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Pour si exagérés qu'on nous a fait passer, je déclare nettement, au nom de la Commission, que nous nous contentons de l'appréciation de l'Union des charbonnages, mines et usines de Liége, parce qu'elle justifie pleinement notre conclusion principale.

Les femmes de fosse sont sans instruction; les femmes de fosse remplissent un travail qui n'est pas en rapport avec leur organisation de femme. Voilà la déclaration nette et positive. Nous en tirons, nous, la seule induction possible, et les charbonniers de Liége et de Charleroi sont de notre avis, à une nuance près. L'honorable M. Fossion, lui, est raide, cassant, impitoyable. Partant de cette prémisse que le travail des fosses améliore l'état de santé, procure aux femmes une force et une vigueur qu'aucun autre ne peut leur donner, qu'en outre elles sont relativement plus morales que celles employées dans n'importe quelle autre industrie, il conclut qu'il faut les y garder, les y maintenir éternellement, qu'ainsi le veut leur intérêt combiné avec les prescriptions hygiéniques les plus formelles. Arrière tous ceux qui professent une opinion contraire; arrière surtout les membres de votre Commission qui ont eu la témérité d'émettre un avis tout à fait opposé!

J'ai donc eu le droit de dire que notre honorable collègue est plus catholique que le Pape, plus charbonnier que les plus âpres de ces industriels.

J'ai toujours entendu dire et je ne cesse de le constater, que les néo-catholiques sont de dangereux fanatiques. En serait-il de même des néo-charbonniers ?

Mais enfin que prouvent les aveux des charbonniers de Liége et de Charleroi qui nous reprochent cependant nos inexactitudes et nos exagérations? Ce qu'ils prouvent, Mes

sieurs, c'est qu'ils ont parlé pour ne rien dire, c'est que leur conscience émue, troublée ne leur a pas permis de pousser jusqu'au bout les conséquences de leurs bénignes appréciations; ce qu'ils prouvent encore, c'est que notre rapport, si violemment attaqué dans des centres charbonniers, et si peu ménagé ici même parmi vous, n'est, en définitive, que l'expression de la vérité, puisque les intéressés eux-mêmes, en dehors de celle enceinte, se voient contraints d'adopter la seule conclusion que nous cherchions véritablement à faire prévaloir.

Et ici, il convient de mettre chacun et chaque chose à sa place. C'est l'honorable M. Kuborn qu'on attaque toujours, c'est lui qui est, en réalité, la cible vers laquelle tous les traits, toutes les flèches sont dirigés. Eh bien! il faut que cela cesse. M. Kuborn n'a été que notre organe à nous trois, MM. Boulvin, Sovet et moi; à nous trois, dis-je, sans exclusion aucune, et par conséquent avec l'inclusion de M. Boulvin, quoi qu'on en ait dit, car voici un passage d'une lettre qu'il m'a écrite le 15 janvier dernier, et qui a été insérée naguère dans le Journal de Charleroi, je pense :

<< Vous trouverez peut-être, M. le Président, que mes réflexions sont un peu tardives, mais elles m'ont été suggérées par l'étude approfondie du mémoire de notre honorable collègue, et TOUT EN ADMETTANT LA RÉALITÉ DES FAITS EXPOSÉS DANS CE RAPPORT ET CONSTATÉS PAR LA COMMISSION dont j'ai l'honneur de faire partie, je dois vous avouer, etc. »

C'est assez clair, je pense.

Nous sommes donc à nous trois responsables des faits qui sont allégués dans ce rapport; nous en sommes même exclusivement responsables, car M. Kuborn, qui n'avait pas le droit de vole, a dû se borner à mettre en lumière, non pas

ses appréciations propres, mais les nôtres, les nôtres exclusivement. Qu'on cesse donc, une fois pour toutes, de l'attaquer comme on l'a fait jusqu'à présent et qu'on veuille bien s'adresser à nous trois, MM. Boulvin, Sovet et moi, qui revendiquons l'honneur d'avoir inspiré ce rapport, qui en acceptons toute la responsabilité, et qui, soyez en bien certains, ne nous trouvons pas le moins du monde gênés de ce qu'on croit être un lourd fardeau.

Et maintenant laissez-moi vous parler de nos inexactitudes et de nos exagérations. Je ne puis attirer à cette barre les personnes étrangères à notre assemblée qui nous les ont reprochées; mais j'ai devant moi leur éditeur responsable, l'honorable M. Fossion: c'est lui qui s'est rendu ici l'écho des clameurs du dehors; c'est lui seul, par conséquent, à qui j'adresse ma réponse.

