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drales. Grétry entra donc à six ans, comme enfant de chœur, à la collégiale de Saint-Denis. Il y éprouva pendant cinq ans les traitements les plus barbares que l'on puisse imaginer; cependant son goût pour la musique, loin de s'affaiblir, semblait s'accroître encore au milieu de ces cruelles épreuves. A l'âge de douze ans, il lui arriva un accident qui faillit lui coûter la vie, et qui pourtant redoubla son courage. Il allait faire sa première communion, et tout plein d'idées religieuses, il avait, dit-il, demandé à Dieu de mourir dans la journée s'il ne devait pas être honnête homme et musicien distingué. Une curiosité d'enfant l'ayant poussé à monter à la tour des cloches, une solive lui tomba sur la tête et l'étendit sans connaissance : « Allons, dit-il quand il fut « revenu à lui, puisque je ne suis pas mort, je serai honnête homme et bon • musicien.» Jamais prophétie ne s'est mieux réalisée. Grétry avait dans sa jeunesse une voix très-belle et trèsétendue; mais la timidité et même la terreur que lui inspirait son maître cruel ne lui permettait pas de la faire briller; cependant il faisait d'heureux progrès; mais ce qui contribua le plus à ses succès, fut l'assiduité avec laquelle il suivit une troupe de chanteurs italiens qui vint à Liége représenter les ouvrages de Pergolèze, de Buranello, etc. C'est de cette époque surtout que date la passion de Grétry pour la musique et pour les chefs-d'œuvre du Pergolèze, Son père, qui sentait sa force et qui l'avait vu composer de petits morceaux sans avoir appris aucun des principes de la composition, voulut lui donner un maître d'harmonie; mais Grétry, trop âgé déjà, n'eut pas la patience de se soumettre à ces nouvelles études, et, laissant les leçons de son maître, composa sans son aveu cinq ou six symphonies qui furent jouées et applaudies chez les amateurs de Liége, et principale ment chez le chanoine son patron, qui lui conseilla d'aller étudier à Rome, en lui offrant de l'aider de sa bourse. Dès lors, ne pensant plus qu'à l'Italie, il se disposa à quitter sa patrie pour aller se perfectionner dans la ville sainte, malgré l'opposition de ses parents et la faiblesse de sa santé.

Ce fut à la fin de mars 1759, à l'âge de dix-huit ans, et sous la conduite d'un vieux contrebandier qui lui servit de guide fidèle, que Grétry s'exposa, et à pied, sur la route longue et pénible de Liége à Rome. Il y avait alors dans cette ville un collége fondé exclusivement pour les Liégeois, qui pouvaient y entrer jusqu'à trente ans, y séjourner pendant cinq ans, et y étudier les sciences ou les arts. Grétry, à peine admis dans ce collége, étonna ses maîtres par son avidité à chercher toutes les occasions, tous les moyens de s'instruire. Il allait tous les jours entendre de la musique dans les églises, pour faire choix entre trois compositeurs les plus renommés. Casali ayant plus de grâce et d'amabilité, Grétry le préféra, et recommença, pour la troisième fois, l'étude des premiers éléments de la composition. Ses progrès furent brillants et rapides. Après deux années d'étude, Casali jugea qu'il pouvait se passer de leçons, et l'exhorta à travailler luimême. C'est à ce conseil qu'on dut, après plusieurs essais infructueux, le Vindemiatrici (les Vendangeuses ), opéra bouffon représenté à Rome en 1763, avec le plus brillant succès.

A la même époque, une partition de Rose et Colas, que lui montra le secrétaire de la légation de France à Rome, lui fit connaître le genre qu'il était appelé à traiter. Il s'éprit de passion pour l'opéra comique français, et résolut de quitter Rome pour venir à Paris. Depuis longtemps il était rappelé à Liége par ses parents. Pour toute réponse, il envoya au concours le Confitebor tibi, Domine, etc. Il obtint la place de maître de chapelle à Liége; mais il n'y alla pas, et n'entendit jamais son Confitebor. Il quitta Rome le 1er janvier 1767.

