Images de page
PDF
ePub

tre fois vous trouvez un liquide qui est roussâtre, c'est-à-dire qui ressemble à de l'eau dans laquelle on aurait lavé de la chair; il y a même des grumeaux, ou bien encore le liquide est brunâtre et participe par sa consistance de celui des hydropisies enkystées. Dans ce cas, vous pouvez être certain qu'il y a un corps étranger dans le ventre; cherchez et vous le trouverez.

Si nous nous appesantissons sur la nature des liquides qui s'écoulent lorsqu'on fait la paracenthèse ou la thoracenthèse, c'est que, comme nous l'avons démontré, il y a des indications précieuses pour le diagnostic de l'affection qu'on veut soigner.

Après avoir jeté un coup d'œil sur les séreuses en général, sur leurs fonctions et leurs divers états pathologiques, nous allons examiner en particulier chacune des grandes cavités closes, c'est-à-dire la plèvre et le péritoine. Si nous n'examinons pas les séreuses de la tête et du rachis c'est que jusqu'à présent l'observation ne nous a rien appris à leur égard; mais nous sommes profondément convaincu qu'on pourrait traiter sans danger l'hydrocéphale aiguë par les injections iodées. A la première occasion nous nous promettons bien de mettre cette méthode en pratique.

DU TRAITEMENT DE L'HYDROTHORAX.

Avant d'entrer dans les détails qui font le sujet de ce travail faisons connaître ce que nous entendons par thoracenthèse et les cas dans lesquels nous employons l'injection iodée.

Nous sommes convaincu, que si, en médecine comme en chirurgie, il y a eu des disputes si longues et souvent même regrettables, cela a tenu surtout au défaut de précision des mots dont on se servait pour exprimer sa pensée. C'est ainsi qu'en nous reportant à l'acception du mot empyème, nous verrons qu'il ne signifie nullement, comme on l'entend en général, une opération ayant pour but l'évacuation du pus de la poitrine, car en ne consultant que son étymologie (εv Tυop, pus dedans), on devrait l'appliquer à toutes les collections purulentes, comme on le trouve dans les anciens auteurs qui décrivent des empyèmes thoraciques, abdominaux, cérébraux, oculaires; plus tard le mot empyème s'appliqua non-seulement aux épanchements de pus dans la poitrine mais encore à ceux de sérosité, de sang, d'air, voire même à ceux de substances alimentaires, comme on le voit dans Boerhaave. Il nous semble qu'il serait plus rationnel et plus conforme au langage de nos jours qui tend à se préciser, et comme l'a proposé M. Sédillot, de désigner chacun des épanchements par un mot propre, par exemple hémothorax, pneumothorax. Du reste, Hippocrate, ce grand maître de l'antiquité, n'entendait par le mot empyème que les épanchements de pus dans la poitrine.

En employant le mot thoracenthèse, nous n'entendons que l'opération qui consiste à faire une ouverture aux parois thoraciques pour donner issue à une production anormale contenue dans leur cavité. Lorsque nous proposons l'injection iodée à la suite de la thoracenthèse, nous entendons que cette opération a été faite pour donner issue aux produits de l'inflammation de la plèvre ou du

poumon. Cela expliqué, nous dirons que la thoracenthèse, appliquée dans ce cas, a subi, comme toutes les autres méthodes, des moments de faveur et de réprobation, selon que les médecins qui en faisaient usage avaient plus ou moins bien réussi dans son application, ou bien encore selon les idées théoriques prédominantes.

De nos jours, cette opération, sans être rejetée d'une manière absolue, n'est cependant employée qu'exceptionnellement malgré la recommandation du père de la médecine de la faire le plus promptement possible, et malgré Galien qui, nourri des idées des Grecs, voulait qu'on la pratiquât de bonne heure. HalyAbbas, Cœlius-Aurélianus, la rejettent formellement; Alexandre de Tralles, Paul d'Égine n'en parlent pas; mais Benedetti, J. Vigo, A. Paré semblent se réunir pour la remettre en honneur et, cependant, ce n'est qu'à J. Fabrice, dans le 17° siècle, qu'il faut en rapporter tout le mérite.

