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Je ne conteste pas, que dans tout lieu, ou réunion d'hommes, soumis à des règlements de propreté et à une surveillance constante; partout enfin, où l'on pourra saisir la gale à son début, on ne puisse arrêter promptement ses progrès, par un traitement quelconque, susceptible de détruire promptement l'açarus qui en est la cause. Mais mon expérience m'a rendu quelque peu incrédule contre tant de belles découvertes, dont les succès éphémères n'ont duré que ce que durent les roses, et j'attends encore aujourd'hui qu'un grand nombre de faits bien observés viennent justifier cette méthode employée dans les conditions les plus avantageuses.

Mais ce n'est pas tout de guérir la gale, et même de la guérir promptement, il faut encore chercher à éviter les récidives, dont la fréquence est en raison de la désinfection plus ou moins complète des vêtements et des objets de couchage des galeux. Or, depuis quelques années et antérieurement à la reproduction du traitement d'Helmerich, une commission, instituée en Angleterre, se livra à des recherches pour constater le meilleur mode de désinfection des vêtements et effets provenant d'individus atteints de maladies contagieuses; cette commission rechercha surtout le meilleur moyen de détruire les larves d'insectes, et après de nombreuses expériences, et la conviction acquise que ces larves pouvaient encore éclore après que les vêtements suspects avaient été soumis à des fumigations diverses, au lavage dans de l'eau bouillante, etc., ils reconnurent que le seul moyen de les annihiler était de soumettre ces vêtements à une très-haute température dans un séchoir, où l'air chaud serait porté de 100 à 130 degrés centigrades. J'eus l'occasion de causer de cette expérience avec un membre de l'administration de nos hôpitaux dans le courant de l'été de 1851; cet homme zélé et instruit m'assura qu'une semblable chambre à air chaud ferait partie des constructions nouvelles, alors en projet pour l'hôpital Saint-Pierre. Et en effet ces constructions existent aujourd'hui, le lieu de désinfection est établi et ne tardera pas à fonctionner.

Voilà, Monsieur le Rédacteur, l'histoire réelle du traitement rapide de la gale, et des moyens de désinfection des vêtements des galeux dont on a fait tant de bruit et l'objet de tant de réclames depuis quelque temps, dont tour à tour les journaux politiques et l'Académie ont été saisis, et que l'on a tenté de faire passer pour une découverte ou une invention nouvelle; mais en homme impartial, et désireux de rendre à César ce qui appartient à César, j'ai cru utile de vous adresser la présente communication, avec prière de l'insérer dans le prochain N° de notre journal. Comme vous voyez, je rétablis les faits avec franchise et sincerité, et je pense que vous partagerez mon opinion, à savoir que dans tout ceci il n'y a d'autre invention ou découverte nouvelle, que celle du mode de désinfec tion des vêtements des galeux que nous devons aux Anglais; et que, quant au traitement d'Helmerich, par le savon vert et la pommade sulfuro-alcaline qui porte son nom, ce traitement, qui date de 1810, vient d'être judicieusement rétabli par MM. Hardy et Bazin, et est généralement adopté dans nos hôpitaux. Mais je vous prie de remarquer que, jusqu'ici, je n'ai pu encore obtenir de guérison de nos galeux au bout de deux heures de traitement, je m'estime déjà très-heu

reux quand je parviens à les guérir au bout de deux ou trois jours, ce qui ne surprendra pas ceux qui connaissent l'état dans lequel se présentent ordinairement ces malades.

Recevez, Monsieur le Rédacteur, les nouveaux témoignages de ma pro

fonde estime.

Bruxelles, le 7 février 1854.

Dr JOLY,

Chirurgien de l'hôpital civil de Saint-Pierre, à Bruxelles.

11. REVUE ANALYTIQUE ET CRITIQUE.

Médecine et Chirurgie.

SUR UNE NOUVELLE FORME DE GALE; par le professeur BOCK, de Christiana. (Deutsche Klinik, 4855, no 2). Extrait par F. BINARD, médecin de régiment.

