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Le rapport du ministre de Lessart et les notes officielles furent renvoyés à l'examen du comité diplomatique. Gensonné vint peu de jours après, au non de ce comité, sanctionner en quelque sorte les provocations de ses collègues. Les députés Isnard et Fauchet, dans un accès de frénésie difficile à concevoir, insultèrent à toutes les cours, excitèrent l'insurrection des peuples, et déclarèrent ainsi une guerre éternelle à tous les États jaloux de conserver leurs institutions sociales.

Peut-être aussi que ces enthousiastes calculè- | vaient pas manquer d'assurer le triomphe de leur rent déjà sur le capital des fortunes particulières cause et l'accomplissement de tous leur vœux. et sur la masse de la population, plus que sur un revenu régulier : décidés à jouer leur existence, ils pensèrent que celle de la nation devait être exposée aux mêmes chances. Déjà la planche des assignats était entre leurs mains une mine féconde en ressources, car la somme légalement émise s'élevait, dès le 1er novembre 1791, à 1400 millions, et tout portait à croire qu'elle ne s'arrêterait pas là. Un autre moyen de succès sur lequel les jacobins fondèrent de grandes espérances, était le système de propagande qui, promettant aux peuples les bienfaits de la liberté, opérerait sur eux un effet magique, et laisserait en un clin d'œil les rois sans appui, sans armée et sans sujets; on aurait de la peine à interpréter d'une manière différente l'arrogance de ces provocateurs.

Ce qui se passait alors en France n'était pourtant pas encourageant pour les peuples voisins, et le spectacle de l'anarchie qui la déchirait, devait bien rassurer les cabinets européens en leur montrant dans les jacobins les auxiliaires les plus sûrs.

Leurs séances (1) commençaient à devenir orageuses et importantes. Déjà le bonnet rouge, fatal emblème du sang qui allait être versé à grands flots, était le signe de ferveur démocratique ou plutôt un symbole de férocité exigé des membres de cette assemblée; et peu de semaines après, les ministres du roi eux-mêmes, se glorifiant d'être membres de la société, parurent à sa tribune, décorés de ce costume burlesque, achevant ainsi de détruire l'ombre de considération qui restait à l'administration publique.

L'assemblée fut violemment agitée par la lecture des dépêches de l'Empereur et de Kaunitz. Brissot et Vergniaud prononcèrent des discours véhéments. Ces étonnantes philippiques menaçant tous les trônes, étaient autant de déclarations de guerre, de provocations imprudentes qui allaient mettre la France aux prises avec tout le continent; et qui malgré les caresses prodiguées aux Anglais, ne de

On ne saurait exprimer qu'imparfaitement les attentats dont ces hommes exaltés se rendirent coupables envers leur patrie; il faut léguer leurs harangues à la postérité, comme des exemples effrayants de ce que peuvent l'esprit de parti et l'enthousiasme mal dirigés (2).

Les connaissances de Brissot, les vues qu'il déploya dans son discours même, sont tellement en contradiction avec les sophismes politiques dont il est entaché, qu'on serait tenté de croire qu'il fut l'instrument du cabinet anglais : ce soupçon tournerait en certitude, si ses erreurs et son faux enthousiasme n'avaient été partagés à cette époque, par les hommes d'État les plus distingués du royaume. Il fallait être néanmoins bien ignorant en politique, ou bien égaré par l'esprit de parti pour supposer que la nation la plus ambitieuse et la plus rivale restât inactive, tandis que la France s'engageait dans une lutte à outrance contre tous les intérêts européens. Un orateur enthousiaste jusqu'à la folie, était seul capable d'attirer sur son pays, privé d'alliances et déchiré au dedans, l'anathème de toutes les puissances, les passions et la haine de leurs chefs.

Le ministère anglais secondant avec adresse les fausses combinaisons de ses rivaux, feignait de grandes alarmes sur la correspondance établie entre les clubs français et ceux des whigs, si connus par leurs sentiments d'opposition au pouvoir monarchique. Mais en réfléchissant au patriotisme sincère

(1) Anacharsis Clootz, prussien d'origine, fut l'orateur le plus véhément de cette secte, et il ne perdait aucune occasion de provoquer la république universelle. Ses imprécations contre tous les gouvernements, et ses relations

avec les Anglais l'ont fait soupçonner d'être un des agents les plus actifs du cabinet de Londres.