Exemple. La conduite tenue par l'illustre chirurgien en chef de l'HôtelDieu (Dupuytren) qui, après s'être décidé un moment à se faire opérer, s'y refusa ensuite, convaincu que l'opération ne pourrait que håter sa mort ou du moins serait incapable de lui donner la vie, et à cette époque, cependant, les faits attestaient la possibilité de guérir, car Morand avait dit : « Dans les hôpitaux, › même où l'on nous soupçonne assez légèrement d'avoir plus de courage pour ⚫ les grandes entreprises, et moins d'égards pour les malades, on ne fait point › cette opération et je suis convaincu qu'il meurt quantité de gens dont un grand > nombre auraient été soulagés et plusieurs guéris par ce secours employé à › propos. Dans les dissections, ajoute-t-il, j'ai vu bon nombre d'individus qui › ne présentaient qu'une grande quantité de liquide dans la poitrine. »

Laënnec, en parlant de la thoracenthèse, dit : « Cette opération est beaucoup ⚫ moins grave qu'on ne le pense communément; son succès dépend moins de › l'état de la plèvre que de celui du poumon, et quand cet organe n'est pas > altéré trop profondément dans sa texture, l'opération doit presque toujours › réussir. ›

>

Si d'un côté, on examine les opinions émises par Boyer et Lisfranc en faveur de l'opération et, de l'autre, les opinions défavorables de Chomel et de Dupuytren, on trouvera qu'il y a une dissidence plutôt apparente que réelle; car tous reconnaissent la nécessité de l'opération. Seulement les uns veulent l'appliquer promptement, et à notre avis, ils ont raison, tandis que les autres ne veulent l'employer que comme moyen extrême, ce qui explique leurs insuccès, car dans les empyèmes chroniques il y a peu et presque point de remède. Aussi ne craignons-nous pas de poser comme loi, d'opérer le plus hâtivement possible. Car, encore une fois, ce n'est ni l'opération ni ses suites qui sont à redouter; mais bien la désorganisation, l'altération plus ou moins profonde des cavités pectorales qui sont la cause unique des succès ou des revers.

Dans cette question, il n'y a que l'opération en elle-même qui ait trouvé des approbateurs et des adversaires impitoyables. D'autres questions ont été soulevées, c'était de savoir s'il fallait se contenter de refermer la plaie comme le veut Vigo, ou bien s'il fallait la laisser ouverte, la laver et la déterger avec des

injections dans la poitrine, ou bien si, enfin, il ne fallait pas même redouter la présence de l'air.

Dans ces derniers temps, il semble que ce fût là la principale préoccupation. Car, que de moyens, que d'instruments n'a-t-on pas conseillés pour empêcher son introduction? Tantôt ce sont des canules plus ou moins ingénieuses, tantôt des espèces de pompes agissant sans que l'air puisse pénétrer dans la poitrine. C'est une des manies de la chirurgie de nos jours que de compliquer tous les moyens dont elle se sert, et de s'efforcer de substituer la machine à l'intelligence. Hé bien, une semblable chirurgie ne peut être que fatale; la nature n'ayant que des moyens simples, elle veut des moyens semblables, et la chirurgie ne sera vraiment profitable que lorsque celui qui s'y consacre pourra emporter dans sa poche tous les instruments nécessaires à l'exercice de son art.

Nous laisserons de côté la question de savoir si on doit évacuer tout le liquide d'une seule fois, ou bien en plusieurs fois. A notre sens, on ne peut porter de règle absolue à ce sujet. C'est au médecin d'en juger.

Il en est de la médecine comme de la peinture et de la musique ; il y a des choses qu'on sent, qu'on sait et qu'on ne peut enseigner.

Il y a deux questions sur lesquelles nous voulons nous arrêter un instant : c'est celle de la crainte qu'ont certains médecins de l'introduction de l'air dans la poitrine, et celle de la chronicité de la maladie.

