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cations de cette Place, & la remplif1485. foit de munitions de guerre, refolut de ne pas fouffrir qu'il y demeurast plus long-temps à caufe du voifinage de la Bretagne.

de Charles

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Elle lui avoit fait dire de la part du Roy qu'on eftoit furpris qu'il euft quitté le lieu de fon exil fans ordre: Jaligny. Hift mais que neanmoins on lui laiffoit la liberté de venir en Normandie en fon Comté de Longueville. Il répondit fierement qu'eftant à Partenai, il eftoit dans fes Terres, & qu'il n'en fortiroit pas. On jugea bien par cette réponfe qu'il fe croyoit en eftat de foutenir fa défobéïflance, & que le parti des mécontens eftoit formé. C'eft pourquoi Madame de Beaujeu fit haf ter la marche des troupes vers Partenai malgré la rigueur de la faifon; car on eftoit alors dans le plus fort de l'hyver mais foit qu'on euft changé de deffein dans la marche, foit qu'on euft affecté exprès de faire courir le bruit qu'on alloit à Partenai, pour attirer toute l'attention des mécontens de ce cofté-là, le Roy eftant arrivé à Poitiers, prit la route de Guyenne, pour s'affûrer des Places de cette Province, dont le SciLettre du Seigneur de Lefcun Comte de Commingneur de ges qui eftoit toûjours en Bretagne, Comminges. avoit le Gouvernement.

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ceux qui l'accufoient d'entrer dans les intrigues du Duc d'Orleans.

1485.

Le Roy commença par fe faifir de Le Roy fe fuiXaintes où eftoit Odet d'Aidie fre- t de Xainre de Lefcun. Odet s'échapa, & se enfatte toute fe res foumer jetta dans Pons & enfuite dans Blaye, la Guyenne, où après quelques jours d'attaque, il fe rendit au Roy, qui lui conferva toutes fes Charges, après avoir tiré une promeffe de lui qu'il contribue- Lettre de roit de tout fon pouvoir à lui fou- Charies VIII. mettre les Villes de Guyenne; & il Bouchage tint parole; le Roy alla de Blaye à dans les MeBourdeaux avec Madame de Beaujeu Bethune vol. qui ne l'abandonnoit jamais.

au Sicur du

moires de

coré 8 460.

de Charles

VIII.

Il y fut reçu avec toutes les marques d'affection que les Sujets les plus 1486 zelez pouvoient donner à leur Souverain.Il parcourut les principales Villes, & les voyant toutes parfaitement foumises à fes ordres, il ofta le Gouvernement de Guyenne au Comte de Comminges, & le donna à Monfieur de Beaujeu, qui y laiffa le Seigneur de Candale pour fon Lieutenant. Les Sé- Jaligny Hift. néchauffées & Gouvernemens particuliers des Places poffedées par le même Comte furent partagez entre divers Seigneurs & Gentilshommes dont la Cour eftoit fûre. Le Comté de Comminges fut réuni à la Couronne, & l'Amirauté de Guyenne à l'Ami rauté de France dans la perfonne du Seigneur de Graville, qui venoit d'être fait Amiral à la place de Louis bâtard de Bourbon mort depuis peu de jours. On voit par cette dépouille jufqu'où Lefcun avoit pouffé fa fortune par fon efprit, par fon adreffe, par fon courage, & à quel prix Louis XI. avoit acheté fes fervices.

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1486.

Lettres da

Comte de Dunois au Duc d'Or

leans, &c.

du mois de

Fevrier 1486

de ce cofté-là, fuppofé, comme il n'en doutoit pas, qu'on portaft d'abord la guerre en Bretagne. Il eftoit à Cognac fort embaraffe, & se tint trop heureux que le Roy vouluft bien lui pardonner tout le paflé. Il vint à Bourges faluer ce Prince, qui le reçut bien, & lui promit de lui conferver toutes fes penfions & toutes les autres graces qu'il recevoit de la Cour, pourvû qu'il demeuraft deformais dans le devoir. Le Sire de Pons obtint auffi fa grace,& mit sa Ville entre les mains du Roy.

