la fragilité de l'embryon dans les premiers mois de la gestation, sera sans doute plus facilement acceptée si l'on admet avec moi

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que la mort trouve son explication dans les troubles que les phénomènes convulsifs apportent dans la circulation maternelle et dans les modifications qu'ils impriment à la constitution du sang. Sous ce rapport, l'état de la femme peut être comparé à une véritable asphyxie, et la cessation de la vie dans le produit de la conception s'explique tout naturellement, parce que celui-ci ne reçoit plus pendant chaque accès la quantité de sang dont il a besoin, ou parce que ce sang ne possède plus les qualités nécessaires. Il est même probable que ces deux conditions sont habituellement combinées et conduisent plus

surement au résultat fatal.

Les choses se passant comme je viens de le dire, ne comprend-on pas que moins l'organisation de l'œuf scra avancée plus eelui-ci pourra résister à certains troubles passagers de la circulation utérine, et trouver encore dans un sang très-peu artérialisé des éléments suffisants pour le maintien de sa vie? Quant à moi, je n'entrevois dans cette explication aucune hérésie physiologique.

J'ai déjà dit que la seconde partie du mémoire de M. Mascarel était consacrée au traitement de l'éclampsie.

Depuis les moyens empiriques préconi sés par les médicastres, dit notre confrère, depuis le crapaud desséché et appliqué entre les épaules, ou les clefs appelées de Saint-Pierre placées sur la nuque, comme cela se pratique encore dans certaines campagnes, jusqu'aux médications les plus rationnelles, il est peu d'agents thérapeutiques qui n'aient été opposés aux convulsions en général et à celles des femmes en couches en particulier. Ici, comme presque toujours, chacun s'est laissé dominer par l'idée qu'il s'était faite de la nature de eette terrible maladie. Pour ceux qui l'ont considérée comme une simple névrose, les antispasmodiques ont paru le moyen par excellence; ceux qui ont cru en trouver la cause dans le développement de l'utérus ont pensé qu'il n'y avait de chance de salut que dans la déplétion de cet organe.

D'autres ont fait intervenir un état saburral des premières voies, la présence de vers intestinaux et beaucoup d'autres conditions pathologiques qu'il serait trop long d'énumérer.

Notre confrère se range sous la bannière des partisans des émissions sanguines à haute dose. Sa conviction à cet égard paraît fortement arrêtéc et fondée surtout sur son expérience personnelle. Il s'appuie d'ailleurs sur l'opinion de quelques bommes haut placés dans la science. It rap

pelle en particulier celle de Levret et de Burns, et emprunte à ce dernier la citation suivante: «La saignée a fait rarement du mal et peut faire beaucoup de bien, elle est peut-être le seul moyen de conserver la vie; et si cet ouvrage ne sert qu'à graver ce fait dans l'esprit d'un seul lecteur, je ne regretterai pas de l'avoir écrit. »

Quant à moi, il y a déjà longtemps que j'ai été conduit, par ce que j'ai observé dans ma pratique et dans celle de nos maîtres, à considérer les émissions sanguines comme le seul moyen sur lequel on puisse véritablement compter, et qui doit faire la base du traitement qu'on oppose aux convulsions. Je demande la permission de rappeler ce que je disais à ce sujet dans mon mémoire lu en 1851 devant l'Académie :

