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duer la proportion d'air qu'on veut mélanger aux vapeurs anesthésiques. D'ailleurs, il est un fait dont il faut tenir un grand compte: c'est que tous les chirurgiens ont renoncé aux appareils.

Il s'inscrit donc formellement contre l'emploi des appareils, et surtout contre leur emploi obligé. Il dénie, tout en protestant de son respect pour la justice, la compétence des magistrats à s'immiscer dans les questions de cet ordre: les médecins, pour tout ce qui regarde leur art, ne sont justiciables que de leur conscience.

A l'appui de la possibilité d'asphyxie par les appareils, il rappelle que naguère un jeune médecin, plein de zèle d'ailleurs et fort instruit, présenta à l'Académie des Sciences un mémoire relatif à des expériences tendant à démontrer que l'éther était le contre-poison du chloroforme. Une commission fut nommée, dont M. Cloquet fit partie, et des expériences nouvelles eurent lieu, en sa présence, sur des animaux au jardin des Plantes. Il en résulta que l'auteur du mémoire, se servant mal de ses appareils, asphyxiait simplement les animaux, et que l'éther les faisait revenir à cux en n'agissant que comme excitant.

M. Cloquet conclut en disant qu'il faut renoncer aux appareils, et remercier M. Devergie d'avoir appelé l'attention de l'Académie sur les phénomènes de l'asphyxie.

Séance du 25 juin.

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DYNAMOSCOPIE. M. COLLONGUES lit un mémoire sur un nouveau système d'auscultation qu'il nomme dynamoscopie (1). L'auscultation, dans ce système, se pratique à l'aide d'un instrument long de 10 à 42 centimètres, composé d'une tige métallique dont l'une des extrémités s'élargit en godet, et dont l'autre se place dans l'oreille de l'observateur. Si l'on introduit la dernière phalange du doigt dans le godet terminal, on entend des bruits particuliers très-distincts, que l'auteur compare à des grésillements, à des pétillements et à des bourdonnements.

Voici en quels termes M. Collongues résume les résultats de la dynamoscopic, dans ses applications aux maladies in

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ou le tremblotement peuvent être continus, comme ils peuvent aussi ne paraître que de temps en temps.

3o Le bourdonnement est très-variable, très-inégal: il affecte tantôt une note aiguë, tantôt une note grave; il est à présent très-évident, tout à l'heure très-obscur; tantôt net, tantôt embarrassé.

4 Le bourdonnement est intermittent. Sa suppression peut être brusque, comme aussi elle peut arriver d'une manière lente, en passant d'une note plus élevée à une note plus basse.

5o Le bourdonnement montre des caractères tels qu'il rappelle le bourdonnement qui existe au creux épigastrique ou sur la région précordiale après la mort: ce bourdonnement est dit bourdonnement des mourants.

6o Enfin le bourdonnement se supprime quelquefois complétement à l'extrémité des doigts quelques heures avant la mort ou au moment même de la mort.

Dans les maladies chroniques. — Toutes les variétés du bourdonnement dans les maladies aiguës se présentent encore dans les maladies chroniques.

Le bourdonnement offre dans celles-ci une faiblesse qui ne se trouve pas dans les maladies aiguës.

Fièvres intermittentes. · Les trois stades de la fièvre ont trois bourdonnements différents.

Dans le premier stade, ou stade de froid, le bourdonnement est sourd, lent, profond, roulan continu, inégal.

Dans le deuxième stade, ou stade de chaud, le bourdonnement est roulant, superficiel, très-fort, très-rapide, continu, quelquefois trépidant ou tremblotant.

Dans le troisième stade, ou stade de sucur, le bourdonnement est roulant, fort, moins rapide, continu, égal, régulier.

Dans le cholera épidémique, le bourdonnement offre dès le début les caractères de celui qui ne se présente ordinairement qu'à la fin des maladies aiguës, c'est-àdire qu'il est intermittent. Les intermittences du bourdonnement sont plus prolongées que les réapparitions. D'ailleurs il est très fort, très-variable, tremblotant; il baisse et disparaît.

Dans les maladies qui se distinguent par la perte subile du sentiment et du mouvement, ordinairement le bourdonnement se supprime d'abord, et sa suppression continue jusqu'aux approches du retour des sens du malade.

Dans les attaques d'hystérie, la suppres sion du bourdonnement n'est pas la règle.

Dans toutes les maladies nerveuses, le bourdonnement est comme contracté, cmbarrassé.

Les paralysies complèles sont remarquables par l'absence totale du bourdon

nement.

Les paralysies incomplètes ont un bourdonnement plus ou moins faible, suivant le plus ou moins de paralysie.