Le Comte de Dunois, ou n'ofant pas efperer la même faveur, ou ne voulant pas la demander, fe donnoit pendant tout ce temps-là de grands mouvemens. Il envoyoit couriers fur couriers en Bretagne & en Lorraine pour avoir du fecours, & pour engager fur tout le Duc de Lorraine à faire diverfion du cofté de Champagne, de Brie, & de Picardie. Il lui reprefentoit de quelle importance il eftoit qu'il fe declaraft ouvertement; qu'on fe défioit de lui à la Cour, mais qu'on n'en faifoit pas femblant ; que Madame de Beaujeu fe prévaloit de fa diffimulation; qu'elle faifoit courir le bruit dans tout le Royaume qu'elle eftoit en bonne intelligence avec lui, & que ce feul bruit arreftoit une infinité de Nobleffe qui eftoit difpofée à prendre le parti des Princes; que fi on le voyoit en campagne, le Roy feroit obligé d'abandonner la Guyenne, qui feroit bien-toft declarée pour les Princes, que faute de cela toutes leurs affaires alloient eftre ruïnées, & que pour lui en particulier il feroit obligé d'abandonner la partie; qu'il avoit cru d'abord qu'on venoit fondre fur lui; mais qu'après la Guyenne foumife, on ne manqueroit pas de le faire, & qu'il ne devoit pas attendre un meilleur traitement que celui qu'on avoit fait au Comte de

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Ces Lettres ne produifirent aucun effet; l'efperance dont la Cour flattoit le Duc de Lorraine de lui rendre la Provence, le contenoit toûjours. Il joüoit la Cour en entrant, comme il avoit fait, dans la ligue de Bretagne; mais la Cour le trompoit auffi,en Lettre de faifant femblant de l'ignorer, & pour des Comptes. lui mieux perfuader qu'on n'avoit nulle défiancé de lui, on le fit cette même année grand Chambellan; & il en fut la dupe.

Roy aux gens

L'expedition de Guyenne ne put eftre ni plus heureufe, ni plus prompte. Le Roy n'eftoit parti de Tours au plutoft que vers la my-Janvier, & dès le quinziéme de Mars il avoit pris toutes fes furetez pour cette Province: de forte que le vingt-huitiéme du même mois il arriva devant Partenai, que fon armée avoit déja investi. Mais le Comte de Dunois voyant bien qu'il n'y pourroit tenir longtemps, n'y eftoit plus, & s'eftoit fau- Jaligny Hift. vé à Nantes auprès du Duc de Breta- de Charles gne. Le Seigneur de Joyeuse qu'il y avoit laiffé pour commander la garnifon, refufa de fe rendre jufqu'à l'arrivée du Roy, à qui il fe foumit moyennant une capitulation tolerable qu'on lui accorda.

VIII,

Le Roy affuré de ce cofté-là, s'aLeRoy marche vança avec fon armée fur les frontie- enfuite en An res de Bretagne dans l'Anjou, & se- jou, journa à Chafteau-Gontier tout le mois d'Avril, plutoft dans le deffein d'intimider le Duc de Bretagne & les Seigneurs liguez avec le Duc d'Orleans, que pour leur declarer la guerre; parce qu'on apprehendoit une diverfion du cofté de Flandre de la part du Roy des Romains.

Ce voifinage de l'armée du Roy ce qui mer la eut fon effet, & caufa de la divifion divifion entre entre les Barons de Bretagne. Les uns tout devoüez au Duc d'Orleans youloient qu'on foutînt la guerre contre

les Barons de Bretagne.

1486. Argentré,

liv. 120

la France, fi elle la déclaroit au Duc. de Bretagne. Les autres mieux confeillez, & qui envisageoient le bien public, eftoient d'avis que le Duc ne Hift. de Bret. obftinast pas à proteger le Duc d'Orleans en expofant le pays à une ruine entiere; & entre autres raifons dont ils appuyoient leur fentiment, ils apportoient celle-cy, que la capitale du Duché eftoit entre les mains de Jacques Guibé neveu de Landois qui en eftoit Gouverneur, & qui, pour avoir moyen de fe venger des Seigneurs qui avoient fait perir fon oncle, ne manqueroit pas de livrer la Ville au Roy, dès qu'il entreroit en Bretagne.

Si-toft qu'on eut fçû cette diffention, la Cour de France refolut d'en profiter. Le Roy envoya au Maréchal de Rieux, qui eftoit de ce dernier avis, André d'Efpinai Breton, Archevêque de Bourdeaux, & le Seigneur du Bouchage pour leur dire qu'il n'avoit point intention de faire la guerre au Duc de Bretagne, pourvû qu'il ceffât de proteger & de retirer dans fes Etats fes Sujets rebelles; qu'il lui offroit fon amitié à cette condition; que fi les Seigneurs bien intentionnez pour la paix vouloient l'obliger à l'accepter, il retireroit fes troupes des frontieres; mais que comme il fçavoit que le Duc eftoit porté d'inclination & par fa haine contre la France à maintenir les factieux, il of froit aux Seigneurs de Bretagne autant de troupes qu'ils fouhaiteroient, feulement pour obliger le Duc d'Orleans & fes adherans à fortir du pays. Cette propofition fut affez goûtée, & le Roy pour leur marquer fon de fir de conferver la paix, fe retira de l'Anjou avec la plus grande partie de fon armée. Mais ce n'eftoit pas là le veritable motif de fa retraite. Il en avoit un autre qui l'obligcoit de s'approcher de l'autre extremité de fon