Outre les différentes formes de gale décrites surtout dans ces derniers temps par Simon et Bourguignon, le docteur Bock croit devoir en admettre une nouvelle, avec formation de croûtes, qu'il a eu l'occasion d'observer en 1851, chez une jeune fille de 15 ans, d'une grande maigreur et non encore menstruée. Dans la paume de la main et à la surface dorsale des doigts on rencontrait des croûtes d'une teinte sale, d'un blanc grisâtre, d'une épaisseur de deux à trois lignes, qui adhéraient fortement à la peau et étaient d'une consistance telle qu'on pouvait les couper comme l'écorce d'un arbre. Les doigts étaient à demi fléchis et on y déterminait de la douleur quand on voulait les étendre : les ongles étaient aussi dégénérés, épais et rugueux; on observait les mêmes altérations à la plante du pied et aux orteils. La marche déterminait beaucoup de douleur, elle était aussi embarrassée. Les coudes, les fesses, la partie postérieure des lombes et quelques points du dos, la partie chevelue de la nuque, les parties latérales du cou, étaient recouverts de croûtes semblables, de la même épaisseur.

Après que celles-ci eurent été enlevées, on vit que la peau était d'un rouge humide et offrait des inégalités. La peau des autres parties du corps présentait aussi une rougeur érythémateuse, sur les jambes on rencontrait des taches arrondies, brunâtres, sans élévation au-dessus de la peau, et çà et là, aux extrémités, apparaissaient quelques vésicules et des pustules. D'après les renseignements qu'on put obtenir, la maladie datait de deux ans

et avait commencé aux mains et aux pieds, où la peau avait semblé s'être crevassée. Au bout de quelque temps les croûtes avaient apparu d'abord aux extrémités, plus tard aux fesses, et en dernier licu, depuis l'hiver, à la tête. Les bains chauds détachaient toujours facilement les croûtes, et à leur place la peau se montrait rouge et enflammée; de nouvelles croûtes ne tardaient pas d'ailleurs à y reparaître. Le professeur Bock eut recours au microscope pour examiner ces croûtes, et ce ne fut pas sans un grand étonnement qu'il vit qu'elles étaient constituées, pour ainsi dire, totalement par des sarcoptes de la gale (l'animal en entier, des œufs, leur enveloppe et les excréments constituant le tout). Tous les cirons qui se trouvaient au milieu des croûtes étaient morts, on n'en rencontra qu'une seule fois un vivant; mais il fut impossible de découvrir les sillons véritables. Il est remarquable que peu de temps après l'entrée de la malade à l'hôpital, l'infirmière et peu à peu tous les malades qui se trouvaient dans la même salle, soit qu'ils eussent eu ou non des relations avec la malade, furent attaqués de la forme ordinaire de la gale, qu'on guérit en peu de temps au moyen de la pommade de Vienne (R. Cera alba, part. A; Flor. sulfur. et picis liquid. ana part. 1 112; Sapon. virid. et axung. ana part 3).

La malade avait aussi communiqué la gale à toutes les personnes qui avaient été en contact avec elle dans ses foyers. On prescrivit d'abord des bains tièdes, et plus tard, comme la malade se plaignait de fortes douleurs avec élancement dans la plante des pieds, on fit faire des frictions générales avec la pommade de Vienne, ce qui amena la chute des croûtes. Après un

nombre de douze frictions, on fit prendre un bain chaud et il ne resta plus alors que quelques petites croûtes à la paume des mains, à la plante des pieds et à la nuque. Au bout de trois semaines, tout le corps se couvrit d'une infinité de vésicules acuminées, il en vint même sur la figure, elles prirent de l'accroissement et aux mains elles devinrent pustuleuses : cette nouvelle éruption fut accompagnée de prurit, mais on ne put d'ailleurs constater l'existence d'aucun sillon. Autour des bords des croûtes qui avaient persisté, on vit alors des croûtes nouvellement formées et que le microscope fit reconnaître comme constituées par deux couches : une superficielle, plus transparente, qui dépendait des cellules de l'épiderme, et une autre, placée plus profondément, qui était distincte de la précédente par la présence des sarcoptes et présentait tout à fait les mêmes. caractères que les anciennes croûtes, de sorte que celles-ci étaient aussi formées sous l'épiderme. Après de nouvelles frictions, la guérison de la malade fut complète; sa constitution d'ailleurs éprouva aussi une grande amélioration.

(Archives belges de médecine militaire.)