Le bourdonnement pendant le sommeil des malades conserve les altérations de l'état de veille; il est seulement plus faible, plus profond.

Pétillements. Dans le cours des maladies aiguës comme des maladies chroniques, les pétillements sont extrêmement variables. Ils ne se suppriment qu'à la mort.

Les pétillements sont rares pendant le stade de froid des fièvres intermittentes; ils sont plus fréquents et plus forts dans le stade de chaud.

Pendant la sueur ils sont éclatants, trèsvifs, assez fréquents et ordinairement simples.

Dans le choléra épidémique, ils sont remarquables par leur nombre et leur éclat. Ils disparaissent pendant les crampes.

Dans les maladies qui se distinguent par la perte subite du sentiment et du mouvement, les pétillements ne se suppri ment pas toujours pendant les attaques.

Dans l'hystérie, ils sont très-nombreux; ils le sont aussi dans les maladies nerveuses qui n'abolissent pas la conscience.

Dans les paralysies complètes, ils sont nuls; dans les paralysies incomplètes, ils

sont rares.

Dans le sommeil des malades, ils sont plus petits, plus rares. Diagnostic.

L'absence du bourdonnement fait distinguer une paralysie complète d'une paralysie incomplète; elle est le signe le plus certain de la paralysie vraie, et la fait distinguer de la paralysic simulée.

Marche, durée, terminaisons des maladies. Les variations du bourdonnement peuvent beaucoup éclairer la marche, la durée, la terminaison des maladies.

Le bourdonnement roulant, fort, rapide, coincide avec la première période des maladies.

Les bourdonnements tremblotants, intermittents et des mourants, correspondent aux périodes les plus graves.

Pronostic. Le bourdonnement roulant, fort, rapide, égal, signifie qu'une maladie, pour le moment, est exempte de danger.

Le bourdonnement tremblotant, rou

lant, rapide, continu, inégal, est l'indice d'un état sérieux.

Le bourdonnement qui est très-variable et très-inégal, surtout s'il se joint au tremblotement, correspond à un état grave.

Le cas sera encore plus grave si le bourdonnement roulant, tremblotant, est inter

mittent.

Lorsque le bourdonnement passe du roulant, du tremblotant, de l'intermittent au doux, c'est le signe de la rétrogradation de la maladie.

Enfin le bourdonnement des mourants et l'absence complète et durable du bourdonnement à l'extrémité des doigts des mains, sont un caractère certain d'une mort prochaine.

Du pronostic dans quelques maladies en particulier. Dans les maladies qui se manifestent par la perte subite de la connaissance, le bourdonnement qui persiste pendant l'attaque indique que l'attaque n'est pas mortelle.

Le bourdonnement qui s'est supprimé au début de l'attaque et qui reparaît durant son cours indique que le malade reprendra ses sens.

La réapparition du bourdonnement sous l'influence de l'électricité dans les organes paralysés annonce que le malade peut guérir.

Traitement. La méthode qui fait rétrograder le bourdonnement de la deuxième période à la première est la plus convenable, et réciproquement la méthode qui fait passer le bourdonnement de la première à la seconde période est un traitement peu convenable. Pétillements. Les pétillements manquent, ainsi que les bourdonnements, dans les organes complétement paralysés.

Dans les pertes de connaissance, les pétillements qui persistent malgré l'absence de bourdonnements doivent faire espérer que le bourdonnement se réveillera et que l'attaque ne sera pas mortelle.

L'électricité qui réveille dans un organe paralysé les pétillements sans le bourdonnement doit inspirer la confiance que le bourdonnement ne tardera pas à revenir. Résultat de la dynamoscopie après la mort. Mort générale. -- Immédiatement après la mort le bourdonnement est absent de l'extrémité des doigts; on le perçoit aux jambes, aux cuisses, aux avantbras, aux bras, au cou, à la poitrine et quelquefois à l'abdomen; on ne l'entend pas à la face et sur le cuir chevelu..

Il y a un point dans la région précordiale et épigastrique où il est plus distinct

que dans toute autre partie. Ce point n'a pas de siége précis.

Le bourdonnement se trouve après la mort, petit, faible, profond, lent, peu nourri, clair, continu, égal. Il rappelle le bourdonnement des mourants.

Le bourdonnement disparaît d'abord des pieds, des mains, puis des avant-bras, des jambes, des bras, des cuisses, où il est rare qu'on le trouve huit heures après la mort. Il se dissipe ensuite au cou, à la partie supérieure de la poitrine, et il reste encore perceptible, quoique très-affaibli, aux points indiqués des régions précordiale et. épigastrique jusqu'à la dixième ou seizième heure après la mort. Mort locale. Dans les membres séparés du tronc, le bourdonnement existe partout immédiatement après l'amputation; il disparaît de minute en minute, en allant des deux extrémités vers le centre. Ce n'est que vers la quinzième minute qu'il est complétement éteint.