Grétry ne possédait pour toute fortune qu'une modique pension qu'il recevait d'un grand amateur de flûte, avec lequel il avait pris à Rome l'engagement de lui composer des concertos. Arrivé à Genève, il fut contraint, pour gagner de quoi continuer son voyage, de donner des leçons de chant. Il y fit représenter, en 1767, Isabelle et Gertrude, opéra dont il avait refait la musique, et fut admis auprès de Voltaire,

qui lui fit l'accueil le plus gracieux et l'engagea de se hâter d'aller à Paris. Il arriva enfin dans cette ville; mais ses premiers essais ne furent pas heureux, et ce ne fut qu'après les plus rudes épreuves qu'il put triompher avec gloire. Inconnu, n'étant appuyé par aucun protecteur, il essuya des dégoûts pendant plusieurs mois, et il commençait à s'abandonner au découragement, lorsque le hasard le mit en rapport avec Marmontel, qui lui confia sa pièce du Huron. Il en composa la musique en très-peu de temps, parce qu'il était pressé de se faire connaître. L'ouvrage avait du mérite, le succès le prouva; mais il fallait le faire recevoir, et il ne dut cet avantage qu'à l'excellent acteur Caillot, qui, appréciant l'œuvre de Grétry, fit toutes les démarches nécessaires pour en obtenir la réception. Le triomphe de Grétry fut complet : il se vit porté aux nues.

Le Tableau parlant, qui fut donné en 1769, le plaça au rang des meilleurs compositeurs français. Malgré les formes vieillies de cette pièce, on l'écoute encore avec plaisir, parce que les mélodies en sont charmantes, naturelles, expressives. Les succès de Zémir et Azor, qui fut donné deux ans après, fut éclatant, et, de ce moment, Grétry n'eut plus de rival. Pendant l'espace de 35 ans, depuis 1769 jusqu'en 1803, il composa cinquante ouvrages dont les paroles sont de Sedaine, d'Hèle, Morel, etc. Trente, au moins, ont eu un brillant succès; vingt sont encore au répertoire, et n'ont point vieilli malgré les révolutions que la musique a éprouvées.

La musique de Grétry brille surtout par le chant et l'expression; il donnait tous ses soins à rendre les paroles avec justesse et vérité. Jamais il ne séparait un instant la musique des paroles ; il voulait même qu'elle eût toujours un rapport direct à ce qui précédait ou à ce qui allait suivre; il n'y a pas jusqu'aux airs de danse, aux ritournelles et aux ouvertures où la musique est employée seule, qui ne soient chez lui liés à l'action. Il serait trop long de donner ici la liste complète des ouvrages de Grétry, nous citerons seulement les opéras suivants: En 1769, le Huron, en

deux actes; Lucile, en un acte; le Tableau parlant, en un acte. En 1770, Silvain, en un acte; les Deux avares, en deux actes; Zémir et Azor, en trois actes. En 1772, l'Ami de la maison, en trois actes. En 1774, la Rosière de Salency, en quatre actes, puis en trois. En 1775, la Fausse magie, en deux actes. Il est resté de cet opéra, qui n'est plus représenté, un morceau bien connu et d'une force de comique étonnante, c'est le duo: Quoi! c'est vous qu'elle préfère. En 1776, les Mariages samnites, en trois actes, repris, en 1782, avec des changements. En 1784, Richard Cœur de Lion, en trois actes. Cet opéra, remis dernièrement au théâtre, est une des meilleures preuves du talent réel de Grétry. Tout Paris s'est pressé pour l'aller entendre. En 1786, les Méprises par ressemblance, en trois actes. En 1788, le Rival confident, en deux actes. En 1789, Raoul Barbe Bleue, en trois actes. En 1790, Pierre le Grand, en trois actes. En 1791, Guillaume Tell, en trois actes. En 1792, Basile ou A trompeur trompeur et demi, en un acte. En 1797, Lisbeth, en trois actes. En 1799, Élisca, en un acte. Il a composé pour le grand opéra : Céphale et Procris, en trois actes, 1793; la Double épreuve ou Colinette à la cour, en trois actes, 1782; l'Embarras des richesses, en trois ac tes, 1782; la Caravane du Caire, en trois actes, 1783; Panurge dans l'ile des Lanternes, en trois actes, 1785; Amphitryon, en trois actes, 1788; Denis le Tyran, maître d'école à Corinthe, en trois actes, 1794. Plusieurs de ces opéras ont été traduits en plusieurs langues et joués dans les pays étrangers. Il a fait exécuter à la cour, en 1777, les divertissements d'Amour · pour amour, comédie de Lachaussée, sur les paroles de Laujon.

