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fants ne descendent dans les fosses qu'à l'âge de 12, de 13 ou de 14 ans; mais s'il faut une loi pour l'obtenir, je crains fort que vous ne l'obteniez jamais. Il est dans les allures du Gouvernement, dans son esprit, que l'on ne peut blåmer à certains égards, de donner la liberté la plus complète à l'industrie, de vouloir que l'industrie fasse elle-même sa discipline, sa police, ce qui existe déjà pour plusieurs de ces branches. Votre vou, jusqu'à nouvel ordre, restera donc stérile. Je regrette vivement pour ma part que le décret de 1813 ait fixé l'âge de 10 ans, car cet âge est vraiment trop peu élevé.

M. Fossion : Le décret de 1813 a été publié en vertu de la loi du 12 avril 1810; c'est un décret impérial; il a force de loi en Belgique et dans les provinces rhénanes de la Prusse.

Ce décret de 1813 a été, je crois, mais je n'oserais l'affirmer, modifié en ce sens que l'âge de 12 ans a été substitué par arrêté royal à l'âge de 10 ans.

M. Bellefroid : Non.

M. Fossion: Dans tous les cas, les ingénieurs ont toujours un droit de conseil qui leur est dévolu par la loi, et ils peuvent agir sur les exploitants; ils peuvent leur donner des conseils et cela est même dans leur mission. Car quand on lit la discussion qui a eu lieu au Conseil d'État sur la loi des mines, on voit que ce droit de conseil leur a été formellement donné et qu'ils peuvent proposer au Gouvernement toutes les mesures qu'ils jugent convenable pour avoir une bonne police des mines.

A cet égard, si l'Académie veut émettre un vou, elle doit l'émettre auprès de M. le Ministre des travaux publics pour qu'il engage le corps des ingénieurs à étudier cette question. du travail des enfants, et alors les ingénieurs pourront faire

un rapport sur les inconvénients qu'il peut y avoir à envoyer les enfants dans les mines à un âge trop avancé. Ainsi l'àge de 14 ans offrirait peut-être des inconvénients au point de vue de l'industrie.

Je pense qu'il y a beaucoup plus de métiers qui sont infiniment plus mauvais pour les enfants, que le travail des mines, et si vous faites des recommandations, ne vous bornez pas au travail des mineurs. Commencez par le travail des fabriques qui est beaucoup plus dangereux.

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M. le Président : Ne rentrons pas dans la discussion générale.

M. Fossion: Je ne rentre pas dans la discussion générale. Il s'agit du travail des enfants; nous ne devons pas l'envisager au point de vue d'une seule industrie. S'agit-il des mines seulement ?

M. Crocq: Dans mon esprit, la mesure devrait s'appliquer à toutes les industries.

A Verviers, les industriels ont déjà pris spontanément

une mesure.

M. Vleminckx: Je crois que M. Crocq ferait bien de retirer sa proposition. Nous nous occupons ici spécialement du travail des mines.

-M. Crocq: Sans doute; aussi je spécifie qu'il s'agit de l'admission des enfants dans les mines; c'est la conséquence d'un principe plus général. Quand je réponds à M. Fossion que ma manière de voir s'applique à tous les travaux quelconques, j'indique une question de principe qui n'est pas ici en jeu.

Je vous dirai maintenant pourquoi j'avais proposé l'àge de 14 ans.

En pratique, cette mesure existe en Prusse. Je ne sais pas

s'il y est défendu d'une manière explicite de laisser descendre les enfants dans les mines avant l'âge de 14 ans; mais l'enseignement obligatoire existe et les enfants sont obligés d'aller à l'école, jusqu'à cet âge. S'ils sont tenus d'aller à l'école, ils ne peuvent descendre dans les fosses; je ne pense pas pourtant que la Prusse manque de houilleurs. Cette objection que l'on ne pourrait plus trouver d'ouvriers mineurs, tombe donc devant ce qui se passe en Prusse.

On a parlé de l'âge de 12 ans. J'accepterais volontiers cet àge, mais à une condition : c'est que le travail fût organisé de manière à ce qu'une partie de la journée fût réservée à l'école; car à l'âge de 12 ans, l'instruction n'est pas suffisante. On peut avoir reçu des principes, mais si on ne les entretient pas jusqu'à un certain âge, ils sont bientôt oubliés.