Nous commencerons par avouer que nous ne comprenons pas les craintes que l'on a de l'introduction de l'air dans la poitrine; car tous les jours nous voyons la déchirure de vésicules pulmonaires, par suite de fractures ou de certaines plaies pénétrantes, donner issue à des quantités notables d'air, de liquides dans la poitrine, produire des emphysèmes considérables, sans que pour cela il y ait de grands dangers pour le malade; ne voyons-nous pas tous les jours des plaies d'armes à feu, par exemple, pénétrer dans la poitrine, laisser une large issue à l'air extérieur et intérieur, sans que pour cela il y ait mort inévitable? Mais rapportons l'opinion de Morand sur ce sujet, elle aura une autre valeur que la nôtre. Dans les Mémoires de l'Académie royale de chirurgie, après avoir rapporté l'observation d'une hydropisie de poitrine guérie par opération, il termine par ces réflexions: « Si l'on considère ensuite » ce que devient le poumon débarrassé de cette grande quantité d'eau ambiante, j'ai de la peine à croire qu'il se développe et qu'il s'étende sur-le-champ, au point de toucher toute la surface de la plèvre qui était humectée par l'eau. » Si cet intervalle n'est pas rempli par le poumon, il faut qu'il le soit par l'air, » et je conviens que cela répugne aux notions établies sur le danger de l'intro»duction de l'air dans les capacités intérieures. » Or, si dans l'observation de Morand on a égard aux dates où l'opération a été faite, et au moment où la plaie a été fermée, on verra que six mois se sont écoulés entre ces deux époques, et qu'on n'a pris aucune précaution pour empêcher l'air de pénétrer; bien plus, quelques jours après la première ponction, on mit dans la plaie des tentes de linge enduites d'onguent digestif; du reste, Laënnec, ce grand maître, qu'il faut toujours citer quand il s'agit d'affections de poitrine, dit : « La pénétration

D

[ocr errors]

› de l'air dans la poitrine est probablement aussi moins dangereuse qu'on ne › le croit, comme le prouvent les plaies de poitrine des malades qui ont guéri ‣ après l'opération de l'empyème. Je ne sache pas que l'ouverture de ceux qui ⚫ ont succombé contredise non plus cette opinion, ou au moins je n'ai vu aucun > exemple d'inflammation aiguë survenir dans la plèvre à la suite de l'opération de l'empyème; dans les cas mêmes où la gravité de la maladie (ajoute › Laennec) ne permet pas de fonder un grand espoir sur l'opération de l'em› pyème, on pourrait au moins tenter une ponction exploratrice : aucun dan› ger n'accompagne cette opération, la plaie se referme de suite; peut-être > même y aurait-il de l'avantage à vider aussi la plèvre dans toutes les pleuré› sies à marche chronique, quoique la nature en guérisse quelquefois de sem› blables. »

Monro est l'un des auteurs qui se sont le plus attachés à vouloir prouver que l'introduction de l'air dans les diverses cavités du corps, détermine toujours des accidents graves, et l'autorité de son nom n'a pu que contribuer à faire accrédi ter cette opinion sans plus d'examen. C'est, dit-il, par suite d'un grand nombre d'expériences sur les animaux vivants auxquels il ouvrait la poitrine pour suivre diverses observations, qu'il a reconnu que le danger est bien moins proportionné à l'étendue de la plaie, qu'au temps que les organes restent exposés à l'air, et au plus ou moins de surface qu'ils présentent. Mais indépendamment des résultats fournis par l'observation des plaies pénétrantes de la poitrine, et qui démontrent combien l'opinion de Monro est peu fondée, des expériences nombreuses faites avec soin, également sur des animaux vivants, prouvent que la présence de l'air dans la cavité des plèvres n'est suivie d'aucun accident fâcheux. Les expériences de Physick, de Nysten, d'Astley Cooper et de John Davy, de Knox, de Finsleg, ne laissent aucun doute à cet égard. Ces expérimentateurs ont reconnu que l'air injecté dans la plaie est tantôt absorbé en totalité, tantôt ne l'est qu'en partie après avoir séjourné quelquefois plusieurs jours dans la cavité de cette membrane; dans l'un et l'autre cas, on n'observe ensuite pas la moindre trace d'inflammation de la plèvre costale ou pulmonaire. John Davy a de plus constaté que l'air qu'on retrouvait alors dans la poitrine ne contient plus la même proportion d'oxygène. Ce gaz est toujours absorbé en plus grande quantité que l'azote qui se trouve au contraire en excès.