(2) Voyez pièces justificatives du livre Ier, no 7, 8 et 9.

et à la haine prononcée de la nation anglaise pour | nobles travaux (1). Si lord Stanhope est le père de

les étrangers, on est presque tenté de chercher dans cette correspondance même, les premières sources de l'influence que le cabinet de Saint-James exerça sur tous les partis qui déchirèrent la France, en les excitant à cette exagération qui devait désorganiser le royaume et le précipiter dans une guerre générale. Cette idée acquiert de nouvelles forces, en songeant que Marat, Anacharsis Clootz, Miranda, Payne, Pache, Clavière, n'étaient point français, et qu'il suffisait au cabinet britannique d'avoir dans ses intérêts quelques chefs des whigs et quelques meneurs du parti républicain, pour profiter du délire qui s'était emparé de toutes les têtes et en diriger les effets à son gré.

pour

Le chancelier Bacon dit quelque part que le cabinet anglais devait faire les plus puissants efforts étouffer chez ses voisins jusqu'au désir d'être libre. Pitt appliquant une maxime inverse jugea peut-être que la liberté est voisine de la licence, principalement dans les États nouvellement institués, et que tout ce qui tend à diviser les forces d'un rival est également dans l'intérêt national; sous ce rapport, il fut plus habile que Bacon. On est du moins autorisé à lui prêter ce système, car il avoua, dès 1790, en plein parlement, qu'il avait à se féliciter de la révolution française, puisqu'elle promettait le triomphe des principes professés en Angleterre, ou d'immenses avantages à son pays. Si le cabinet anglais fut fidèle aux préceptes du chancelier, en soutenant la maison d'Orange contre les patriotes; s'il devint ensuite l'appui de l'oligarchie, comme il le fut en Espagne de l'inquisition, on ne peut se dissimuler qu'il a du moins mauvaise grâce à se proclamer le libérateur des

nations.

Enfin, les plus graves soupçons planent avec raison sur ces complots du machiavélisme, lors qu'on se rappelle les adresses de plusieurs clubs anglais à l'assemblée nationale, et entre autres celle qui fut signée par lord Stanhope au nom de la société des amis de la liberté, témoignant la joie qu'on éprouvait à Londres de la révolution française, et encourageant les législateurs dans leurs

(1) Séance du 21 juillet 1790.

celui qui vient de prononcer une diatribe si virulente contre la nation française, on peut juger de la nature des ressorts que la politique anglaise fait mouvoir à son gré.

En attendant, Pitt convaincu que le meilleur moyen d'agiter la France plus longtemps serait de ne pas la combattre trop tôt, ou craignant d'éveiller les soupçons des puissances continentales, modéra les ressentiments du roi Georges, et l'engagea à ne prendre part à la guerre qui allait éclater, que quand elle serait entièrement engagée. Trop habile néanmoins pour ne pas profiter des embarras de la seule puissance qui fût à même de lui contester l'empire de l'Inde, il prenait toutes ses mesures pour le subjuguer, et tandis que la France s'amusait à des controverses sur les droits de l'homme, que la Prusse et l'Autriche s'apprêtaient à les combattre, l'imperturbable Albion portait ses efforts dans le Bengale et s'assurait, par la soumission du sultan de Mysore, un empire absolu dans la riche presqu'île du Gange.

Cependant l'abandon de tous ses intérêts d'outre-mer ne rendait pas la France plus sage sur le continent européen. L'assemblée nationale, d'après le rapport de son comité diplomatique, avait rendu un décret pour inviter le roi à demander des explications à l'empereur d'Autriche. Le prince de Kaunitz répondit, le 17 février 1792, aux dépêches de M. de Lessart à M. de Noailles, ambassadeur à Vienne. La note du ministre autrichien était d'un style modéré; elle donnait des éloges à la constitution et au peuple français, mais elle attaquait fortement le parti des jacobins et les maximes révolutionnaires qu'il propageait, et c'était justement le moyen le plus sûr de provoquer la guerre dans le fait, cette note ne donnait que des satisfactions illusoires (2) car la coalition existait, les armements se continuaient, la Prusse et l'Autriche venaient de se lier plus étroitement par une alliance offensive et défensive, signée à Berlin, le 7 février 1792. On paraissait n'attendre que l'occasion pour une rupture qui depuis longtemps était inévitable.

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(2) Voyez pièces justificatives du livre Ier, n° 11.