Etat avec fes troupes.

mité du Ro.

mains.

de faire la

Maximilien Roy des Romains ef- 1486. toit convenu avec les Princes liguez Il retourne à de faire diverfion du cofté de Picar- antre extredie & d'y commencer la guerre, yaume, pour ayant affurance d'eftre bien secondé, s'opposer au dès que l'affaire feroit engagée. Roy des RoCe Prince ne manquoit pas de pre- Pretextes qu' textes d'attaquer la France. Le Trai- avoit celui-ci té d'alliance fait par Madame de Beau- guerre à la jeu avec les Communautez de Flan- France, dre pour empêcher qu'il n'euft la tutelle de fon fils Philippe d'Autriche, quoique la plupart des autres Provinces des Pays-bas la lui euffent déferée, & les fecours qu'on avoit envoyez de France aux Flamans pour les foutenir contre lui, en eftoient un plus que fuftifant. Deplus, on avoit fait alliance avec les Liegeois envers tous & contre tous; & cette Republique eftoit alors en guerre ouverte avec le Roy des Romains. Ainfi ce Prince prétendoit que le Roy n'aïant excepté ni lui, ni l'Empereur dans Réponse du ces termes du Traité de ligue, avoit Confeil du Roy des Roviolé les anciens Traitez faits entre la mains aux France & l'Empire. C'eft pourquoi Lettres du fans autre declaration de guerre, il fit Re faire des hoftilitez par fes troupes fur Brabant. les Terres de France. Salafar Gouverneur de Doüai furprit Teroüane: Mortagne fut auffi enlevée; & Maximilien afin de rendre la pareille au Roy qui avoit traité contre lui avec. les Flamans, écrivit aux Bourgeois Jaligny Hi de Paris une Lettre qu'il leur envoya de Charles par un Heraut, pour les exhorter à vIII. la reforme du gouvernement de l'Etat, que Monfieur & Madame de Beaujeu, ainfi qu'il le difoit, gouvernoient très-mal.

Il s'eftoit accommodé avec les Flamans qui à la fin l'avoient reconnu pour tuteur de Philippe d'Autriche. Il avoit tiré ce jeune Prince des mains des Gantois, & l'avoit fait conduire à Malincs; de forte que plus tranquil

le

Roy.

Haræus Ann

le chez lui qu'il n'avoit efté par le 1486. paffé, il commençoit à agir conformément aux intentions des mécon

tens de France, & à executer leTraité qu'il avoit fait avec eux.

Le Roy fur ces nouvelles s'eftoit rendu avec des troupes à Beauvais, pour veiller fur les mouvemens du Roy des Romains: & ce fut-là, que la Ville de Paris lui envoya la réponfe qu'elle faifoit à la Lettre de ce Prince, qui dut en eftre auffi mécontent, que le Roy eut fujet d'eftre fatisfait de la fidelité de fa Capitale. On renvoya le Heraut Flaman que les Parifiens avoient fait conduire à la Cour, & le Chancelier lui ordonna de porter à fon Maistre les juftes plaintes du Roy touchant les entreprises qu'il avoit faites fur les Terres de France.

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Cependant le Maréchal de Gié & le Seigneur d'Efguerdes avoient pourvû à la fureté de la frontiere, & harceloient continuellement l'armée du Roy des Romains avec un camp volant; mais ils ne purent l'empêcher de ravitailler Teroüane, lorfqu'elle eftoit fur le point de fe rendre fau

te de vivres.

Quelles é L'armée ennemie qui eftoit de dix soient fes for à douze mille hommes, perdit le refefes def fte de la campagne à faire diverfes marches fur les frontieres de Picardie. L'intention du Roy des Romains eftoit d'affieger Guife: mais les deux Generaux François qui coftoyoient toûjours fon armée, ayant penetré fon deflein, y envoyerent Brezé Senechal de Normandie, & renforcerent tellement la garnifon, qu'il n'ofa attaquer cette Place. Il fut contraint, faute d'avoir de quoi foudoyer fes troupes, de les féparer. Deux mille Allemans de cette Armée ennuyez de n'eftre point payez, déferterent tous ensemble, & vinrent fe rendre à Brézé; ce Seigneur les envoya au Roy Tome V

à Compiegne, où l'on leur donna
des fauf-conduits & de l'argent pour 1486.
repaffer en leur pays.