Grétry a obtenu plus de succès à l'Opéra-Comique qu'au grand Opéra, et a réussi surtout dans les pièces comiques. Il ne possédait pas le sens musical tragique, et on l'a justement nommé le Molière de la musique. Les musiciens lui reprochent aussi son ignorance des règles de la composition; il les viole en effet souvent. Un de ses amis lui en parlait un jour: « Je fais des fautes,

a

répondit-il, je le sais, mais je veux a les faire. Toutefois, en accordant même qu'il n'eût pas une connaissance profonde de ces règles, il n'en reste pas moins un de nos premiers compositeurs.

Il se fit également connaître comme écrivain; il avait publié, en 1789, un volume in-8°, ayant pour titre : Mémoires ou Essais sur la musique; le gouvernement le fit réimprimer, en 1797 (an v), avec deux nouveaux volumes, contenant des observations sur la partie dramatique de la musique; mais ces deux volumes sont d'un intérêt moins général que le premier. Il donna, en 1802, un ouvrage intitulé: La vérité ou ce que nous fûmes, ce que nous sommes, ce que nous devrions étre, 3 vol. in-8°. On a prétendu que Grétry, dans cet ouvrage, avait vérifié cet ancien proverbe, ne sutor ultra crepidam, et prouvé qu'il était étranger aux principes d'une saine politique. Ayant renoncé, en quelque sorte, à la musique dans ses dernières années, il s'occupait d'un ouvrage qu'il annonçait sous le titre vague de Réflexions d'un solitaire. Cet ouvrage n'a jamais été publié.

La conversation de Grétry était attachante; il savait mêler adroitement des aperçus pleins de finesse à des réflexions philosophiques, et l'on était étonné qu'avec un caractère porté à la mélancolie, il composât des ouvrages aussi gais. Il savait s'apprécier et parler de ses ouvrages avec une franchise qui, chez tout autre, aurait été de la vanité. Cependant il ne fut pas insensible à l'honneur que lui fit un amateur de son talent (le comte de Livry), en lui érigeant une statue qui a été placée, en 1809, dans le vestibule du théâtre dépositaire du plus grand nombre de ses ouvrages. Il avait acquis l'Ermitage, maison de campagne devenue célèbre par le séjour de J.-J. Rousseau. Il s'y plaisait extraordinairement, y passa ses dernières années, et voulut y terminer ses jours. Il y mourut, en effet, le 24 septembre 1813.

La possession de son cœur fut longtemps disputée entre la ville de Liége et son neveu; il y eut même procès à ce sujet. Enfin il fut rendu, en 1828, à la ville de Liége.

GREUSSEN (combat de). Après la bataille d'Iéna, le roi de Prusse fit demander à l'empereur Napoléon un armistice de six semaines. Napoléon répondit qu'après une victoire il était impossible de donner à un ennemi le temps de se rallier. Cependant les Prussiens répandirent avec tant d'assurance le bruit qu'un armistice était conclu, que plusieurs généraux français laisserent passer devant eux plusieurs corps prussiens sans les combattre. Blücher s'était ouvert un passage par un mensonge semblable. Cependant Soult arriva, le 16 octobre 1806, au village de Greussen, poursuivant une colonne de 10 à 12,000 Prussiens, commandés par Kalkreut. Ce général, pressé trop vivement, fait dire au maréchal qu'un armistice a été conclu. On lui répond qu'il est impossible que l'empereur ait fait une telle faute; qu'on ne croira à cet armistice que quand il sera officiellement notifié : « Posez les armes, dit le maréchal, et j'attendrai dans cette situation les ordres de l'empereur. »> Le vieux Kalkreut sentit qu'il n'avait pas de réponse à faire, et qu'il fallait combattre. Le village de Greussen fut enlevé, l'ennemi fut culbuté, et poursuivi l'épée dans les reins jusqu'aux portes de Magdebourg; 1,200 prisonniers, 30 pièces de canon et près de 300 caissons tombèrent dans les mains des Français durant cette poursuite.

GREUZE (Jean-Baptiste), l'un des peintres les plus distingués de l'école française au dix-huitième siècle, naquit à Tournus en 1726. Dès son enfance, il manifesta pour le dessin une vive passion, qui lui fit négliger toute autre Occupation. En vain son père lui défendait de barbouiller des rames de papier, et de charbonner les murailles, il ne put jamais le diriger vers la carrière à laquelle il le destinait, et il allait même le renvoyer de la maison paternelle, lorsqu'un peintre lyonnais, nommé Grandon, qui passait par la petite ville de Tournus, demanda et obtint la permission de l'emmener dans sa patrie; il lui donna des leçons gratuites, et le mit en état de peindre le portrait avec succès. Ce fut donc à Grandon qu'il dut la supériorité avec laquelle il peignait les têtes d'enfants et de vieillards.