« C'est dans les émissions sanguines générales qu'il faut chercher la médication curative par excellence. Mais, pour être efficaces, les saignées doivent être abondantes et ordinairement répétées plusieurs fois dans l'espace de quelques heures. Il est bien entendu, d'ailleurs, qu'il faut les mesurer sur la constitution du sujet et sur l'effet qu'elles produisent. Si une seule a suffi dans certaines circonstances, il n'en est pas ainsi habituellement. J'ai eu plusieurs fois recours à quatre saignées dans l'espace de cinq heures, de manière à retirer plus de 2,000 grammes de sang, et je crois devoir à cette pratique des succès incontestables. La pâleur du visage, l'infiltration partielle ou générale, la constatation de l'albuminurie ne doivent pas faire renoncer à cette thérapeutique, que l'expérience m'a appris être la plus utile, même dans ces conditions. Les personnes qui n'ont pas eu de suffisantes occasions pour étudier ce qui se passe chez les femmes éclampsiques pourraient se laisser arrêter par la petitesse du pouls qui se rencontre si communément. Il faut savoir que cet état seul ne contre-indique pas les saignées. A peine la veine est-elle ouverte qu'on voit le pouls se relever, devenir large et plein, et ces phénomènes se reproduire après chaque émission sanguine. Le point capital, c'est de recourir de bonne heure à l'emploi de ce moyen. Pour qu'il soit utile, il ne faut pas attendre que les troubles profonds et généraux qui signalent les accès aient placé les organes indispensables à la vie dans des conditions où ils ne puissent plus reprendre l'exercice de leurs fonctions. »

Pour bien poser les bases du traitement qui lui paraît le plus convenable et qu'il a adopté dans sa pratique, M. Mascarel s'occupe d'abord des cas dans lesquels le

travail n'ayant pas commencé, le col de la matrice n'a encore subi aucun changement. Il veut qu'on débute toujours par de larges saignées. Il conseille même, dans les cas graves, d'ouvrir simultanément une veine à chaque bras. Il repousse l'artériotomie, parce qu'elle n'offre pas les avantages qu'on lui accordait autrefois et parce qu'elle n'est pas toujours exempte de dangers. Après les saignées générales, si la femme est forte et si la maladie date de quelques heures seulement, il fait placer des sangsues en grand nombre autour des malléoles; dans le cas contraire, il les établit en permanence, et deux par deux seulement.

Puis doivent venir les sinapismes promenés sur les membres ou appliqués entre les deux épaules. Il les préfère aux vésicatoires, qui ont été également préconisés. Je dirai à cet égard que, pour mon compte, je suis très-disposé à repousser d'une manière générale non-seulement les révulsifs précédents, mais encore presque tous ceux qui ont été vantés. Je comprends dans cette exclusion surtout ceux qui n'agissent qu'à la condition de produire une douleur plus ou moins vive, ou tout au moins une sensation pénible. J'ai remarqué bien souvent que tout ce qui est de nature à irriter ou à impressionner désagréablement les malades avait une influence marquée sur le retour des accès, et je suis convaincu que ce qu'il y a de mieux à faire une fois qu'on a rempli les indications fondamentales, c'est de les laisser dans le repos le plus absolu. Le toucher lui-même ne doit être pratiqué qu'avec beaucoup de réserve. J'ai vu des femmes qui ne pouvaient y être soumises sans qu'une nouvelle attaque se manifestât; je ne crois pas non plus, quoi qu'en dise notre confrère, qui invoque à ce sujet l'autorité du père de la médecine, que les bains soient un moyen à employer. Pendant l'accès, ce serait matériellement impossible; pendant la période de coma, outre les difficultés de l'exécution et la crainte de l'apparition d'une nouvelle attaque, il n'est pas bien sûr qu'on eût à se féliciter d'y avoir recours.

Mais je suis de son avis pour exclure Jes narcotiques et les vomitifs. Je passe sous silence une foule d'autres petits moyens qui se trouvent indiqués partout et dont les avantages sont au moins problématiques. Je dirai seulement un mot du chlo. roforme, que M. Mascarel réserve, ainsi que les antispasmodiques, pour les cas où les émissions sanguines sont tout à fait inapplicables. Les quelques essais qui ont été faits sous ce rapport ne me paraissent pas encourageants, et à mon sens le rai

sonnement ne conduit pas à l'emploi de cet agent.

Mais il est une autre question d'une grande importance, qui, sans avoir été négligée dans le travail dont je vous rends compte, n'a pas été peut-être suffisamment étudiée je veux parler de l'opportunité de la provocation de l'accouchement ou même de l'avortement, selon l'époque de la grossesse où se manifeste l'éclampsie. Il y a quelques années à peine, le problème était résolu par presque tous les accoucheurs dans le sens de l'affirmative.