M. de Lessart, en succédant à M. de Montmorin, avait apporté dans ses relations le même caractère de droiture avec moins de défiance pour les sentiments de l'assemblée. Il vint soumettre imprudemment, dans la séance du 3 mars, la réponse qu'il avait faite au nom du roi sur les notes des 3 et 21 décembre, et le nouveau message du prince de Kaunitz, qui en était le résultat. Dépassant ainsi les bornes que la constitution avait mises aux droits de l'assemblée dans les négociations, il provoqua, par une discussion publique, les agressions directes qui devaient mettre plus d'aigreur dans les relations des deux États.

nouveaux ministres accélérassent aussi la rupture Au moment même où ces grands changements avaient lieu, Gustave III était assassiné dans un bal masqué (16 mars ), et sa mort, en renversant toutes les espérances que les émigrés avaient placées en lui, enlevait à la coalition le chef que l'opinion générale des royalistes lui assignait.

D'après l'examen de toutes ces circonstances, on voit qu'il serait difficile d'affirmer, sur les actes connus, à quel parti on doit attribuer les premiers torts de l'agression. Les puissances du Nord et de l'Allemagne se lièrent par des traités menaçants, et parurent vouloir la guerre. Lorsque le parti réCette réponse rédigée du reste avec sagesse, et publicain fut informé à son tour de l'existence forte d'arguments, jettera un grand jour sur les d'une coalition, il craignit d'être prévenu, attaqué véritables dispositions des puissances alliées à cette dans l'intérieur et livré à la vengeance de la noépoque. Le parti républicain se vengea bientôt sur blesse qu'il avait outragée. Il prit alors l'initiative; de Lessart des vérités que le prince de Kaunitz et le renouvellement du ministère dont nous avons avait dévoilées. Le ministre fut décrété d'accusa-parlé, devait être le signal du commencement des tion et traduit à la haute cour nationale.

La famille royale éperdue, n'avait aucune confiance dans ses conseillers qui ne pouvaient plus rien; on recourut dans cette extrémité au moyen dangereux qui avait coûté la vie à Charles Ier, en déterminant Louis à renouveler entièrement son ministère, et à se jeter franchement entre les bras du parti des girondins. Dumourier fut appelé aux affaires étrangères, Roland à l'intérieur, Servan à la guerre; fatale résolution qui précipita la chute du monarque imprudent.

Les esprits s'aigrissaient de plus en plus; les discours dont la tribune retentissait chaque jour, portaient dans toutes les cours, des sentiments naturels de haine et de vengeance. Les armements, les préparatifs dont l'Europe était agitée, venaient à leur tour jeter en France une défiance et une haine non moins fortes.

Dans un tel état de choses, il ne fallait qu'une étincelle pour faire éclater l'incendie, et les premiers jours du mois de mars 1792, furent signalés par plusieurs événements qui en provoquèrent l'explosion. L'Empereur termina sa carrière le 1er mars; dès cet instant les affaires prirent une tournure beaucoup plus hostile, soit que le successeur de Léopold, plus jeune que lui, fût moins prudent et plus disposé à la guerre, soit que la situation relative de la France et le caractère des TOME 1.

hostilités.

Dumourier ayant une tête ardente, et quelques talents militaires qu'il estimait bien au-dessus de leur réalité, désirait les occasions de se signaler, sans trop s'arrêter aux conséquences qui en résulteraient. Il flattait les girondins de la conquête immédiate des Pays-Bas, car l'armée autrichienne n'excédait pas quarante mille hommes, et n'avait aucune place pour baser ses opérations. En prenant l'initiative de la déclaration de guerre, on pouvait espérer des succès certains sur une armée qui ne se trouvait pas encore en mesure : en restant au contraire sur la défensive, on laissait amonceler l'orage prêt à fondre sur la France, et le succès devenait douteux. Guidé par ces considérations, Dumourier avait pressé M. de Noailles d'obtenir des réponses satisfaisantes de la cour de Vienne, et voyant qu'elles n'arrivaient point, il proposa, le 20 avril 1792, de déclarer la guerre au roi de Bohême et de Hongrie, ce qui eut lieu dans la même séance.

Le roi de Prusse, par suite de ses traités offensifs et défensifs, devait nécessairement prendre à cette guerre une part active. Ses manifestes ne tardèrent pas à en donner l'assurance, et les mouvements de ses troupes la confirmèrent bientôt.

