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DE MÉDECINE.

artenay iniyam (MARS 1854.)

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TRAITÉ PRATIQUE DES HYDROPISIES DES GRANDES CAVITÉS CLOSES M. LECHE, docteur en médecine, à Lyon. (Suite. Voir notre cahtede ferrier p. 152.)

DES INJECTIONS IRRITANTES DANS LES GRANDES CAVITÉS CLOSES. L'idée primitive de traiter les ascites par les injections irritantes semble appartenir à Brenner. Pour fortifier, disait-il, les viscères, il conseilla un mélange d'eau-de-vie camphrée, d'aloès et de myrrhe. Warrick se servit des eaux de Bristol et guérit son malade. Plus tard, on fit des injections avec du vin rouge et l'eau de goudron, mais sans résultat.

Broussais invoqua les vapeurs de vin. M. Lhomme tenta le même moyen sur un malade qui avait déjà subi plusieurs fois la ponction et réussit au delà de ses espérances. M. Bretonneau, en 1819, dans le but d'éclairer la question, fit quelques expériences sur des chiens. Il injecta de l'eau pure, de l'eau mêlée avec de l'eau-de-vie, de l'eau chargée avec du muriate de soude; mais nulle inflammation ne put être obtenue chez ces animaux, et toutes les matières injectées furent absorbées au bout de quelques jours. M. Van Roosbroeck, de Louvain, qui avait été frappé de l'action éminemment diurétique et sudorifique du gaz oxydule d'azote, l'injecta dans le ventre des hydropiques après la ponction. Broussais a tenté ce moyen sans succès.

La question, à cette époque, n'était pas, selon nous, dans la possibilité de guérir les hydropisies par des injections; il y avait dans la science une surabondance de faits qui venaient prouver cette impossibilité. Ce qu'il fallait, c'était de trouver un agent qui ne produisit qu'une inflammation spéciale, ou, du moins, qui n'exposât pas à des inflammations suppuratives et qui, d'un autre côté, fût assez actif pour produire des adhérences; or nous trouvons que les expériences tentées par M. Bretonneau n'avaient rien produit de semblable. Peut-être pourrait-on considérer les injections d'oxydule d'azote comme jouissant de ces propriétés; mais la difficulté inhérente à l'emploi de ce moyen l'a fait laisser de côté. A l'exemple de ce qui se passe dans le traitement de l'hydrocèle par le vin, on a tenté d'en injecter dans l'abdomen; quelques résultats heureux sont venus confirmer les espérances qu'on en avait conçues. D'un autre côté,

'de même qu'il produit quelquefois des inflammations suppuratives dans le scrotum, il en a produit dans l'abdomen, ce qui a fait rejeter cette pratique. Il fallait donc, selon l'expression de M. Velpeau, faire naître dans les cavités closes affectées d'épanchement, une irritation qui fut toujours adhésive et qui ne devint jamais purulente; aussi pensons-nous devoir rapporter les considérations que donne cet illustre chirurgien à propos des inflammations adhésives. Le travail organique, connu sous le nom d'inflammation adhésive, est en quelque sorte propre au tissu cellulaire. Partout où il existe seul, il est suivi de la connexion indélébile des deux lames voisines qui en ont été le siége; il précède, il entoure généralement les inflammations purulentes et marche pour ainsi dire au-devant d'elles en essayant sans cesse de les restreindre, de les circonscrire, d'en prévenir les couches ambiantes. C'est, en un mot, un travail protecteur, un effort qui tend à retenir, dans un espace aussi limité que possible, les matières hétérogènes qui se développent entre les tissus... Or, cette phlegmasie se développe et se complaît d'autant mieux dans les cavités closes, que ces cavités ont des parois plus lisses, plus complétement séreuses. Là, comme dans le tissu cellulaire, elle fait que les parois opposées, ramenées au contact, se collent, s'unissent, reviennent à leur état embryonnaire en quelque sorte, et que la cavité s'efface absolument. L'inflammation adhésive, purement adhésive, est par conséquent ce qu'il y a de plus rationnel à désirer en présence d'une hydropisie. C'était donc à des agents plus inoffensifs que ceux qu'on avait employés jusque-là que nous nous sommes adressé. La teinture d'iode étendue d'eau nous parut remplir toutes ces conditions.

Des proportions à observer dans le mélange qui sert à l'injection iodée.

Lorsqu'on a commencé à se servir de la teinture d'iode pour guérir certaines collections séreuses, on s'est contenté de faire un mélange d'eau et d'iode dans la proportion d'un tiers; mais il y avait à cela un inconvénient, c'était la tendance qu'avait l'iode à se précipiter, et dans nos expériences cela pouvait avoir un résultat fâcheux, car nous ne pensons pas qu'on puisse impunément mettre en contact l'iode, qui a une vertu caustique, avec la membrane séreuse du ventre. A l'exemple de M. Darcet, nous y avons ajouté une certaine quantité d'iodure de potassium qui maintient parfaitement la transparence du liquide.