Aujourd'hui beaucoup se montrent plus réservés, et je suis de ce nombre. Les faits très-multipliés qui prouvent que les convulsions peuvent persister et même se terminer par la mort après la déplétion spontanée ou artificielle de l'utérus m'ont depuis longtemps convaincu que là n'était pas l'indication première et fondamentale. Que pourrait-on espérer, par exemple, de la provocation de l'avortement? Ne sait-on pas que, quelle que soit la méthode à laquelle on s'adresse, plusieurs heures, plusieurs jours même sont souvent nécessaires? L'éclampsie avec sa marche la plus habituelle permettrait-elle de compter sur un moyen dont l'action devrait être aussi tardive? Mais ce n'est pas tout. Ceux qui ont observé avec soin beaucoup de femmes éclampsiques ne savent-ils pas combien tout ce qui est de nature à irriter, combien surtout les excitations qui s'adressent à l'utérus ont une influence fâcheuse sur la marche et le retour des accès convulsifs? Ce qu'il y a de mieux à faire sous ce rapport, c'est de s'en rapporter à la nature, qui sollicite souvent des contractions spontanées qui conduisent plus sûrement à l'expulsion du produit de la conception lorsqu'elle est inévitable.. On ne s'expose pas de la sorte à compromettre volontairement certaines grossesses qui peuvent résister à l'orage, quand on a été assez heureux pour le conjurer par les émissions sanguines.

J'ai communiqué dans le temps à l'Académie une observation qui prouve qu'il peut en être ainsi. Elle est relative à une femme qui fut atteinte d'éclampsie à la fin du troisième mois de sa grossesse, et qui, malgré seize attaques bien caractérisées. arriva ensuite à son terme, et accoucha sans nouvel accident d'un enfant vivant. Ce fait, quant au résultat, est loin d'être unique dans la science; j'en ai moi-même recueilli plusieurs.

Dans la seconde condition que je suppose, on n'a pas même pour excuse l'inté rêt de l'enfant, qui n'est pas viable Mais en supposant que la grossesse ait atteint le

huitième ou le neuvième mois, cet intérêt tout puissant qu'il soit doit-il faire adopter une conduite différente? Je ne le pense pas davantage. A la provocation de l'accouchement sollicité à cette période de la gestation s'adressent tous les reproches dont j'ai parlé en discutant l'opportunité de l'avortement provoqué. Ici encore le résultat désiré ne peut être espéré que dans un avenir trop éloigné pour qu'il puisse être considéré comme un moyen de salut soit pour la mère, soit pour l'enfant. La marche de l'éclampsie est ordinairement trop rapide et trop aiguë. Il faut une médication plus prompte et plus sûre, et, je l'ai déjà dit, c'est dans les émissions sanguines qu'on peut espérer la trouver.

L'accouchement forcé, qui de prime abord semble exclure la plupart des inconvénients que je viens d'indiquer, ne me semble pas devoir être plus favorablement accueilli. Ce n'est pas une chose aussi simple qu'on pourrait se l'imaginer que de pénétrer violemment dans la cavité d'un utérus dont le col, encore long et résistant, est plus ou moins complétement fermé. C'est cependant ce qui a lieu le plus habituellement, puisque la plupart des éclampsiques sont primipares. Mais en admettant qu'après avoir fait ou non des incisions la main ait franchi l'obstacle, ceux qui ont exécuté de semblables opérations savent que de nouvelles difficultés peuvent se présenter pour l'extraction de l'enfant, qui ne trouve pas une voie suffisamment préparée, et dont la vie court les plus grands dangers, surtout si on l'engage par l'extrémité pelvienne. Du côté de la mère, les accidents à redouter ne sont pas moins sérieux. Qui pourra répondre, par exemple, qu'une déchirure de l'utérus ne sera pas la conséquence d'une semblable manœu→ vre? Je ne veux pas insister davantage; qu'il me suffise d'ajouter qu'ici encore, outre qu'on n'est pas sûr de se rendre maitre des convulsions, on compromet certainement une grossesse qui, à l'aide d'une tout autre médication, aurait pu peut être parvenir jusqu'à son terme. Dans le courant de l'hiver de 1836, j'ai assisté mon savant maître, M. P. Dubois, dans une opération de ce genre, qu'il pratiqua sur une dame de Montrouge. Après plu sieurs incisions pratiquées sur le col, le forceps fut appliqué au-dessus du détroit supérieur. Un enfant mort fut extrait. Les convulsions, loin de s'arrêter, semblèrent prendre une nouvelle intensité, et la mère ne tarda pas à succomber. Il nous a souvent répété, dans ses leçons cliniques, qu'il n'avait pas été plus heureux dans d'autres cas analogues Je puis ajouter que

