Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

tout ce dernier caractere d'agriculteur que Houdon a eu en vue. Le costume simple de la figure, choisi à cet effet, a trouvé beaucoup de critiques en Amérique, où le goût est encore dans l'enfance. On désirait voir un héros Romain avec tous les attributs d'un conquérant. Houdon au contraire voulait présenter le protecteur des arts, de la paix & de la liberté, ce fut l'entremise de Washington lui-même, qui décida dans les états l'exécution de l'idée de l'artiste.

La figure porte le simple & noble habillement d'un homme de la campagne, une veste légere plissée, à moitié boutonnée, & des sandales aux pieds, avec un manteau, attaché sur la poitrine, se développant sur les épaules & sur le dos, destiné à garantir du mauvais tems un agriculteur. Une main est appuyé sur un bâton, l'autre se pose sur des faisceaux républicains, converts du chapeau de la liberté, à ses pieds une charrue.

Houdon a été sauvé par son excellente & aimable femme des mains de Robespierre & de ses adhérents, qui s'étaient conjurés contre

tout ce qui tenait au génie. Les annales de cette époque malheureuse conservent beaucoup d'exemples de la grandeur d'ame vraiment Romaine de beaucoup de femmes Françaises, qui ont ou cautionné, ou sauvé leurs maris. Une exposition de ces faits héroïques fournirait un riche sujet pour une poëme, & présenterait le plus bel éloge de la plus noble partie des femmes de notre siecle. Ces traits. de vertu heroïque & de force d'âme méritent autant nos hommages, que les vertus domestiques de nos femmes, leur soumission, leur doux attachement leur attirent notre admiration & notre reconnaissance.

Dans les plus violents orages de la révolution, beaucoup de femmes Françaises intrépides, & s'oubliant elles-mêmes, se sont teneus aux côtés de leurs maris. Elles ont partagé avec eux toutes les horreurs de leur sort prévoyant le danger qui les menaçait, elles le détournaient avec une prudence adroite, ou allaient à sa rencontre avec intrépidité & enfin leur faiblesse succombant sous la violence des assassins, s'armant d'une rési

225

gnation céleste elles suivaient leurs bien-aimés à l'échafaud & à la mort.

La haîne & la persécution du dictateur contre le génie pénétra dans les demeures paisibles des artistes habitans du Louvre. A ses yeux ils étaient tous des aristocrates, des conjurateurs contre la liberté, qu'il oppri mait, contre la patrie qu'il dévastait. Les satellites du tyran osaient dire hautement: quand le sang de tous les ci-devant grands, riches, de tous les prêtres, de tous les artistes aura été versé, alors la République pourra être sûre & tranquille. Les arrestations nocturnes, la menace de la guillotine étaient à l'ordre du jour du gouvernement terroriste, aussi pour des artistes du Louvre, qui n'avaient consenti qu'à regret à l'abolition de l'ancienne académie royale des sciences.

Houdon était un d'entr'eux, & on regardait comme suspect le patriotisme de cet homme tranquille, sans reproche & honnête. On lui imputait à crime de n'avoir encore présenté aucun ouvrage patriotique, ce qui prouvait son intention contre révolutionnaire. Il était TOME II.

menacé de la prison, & le grand nombre de statues & de bustes sortis de ses mains, qui représentaient les flambeaux de la philosophie, comme Rousseau & Voltaire, ne l'auraient pas sauvés, car eux aussi étaient morts dans le sein de l'aristocratie.

Il fut sauvé par la présence d'esprit & la résolution de sa noble épouse. Houdon avait achevé la statue en marbre d'une sainte qui lui avait été commandée quelques années avant la révolution pour un couvent de Paris. Cette sainte avait été représentée très-simple, sans attributs mistiques, comme une statue de la philosophie, avec un livre ouvert dans la main. Madame Houdon mit la circonstance à profit. Elle savait que son mari était menacé; elle se rendait au Comité de Salut Public, sous la verge de fer duquel tout le monde pliait. Barrere, qu'elle y trouva, lui reprocha aussitôt que son mari était un mauvais républicain, puisqu'il n'avait fait encore aucun ouvrage patriotique. "Houdon, répondit-elle tranquillement a fait la statue de la philosophie, venez, & voyez-la dans son attélier. La

"Cela

philosophie a préparé la révolution, elle réclame sa place auprès de la liberté dans le temple de la loi." Barrere appuya. est beau, dit-il, j'approuve votre motion, je vais en faire part au comité.". Cet homme singulier, flatteur du parti dominant, sans énergie, sans volonté propre, toujours en contradiction avec lui-même, susceptible cependant de quelques bonnes impressions, appuya la proposition avec chaleur. La statue de la ci-devant sainte actuellement de la philosophie, fut enlevée de l'attélier d'Houdon, & placée dans l'avant salle de la Convention, à présent du Conseil des Anciens, où elle est encore, & Houdon fut sauvé.

COLLECTION DE TABLEAUX DU PEINTRE

MARTIN.

Les collections des arts des particuliers émigrés dont Paris était rempli, sont à présent, ou tombées dans les mains de la nation, ou dans le tems de la terreur & de l'avilisse

« VorigeDoorgaan »