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à Naples. Il s'attendrissait avec des sentiments paternels sur la mort prématurée de son disciple Drouais, dont il portait la miniature sur son portefeuille. Le génie de l'artiste respirait dans ce beau portrait. Avec sa récommandation je me rendis chez la mere de Drouais, pour voir les tableaux que son fils a laissés.

LE PEINTRE DROUAIS.

"Oseras-tu tuer Marius? Ce furent là les énergiques paroles que proféra Marius au Cimbre que son vainqueur Sylla avait envoyé pour le tuer, & qui l'avait atteint à Minturne: tel est le sujet du fameux tableau que cet excellent jeune homme avait achevé à Rome, deux ans avant sa mort. Cette composition grande & simple ne renferme que deux figures. Dans une chambre médiocrement meublée est assis le proscrit Marius dans un fauteuil, devant un lit, près d'une table, sur laquelle est posé son casque, & son bras est appuyé.

Réveillé des pensées sombres, dans lesquelles il était plongé, par le bruit de l'assasin qui entre dans la chambre, l'épée nue, il tourne sa tête, qui le moment d'avant était appuyée sur sa main, avec un mouvement brusque, & une majesté intrépide dans son regard, vers ce soldat, & il étend vers lui sa main droite. Le Cimbre effrayé par ces mots énergiques: Oseras-tu tuer Marius? se recule en chancelant, & foudroyé par le regard du héros, il porte avec sa main gauche son manteau devant son visage.

L'expression contrastante des deux figures est parfaite dans Marius, ce terrible proscrit, le courage indompté, le mépris de son vainqueur, & la menace contre l'esclave envoyé par le tyran; dans le visage & toute l'habitude du corps du soldat, l'effroi, le trouble & la honte le dessein, les draperies, la force du coloris, montrent la touche d'un grand maître. Mais ce beau tableau est exposé en mauvais jour dans un chambre basse & étroite, & se ressent déjà de l'humidité de ce lieu fermé. Dans la même chambre sont les au

tres œuvres posthumes de ce jeune Raphael Français car c'est ce que promettait le dévelopement des talents de cet étonnant jeune homme.

Un gladiateur blessé & mourant. La tête est tournée avec un regard féroce vers son adversaire. Il s'appuye sur sa main droite, & avec sa gauche il tient sa blessure saignante. Superbe académie, d'un grand effet.

Philoctete dans le désert. Une grande idée, mais laissée incomplete. Le blessé est assis sur un bloc de rocher dans un site sauvage. Il nettoye sa blessure avec l'aile d'un aigle qu'il a tué, & qui est à ses pieds. L'expression de douleur concentrée avec laquelle il lance un regard de plainte vers les dieux est très-grande.

Le dernier ouvrage de ce jeune artiste mourant est l'esquisse, composée de main de maître, d'un grand tableau historique, qu'il projettait, Caius Gracchus va à une assemblée du peuple pour appaiser une sédition dont il fut lui-même la victime. Se refusant au sentiment d'époux & de pere, cet homme auda

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cieux, suivi de quelques amis, va au devant de sa destiné. Sans faire attention aux plaintes de sa femme qui tombe évanouie sur les marches de la maison, il tire à lui, en marchant, son manteau, dont le bord est encore embarrassé entre les pieds de cette infortunée. Celleci, sans force, étend sa main vers cet homme inflexible; son enfant se précipite dans son sein en pleurant. Quelques servantes sortent du peristile du palais pour la secourir.

Drouais peignait son Marius à Rome à l'âge de vingt-deux ans, & il y est mort en 1787, agé seulement de vingt-quatre ans.

LE SCULPTEUR HOUDON.

Houdon dans les têtes de portraits qu'il fait, ne s'éleve point au beau idéal, il rend la nature comme il la trouve, avec une merveilleuse vérité, avec force, & en saisissant le plus heureux moment de la ressemblance. Il saisit le génie & le caractere de la personne, & il donne la parole au marbre. Le talent de cet

artiste est prouvé par les bustes de Voltaire, Rousseau, Gluck, Diderot, Cagliostro, Barthélemy, Franklin, Washington. Ses figures entieres, sans être idéales, ont aussi leur mérite. Sa Diane nue, dans sa course légere, la petite fille frilleuse, la jeune fille, pleine de grâces, couronnée de fleurs, représentantes l'hyver & le printems; sa jeune vestale avec l'expression d'un âme calme, sont connues aussi en Allemagne.

Houdon a achevé la statue de Washington en marbre pour les états de Virginie; elle était alors partie pour sa destination, Richmond, où elle doit être dressée. Cet artiste, pour faire ce portrait avait été à Philadelphie, & avait demeuré six mois dans la maison de Washington. J'ai vu le modele de cette statue dans l'attelier d'Houdon. Le caractere & l'attitude du fondateur & conservateur de la liberté de l'Amérique, du représentant d'un peuple heureux & pacifique, du protecteur de l'agriculture, cette sourcce abondante de la richesse nationale, sont heureusement imaginées & bien exécutées dans cette statue. C'est sur

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