moi-même, dans deux circonstances, j'ai obtenu un résultat tout aussi déplorable, et que je me crois suffisamment éclairé sur ce point pour proscrire à tout jamais l'accouchement forcé dans la condition que j'ai supposée. Sans être rares, les circonstances précédemment indiquées ne sont cependant pas celles qu'on observe le plus communément; souvent, au contraire, les convulsions n'éclatent qu'alors que le travail s'est déclaré depuis un temps plus ou moins long, ou bien l'éclampsie, qui s'est manifestée la première, a eu pour conséquence de mettre en jeu la contractilité de la matrice, et dans les deux cas, lorsque le médecin est appelé, il constate que le col de l'utérus a subi des modifications variables, mais dont le degré doit être pour lui la source d'indications diverses.

Supposons d'abord que ce col soit complétement dilaté ou suffisamment dilatable, faudra-t-il de prime abord songer à terminer l'accouchement et se hâter d'intervenir par le forceps ou la version? Comme dans les cas précédents, c'est par des émissions sanguines qu'il convient de débuter. Seulement ici, l'extraction de l'enfant étant en général chose facile, ne devra pas tarder à y recourir pour le soustraire, s'il est possible, aux dangers que lui font courir les phénomènes convulsifs de la mère. Peut-être celle-ci, de son côté, trouvera-t-elle quelques avantages dans la prompte déplétion de l'utérus et dans l'écoulement de sang qui en est habituellement la conséquence.

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Mais si le col, quoique en partie dilaté, ne l'est pas encore suffisamment pour qu'on puisse agir par les moyens ordinaires, estil utile, lorsqu'on a rempli les indications que je regarde comme fondamentales, de brusquer l'accouchement et de pénétrer dans l'utérus, soit avec la main, soit avec l'instrument, à travers l'orifice préalablement incisé? Je crois que le parti à prendre devra être dicté par l'état de l'enfant. Si l'auscultation permet de constater qu'il est encore vivant, l'espoir de lui conserver la vie légitimera complétement une semblable opération; si, au contraire, on acquiert la certitude qu'il a cessé de vivre, pourquoi se presser, s'il est vrai, comme je le pense, que l'intérêt bien entendu de la femme n'a pas grand'chose à gagner à une intervention aussi brusque et aussi violente?

Le traitement de l'éclampsie qui survient après l'accouchement ou qui, ayant commencé pendant la grossesse, dure encore après la déplétion de l'utérus, découle naturellement de tout ce qui précède. Si la saignée a été poussée sans succès jus

qu'à ses dernières limites, on peut, ainsi que le propose notre confrère, insister sur les antispasmodiques et les révulsifs de toutes sortes. C'est encore sur elle qu'il faut fonder tout son espoir si les forces de la malade permettent d'y recourir encore. Après avoir rendu justice aux autres parties du mémoire de M. Mascarel, M. Depaul propose les conclusions suivantes, qui sont adoptées à l'unanimité :

1o Le remercier de sa nouvelle et intéressante communication;

2o Renvoyer son mémoire au comité de publication;

3o Inscrire son nom sur la liste des can. didats aux futures places de correspondants.