Pétillements.

Les pétillements sont nuls dans la mort générale et locale.

L'absence du bourdonnement est le signe le plus certain de la mort réelle; elle fait distinguer la mort réelle de la mort appa

rente.

ANESTHÉSIQUES. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion sur l'emploi des appareils dans les inhalations anesthésiques. M. Larrey proscrit tout appareil pour l'application du chloroforme, et rejette toute responsabilité que l'on serait tenté de faire peser sur le chirurgien.

Séance du 30 juin.

CAUSE PEU CONNUE D'ACCIDENTS DANS L'INHALATION ANESTHÉSIQUE.-M. DEPAUL donne lecture d'une lettre de M. DESPRÈS, chirurgien de Bicêtre, relative à la discussion sur les anesthésiques. M. Desprès, regret tant que le conseil des décisions académiques ne lui ait point accordé le tour de faveur qu'il avait sollicité, prie l'Académie de prendre note de quelques conclusions du mémoire qu'il doit venir lire, plus tard, devant elle. Parmi ces conclusions il en est une qui offre, eu égard au point où en est Ja question, un intérêt tout particulier, la voici M. Desprès pense que la mort à la suite des inhalations de chloroforme est causée par la base de la langue qui pèse sur l'épiglotte et s'oppose au passage de l'air. La meilleure manière de remédier aux accidents qui se produisent est d'introduire dans la gorge du patient l'index, dont on fait pénétrer l'extrémité jusque dans l'ouverture supérieure de la glotte,

et, le recourbant en crochet, d'attirer en haut et en avant l'épiglotte et la langue.

VACANCE. M. LE PRÉSIDENT annonce que, par suite de la mort de M. MartinSolon, une vacance est déclarée dans la section de thérapeutique et de matière médicale.

VACCINE. · M. VELPEAU dépose sur le bureau un mémoire ayant pour titre : Quelques observations sur la vaccine et la variole, par M. Alfred Vy, vaccinateur spécial à Elbeuf.

M. VELPEAU recommande ce travail, contenant des observations faites pendant une série de vingt années et traitant de la plupart des questions en litige à propos de ces maladies. Il émet le vœu que le mémoire de M. le docteur Vy ne soit pas égaré.

M. LE PRÉSIDENT le prie de se joindre à la commission chargée de l'examen de ce travail.

DARTRE TONSURANTE.-M. REYNAL, chef de clinique à l'École vétérinaire d'Alfort, lit un mémoire sur une dartre tonsurante du cheval et du bœuf, contagieuse de ces animaux à l'homme.

L'auteur a résumé son mémoire dans les conclusions suivantes :

1o Il existe chez le cheval et chez le bœuf une maladie cutanée que l'on peut désigner sous le nom de dartre tonsurante contagieuse.

2. Cette maladie apparaît sous la forme d'anneaux et de cercle d'un diamètre de trois à six centimètres.

3. Elle détermine la dépilation des points envahis en procédant toujours circulaire

ment.

4° La dartre tonsurante se transmet du cheval au cheval et du bœuf au bœuf, et réciproquement du cheval au bœuf.

3 Elle se transment égalemet du cheval et du bœuf à l'homme. (Commissaires: MM. Leblanc, H. Bouley et Devergic.)

M. GIBERT fait remarquer que l'on a reconnu à l'hôpital Saint-Louis que les affec tions analogues à celle dont M. Reynal vient d'entretenir l'Académie sont dues à un champignon semblable à celui du favus.

A la suite de cette observation, M. Gibert est adjoint à la commission nommée.

ANESTHÉSIQUES.-M. ROBERT. Je ne partage pas l'opinion de ceux de nos collègues qui ont regretté que M. Devergie ait fait sa communication. La question de responsabi. lité médicale, suivant moi, n'est pas une de celles que l'on puisse éluder à son gré; elle est inscrite dans les lois, et, de plus, dans la conscience de tout honnête homme. Loin

donc d'en détourner les regards, il faut l'examiner sérieusement, afin de dissiper, s'il est possible, les inquiétudes du corps médical en lui montrant dans quelles limites cette grave question peut être posée.

Depuis l'observation de M. Gorré (de Boulogne), qui fut le point de départ de la mémorable discussion de 1849, les cas de mort se sont multipliés; plusieurs ont eu lieu sous les yeux des praticiens les plus consommés, de telle sorte que la question de responsabilité a complétement changé de face; car aujourd'hui il n'est plus permis de douter que le chloroforme ne puisse entrainer des accidents funestes, alors même qu'il est pur et administré par des mains habiles.