Ayant suivi son maître à Paris, et s'y étant fixé, la gêne où il ne tarda pas à se trouver lui fit sentir la nécessité de s'élever à un genre plus noble. Il suivit l'étude du modèle à l'Académie, et eut peu de succès par sa manière de dessiner le nu; mais il y gagna l'avantage de rectifier ce que ses premiers principes avaient de défectueux. Ses progrès n'avaient pas encore été bien saillants, lorsqu'un jour il présenta à ses professeurs son tableau du Père de famille expliquant la Bible à ses enfants. Leur étonnement fut extrême; ils se refusèrent même d'abord à croire qu'il en pût être l'auteur; mais il prouva bientôt, par de nouveaux sujets du même genre, exécutés avec encore plus d'habileté, que son talent s'était formé tout d'un coup.

Dès lors sa réputation s'éleva au plus haut degré, et il trouva des protecteurs puissants. Son tableau de l'Aveugle trompé le fit agréer à l'Académie, sur la proposition de Pigalle, et les ouvrages qu'il exposa au salon eurent une vogue prodigieuse. On lui fit toutefois des reproches assez graves, auxquels il attacha assez d'importance pour se décider à aller à Rome, apprendre à mettre plus de vigueur dans son coloris, plus de noblesse et d'élégance dans son dessin.

Cette entreprise fut malheureuse sous deux rapports; Greuze y contracta le défaut d'une imitation servile, et altéra la naïve originalité de sa première manière. Ce fut un triomphe pour ses ennemis, qui ne manquèrent pas de publier qu'il avait perdu son talent en route. Il eut le bon esprit de sentir la justesse de la critique, profita de la leçon, et répara ce léger échec. Il eut ensuite d'autres désagréments, mais qui tenaient à son caractère il se crut exempt de la loi qui assujettissait tous les agréés à présenter un tableau de réception, et s'y refusa constamment. Alors, par égard pour son talent, après le délai expiré, on se contenta de lui interdire le droit d'exposer ses ouvrages au salon du Louvre. Il voulut ensuite être admis à l'Académie sous le titre de peintre d'histoire, et présenta une composition du genre héroïque, qui malheureusement fut jugée

médiocre par tout le monde ; c'était l'Empereur Sévère, reprochant à Caracalla son fils d'avoir voulu l'assassiner. Le tableau ne fut point admis, et les académiciens persistèrent dans leur refus. Dès lors, Greuze s'abstint de présenter ses ouvrages au salon, et il persista dans cette résolution tant que l'Académie subsista.

A l'époque de la révolution, il envoya au musée des artistes vivants quelques portraits dont les journaux firent l'éloge, moins pour leur mérite réel que pour les égards dus à la vieillesse de l'artiste. Il approchait de sa 80° année, lorsque la mort l'enleva aux arts et à sa famille, le 21 mars 1805.

Greuze sera toujours considéré comme un peintre unique dans son genre. La nature avait refusé à son génie le degré d'élévation et l'espèce de grandiose qui conviennent au style héroïque; c'était dans l'intérieur des pauvres ménages, c'était sous le chaume du simple laboureur, qu'il allait observer la nature et chercher ses inspirations, et il faut avouer qu'il a excellé dans ce genre. Ses compositions sont de petits drames complets, pleins de vie et de mouvement. Il en est plus d'une qui émeuvent jusqu'aux larmes. Rien ne prouve mieux son talent réel en ce genre que les imitations qu'on a cherché à en faire. Quelques peintres ont voulu suivre la même ligne; mais ils sont tombés dans l'écueil de ce genre: ils ont altéré la simplicité de la nature qu'ils voulaient représenter; et, cherchant à l'embellir, ils l'ont maniérée, tandis que Greuze a su conserver toujours le caractère de la vérité, tomber dans le trivial et le commun. On lui a reproché de répéter presque partout les mêmes caractères de tête; ce reproche est fondé, mais ces têtes sont si belles, et si pleines d'expression, qu'on n'ose pas regretter de les retrou

ver.