M. CAZEAUX. Je désire présenter quelques observations au sujet de quelques points sur lesquels je ne suis pas tout à fait d'acccord avec M. le rapporteur. Je me bornerai à la question relative à l'albuminurie des femmes enceintes et à sa coïncidence avec l'éclampsie. M. Depaul m'a prêté à cet égard une opinion qui n'est pas tout à fait la mienne. J'ai dit et j'ai écrit dans le temps, en effet, que toutes les fois qu'on avait examiné l'urine des femmes éclampsiques on y avait trouvé de l'albumine. J'avais cru jusqu'alors que c'était une loi générale qui ne souffrait pas d'exception; mais depuis cette époque j'ai dû modifier un peu mon opinion, et je l'ai formulée dans ma dernière édition en disant que dans l'immense majorité des cas, et à de très-rares exceptions près, on trouve de l'albumine dans l'urine des femmes enceintes éclampsiques, ce qui infirme à peine, comme on le voit, na première proposition.

Parmi les observations que M. le rapporteur a réunies pour infirmer cette proposition, il faut établir une distinction. Il en est quelques-unes dans lesquelles le fait de l'absence d'albumine n'est pas douteux; mais il en est d'autres à l'égard desquelles le doute est permis. Tous les médecins ne sont pas également familiarisés avec ce genre de recherches, et il est d'ailleurs une foule de causes d'erreur qui peuvent leur avoir donné le change. Ainsi l'absence d'albumine dans les cas cités par M. Depaul (je parle des faits qu'il a empruntés à divers auteurs et non des siens propres, que je ne mets pas en doute) est un fait qui aurait besoin d'être examiné de plus près. Par exemple, je vois que dans quelques-unes de ces observations on n'a pas toujours employé les deux modes de réactifs si connus, la chaleur et l'acide nitrique; on n'a pas pris surtout la précaution d'indiquer si les

urines étaient acides ou alcalines; enfin, on n'a pas non plus tenu compte des précipités d'urates qui ont lieu quelquefois par l'action de l'acide nitrique, et qui peuvent en imposer à des personnes peu attentives pour un dépôt d'albumine.

On voit à combien de causes d'erreur sont sujettes ces sortes de recherches ; et en supposant qu'on ait évité ces causes d'erreur, qu'est-ce que ce sera encore que sept à huit faits, si l'on tient compte que ces recherches sont faites aujourd'hui par tout. La loi de coïncidence de l'albuminurie avec l'éclampsie n'en reste donc pas moins établie pour l'immense majorité des cas.

M. Depaul a été plus loin. Il a dit que l'albuminurie était un effet et nullement une cause. C'est une proposition qui est au moins exagérée. M. Depaul dit avoir constaté que sur 41 femmes albuminuriques 7 seulement avaient eu des attaques d'éclampsie, et il trouve que ce n'est pas beaucoup. Mais l'éclampsie est une affection rare, et on peut en évaluer la proportion à 1 cas sur 2 ou 300 accouchements. peut-être. Or, si vous avez trouvé 7 cas de coïncidence d'albumine avec l'éclampsie dans une affection qui ne se montre qu'une fois sur 300 accouchements environ, on devra convenir que c'est encore beaucoup.

Mon opinion à cet égard trouve encore un appui dans un rapprochement avec l'affection convulsive épileptiforme que l'on observe quelquefois dans la maladie de Bright. On sait, d'un autre côté, que M. le professeur Paul Dubois a également rencontré l'albuminurie chez les enfants éclampsiques. Comment pourrait - on, après ces rapprochements, persister à dire que l'albuminurie a suivi l'éclampsie et qu'elle ne l'a pas précédée? qu'elle n'a par conséquent avec elle aucun lien étiologique ?

M. Depaul rapporte deux cas dans lesquels l'albuminurie n'aurait été constatée qu'après l'éclampsie; il y a là de quoi m'étonner, mais cela ne prouverait pas que l'albuminurie succède à l'éclampsie, qu'elle n'en est que la conséquence, lorsque, surtout dans beaucoup d'autres cas, on l'a constatée avant. Ces faits sont évidemment deux faits exceptionnels qui ont quelque chose d'insolite et de surprenant, et auxquels je ne croirais pas s'ils ne m'étaient affirmés par M. Depaul.

Ainsi la coïncidence fréquente et habituelle de l'albuminurie avec l'éclampsie. le rapprochement de ce fait avec les accidents convulsifs des sujets atteints de maladie de Bright et avec l'albuminurie con

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