Je n'ai pas néanmoins assumé la tâche de poursuivre pas à pas le discours de l'honorable membre; l'honorable M. Kuborn et d'autres confrères m'ont demandé instamment d'être chargés de ce soin; je me bornerai, pour mon compte, à vous présenter quelques considérations générales qui vous permettront de juger de l'importance qu'il convient d'attacher à l'œuvre de notre honorable contradicteur.

Donc, d'après l'honorable M. Fossion, nous avons été exagérés, incomplets, inexacts. Notre rapport n'est pas digne d'être pris en sérieuse considération. Eh bien! nous allons le voir.

Je demande pardon à l'Académie de la condamner à une revue rétrospective, mais cette revue m'a paru indispensable dans la circonstance: c'est elle qui doit me servir, Messieurs, à vous édifier sur les affirmations actuelles de l'honorable M. Fossion.

Écoutez donc.

C'était en 1860, vous aviez mis pour la seconde fois au concours la question des maladies des houilleurs.

Elle était posée en ces termes : « Exposer les causes, les symptômes, le caractère et le traitement des maladies particulières aux ouvriers employés aux travaux des exploitations houillères du royaume.

Trois mémoires nous furent adressés, dont un appartenant à l'honorable M. Boëns, qui fut presque immédiatement retiré.

Le rapport vous fut présenté le 28 septembre 1861. Un des deux restants reçut, dans le cours du rapport, une approbation presque complète et pour ainsi dire sans réserve de la part de la Commission, du concours, et voici comment celle-ci crut devoir conclure par l'organe de son honorable rapporteur :

Après quelques observations sur ce qu'il y avait de trop et de trop peu dans le mémoire : « Ce nonobstant, dit-il, nous le considérons comme un travail remarquable, contenant d'excellentes parties, portant le cachet d'un bon esprit, d'une instruction solide, d'une connaissance parfaite de la vie, des habitudes et des besoins des houilleurs, écrit sous la dictée d'une expérience acquise en vivant avec eux et au milieu d'eux et digne à ce titre de fixer la bienveillante attention et les encouragements de l'Académie. »

Que dites-vous de cela, Messieurs? Est-ce assez élogieux? En présence d'une pareille déclaration, n'étions-nous pas autorisés à tirer parti du travail dont il s'agit, et à y puiser les renseignements qui devaient nous aider à résoudre la question qui nous était soumise? Où est donc jusqu'ici l'exagération? Et ce n'est pas tout. Il y avait des choses inutiles

dans le mémoire, c'était l'avis du rapporteur; aussi vous proposa-t-il de ne le laisser imprimer que par extraits.

Vous acceptâtes cette proposition et vous décidâtes que l'auteur aurait à s'entendre à cet égard avec la Commission.

J'ai ici le mémoire couronné sous la main; l'intérêt de la cause que je défends, m'ordonne de vous lire quelques passages de la partie dont l'impression a été consentie par la Commission ou plutôt par le rapporteur de celle-ci, et qui (c'était son droit et son devoir) a fait retrancher du travail original toutes les inutilités et par conséquent toutes les exagérations (car les exagérations sont, elles aussi, des inutilités). Eh bien! veuillez écouter ces passages, je vais vous les lire textuellement :

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« I. Aspect général. Les mineurs, dans leur jeunesse, ont le teint pâle, le corps maigre et l'attitude fatiguée; plus âgés, ils ont la taille courbée, les jambes arquées et la démarche lente; ils présentent toujours dès l'àge de 40 à 50 ans, les marques d'une vieillesse anticipée.

« Cette habitude extérieure des mineurs, constatée par la Chambre de commerce de Mons, dans son rapport à propos de l'enquête sur la condition des classes ouvrières en Belgique, existe aujourd'hui comme elle existait il y a quatorze ans. Les caractères signalés plus haut ne sont guère moins marqués, ils se présentent encore généralement. Les effets de l'élévation actuelle des galeries souterraines, les facilités du charriage, contribueront sans doute pour une bonne part à amener insensiblement plusieurs modifications favorables dans l'habitude du mineur.

<< Lorsqu'on envisage dans son ensemble la classe des houilleurs, on remarque chez la plupart d'entre eux des signes

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