BONS EFFETS DE L'EMPLOI DE LA NOIX voMIQUE CONTRE DES VOMISSEMENTS, ET DE L'ACÉTATE DE CUIVRE CONTRE DES CRAMPES LIÉES A LA GROSSESSE. L'acétate de cuivre administré à l'intérieur n'a guère été expérimenté en France que contre les affections cancéreuses; les bons résultats consignés dans l'observation suivante nous engagent à enregistrer le fait publié par M. Lobach. Une femme de 43 ans, enceinte pour la sixième fois, sujette aux crampes pendant ses grossesses antérieures, fut prise, dans le cours de cette sixième grossesse, de crampes plus fortes que les précédentes et, en même temps, de vomissements tellement opiniâtres que l'estomac ne supportait aucune espèce d'aliment; la maigreur était devenue extrême. M. Lobach prescrivit la teinture de noix vomique, à la dose de 3 ou 4 gouttes toutes les deux heures, médicament qu'il avait souvent employé avec succès dans des cas semblables. Les vomissements s'arrêtèrent, mais les crampes continuèrent à se manifester avec violence. On tenta alors la teinture d'acétate de cuivre à très-faible dose, mais elle ne fut pas supportée. L'usage du fer fut suivi de quelque amélioration; mais bientôt les crampes reparurent et persistèrent, malgré l'emploi de la valériane, du castoréum et d'autres substances médicamenteuses. Peu à peu cependant, après

l'usage de la teinture d'ambre et de musc, du fer, de la noix vomique, l'état de la malade s'améliora vers le milieu de la grossesse. Trois mois plus tard, les mêmes symptômes ayant reparu, on revint à l'emploi de la teinture d'acétate de cuivre, une goutte d'abord toutes les heures, puis on augmenta insensiblement jusqu'à six gouttes; l'action fut des plus remarquables : au bout de 36 heures, tous les accidents avaient cessé. La fin de la grossesse fut encore très-orageuse; cependant on parvint à soulager la malade, et l'on combattit de nouveau les crampes par l'emploi de l'acétate de cuivre. Cette femme mit au monde un enfant délicat, qui ne parut pas être tout à fait à terme. Les suites de couches ne présentèrent rien de particulier.

Pour nos lecteurs, qui ont eu déjà sons les yeux bon nombre d'observations de cas de vomissements, pour ainsi dire incoercibles, ayant cédé à l'usage de la noix vomique et de son alcaloïde, nous passerions sur cette partie de l'observation; mais nous devons faire mention à ce propos de la remarque faite par M. Lobach, c'est que, dans tous les cas dans lesquels la noix vomique s'est montrée efficace, le médecin dit qu'il existait toujours une affection quelconque du foic, plus ou moins développée. Quant à l'acétate de cuivre, on a remarqué avec quelle rapidité il a calmé les crampes. L'auteur a été conduit à en faire usage, par les bons succès qu'il en avait retirés dans les crampes des hysté riques et dans les paralysies, suites d'apoplexie. (Verhandlungen der phys.-méd. Vercin Wurzburg et Bull. gen. de thérap.)

DE L'EMPLOI DE L'ESSENCE D'ORANGE CONTRE LES NÉVROSES GASTRIQUES. M. le docteur Hannon vient d'appeler l'attention des praticiens sur l'efficacité de l'huile essentielle d'écorce d'orange dans certains cas de névroses gastro-intestinales, en publiant dans la Presse médicale belge l'histoire de cinq malades chez lesquels cette essence lui a rendu un très-grand service. Administrée à des doses élevées, elle irrite énergiquement la muqueuse gastrique et produit de la céphalalgie; mais à la dose de quelques gouttes (6 à 7) sur du sucre, elle agit comme stomachique et n'entraîne aucune incommodité. Elle peut se prescrire de cette manière toutes les fois qu'elle sera indiquée, à la dose de 6 à 8 gouttes par jour, en deux fois, et à 2 heures d'intervalle dans la matinée. Voici du reste comment M. Hannon a exposé les indications et les contre-indications à l'emploi de cette

essence.

La gastralgie, le pica, le pyrosis, la houlimie se rencontrent souvent en même temps que la grossesse, l'épilepsie, l'hypochondrie. On devra toujours tenir compte des symptômes concomittants, qui dans ces divers cas suffiront pour éviter l'erreur. La gastrite et la gastro-entérite sont plus difficiles à distinguer, surtout si la gastralgie ou la gastro-entéralgie sont les seuls symptômes par lesquels la névrose se manifestc.