M. Velpeau, dans ses essais sur les chiens, pose comme base les proportions suivantes jusqu'à la proportion d'un cinquième, l'injection iodée provoque la mort des animaux par excès d'inflammation. La conséquence toute simple à tirer de ce premier fait, c'est que dans le péritoine, il ne faut se servir de l'eau iodée qu'au septième, au huitième, au neuvième ou au dixième. Sur les animaux, cela peut être vrai; mais sur l'homme il n'en est pas ainsi, et là encore, les faits sont venus démentir la théorie, car voici les proportions dont nous nous sommes servi:

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Quelques médecins ajoutent à ce mélange de l'alcool camphré; nous ne savons vraiment pas dans quel but, car l'ayant tenté une fois, nous avons déterminé des douleurs très-vives sans autre résultat, ce qui nous a fait rejeter toute espèce de mélange de ce genre.

Des effets physiologiques des injections iodées dans les grandes cavités closes.

Lorsqu'on met de la teinture d'iode dans les grandes cavités séreuses, la première impression est une douleur assez vive, mais qui, en général, est de peu de durée; puis vient une chaleur douce qui, loin de tourmenter le malade, semble lui faire éprouver une sensation agréable.

Quelques heures après, le malade a dans la bouche un goût d'iode très-prononcé, l'haleine est manifestement très-imprégnée de cette odeur. La circulation nous a paru peu influencée par cet agent; jamais nous n'avons vu le pouls s'élever au delà de l'état normal, ou du moins très-rarement. La sécrétion urinaire est en général augmentée dans les premières 48 heures, et, si l'on soumet les urines aux réactifs (solution d'amidon et de chlorure de chaux), on peut facilement y reconnaître la présence de l'iode qui, en général, persiste plusieurs jours; nous en avons retrouvé huit jours après l'injection, bien que la sécrétion fût rentrée dans son état habituel.

Il est digne de remarque aussi que, dans les premières 24 heures, on reconnaît une espèce d'augmentation de volume dans l'abdomen. Deux causes, selon nous, contribuent à amener cet effet: 1° l'inflammation développée par l'injection; 2o le retour à leur position normale des intestins qui avaient été refoulés en haut par le liquide.

Quelques malades ont accusé des coliques, qui ont toujours cédé à des moyens simples: cataplasmes de farine de lin, extrait d'opium pris en pilule le soir. Nous n'avons pas remarqué que l'injection iodée eùt quelque influence sur les fonctions intestinales.

Deux fois, nous avons remarqué un coryza avec un écoulement séreux trèsabondant et en même temps les conjectives étaient légèrement injectées; ces divers phénomènes n'ont jamais nécessité l'emploi de moyens particuliers pour les faire disparaître; le temps seul a suffi.

La cure radicale de l'ascite obtenue par le fait des injections irritantes dans l'abdomen peut faire naître, dans l'esprit du praticien, une crainte qui lui ferait rejeter ce moyen, c'est l'adhérence, la cohésion des parties entre elles; mais l'expérience, le temps aidant, a démontré la vérité de la théorie et en même temps a fait voir que peu à peu les fonctions se rétablissent, les organes reprennent leurs fonctions et leurs mouvements habituels..

Bien plus, dit M. Velpeau, c'est qu'une cavité close ayant été détruite par la soudure de ses parois, elle finira par se reproduire, au moins en partie, si les organes voisins jouissent habituellement d'une grande mobilité, s'il leur est possible de continuer leur mouvement. Ce dernier phénomène est des plus curieux et n'avait point encore été mentionné; je l'ai constaté aujourd'hui pour les cavités closes, j'ai vu des phlegmasies de la plèvre, des phlegmasies du

péritoine, amener des adhérences qui en agglutinaient largement les parois, et cependant ces parois se trouver libres au bout de quelques mois ou de quelques années, ne plus adhérer du moins que par quelques brides, quelques filaments celluleux.

La reproduction ou le rétablissement des cavités séreuses, ajoute le même auteur, est d'ailleurs tout à fait en rapport avec l'idée que j'ai donnée de leur fonction première et avec le mécanisme de celles qui s'établissent accidentellement. En effet, une fois leurs parois collées, elles apportent aux mouvements voisins une véritable gêne; l'organe mobile, ainsi troublé dans l'exercice de sa fonction, agit sans cesse contre l'obstacle, oblige les tissus à glisser, à frotter les uns contre les autres; la pression, le glissement étant mis en jeu, ramènent à une cavité close et la régularisent, si ce n'est exactement entre les mêmes lamelles, du moins vis-à-vis des mêmes points mobiles qu'autrefois.

