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DICTIONNAIRE

DES

PROVERBES FRANCAIS.

A.

A. (Il n'a pas fait une panse d')

Il n'a rien fait du tout.

Cette expression proverbiale est fondée sur ce que l'a est la première lettre de l'alphabet, et sur la manière de commencer à former cette lettre.

A. (Marqué à l')

Proverbe tiré des monnaies de France. A est la marque de l'hôtel des monnaies de Paris; et comme cet hôtel est le plus considérable de toute la France, une sorte de supériorité s'est trouvée comme inhérente à la lettre A, et l'on a dit d'un homme remarquable par ses lumières, son courage, ou sa grande probité, qu'il était marqué à l'A.

E;

On a anciennement battu monnaie dans toutes les villes que nous allons citer; et voici leurs marques : Paris, A; Rouen, B; Caen, C; Lyon, D; Tours, Angers, F; Poitiers, G; La Rochelle, H; Limoges, I; Bordeaux, K; Bayonne, L; Toulouse, M; Montpellier, N; Riom, O; Dijon, P; Perpignan, Q; Orléans, R; Reims, S; Nantes, T; Troyes, V; Amiens, X; Bourges, Y; Grenoble, Z; Metz, AA;

Strasbourg, BB; Besançon, CC; Lille, W; Aix, &; Rennes, 9; Pau, U, ou l'empreinte d'une vache.

A l'époque de la révolution de 1789, les villes où se trouvaient des hôtels des monnaies, étaient, Paris, Rouen, Caen, Tours, Angers, Poitiers, La Rochelle, Limoges, Bordeaux, Dijon, Orléans, Reims, Nantes, Troyes, Amiens, Bourges, Rennes, Metz, Strasbourg, Besançon, Lille. Leur juridiction était subordonnée à celle de la Cour des monnaies. Chaque hôtel était composé pour la régie de deux juges-gardes, d'un directeur, d'un contrôleur, d'un graveur et d'un nombre plus ou moins grand d'ajusteurs et de monnoyeurs. Metz, Dole et Pau avaient une chambre des monnaies.

Le nombre des ateliers monétaires a été bien réduit. Cependant Marseille, où il ne s'en trouvait point en 1789, en a un. Voici la liste de ces ateliers, par ordre, avec leurs marques: Paris, A; Bayonne, L; Bordeaux, K; La Rochelle, H; Lille, W; Limoges, I; Lyon, D; Marseille, AM entrelacés comme le chiffre de la Vierge Marie, l'Ave Maria; Nantes, T; Perpignan, Q; Rouen, B; Strasbourg, BB; Toulouse, M.

La monnaie de France est aujourd'hui, sans contredit, la mieux frappée de l'Europe, à plus forte raison des autres parties du monde.

En l'an vIII de la république française (1800), il fut frappé à Paris une médaille de bronze, qui fait époque; elle prouve qu'alors on essayait de perfectionner les monnaies; nous en devons la communication à M. Huguier de Saint-Amand, ex-commissaire des guerres. D'un côté est la tête de Lavoisier, avec cette légende à l'entour: Ant. Laur. Lavoisier. De l'autre côté : l'an 8. Ph. Gengembre essayait de perfectionner les monnaies.

ABBÉ. (Attendre comme les moines attendent l') C'est-à-dire, en commençant à dîner.

L'heure du repas est si réglée dans les couvens, que, quand l'heure est sonnée, on se met à table sans attendre personne, pas même le supérieur.

Le P. Jean-Marie de Vernon, pénitent du couvent de Nazareth, à Paris, qui fit en 1665 un Commentaire édifiant sur les Proverbes, donne cette explication : «En attendant l'abbé, les moines ne laissent pas de chanter au chœur. >>

Le moine répond comme l'abbé chante.
On suit les ordres de son chef.

AB OVO.

Expression proverbiale, qui est le commencement. du passage d'Horace: Ordiri ab ovo, commencer par l'œuf:

C'est-à-dire, remonter à l'origine d'une chose; par allusion à ce poète qui, pour chanter la guerre de Troye, commença par l'histoire de l'œuf, d'où sortit Léda, première cause de cette guerre.