› Dans la névrose gastro-intestinale les symptômes les plus ordinaires sont les suivants : Douleur déchirante, aiguë, vive, de nature fort variable, rémittente ou intermittente, diminuant par la pression, ou tout au moins ne s'aggravant pas, plus vive le matin et sous l'influence d'émotions pénibles. Gonflement de l'épigastre, sécrétion gazeuse, éructations, bâillements, vomissement de matières muqueuses, digestion facile des viandes rôties et du pain, constipation, selles naturelles, urines limpides, abondantes. Battements épigastriques, palpitations, dyspnée, étouffement, anxiété précordiale, fièvre nulle, chaleur naturelle de la peau, désordres nerveux, exaltation des sens, expression et couleur du visage naturelles, irascibilité, morosité, conservation de l'embonpoint. Tempérament nerveux et lymphatique, affections morales; nourriture malsaine, incomplète, végétale, boissons aqueuses.

» Avec tous ces symptômes réunis, ou avec chacun d'eux en particulier, l'essence d'orange pourra s'administrer avec la certitude d'amener la guérison; son emploi n'exclut, du reste, pas les autres ressources qu'offre la thérapeutique.

Il faudrait, au contraire, se garder de la prescrire dans les circonstances suivantes Douleur continue, obtuse, sourde, nulle parfois, mais augmentant toujours par la pression, douleur plus intense après les repas, et s'exaspérant surtout le soir. Langue rouge, sèche, enduite, pointue, appétit non dépravé, nul souvent, aversion pour les viandes, le vin, les alcooliques, désir des boissons glacées ou acides. Pas de gonflement épigastrique, ni de sécrétions gazeuses, ni de baillement. Digestion facile des boissons, vomissements d'aliments, constipation, selles d'une odeur fétide, liquides, jaunâtres, séreuses ou muqueuses, urines rares, colorées, sédimenteuses. Pas de battements épigastriques, pas de palpitations précordiales, fièvre continue, chaleur de la peau augmentée. Aucun trouble intellectuel, figure grippée, sillon partant de l'aile du nez au coin de la bouche profond, peau terreuse, amaigrissement. Tempérament sanguin,

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sexe masculin. âge mûr. Abus dés aliments trop épicés, du vin, etc.

Lorsque ces symptômes existent chez un malade, il faut bien se garder de prescrire l'essence d'orange, elle aggrave toujours les douleurs; il en est de même du cancer de l'estomac.

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Lorsque la tumeur cancéreuse ne peut être perçue au toucher, lorsque les vomissements caractéristiques manquent, le diagnostic est des plus difficiles. Les douleurs lancinantes qui accompagnent la digestion sont cependant des indices à peu près certains de la maladie organique, et si la diète abolit les douleurs et que le teint du visage soit jaune paille, on pourra croire au cancer, mais ce qui ajoute au diagnostic une certitude plus grande, c'est l'emploi de l'essence d'orange, elle augmente les douleurs.

» Certaines affections rhumatismales, goutteuses, simulent parfois la névrose gastrique, mais leur caractère erratique les fait aisément reconnaitre. Le ver solitaire, enfin, provoque chez certains sujets des troubles nerveux fort singuliers, que, sans l'expulsion de quelques anneaux, on pourrait prendre pour les symptômes d'une névrose, mais s'il n'y a point cu rejet de fragments du tœnia, le diagnostic est plus difficile. Le traitement est alors un excellent moyen de diagnostic. L'huile essentielle d'écorce d'orange augmente les douleurs intestinales, et son emploi continué ne les diminue jamais comme il le fait dans la névrose gastrique. »

Nous donnons plus loin sous la rubrique pharmacie les préparations recommandées par M. le docteur Hannon.

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GLOSSALGIE INTERMITTENTE; par le docteur BUISSON. En recherchant avec le plus grand soin dans les auteurs qui ont écrit sur les névralgies, j'ai été surpris de n'y trouver aucun vestige d'une affection que j'ai eu l'occasion de rencontrer ces jours derniers, et que j'ai observée par suite avec d'autant plus de soin, que rien de semblable ne s'était encore présenté à moi, ni dans mes lectures ni dans ma pratique. Voici le fait :

Mme G., tenant une auberge dans le quartier Saint-Jean, âgée de trente-trois ans, mariée depuis dix ans environ avec un voilier. n'a jamais eu d'enfant. Douće d'un tempérament lymphatique et excessivement nerveux, elle a présenté fréquemment des accès d'hystérie sans convulsions; les menstrues ont toujours été très-régulières. Dans le courant du mois de juin, Mc G. a été atteinte d'une pleu

rodynie légère qui a cédé à une application de sangsues. Depuis, sa santé n'a nullement souffert jusqu'au samedi 9 juillet 1855. Ce jour-là, vers une heure et demie de l'après-midi, elle éprouva un frisson, ou plutôt une horripilation sur la portion radiale inférieure du bras gauche, qui dura à peine quelques minutes; puis, à ce sentiment douloureux, succéda celui de piqûres dans l'extrémité de la langue. Un goût poivré très-désagréable se fit également ressentir; la salive était abondante et s'écoulait par les commissures des lèvres; la déglutition était difficile. Si la malade essayait de parler, elle mordait involontairement sa langue, dont le volume ne permettait pas qu'elle restât complétement renfermée derrière l'arcade dentaire inférieure. Vers neuf heures du soir, toutes ces souffrances diminuèrent, si bien que, le dimanche matin, la dame G. ne crut pas devoir consulter un médecin, pensant que les accidents ne se renouvelleraient plus.