sans

On s'accorde à regarder comme ses chefs-d'œuvre les ouvrages suivants : le Père paralytique; la Malédiction paternelle; la Bonne mère; le Père dénaturé, abandonné de sa famille ; Sainte Marie égyptienne. On cite encore avec de justes éloges la Petite fille au chien, ouvrage plein de nai

veté; le Retour du chasseur; l'En-
fant au capucin; la Dame de charité;
Accordée de village maintenant
placé au musée royal; le Gâteau des
rois; la Fille confuse; la Bonne édu-
cation; la Paix du ménage ; la Cru-
che cassée; le Départ de Barcelon-
nette ;
la Bénédiction paternelle;
l'Enfant pleurant la mort de sa mère.
Presque tous ces ouvrages ont été gra-
vés par les plus habiles artistes de l'é-
poque. Les connaisseurs, néanmoins,
attachent un plus grand prix aux gra-
vures de Filipart, et à celle de la Bonne
mère, par Massart père. Greuze, mal-
gré quelques ridicules, avait le cœur
excellent, et il fut vivement regretté.
Il a laissé deux filles qui ont hérité
d'une partie de ses talents.

GREVES. Pièce de l'armure complète, qui garantissait les jambes depuis le cou-de-pied jusqu'aux genoux, et qui se fabriquait en fer battu, en lames superposées ou en mailles.

GREVIN (Jacques)_naquit en 1540, à ,à Clermont-sur-Oise. Sa vie fut courte, et tout entière consacrée à la culture des lettres. Les leçons du célèbre Muret et les conseils de Ronsard développèrent de bonne heure son esprit; et dès l'âge de dix-sept ans, il écrivit une comédie, la Trésorière, d'après l'ordre de Henri II. Quelque temps après, il fit une tragedie, César, suivie bientôt d'une nouvelle comédie, les Esbahis. Ces pièces ont tous les défauts et les qualités de l'âge où l'auteur les composa. Le style a du mouvement; mais il s'y trouve des expressions prétentieuses et des détails d'une érudition pé dantesque. Les Esbahis et la Trésorière ne manquent pas de gaieté; César renferme quelques pages écrites avec noblesse. Toutefois, cette gaieté dégénère en licence, cette noblesse en em-phase; enfin, dans les deux genres de drames, les plans sont mal conçus, les scènes languissantes, le dialogue embarrassé. Quoi qu'il en soit, Grevin eut de la vogue. Épris d'un vif amour pour la fille d'un médecin, il étudia la médecine; mais le docteur n'effaça pas le poete. Il chanta dans les Jeux olympiens la beauté de sa maîtresse; il célébra dans sa Gélodacrie son désespoir de l'avoir perdue. Bientôt consolé

et même marié avec une autre femme, il suivit, en 1565, Marguerite de Savoie en Piémont. Sa double charge de médecin et de conseiller de cette princesse ne l'empêcha pas de composer une Description du Beauvoisis et plusieurs autres ouvrages, ni de traduire du grec les préceptes de Plutarque sur le mariage, et Nicandre. Il mourut à Turin, âgé de trente ans, en 1570.

On a de lui plusieurs ouvrages de médecine tant originaux que traduits du grec et du latin; son Théâtre et ses Poésies diverses ont été publiés à Paris (1562, in-8°). On y remarque une satire intitulée le Temple (*), dirigée contre Ronsard, qui, dans son Discours sur les misères du temps, avait attaqué le calvinisme, religion embrassée par Grevin. La Harpe a parlé avec éloge de la tragédie de César, composée par cet auteur, qu'il place fort au-dessus de Jodelle.

Ronsard qui, avant la publication de la satire du Temple, estimait beaucoup Grevin, s'est vengé de lui en rayant son nom de ses écrits.

GRIBEAUVAL (Jean-Bapt. VAGUETTE de), lieutenant général d'artillerie, né à Amiens en 1715, entra au service en 1732, comme volontaire dans le régiment royal d'artillerie, et devint lieutenant-colonel en 1757. Passé, avec le consentement du roi, au service d'Autriche, Gribeauval fut élevé au grade de général, commandant l'artillerie, le génie et les mineurs de l'armée impériale, acquit une grande réputation dans la défense de la place de Schweidnitz attaquée par Frédéric II, fut nommé feld-maréchal-lieutenant, et revint en France en 1763. Le roi le fit lieutenant général et inspecteur général d'artillerie. C'est à lui qu'est due la rédaction de l'ordonnance de 1764, qui fixait la proportion des troupes de l'artillerie et en déterminait l'emploi ; il présida la formation du corps des mineurs, dont il avait le commandement particulier; perfectionna les manufactures d'armes, forges et fonderies; introduisit de nouvelles batteries de côtes avec des affûts

(*) Composée en collaboration avec la Roche Chaudieu et Florent Chrétien.

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