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anneaux les plus éloignés de l'extrémité céphalique se détachent et sont évacués avec les fèces. Ces portions du ver, auxquelles on a donné le nom de proglottis ou cucurbitains, renferment une quantité innombrable d'œufs. Si elles viennent à être avalées par le porc, qui les trouve dans les immondices où il se vautre, elles donnent lieu à un nombre considérable d'embryons qui se développent dans le tissu cellulaire de cet animal sous forme de cysticerques et produisent la maladie qu'on a appelée ladrerie. Or, si l'homme se nourrit de la chair de ce porc, les cysticerques arrivés dans l'intestin, perdent leur ampoule caudale, s'accroissent rapidement par la pullulation d'anneaux qui se juxtaposent à la suite de l'extrémité céphalique, et bientôt se trouve constitué un nouveau ver rubané. Les proglottis sont, dit l'auteur, doués d'une tenacité vitale qui leur permet d'attendre, dans une vie latente, les conditions favorables à l'éclosion de leurs œufs. Le proglottis engourdi, rencontrant un milieu fréquenté par les animaux sujets au tænia (le porc, le bœuf, etc.), pénètre dans leur estomac, à l'action duquel il résiste, pour arriver dans l'intestin, où il renaît à la vie, fixe ses œufs et se désagrége.

Il ne manquerait rien à cette théorie, si M. Dupont indiquait où il l'a puisée, point sur lequel il se tait complétement. Nous devons, pour être justes, rappeler ici que ce sujet a été amplement traité dans le bel ouvrage de zoologie médicale que M. le professeur Van Beneden, de Louvain, a publié en 1859, en collaboration avec M. Paul Gervais, de Montpellier.

Nous en extrayons les passages suivants, qui ne laissent plus guère de doute sur l'origine du tænia chez l'homme.

« Tous les vers vésiculaires sont des tænias en voie de

développement; ils sont à l'état agame et dans une condition. expectative. Ne devant se développer entièrement que dans le canal intestinal, ils sont alors comme emprisonnés dans les cavités closes ou les parenchymes: le péritoine, les muscles, le cerveau, l'œil, le foie, la rate. Introduits dans le canal digestif de l'animal auquel ils sont destinés, ils résistent aux fluides digestifs de ce dernier, perdent bientôt leur vésicule, et prennent, au bout de quelques jours, la forme rubannaire. Ce sont alors des tænias.

«Les cochons tiennent leurs cysticerques de l'homme, et sous forme d'œufs qu'ils prennent dans les immondices au milieu desquels ils se vautrent ou qu'ils mangent. Les excréments humains, qu'on laisse souvent manger aux porcs, en renferment principalement.

« Le cysticerque du cochon, qui constitue par sa présence la maladie connue sous le nom de ladrerie de ces animaux, est l'état normal du tænia solium dans son premier degré de développement. Il reste sous cette première forme, attendant qu'il soit introduit, avec les tissus qui le logent, dans le canal digestif de l'homme. >>

Ce qui donne un cachet de vérité à cette opinion, ce sont les expériences de Küchenmeister, de Leuckart, de Humbert qui, ayant fait avaler à des individus, exempts jusque-là du tænia, le cysticercus mulosus, produisirent bientôt chez ces individus l'infection du ver solitaire. De son côté, M. Van Beneden introduisit dans l'estomac de jeunes chiens des cysticerques de lapin domestique, et ces animaux furent, en peu de temps, atteints du taenia serrata, ce qui fut constaté à l'autopsie.

Quant aux moyens thérapeutiques à employer pour obtenir l'élimination du tænia, M. Dupont passe en revue

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tous les remèdes préconisés comme tænifuges et s'arrête particulièrement à la fougère måle, qui n'est utile que contre le botriocéphale, la décoction de l'écorce de la racine de grenadier sauvage, qui est un breuvage désagréable, difficile à supporter par l'estomac et d'un effet peu sûr, et les fleurs de kousso, auxquelles il adresse le même reproche, bien qu'elles soient considérées comme un excellent spécifique.

Il n'en est pas de même, selon lui, des semences de citrouille, dont Edw. Tyson se servait déjà en 1685 contre le ver solitaire, et qui, dans ces derniers temps, ont été employées avec succès par plusieurs praticiens, qui ont consigné leurs observations dans les journaux de médecine.

