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beaucoup rire cette société douteuse, que j'ai peinte ailleurs. Je vais insérer ce conte, quoique le sel satyrique de la narration perde de sa force par écrit.

Une Citoyenne de la section Pelletier marchandait une aune d'étoffe. Elle croyait, ne connaissant peut-être pas encore le Métre nouvellement inventé, avoir la mesure d'une aune, mais le marchand mesurait avec son métre. Revenue chez elle, elle vérifie, sur sa propre aune, & elle trouve trop peu d'étoffe. Elle retourne chez le marchand, il soutient son droit, & ne veut ni reprendre sa marchandise, ni entrer en composition. Alors elle se rend chez le Citoyen Juge de Paix, il se nomme Delorme, & plaide devant lui sa cause de la maniere suivante :

La Femme.

Monsieur.

Delorme, interromant.

suis pas un Monsieur.

Comment! je ne

La F. Ah, pardon, Citoyen. Diman he

passé,

Del. Qu'appellez vous, Dimanche ? nous n'en avons plus.

La F. Eh bien! le-Quintidi de la Semaine.

- Del. (impatient.) Vous m'ennuyez, je ne connais point de Semaines.

La F

Mais-Mons.....Citoyen, Je veux

dire la Décade du mois-d'Avril.

Del. (en colere.) Encore une sottise, Avril ! La F. De Floréal—J'achetai deux aunes. Del. (furieux.) Finissez enfin. Vous parlez de Métres. Allez, allez, allez! vous avez encore des Dimanches-des Semaines-des mois d'AVRIL-des Aunes-& des Messieurs!! retirez-vous, vous êtes une Aristocrate.

La pauvre femme bien confuse de ses méprises se retira, & garda sa marchandise métrique.

Divers intérêts étaient liés à mon séjour à Paris. Les circonstances même de mes affaires exigeaient de la promptitude dans l'aller & le retour; Il fallut en conséquence abandonner mon projet de revoir les départements intérieurs, surtout les magnifiques contrées méridionales de la France, que j'avais vues en 1783; & même les superbes environs de

Paris, excepté quelques maisons de campagne de personnes de ma connaissance, je ne vis que Meudon, St. Germain en Laye & Versailles.

ST. GERMAIN EN LAYE.

Le chemin de Paris à St. Germain en Laye est un des plus agréables de toute cette belle contrée. De la Place l'Egalité, devant le cidevant Palais Royal, je roulai dans mon rapide cabriolet, au travers de la Place de la Concorde & des Champs Elysées, à la barriere de Chaillot. Quelques unes des maisons des barrieres, bâties le long des immenses murailles de Paris sont de beaux morceaux d'architecure; d'autres au contraire sont plutôt les productions d'un bizarre caprice, que l'invention du bon goût. L'une ressemble à un amas de pierres, dont la masse, sortant du cahos, cherche à se développer pour former une maison: une autre ressemble à un fortin informe; dans une troisieme vous voyez l'échantillon de la Bastille. Elles ont été bâties avec une prodigalité monstrueuse, & on ne peut tirer

à présent aucun parti de ces masses élevées sans but utile.

Le chemin vous conduit sur le pavé le plus uni, au milieu d'une double allée d'arbres superbes jusqu'au Bois de Boulogne, jadis si beau. Il a perdu tous ses charmes, c'est à présent une raze campagne, avec quelques grouppes d'arbres sur un terrein hériffé de souches. La plus grande partie de ce beau bois a été abbatue, quelques uns disent à cause de la disette de bois, d'autres, parce que les arbres mouraient. Les Parisiens ne fourmillent plus dans ces bocages autrefois si délicieux, à présent dévastés; je vis très-peu de promeneurs, de cavaliers & de voitures. De là le grand chemin traverse un pays bien cultivé. Tout ce que la richesse de la nature peut étaler se présente à vos yeux avec une abondance luxurieuse & une variété séduisante. Les collines couronnées de bois, des vallons dont les prairies sont couvertes de bêtes à cornes, de moutons, de troupeaux, des champs cultivés à perte de vue, & la Seine serpentant au mileu de ce superbe tableau.

L'agriculture est encore à présent dans l'état

le plus florissant en France, & rien ne m'a plus étonné que le coup d'œil du pays, en traversant les départements frontieres à mon entrée & à ma sortie. Que n'a-t-on pas dit & écrit en Allemagne sur la pauvreté du pays, sur Pentiere destruction de l'agriculture, sur la dévaftation des campagnes & des jardins, faute de bras que n'a-t-on pas rêvé sur le succès final du projet d'affamer la France! je m'attendais, non pas d'après ce projet, mais à cause de l'absence de tant d'hommes employés, ou dévorés par la guerre la plus sanglante, à trouver une grande partie du pays dépeuplé, surtout les départements frontieres, qui avaient plus souffert de ce fléau; j'ai trouvé tout le contraire; jamais le pays n'a été mieux cultivé; pas un acre de terre n'était inculte des terres labourables une mer ondoyante d'épis à perte de vue de tout côté; les jardins potagers parfaitement soignés; les fossés, les enclos bien entretenus; les habitations des cultivateurs en bon état, la plûpart même bâties à neuf, ou réparées. S'il y a un pays dans le monde qui soit enrichi par la prodigalité de la nature, jointe

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