Le Roy des Romains avoit efperé Suite de la que dès qu'il auroit attiré le Roy fur divifion des la frontiere,il fe feroit quelques mou- Betons. Seigneurs vemens foit du cofté de Bretagne, foit en Guyenne ou en quelque autre endroit du Royaume, & cela fur la parole que lui en avoient donnée les Princes liguez. Mais les diffentions. des Seigneurs Bretons & les bons or dres que Madame de Beaujeu avoit donnez par tout, ne permirent pas aux mécontens de faire aucune entreprife. Au contraire cette Princesse fçut alors fi adroitement manier l'ef prit du Connestable de Bourbon, qui eftoit venu trouver le Roy à Beauvais où le Comte de Vendôme l'avoit invité de fa part, qu'elle le gagna entierement, & le réconcilia avec Monfieur de Beaujeu fon mari frere cadet de ce Prince. La grande puiffance du cadet faifoit le fujet de la joloufie de l'aifné: mais on fit comprendre à ce- Comte de lui-ci qu'il eftoit & du bien de l'Eftat, Vendôme & même de l'intereft de la Maifon de pour le Conneftable. Bourbon, qu'ils fuffent enfemble en une parfaite intelligence.

Inftruction du Roy au

Comines

Roy

Il donna une grande marque de la fincerité de fa reconciliation, en ce plufieurs au que la Princeffe lui ayant dit qu'elle vaincus d'être tres font con fçavoit qu'il avoit dans fa maifon mal intentions deux Gentilshommes qui entrete- ex pour le noient correspondance avec le Duc d'Orleans, il confentit à les éloigner de fa perfonne. Ces deux Gentilshommes eftoient le Seigneur de Culant, & le Seigneur d'Argenton, plus connu fous le nom de Philippe de Comines, qui chagrins de n'avoir pas le même credit fous le prefent Regne, que fous le précedent, eftoient. mêlez dans les intrigues du Duc d'Orleans, & l'informoient de ce qui Mift de Char Jaliguy fe paffoit à la Cour. En quoi Philippe les VIII, de Comines s'éloignoit beaucoup de

E

1486.

Comines 1. 6. chap.12.

la belle Morale qu'il débite de temps en temps dans fes Hiftoires, touchant la droiture & la fidelité des fujets envers leur Souverain.

On eut dequoi les convaincre de leur infidelité par des lettres en chiffre, qui furent interceptées au mois de Janvier fuivant, par lesquelles on reconnut qu'outre ces deux Seigneurs il y avoit encore à la Cour bien d'autres gens mal affectionnez au Roy. De ce nombre eftoient Geoffroi de Pompadour Evêque de Perigueux, George d'Amboife Evêque de Montauban & Buffy fon frere. On les arrefta tous, & Philippe de Comines écrit de lui-même, qu'il fut mis dans une de ces cages, dont j'ai parlé fur la fin du regne de Louis XI. & qu'il y demeura huit mois. On foupçonna auffi l'Evêque d'Albi, frere de l'EvêJaligny Hift. vêque de Montauban d'eftre de la de Charles Cabale. On envoya des gens pour l'arrefter; mais ayant efté averti, il fe fauva à Avignon, & fe difculpa depuis.

VIII.

Traité avantageux pour

au Duc d'Orleans.

Quelque temps avant cette découce Prince fait verte, le Roy ayant eu nouvelle que avec la fa- le Duc de Bretagne eftoit fort malaencontrar de, partit de Compiegne & s'avança avec des Troupes jufqu'à Tours, en refolution d'entrer en Bretagne, & de s'en faifir au cas que ce Prince mourut: mais la maladie n'ayant point eu de fuite, il revint à Amboise au mois de Novembre, & y refta pour prendre des mefures avec la faction des Seigneurs de Bretagne contraire au Duc d'Orleans. L'Archevêque de Bourdeaux & le Seigneur du Bouchage firent avec eux à Chafteaubriand un Traité très avantageux au Roy, malgré tous les efforts du Prince d'Orange, qui fit fon poffible pour rompre cette negociation, & pour réunir tous ces Seigneurs en fa

* Andié d Espinai.

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