Mais, dira-t-on, si l'emploi des anesthésiques sagement dirigé peut amener la mort, que ne doit-on pas redouter de la témérité ou de l'ignorance? Et le médecin inhabile, si un malade périt entre ses mains, ne pourra-t-il pas être frappé par l'art. 515 du Code pénal? Il faut donc d'abord déterminer ce qu'on doit entendre par bon ou mauvais emploi du chloroforme.

De nombreuses expériences pratiquées sur les animaux ont prouvé que, entre les premières manifestations anesthésiques et les phénomènes ultérieurs qui entraînent la mort, il existe une période moyenne, caractérisée par l'abolition de la sensibilité et des mouvements volontaires avec intégrité des grandes fonctions de la vie organique. C'est cette période qui se prête le mieux à la pratique des grandes opéra tions. Quel que soit le degré de l'anesthé sie que l'on désire obtenir, depuis la simple insensibilité jusqu'à la résolution des muscles, il est un précepte capital: c'est que les vapeurs stupéfiantes doivent être mêlées à l'air en proportions toujours peu considérables.

M. le docteur Snow a vu que les animaux, placés dans un vase clos contenant 3 ou 4 p. 100 de vapeurs de chloroforme, cessent de respirer au bout de dix ou quinze minutes, qu'ils peuvent être rappelés à la vie si l'on n'y prolonge pas trop leur séjour, mais qu'ils succombent rapidement lorsque l'air contient plus de 8 p. 100 de chloroforme. J'ai rappelé dans mon rapport sur l'amylène des détails d'expériences analogues, qui m'ont donné à peu près les mêmes résultats.

Chez l'homme, l'éthérisation s'opère dans des conditions bien différentes, car elle a toujours lieu à l'air libre. Il est done impossible de connaitre exactement les proportions de vapeurs anesthésiques mélées à l'air, et d'apprécier la quantité

d'air mêlé de chloroforme que les malades absorbent dans un temps donné, les uns respirant modérément, les autres à pleine poitrine. Par conséquent, la prétention émise par quelques personnes d'adminis trer le chloroforme avec précision et de le doser est une chimère que l'on ne saurait réaliser dans la pratique.

Il faut procéder, en quelque sorte, par tâtonnements, commencer par des quantités très-faibles et incapables de nuire, quelle que soit la susceptibilité de l'organisme; puis augmenter peu à peu la proportion des vapeurs, en même temps que l'on surveille les effets produits, seul criterium qui puisse nous donner la mesure des quantités qu'il est permis d'atteindre. Quelles conditions doivent remplir les appareils destinés à l'inhalation des vapeurs du chloroforme?

1o Ils doivent être disposés de manière à laisser à l'air un passage large et constamment facile.

20 L'air doit être sans cesse renouvelé, c'est-à-dire que chaque portion d'air respirée doit être immédiatement rejetée au dehors.

5o L'opérateur doit pouvoir, à son gré et suivant les effets produits, graduer la concentration des vapeurs anesthésiques.

4 Enfin l'inhalation doit être pratiquée à la fois par les narines et par la bouche.

Je reconnais de grands avantages à l'éponge ou à la charpie imbibées de chloroforme et placées au fond d'un cornet; mais ces corps poreux, présentant sous un petit volume une surface très-étendue, permettent l'évaporation du chloroforme avec une extrême rapidité. Il résulte de là qu'à un moment donné l'air qui s'en dégage doit être chargé de vapeurs stupéfiantes dans de fortes proportions; et si le malade fait alors des inspirations rapides et profondes, n'y a-t-il pas lieu de redouter les plus graves accidents?

Ces raisons m'ont porté à préférer à ces moyens simples des instruments plus précis et plus sûrs.

Ceux qui remplissent le mieux les indications que j'ai exposées plus haut sont, en Angleterre, l'appareil de M. Snow, et, en France, celui de M. Charrière et celui de M. Duroy.

L'appareil de M. le docteur Snow est simple et bien connu; mais il ne laisse pas l'opérateur suffisamment maître du dosage des vapeurs anesthésiques.

L'appareil de M. Duroy, ou anesthésimètre, est parfaitement imaginé, mais il est compliqué et d'un prix élevé. Enfin l'appareil de M. Charrière, le plus simple de tous, offre l'avantage de doser approxi

mativement les vapeurs de chloroforme, grâce à un petit diaphragme spiroïde qui ne laisse se volatiliser qu'une quantité toujours modérée du liquide dont il est imbibé.