Je crois cependant pouvoir me rallier à l'âge de 15 ans ; ce sera une année de plus passée à l'école et c'est beaucoup. M. Boëns : Permettez-moi d'insister pour l'âge de 12 ans. L'objection de M. Crocq vient à l'appui de ce que j'ai dit. Il fait remarquer qu'en Prusse l'instruction obligatoire retient les enfants à l'école jusqu'à l'âge de 14 aus; mais il n'en est pas ainsi en Belgique; les enfants n'y sont pas obligés d'aller à l'école jusqu'à l'âge de 14 ans.

M. Crocq: Cela viendra.

-M. Boëns : Quand cela viendra, je serai peut-être de votre avis. Mais voici ce qui se passe aujourd'hui chez nous. Quand l'enfant a fait sa première communion, c'est-à-dire à l'âge de 11 ans, il est mis dans un état, il va travailler. Eh bien! lorsque l'enfant, à l'âge de 11 ou 12 ans, a commencé à apprendre un état, à aller dans les laminoirs, dans les forges, dans les verreries, il ne se résout pas à quitter cet

état pour descendre dans la houillère. Si vous relenez les enfants à l'école jusqu'à 14 ans, et si vous les empêchez d'aller dans les autres industries, je serai d'accord avec vous.

Voilà pourquoi vous ne devez pas aller au delà de l'âge de 12 ans. Sinon, décrétez l'instruction obligatoire et défendez que les enfants embrassent d'autre carrière avant l'âge de 14 ans; autrement vous porterez une atteinte trèsprofonde à l'industrie charbonnière.

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M. le Président : Nous sommes en présence de deux propositions. Il y a l'amendement de M. Crocq modifié, du consentement de celui-ci, par M. Kuborn, et il y a le sous-amendement de M. Boëns qui propose 12 ans.

Je fais remarquer que M. Boëns, correspondant, ne peut proposer d'amendement.

M. Vleminckx : Je prends l'amendement de M. Boëns sous mon patronage pour qu'il puisse être voté. -Le sous-amendement de M. Boëns est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

L'âge de 13 ans proposé par MM. Crocq et Kuborn est adopté.

M. Vleminckx: Je ne crois pas que la rédaction de M. Crocq puisse être maintenue. Il s'agit de demander la modification d'un texte de loi. On pourrait dire:

«L'Académie exprime en outre l'avis qu'il ne convient pas d'admettre les garçons dans les mines avant l'âge de 13 ans. »

M. Crocq: Et s'ils ne connaissent la lecture, l'écriture et les premiers éléments du calcul.

M. Lefebvre Il me semble impossible de venir décider, d'une manière incidente et après une discussion rapide, un principe aussi grave que celui-là pour une seule industrie et alors que cela n'existe dans aucune autre.

M. Vleminckx: On peut voter par division; je demande que l'Académie se prononce d'abord sur la formule que je propose et ensuite sur la seconde partie de l'amendement de M. Crocq, à savoir si l'on demandera que les enfants sachent la lecture, l'écriture et les premiers éléments du calcul.

-

M. Kuborn: Personne plus que moi n'est partisan de l'instruction; mais je me demande si l'instruction rendue en quelque sorte obligatoire, ne serait pas plus utile chez d'autres que chez les mineurs. Jusqu'aujourd'hui ce métier a passé pour être le partage des gens ignorants, et il est de fait que l'on peut être un mineur passable et même un trèsbon mineur, sans savoir lire et écrire.

A un point de vue plus général, je voudrais que l'instruction fût inscrite partout; mais tout en étant partisan de l'instruction obligatoire, je voudrais d'abord que nous eussious des bâtiments d'école partout et un nombre suffisant d'instituteurs; je voudrais en outre que nos écoles ne regorgeassent plus d'élèves. Si alors il y avait encore des parents assez mal avisés pour ne pas soigner le bien-être moral et intellectuel de leurs enfants, je crois que la loi devrait intervenir.

En ce qui concerne les mines spécialement, je crois qu'en fixant l'âge de 13 ans, nous avons lieu de croire que les enfants iront à l'école jusqu'à cet âge; où voudriez-vous qu'ils allassent? Aujourd'hui l'instruction est pour ainsi dire gratuite partout. D'un autre côté, nos ingénieurs des mines ne sont pas partisans de l'obscurité; ils désirent aussi que les ouvriers sachent lire et écrire. Les industriels à leur tour ne demandent pas mieux, et la preuve, c'est qu'ils établissent partout des écoles et engagent les ouvriers à y envoyer leurs enfants.

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