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le 22 pour les rejoindre. Le 25, il s'empara de Bréda; le 26, de Klunderl. Le commandant de ce fort, voyant qu'il ne pouvait plus tenir dans la place que l'on avait incendiée, encloua ses canons, et se fit tuer les armes à la main.

Le 5 mars, Dumouriez s'empara de Gertruydenberg, assiégea Villemstadt, et bloqua en même temps Berg-op-Zoom et Steinbergen. Son quartier général était dans l'anse de Roowaertz; ses soldats, qui n'avaient pour cantonnements que des huttes de paille, pratiquées sur des dunes, appelaient plaisamment ce lieu le camp des castors, parce qu'ils campaient dans l'eau. Dumouriez était parvenu à équiper vingttrois bâtiments avec lesquels il se disposait à passer sur l'autre rive, en traversant le bras de mer appelé Mordyck.

Mais le prince de Cobourg, qui commandait l'armée ennemie, voyant les troupes françaises disséminées en Prusse, en Belgique, en Hollande, força les cantonnements de la Roer, et attaqua subitement Aix-la-Chapelle. Les Français, après un combat sanglant dans les rues, mis en désordre, se retirèrent sur Liége. Miranda, se voyant en danger d'être coupé, abandonna le siége de Maëstricht le 3 mars, ainsi que toute la rive gauche de la Meuse, pour se retirer sur Tongres. Il en fut bientôt chassé, et perdit une partie de ses troupes et tout son matériel. Enfin, le 6 et le 7, tous les petits corps parvinrent, après des pertes

effroyables, à se rallier à Saint-Tron. Le lendemain, ils se portèrent sur Tirlemont, puis en arrière de Louvain, pour couvrir la Belgique, et attendre l'arrivée du général Dumouriez.

Lacroix et Danton, commissaires de la Convention, donnèrent à ce dernier l'ordre de revenir sur-le-champ en Belgique. Dumouriez partit le 10 mars, après avoir laissé provisoirement au colonel Thouvenot la direction de son armée d'expédition.

VI. Danton et Lacroix revinrent à Paris le 8 mars. Danton, après avoir présenté à la Convention le tableau des désastres, assura que Dumouriez réunissait au génie du général l'art d'encourager le soldat; que l'armée battue le demandait à grands cris, et que s'il était secondé, il saurait faire repentir l'ennemi de son premier succès. Qu'il ne fallait donc pas se livrer au désespoir, mais qu'on ne devait pas attendre le salut uniquement de la loi sur le recrutement, dont l'exécution était trop lente. L'orateur conclut en proposant d'envoyer, le soir même, des commissaires dans les quarante-huit sections, et dans tous les départements pour convoquer et armer les citoyens qui pouvaient voler à la défense de la Belgique.

La Convention décréta immédiatement cette proposition. Le danger était grand; on le croyait plus grand encore. Des citoyens affirmaient que l'armée de Dumouriez était entièrement détruite; d'autres, que l'ennemi avait déjà franchi la frontière. On criait par

:

tout à la trahison les royalistes étaient désignés comme la cause des défaites. Tous les magasins furent fermés; les boulangers et les employés des administrations, ne voulant pas quitter leurs sections, la Convention se vit forcée de rendre un décret pour les renvoyer à leurs travaux. Les circonstances se montraient aussi graves qu'au 2 septembre, et il était à craindre que le peuple ne se fit encore lui-même justice; il fallait assurer sa tranquillité par des mesures promptes et efficaces. Le conseil général fit battre le rappel, invita les commis des bureaux et tous les citoyens en état de porter les armes, à s'enrôler, et fit exposer sur l'hôtel de ville le drapeau qui annonçait que la patrie était en danger. Pache, nouveau maire de Paris, fit mettre au sommet de la cathédrale un immense drapeau noir, et proposa à la Convention de décréter une taxe de guerre, et d'instituer un tribunal révolutionnaire.

Le lendemain, 9 mars, les prédications des commissaires dans les sections avaient fait enrôler, grâce à l'enthousiasme qu'ils excitèrent, quinze mille hommes: ceux-ci, prêts à partir, demandèrent à la barre l'institution du tribunal révolutionnaire pour assurer la punition des traîtres. Carrier convertit la pétition en une motion, dont le principe fut aussitôt accueilli, malgré l'opposition de Lanjuinais.

1 Discours de Jean-Bon-Saint-André, de Lamarque, Bentabole, Danton, Carrier, etc., dans tous les journaux du temps.

Danton fit décréter la mise en liberté de tout citoyen français emprisonné pour dettes, en disant qu'un tel emprisonnement était contraire à la saine morale, aux droits de l'homme. « Que les propriétaires ne s'alarment point, ajouta-t-il, parce que quelques individus se sont portés à des excès la nation, toujours juste, respectera les propriétés. Respectez la misère, et la misère vous respectera. » Jean-BonSaint-André fit décréter aussi l'abolition de la contrainte par corps, maintenue seulement contre les détenteurs des deniers publics.

On lut de nouvelles adresses, qui toutes demandaient, en termes menaçants, la prompte organisation du tribunal révolutionnaire. La Convention ne se pressait pas de répondre à ces voeux, et retardait l'envoi des commissaires dans les départements. L'agitation croissait à Paris, irrité surtout des articles de Brissot, de Gorsas et de Condorcet, qui atténuaient les périls, dans l'espoir, disait-on, d'endormir les populations, et de retarder les grandes mesures révolutionnaires. Une autre cause ajoutait encore à l'indignation populaire. Depuis le 21 janvier, des pamphlets royalistes, répandus à profusion, exhortaient les citoyens à massacrer la Convention, qu'ils désignèrent comme un ramassis de brigands; à rappeler les prêtres déportés, et à délivrer le fils de Louis XVI.

Dans la nuit du 9 au 10, trois révolutionnaires, exaltés et suspects, Varlet, Fournier dit l'Américain

et Champion, qui passaient tout leur temps à déclamer sur la place publique ou dans les sections', se portèrent, avec quelques furieux, sur les imprimeries de Gorsas et de la Chronique de Paris, qu'ils saccagèrent. Aucune autorité, aucun club, aucune section ne prit la moindre part à cet acte insensé et criminel; la poursuite des coupables fut ordonnée. Les Montagnards se prononcèrent avec une vive indignation contre eux; mais les Girondins ravis firent grand bruit de cet événement, et s'efforcèrent de persuader à tous les départements qu'ils allaient être la proie de quelques brigands.

La Convention paraissait ne pas songer à autre chose dans la séance du lendemain, lorsque Danton, irrité de ne pas voir partir les quatre-vingt-deux commissaires, et du retard apporté à l'organisation du tribunal révolutionnaire, s'écria : « Quand l'édifice est en feu, je ne m'attache pas aux fripons qui enlèvent des meubles; j'éteins le feu. Vous n'avez pas un instant à perdre pour sauver la république. Faites donc partir vos commissaires : qu'ils partent cette nuit même; qu'ils disent à la classe opulente : Il faut que l'aristocratie de l'Europe, succombant sous nos efforts, paye notre dette ou que vous la payiez: le peuple n'a que du sang, il le prodigue. Allons, misérables, prodiguez vos richesses!

1 Varlet avait même une tribune ambulante qu'il promenait dans tous les carrefours pour haranguer les oisifs.

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