ABSENCE.

Les absens ont tort.

Les anciens disaient d'un homme absent: hæres non erit, il n'héritera point.

On oublie les absens, ou si l'on s'en occupe, dans l'impossibilité de faire valoir leurs droits.

ils sont

Notre proverbe peut aussi s'appliquer aux amans. Vif et impétueux, l'amour a besoin de jouissances; le jeûne fait sur lui l'effet d'un poison lent. Après vingt ans d'absence, un amant cherche-t-il son amante? elle avait vingt ans lors qu'il est parti.... Vingt et trente....

Oh! comme elle doit être vieillie! aussi, il temps qu'il n'y pense plus.

ACAGNARDER, (s') devenir paresseux.

y a long

y

<«< En ma grande jeunesse, dit Estienne Pasquier, Recherches de la France, ces fainéans (cagnards) avoient accoutumé au temps d'esté de se venir loger soubz les ponts de Paris, garçons et garces pesle mesle: et Dieu sçai quel menasge ils faisoient ensemble. Tant a qu'il me souvient qu'autrefois par cry publicq' émané du prevost de Paris, il leur fut deffendu sur peine du fouët de plus y hanter; et comme quelques uns y furent desobeyssans, j'en vey fouëter pour un coup plus d'une douzaine soubz les mesmes ponts, depuis lequel temps ils en oublierent le chemin. Ce lieu estoit appellé caignard, et ceux qui le fréquentoient, caignardiers, parce que tout ainsi que les canards, ils vouoient leur demeure à l'eauë. »

L'opinion de Le Duchat (Ducatiana) nous paraît plus vraisemblable; il fait dériver cagnard de canis; et par cagnard il entend toute espèce d'abri où les gueux aiment à se coucher, comme des chiens.

ACCORDS. (Être de tous bons)

Métaphore empruntée de la musique, où ce qu'on appelle la quinte est de tous accords.

Étienne Tabourot, procureur du roi au bailliage de Dijon, mort en 1590, avait pris le surnom de Seigneur des Accords; sa devise était un tambour avec ces mots : à tous accords.

On trouve dans ses Bigarrures, ouvrage plusieurs fois réimprimé, entre autres en 1662, in-12, des règles sur les différentes manières de plaisanter, notamment sur les calembourgs.

Étienne Tabourot était du nombre de ces pseudonymes qui, en voulant amuser le public de ce qui les divertit eux-mêmes, n'osent avouer des productions frivoles.

Jean Tabourot, son oncle, official de Langres, avait mis le nom de Toinot arbeau, qui est l'anagramme de Tabourot, à la tête de l'Orchæsographie (Traité de la danse) imprimée en 1529.

ACCOUCHÉE. (Caquets de l')

On appelle ainsi les interminables conversations des femmes qui visitent une accouchée. Chacune raconte ce qu'elle a eu, ce qu'elle a fait en pareille occasion, etc. Nous croyons que c'est dans l'ouvrage de Christine de Pisan, intitulé la Cité des Dames, que l'on trouve le plus ancien monument des visites bruyantes faites aux femmes en couche, visites qui dès ce temps-là (quatorzième siècle) étaient appelées caquets de l'accouchée.

Christine visita la femme d'un marchand. La chambre de l'accouchée, ornée d'une tapisserie précieuse en or de Cypre, attirait l'admiration; on y voyait des cartouches où étaient brodés les chiffres et les devises de la dame. Les draps du lit, en toile fine de Reims, avaient coûté plus de trois cents livres; le couvre-pied, invention nouvelle, était une étoffe de soie et argent;

oreillers à

le tapis sur lequel on marchait était pareil à or. La femme du marchand brillait dans son lit avec la plus élégante robe de soie cramoisie, appuyée sur gentils gros boutons de perles orientales. Dans un autre ouvrage fort ancien, intitulé le Miroir des vanités et pompes du monde, voici ce qu'on lit sur caquet de l'accouchée : « Il « y a là caquetoire parée tout plein de fins carreaux pour asseoir les femmes qui surviennent, et auprès du lit une chaise ou faudeteul

le

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