Le roi de Sardaigne lié également avec le cabinet de Vienne auquel son ministre était vendu, non

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Les causes générales qui ont tant d'influence sur les destinées des nations, exercent le même empire sur leur état militaire. Les victoires proviennent en partie de ces causes, et développent les talents des généraux comme le courage des soldats. Toutefois on ne peut se dissimuler, qu'abstraction faite de la situation intérieure des empires, une armée ne possède en elle-même les principes de sa supériorité ou de son infériorité, par la nature de son or

moins intéressé d'ailleurs au soutien de la famille | pher de ses ennemis et pour constituer une bonne des Bourbons, ne pouvait manquer d'y intervenir. | armée. Mais cela ne suffisait pas aux desseins du cabinet britannique, et le point le plus important de son projet consistait à mettre aux prises toutes les puissances maritimes, dont l'alliance en 1780 lui avait été si funeste. Les raisons d'État les plus puissantes semblaient apporter un obstacle invincible à l'exécution d'un tel plan, mais tous les intérêts nationaux devaient se taire, lorsque des passions habilement excitées eurent porté les peuples au plus haut degré de folie, et les princes au comble de l'exas-ganisation, son esprit, et le caractère de ses chefs. pération.

La force réelle d'un État se compose donc de l'espèce et de l'esprit de ses soldats et de ses officiers; De ses moyens de recrutement;

Des institutions organiques des corps;
Des talents et de l'instruction de ses états-majors;
Du génie des généraux qui les commandent ;
Enfin, de l'esprit national à l'époque où la guerre
éclate.

Les grands résultats ne s'obtiennent que par la réunion de ces moyens, car s'il est vrai que l'ha

La haine du stathouder pour le parti qui avait si souvent mis des bornes à son autorité et qui l'avait même compromise, l'aversion non moins forte que le roi d'Espagne manifestait pour les ennemis de l'autorité des Bourbons, pouvaient en un instant renverser les longs calculs d'une politique sage, détruire les fruits de l'heureuse guerre d'Amérique, et procurer aux Anglais l'alliance de deux puissances rivales qui n'auraient jamais dû déployer leur pavillon que contre eux. Dès lors plus de ba-bileté du général en chef soit le premier garant des lance dans la lutte maritime, plus d'incertitude sur la perte de la marine et des colonies françaises, plus de doute sur l'empire absolu des mers, que les passions de ces deux cabinets imprudents devaient livrer d'un trait de plume à celui de Saint-James. Mais il ne faut pas anticiper sur les événements,

et avant de revenir sur ce qui se passa en France aussitôt après la déclaration de guerre, il est convenable de tracer l'état des différentes armées européennes à cette époque, et de raconter les premiers événements militaires qui eurent lieu en Belgique.

CHAPITRE IV.

Coup d'œil sur la constitution des différentes armées européennes à l'époque de la déclaration de guerre en 1792.

Les vainqueurs de Leuthen, de Rosbach, de Torgau sont venus prouver dans les plaines de la Champagne et à Jéna, que les armes sont journalières, et qu'il faut plus que du courage pour triom

succès, ce chef gagnera des batailles sans résultats si la nation se refuse à des sacrifices devenus nécessaires, et il sera condamné comme le héros carthaginois à voir consumer son armée après la victoire.

De même les meilleures troupes du monde, conduites par un homme faible et sans talents, ne doivent attendre que des revers. Les armées françaises après avoir éclipsé les bandes espagnoles et triomphé de celles du celèbre Guillaume, perdirent aux champs de Ramillies, de Turin et de Hochstet, un lustre qu'elles reprirent sous le maréchal de Saxe, pour retomber dans le mépris

sous ses successeurs.

Un bon état-major est surtout indispensable pour bien constituer une armée; il faut le considérer comme la pépinière où un général en chef doit puiser les instruments dont il se sert; comme une réunion d'officiers dont les lumières doivent seconder les siennes. Quand il n'y a pas harmonie entre le génie qui commande et les talents de ceux qui doivent appliquer ses conceptions, le succès devient douteux, car les combinaisons les plus habiles sont détruites par les fautes d'exécution. Un

De temps immémorial, les Gaules furent habitées par des peuples valeureux: hardis et entreprenants sous les deux Brennus, opiniâtres et fermes contre les attaques de César, on les vit figurer glorieusement comme auxiliaires dans toutes les guerres de Rome. Ils parcoururent le moyen âge avec un égal succès, et s'ils durent céder à l'irruption des Francs, l'amalgame des deux nations ne fit qu'ajouter à leur énergie.