Il n'en fut cependant pas ainsi : à la même heure que la veille, l'horripilation se fit encore sentir dans le bras gauche, et bientôt après, le goût poivré, les douleurs de la langue, l'augmentation du volume, tout enfin se reproduisit comme le premier jour, pour cesser encore dans la soirée. Le lundi, la dame G. vint me consulter dans mon cabinet; les symptômes me furent assez mal énumérés; si bien que, ne soupçonnant pas la névralgie, je conseillai simplement l'usage du petit-lait et des bains entiers, la priant de me faire prévenir si les premiers accidents se renouvelaient.

Le mardi, je ne fus point appelé; ce ne fut que le mercredi, dans l'après-midi, que je vis la malade. Son état était le suivant comme les jours précédents, le bras gauche avait été le premier envahi; la langue était pâle, sa souplesse un peu diminuée, la chaleur médiocre, le volume augmenté, au point qu'elle dépassait assez le bord dentaire inférieur pour que les rugosités de la partie posté rieure du bord alvéolaire de la mâchoire supérieure se fussent comme imprimées sur la pointe. Les dents étaient fortement imprimées sur le pourtour, la salive était abondante et s'écoulait de la bouche, la malade ne pouvait avaler qu'avec peine, et la parole devenait difficile, la langue étant mordue par le fait de son échappement au travers de l'écartement des mâchoires. Plusieurs fois, j'ai surpris la malade comprimant cet organe avec un mouchoir, pour, disait-elle, le rendre moins volumineux et calmer les douleurs qu'il lui cau

sait. Tous ces phénomènes cessèrent dans la soirée. Ce jour-là, je ne fis aucune prescription, désirant m'assurer si, comme on me le disait, la nuit guérirait tout cet appareil bizarre de symptômes.

Le jeudi matin, je revins près de la dame G., et je la trouvai dans le même état que le lundi précédent, quand elle était venue me consulter chez moi le pourtour de la langue offrait encore l'estampe des dents de la mâchoire inférieure. Mais elle redoutait vivement la crise du soir; nul doute que, comme les cinq jours précédents donnaient motif de le craindre, elle se reproduirait à heure fixe et avec les mêmes accidents, si je n'étais assez heureux pour la prévenir. Dans ce but, je conseillai l'usage immédiat de pilules composées de

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Extrait de jusquiame.
Extrait gommeux d'opium. 0,05

pour six pilules à prendre avant l'accès.

Elles furent exécutées ce jour même, mais trop tard pour être toutes prises avant l'accès; celui-ci ne fut conjuré qu'en partie.

Le vendredi, même prescription; l'accès vint, mais il fut infiniment moindre. Le samedi, continuation des pilules ; point d'accès.

Dimanche et lundi, six pilules seulement furent prises dans les deux jours pour prévenir le retour de l'accès, qui ne se montra point, et à dater de cette époque la santé redevint parfaite.

Il est évident que j'ai eu affaire à une glossalgie intermittente; le diagnostic ne me parait susceptible d'aucune discussion. Frisson prenant à l'avant-bras gauche (extrémité radiale), sensation de piqûres dans le bout de la langue, augmentation de volume suffisant pour forcer le tissu de cet organe à subir l'impression des dents et empêcher la déglutition de la salive aussi bien que la libre articulation des mots, perversion du goût (goût poivré), tel est le tableau rapide de cette affection, que la même heure voit se reproduire chaque jour, pour disparaitre chaque soir et revenir encore le lendemain à la langue. devenue libre et presque saine. Les auteurs chez lesquels j'ai recherché un fait qui eût avec celui-ci quelque analogie, ne m'en ont présenté aucun. Tous ont décrit les lésions physiques, les inflammations idiopathiques symptomatiques de la langue, les abcès qui terminent les inflammations; tous ont décrit des prolongements

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