Il y a donc, dans un appareil, un motif de sécurité, une garantie que ne comportent pas les instruments poreux. Aussi n'est-ce pas sans étonnement que, dans la dernière séance, j'ai entendu M. Larrey nous dire que les appareils sont des instruments de concentration plus actifs, et par conséquent plus dangereux, que la simple éponge.

Mais la question du choix des appareils n'a pas l'importance que la discussion actuelle semble lui donner. M. Devergie, en se préoccupant de l'asphyxie par défaut d'air comme d'une cause possible de mort, dans le cours des inhalations, a commis une erreur manifeste. Tous les médecins savent qu'avant tout ils ne doivent pas étouffer leurs malades; et je ne sache pas qu'il existe dans la science un scul cas avéré où la mort ait eu lieu par le mécanisme qu'il admet.

La question de responsabilité, en ce qui touche le chloroforme, est une question très-complexe; elle peut être soulevée dans la plupart des conditions très-diverses au milieu desquelles se pratique l'éthérisation. Ainsi, pour ne parler d'abord que des degrés auxquels on peut être obligé de pousser l'anesthésie, ces degrés varient suivant la nature des opérations qu'il s'agit de pratiquer. Est-ce une simple ouverture d'abcès, le débridement d'un panaris, une petite amputation : il suffit en général d'éteindre à peine ou seulement d'émousser la sensibilité. Mais faut-il amputer un membre, découvrir une artère, isoler une tumeur placée dans le voisinage d'organes importants: il faut abolir complétement la sensibilité, sous peine de voir le malade se livrer à des mouvements violents que sa volonté ne peut plus maîtriser. Certains actes chirurgicaux ne peuvent s'accomplir sans qu'on se soit débarrassé à la fois et de la sensibilité et de la contractilité musculaires. Parviendrait - on, sans cette condition, à réduire les luxations et les hernies?

Enfin la durée de certaines opérations est considérable; on est quelquefois obligé de prolonger l'éthérisation un quart d'heure, vingt minutes, une demi-heure. Certes, il est sans exemple encore que la mort ait été causée par le fait de doses considérables de chloroforme. Cependant on ne saurait disconvenir que la nécessité de pousser ainsi l'éthérisation jusqu'à ses limites extrêmes ne soit une circonstance sérieuse.

Certaines altérations organiques da cœur sont de nature à influer gravement sur les résultats de l'éthérisation. Mais comment les reconnaître d'une manière certaine? Comment diagnostiquer sûrement un amincissement des parois du cœur, ou cet état graisseux dont la dernière victime de l'anesthésie a offert un exemple? L'anémie, la faiblesse, l'épuisement, suites de maladies longues, les hémorrhagies, la dépression vitale qui se produit sous l'influence des préoccupations, de la terreur causée par l'opération, sont encore des conditions défavorables au même titre. Le médecin à qui, dans de semblables circonstances, il arriverait un malheur, pourrait-il être compromis sérieusement aux yeux de la loi !

Les doses de chloroforme requises pour obtenir l'anesthésie varient à l'infini, suivant les susceptibilités individuelles, et ne peuvent davantage devenir des armes contre les médecins malheureux.

Toutes ces conditions variées de l'organisme doivent être prises en sérieuse considération quand on veut étudier le mode d'action du chloroforme et apprécier la responsabilité qui peut incomber au médecin, en cas de malheur.

Cependant ce n'est point, en général, de ce côté que se trouvent les plus graves écueils de l'anesthésie; c'est dans la marche même des phénomènes qu'il faut les chercher, dans leur irrégularité, et dans les accidents qui peuvent en entraver le

cours.

On aurait une idée fort inexacte de la marche des phénomènes de l'éthérisation si l'on se bornait à l'observer chez les animaux. lei, à part quelques variations insignifiantes, elle est régulière; mais chez l'homme il peut se présenter une foule d'accidents plus ou moins sérieux.

Une cause d'asphyxie très-commune est la suivante :

Lorsque l'anesthésie est profonde, les muscles de la langue étant paralysés, la base de cet organe se porte en arrière en obéissant aux lois de la pesanteur; elle refoule l'épiglotte, et peut ainsi fermer l'ouverture supérieure du larynx. Cet accident a été surtout signalé par M. Desprès, chirurgien de l'hospice de Bicêtre, qui l'a fréquemment observé chez les vieillards.

Chez quelques malades, le chloroforme exerce une action hyposthénisante trèsmarquée pendant toute la durée des inhalations. La période d'excitation est nulle ou presque nulle. Ces cas réclament la réserve et la vigilance du chirurgien, car c'est alors que les mouvements respira

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