C'est sous forme d'émulsion que l'auteur a employé ce médicament, dans trois cas qu'il rapporte. Il lui reconnaît les avantages suivants : 1° Son goût est agréable et rappelle celui du sirop d'orgeat, ce qui n'est pas à dédaigner pour la médecine des enfants; 2° Son action est inoffensive et il peut être employé chez l'enfant comme chez l'adulte; 3° La semence de citrouille est d'un prix peu élevé et se trouve partout sous la main; 4o C'est un puissant tænifuge; 5° Enfin, grâce à son peu de valeur, on ne songera pas à la falsifier, comme cela se fait dans le commerce pour le kousso et l'écorce de grenadier.

Voici comment il administre ce remède :

On choisit l'époque où le malade rend des cucurbitains, et on prescrit une diète lactée le soir qui précède l'ingestion du médicament.

On prend 200 semences de citrouille (cucurbita maxima ou pepo maxima), sinon fraiches, du moins dans un bon état de conservation. On émonde ces semences de leur follicule, de

manière à n'employer que le noyau, l'endosperme. Ainsi décortiquées, elles doivent être douces et agréables au goût et les 200 semences répondre à 50 grammes environ. On triture cette dose dans un mortier avec suffisante quantité de sucre, et on y ajoute 60 grammes de lait pour faire une émulsion.

Cette potion est administrée le matin à jeûn; deux heures après, on fait prendre au malade 40 grammes d'huile de ricin.

L'auteur assure qu'à la suite de cette médication, le ver est expulsé en entier. Cependant nous devons faire remarquer que dans deux des faits qu'il a observés, l'extrémité céphalique manquait; il est vrai qu'il suppose qu'elle a été rendue avec les fèces qui contenaient encore quelques parcelles de l'helminthe.

Nous ne contestons pas les succès obtenus par M. Dupont; nous admettons aussi les faits publiés par plusieurs praticiens et que l'on trouve relatés dans les recueils périodiques, mais nous ne pouvons, avec lui, considérer les semences de citrouille comme un tænifuge par excellence pouvant remplacer avantageusement l'écorce de grenadier sauvage et le kousso, médicaments dont la spécificité contre le tænia est depuis longtemps reconnue. Nous pourrions citer des insuccès de l'emploi des semences de citrouille entre les mains d'un de nos confrères, dont les essais remontent à huit années, mais nous voulons bien admettre qu'il réussit quelquefois là où les autres moyens ont échoué, ce qui tient à des circonstances dont, trop souvent, il est difficile de se rendre compte. Votre rapporteur a eu l'occasion de traiter un grand nombre d'individus atteints du ver solitaire par l'administration de la décoction de l'écorce de la racine de

grenadier sauvage, et dès 1830 il n'hésita pas à regarder ce médicament comme un spécifique ayant la propriété de tuer le ver, qui est expulsé entier, sans porter atteinte à l'organisme (1). Rarement il a manqué son effet. Vos commissaires ont aussi fait usage des fleurs de kousso, qu'ils reconnaissent comme un puissant lænifuge, mais ne répondant pas toujours, comme il arrive à tous les médicaments héroïques, à l'attente du praticien.

Nous avons l'honneur de proposer à l'Académie d'adresser des remerciments à M. Dupont et d'ordonner le dépôt de son travail aux archives.

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3. SUITE de la discussion du rapport de la Commission qui a été chargée de l'examen des questions relatives à l'admission des femmes dans les travaux souterrains.

M. KUBORN, rapporteur (2).

M. le Président : Avant de donner la parole au premier orateur inscrit, je prierai les membres de l'Académie qui auraient à présenter des modifications aux conclusions du rapport, de bien vouloir faire parvenir leurs propositions au Bureau.

Dans une discussion comme celle-ci, il faut être extrêmement large. MM. les correspondants qui prennent part à la discussion n'ont pas le droit de présenter des conclusions; ils n'ont, aux termes du règlement, que voix consultative dans nos discussions. Cependant, je suis convaincu qu'il n'est

(1) MARINUS. Dissertatio inauguralis de tænia, in-4°. Bruxellis, 1850. (2) Voir Bulletin, t. III, 3a série, pp. 11, 99, 366 el 485.

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