bon état-major a d'ailleurs l'avantage d'être plus | jeter un instant ses regards sur l'état intérieur des durable que le génie d'un seul homme; il peut re- différentes troupes européennes au moment où la médier à bien des maux, et nous osons affirmer guerre éclata, et nous commencerons par l'armée qu'il est la meilleure sauvegarde d'une armée. De française, qui fut appelée à y jouer un rôle prinpetits intérêts de coterie, des vues étroites, un cipal, puisqu'elle eut affaire alternativement et amour-propre déplacé, s'élèveront contre cette as- collectivement avec toutes les autres. sertion, elle n'en restera pas moins une vérité irrécusable pour tout militaire pensant et tout homme d'État éclairé (1). Un état major bien institué sera à une armée ce qu'un ministère habile est à une monarchie; il secondera le chef lors même qu'il serait en état de tout diriger par lui-même; il préviendra des fautes en lui fournissant de bons renseignements; il les empêchera, quand le général sera inhabile au commandement. Et combien de hauts faits anciens et modernes qui ont illustré des hommes médiocres, ne furent-ils pas préparés par leurs alentours? Reynier fut le premier instrument des victoires de Pichegru en 1794; et Dessoles, comme lui, ne resta pas étranger à la gloire de Moreau (2). Le général Toll ne s'est-il pas associé aux succès de Kutusof; Diebitsch à ceux de Barclay et de Witgenstein; Gneisenau et Muffling à ceux de Blucher? combien d'autres noms ne pourrais-je pas encore citer à l'appui de ces assertions!

Les guerres de Charlemagne et les croisades, les invasions de Louis XII, Charles VIII et François Ier en Italie, enfin la lutte soutenue contre toute l'Europe par Louis XIV, prouvèrent suffisamment ce qu'on peut attendre d'une armée française bien commandée,

La fatale guerre de sept ans, les intrigues de la cour de Louis XV, et plus encore l'esprit de vertige qui s'empara de toutes les têtes après ces honteuses expédition d'Hanovre, éclipsèrent en un instant des siècles de gloire, et firent de cette ar

Enfin, une armée brave et bien organisée, sans bon système de recrutement, est une machine in-mée un objet de ridicule. complète; la France en a senti les tristes effets Après la paix de 1762, le ministère français, ne sous Louis XV, et les alliés pendant les premières sachant à quoi attribuer ses défaites, alla chercher guerres de la révolution. C'est par un tel système dans les plus minutieux détails de la discipline et qu'on obtient les moyens de réparer ses pertes, de l'instruction, ce qui n'était que l'effet du mausans attendre les ressources tardives d'un enrô-vais choix des généraux et de la direction fautive lement; c'est lui seul qui constitue une armée na- des grandes opérations. tionale, qui met un État en mesure de proportionner ses efforts aux dangers, et procure une excellente espèce de soldats.

Pour se faire une idée plus précise des événements que nous allons retracer, il importe donc de

On ne réfléchit ni aux dispositions qui font gagner les batailles, ni aux mouvements stratégiques, c'est-à-dire aux marches considérées comme manoeuvres de guerre; et l'on oublia toutes les combinaisons de la direction et de l'emploi des

réunion d'officiers de ces deux armes, les plus capables de diriger une opération de guerre, et mis à la disposition du général en chef pour l'aider dans ses travaux.

(1) Je n'estime pas qu'un état-major soit bien institué ront d'être les antagonistes d'une telle institution, en répar cela seulement qu'on exigera des études outrées de la fléchissant que l'état-major leur offrirait alors un plus vaste part des jeunes aspirants; on peut être profond mathéma-champ pour se distinguer, et ne serait désormais qu'une ticien, bon topographe, dessinateur correct, et mauvais guerrier. Un état-major qui remplirait toutes les conditions, serait à mon gré celui qui jouirait d'assez de considération et de prérogatives pour offrir un avantage à tous les officiers des autres armes, et qu'on composerait par ce moyen des militaires déjà connus par leur aptitude pour la guerre. Les officiers du génie et d'artillerie cesse

(2) Je ne prétends point placer Moreau au rang des gé néraux médiocres, j'affirme seulement qu'il fut assez bien secondé par ses chefs d'état-major, pour leur devoir une partie de sa gloire.

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