On voit, d'après ces exemples, que l'air n'a pas une influence fâcheuse sur le résultat de la guérison, ce qui nous fait rejeter d'une manière absolue tous les instruments qui ont pour but de s'opposer à l'introduction de l'air dans la poitrine ainsi que l'opinion qu'il altère les liquides contenus dans cette cavité, et amène la mort, tout en reconnaissant en même temps que l'air n'est pas absorbé; mais dirons-nous, si l'absorption n'a pas lieu, comment alors expliquer une terminaison si fâcheuse par suite d'une infection que pourrait amener le changement de nature des liquides, surtout lorsque nous voyons les liquides étre altérés lors de l'opération et les malades guérir! Allons plus loin, admettons le principe que la présence de l'air dans les épanchements de poitrine est funeste. Comment alors expliquer la mort, lorsqu'on emploie des instruments

propres à empêcher l'introduction de l'air, et entre autres moyens la canule de M. Reybard qui donne la facilité d'évacuer le liquide à mesure qu'il se forme, sans que l'air puisse pénétrer. N'est-il pas plus rationnel, plus conforme aux idées reçues, pour expliquer les divers phénomènes, de dire: que toute évacuation de liquide de la cavité thoracique est une nouvelle déperdition pour l'organisme, et que l'affaiblissement qui s'en suit n'est pas toujours en rapport avec le reste des forces vitales, sans avoir recours à des idées que rien ne justifie.

Comme nous le disait un de nos anciens maitres, quand on fait l'opération de la thoracenthèse, en général on abandonne le malade, c'est-à-dire on ne songe pas à l'usage d'autres moyens, et cependant il est digne de remarque que les chirurgiens qui ont pratiqué cette opération, et qui ont réussi, ont employé en même temps des injections dans la poitrine. Jean Vigo, par exemple, les recommande d'une manière toute spéciale. Dionis en fait un précepte. Morand, dans l'observation dont nous avons déjà parlé, fit aussi des injections. Guérand dit, après avoir donné l'observation d'une plaie pénétrante dans la poitrine chez un cavalier à la bataille de Fontenoy : « On convient assez unanimement » que les plaies pénétrantes de la poitrine, avec lésion du poumon, ne doivent point être traitées par les injections. Les plaies d'armes à feu fournissent des cas particuliers où elles semblent nécessaires et même indiqués par exemple, s'il y avait quelques indices de pourriture dans ces parties, les injections » pourraient être employées utilement pour procurer la séparation des es› carrhes, et aider par ce moyen l'ouvrage de la nature. »

D

D

D

[ocr errors]

De ce qui précède, nous pouvons conclure que l'opération de l'empyème est loin d'être aussi grave que ses adversaires le prétendent. On peut y avoir re› cours, dit M. Boudin, lorsqu'après la période d'acuité d'une pleurésie, il › reste un épanchement tellement considérable que la suffocation soit menaçante, que l'on craigne de voir échouer le traitement médical; si la collection > tend à se créer naturellement une issue au-dehors, l'opération est indiquée.. » L'introduction de l'air, ajoute le même auteur, ne produit pas tous les graves > accidents qu'on lui a imputés ; il est néanmoins prudent de l'éviter. Le procédé Reybard est le plus simple et le plus efficace. Nous regardons les injections comme un complément nécessaire de l'opération. Pour appuyer notre assertion, nous rapporterons les observations où on les a employées largement avec succès. Nous commencerons par celle du citoyen Miot, qui faisait des injections dans la poitrine.

Are Observation d'une vomique guérie par l'opération de l'empyème;
par le citoyen MIOT.

Pheadre Heinsberg, lieutenant au 1er bataillon de Strozzi, autrichien, prisonnier de guerre, âgé d'environ 25 ans, d'un tempérament bilieux, entré à l'hôpital militaire de Thionville, le 6 floréal an VIII, pour une péripneumonie inflammatoire, et, de plus, affligé depuis 15 ans d'une vomique provenant d'une pleuropneumonie, pour laquelle il avait été traité par un médecin de Cologne, en 1785.

«Le 6 floréal an VIII, à ma visite du soir, je trouvai le malade avec des symptômes très-alarmants, tels qu'une respiration très-courte, la suppression totale de l'expectoration, de grands maux de tête, une douleur gravative dans tout le lobe gauche du poumon. le pouls fort et dur, la langue et la peau sèches, une soif vive, le bas-ventre gros,

« PrécédentContinuer »