Les mouvements organiques jouent un grand rôle dans les corps animés ; c'est pourquoi les conditions organiques qui les rendent faciles sont si variées et si multipliées; tel est l'exemple que nous fournissent les intestins, car il y a pour ces organes un mouvement de dilatation et de rétraction dans le sens circulaire et dans le sens longitudinal, d'abord pour chaque point du tube. Il y a ensuite un mouvement de totalité ou de masse transmis d'une circonférence à l'autre, puis le tout est déplacé de haut en bas par l'action du diaphragme, si ce n'est d'avant en arrière ou de chaque côté par l'action des parois abdominales. Viennent enfin les mouvements déterminés par la pesanteur des viscères, par le battement et les secousses que leur impriment la marche et les divers déplacements du corps en totalité. S'il n'y avait point de cavité séreuse, si la surface des intestins se continuait avec les parois voisines, il est évident que ces mouvements ne pourraient s'effectuer et que les fonctions digestives seraient profondément altérées, si ce n'est complétement anéanties. Cependant, lorsque les cavités closes ont disparu par suite d'inflammations adhésives provoquées, les choses ne se passent pas ainsi, les malades éprouvent bien une espèce de gêne dans les mouvements, une raideur dans le ventre, mais il n'y a pas de troubles appréciables du côté des fonctions digestives, et peu à peu cette gêne ou plutôt cette corde, comme ils l'appellent, qui leur semble être tendue dans le ventre, s'assouplit et finit par disparaître. Ainsi donc, il n'y a pas encore, dans ce fait des adhérences, rien qui puisse arrêter pour mettre en usage les injections iodées.

DES ÉPANCHEMENTS DANS LES GRANDES SÉREUSES EN GÉNÉRAL.

Les épanchements, les collections de sérum, de sang, de pus, sont une des maladies ordinaires des cavités closes, surtout des cavités viscérales.

Quelle que soit la nature du liquide épanché, les cavités closes l'isolent de manière à le soustraire à la réaction du reste de l'organisme et des influences extérieures. Aussi ces liquides ne se décomposent pas dans des voies closes et hermétiquement fermées et ne subissent que des changements qui résultent des réactions chimiques de leurs molécules, surtout quand il n'existe point de travail organique autour d'eux. On sait que dans les autres tissus les choses se

passent autrement; le sérum infiltré dans ce cas est bientôt repris par les voies de l'absorption et disparaît généralement sans occasionner de réactions notables, tandis que, dans les cavités closes, les épanchements constituent une lésion qui peut subsister plusieurs années sans subir aucun changement et qui ne se dissipe que très-rarement d'une manière spontanée.

Comme nous l'avons déjà dit, le sérum épanché dans le tissu cellulaire n'exerce jamais sur lui aucune action malfaisante; aussi son infiltration, quelque considérable qu'on la suppose, ne produit-elle que fort rarement des inflammations notables; ce liquide étant le résultat d'une évolution naturelle, l'organisation réagit sur lui, sans effort, et le reprend sans qu'il en résulte aucun trouble.

Lorsqu'on a débarrassé, soit par l'incision sous-cutanée, soit par la ponction, une cavité close des matières qui s'y trouvaient accumulées, de sérum par exemple, la cavité qu'on vient de vider se remplit bientôt de nouveau chez la plupart des individus; si la collection est de formation récente, on peut quelquefois, exceptionnellement, en débarrasser le malade radicalement, par une simple ponction.

On le voit, le traitement des collections séreuses dans les grandes cavités closes, en se bornant à ces moyens, a besoin de quelque chose de mieux, car leur efficacité est fort limitée.

Il faut donc avoir recours à une méthode qui donne plus ; c'est pour cela que nous avons songé à appliquer à leur traitement les injections iodées, puisqu'elles produisent toujours une inflammation purement adhésive et amènent, sans inconvénient, la disparition de la cavité close malade.

DE LA NATURE DES LIQUIDES ÉPANCHÉS.

Ici nous sentons encore le besoin de restreindre notre sujet. Ne voulant traiter absolument que des collections séreuses des grandes cavités closes, nous ne nous occuperons donc ni du sang, ni du pus épanchés dans ces réservoirs.

Les quantités du liquide séreux varient à l'infini depuis quelques onces jusqu'à des centaines de kilogrammes, selon que l'accumulation a lieu dans la poitrine ou dans l'abdomen.

La nature du sérum varie aussi selon des circonstances qu'il est difficile d'apprécier; tantôt vous trouvez un liquide louche, limpide, rougeâtre, tantôt légèrement teint en jaune ou vert, inodore ou d'une odeur aigre, se coagulant par la chaleur. Tels sont les caractères physiques et chimiques communs aux epanchements de la plèvre et du péritoine. Dans cette dernière membrane, il y a cette remarque à faire et qui est d'une grande importance, selon nous : c'est que lorsqu'il y a incertitude dans le diagnostic, si l'hydropisie est ou non enkystée, si le liquide fourni par la ponction est purement séreux, vous pouvez être certain que l'hydropisie n'est pas enkystée; mais le liquide est-il épais, gluant, et ne sort-il qu'avec une extrême difficulté, vous pouvez être certain d'avoir affaire à un kyste, soit que le liquide sorte du scrotum ou du ventre, car jamais dans la poitrine vous ne rencontrerez un liquide offrant ces qualités. Une au

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