Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

doute trop avancé pour reculer, et il paraît avoir compté parmi les adhérents de Gui de Crême, donné pour successeur à Octavien, sous le nom de Pascal III. Ses relations avec l'empereur continuèrent : nous voyons Frédéric, probablement vers la fin de l'année 1164, lui demander un entretien, voulant sans doute reprendre, sur de nouvelles bases, la négociation qui avait échoué à Saint-Jean-de-Losne. Henri fit le voyage de Paris pour en conférer avec le roi. On ne nous a pas conservé la réponse de Louis, mais il ne paraît pas qu'elle ait été favorable à la cause du schisme (1). Frédéric dut renoncer à l'espérance d'entraîner le monarque et le clergé français dans le parti du nouvel antipape, qu'il aurait voulu faire reconnaître solennellement par toute la chrétienté. « Voyant, » disait-il, « le roi de France as»socié avec Roland, ennemi public de notre empire, » et avec ses sectateurs pour nous enlever notre >> honneur impérial, lui ayant adressé beaucoup » d'admonitions inutiles, et comprenant que sa » détermination était irrévocable, » Frédéric se contenta de faire proclamer, dans un concile allemand, la validité de l'élection de son antipape. Ce concile se tint à Wurtzbourg, la semaine qui précéda la Pentecôte, 23 mai 1165. Après avoir invoqué l'Esprit-Saint, l'empereur jura, la main sur des reliques, que jamais il ne reconnaîtrait pour pape le schismatique Roland ni le successeur que son parti lui donnerait; il jura qu'il soutiendrait toujours le

(1) Lettre d'un anonyme à Thomas de Cantorbéry, ap. D. Bouquet, XVI, 221 C.

seigneur Pascal, pape, et qu'il lui donnerait toujours les marques d'obéissance, d'honneur et de respect dus au père de la catholicité et au pontife universel; qu'enfin il ne quitterait son parti qu'avec la vie. Après lui, les archevêques et les évêques, la main sur l'Evangile, prêtèrent le même serment. Ensuite vinrent les barons de l'empire, le duc de Saxe en tête, qui jurèrent, la main sur des reliques. Puis le samedi des Quatre-Temps (22 mai), Frédéric fit sacrer tous les évêques élus qui n'avaient pas encore reçu l'onction sainte. Peu après arrivèrent à Wurtzbourg des ambassadeurs du roi d'Angleterre, alors en lutte avec Thomas Becket, archevêque de Cantorbéry, et mécontent d'Alexandre, qui soutenait Thomas. Ces ambassadeurs, agissant au nom de leur souverain, prêtèrent le même serment que l'empereur et ses barons. Nous avons encore la lettre par laquelle Frédéric notifie tous ces faits à son cher vassal et cousin Henri, comte de Troyes; elle est datée de Wurtzbourg et du 1er juillet (1). Ce document fit grand bruit; on en répandit des copies. Jean de Salisbury, depuis évêque de Chartres, en reçut une, dont il parle dans une lettre adressée à Jean, évêque de Poitiers; il s'excuse de ne pas lui envoyer cette pièce qu'il avait fait passer à l'archevêque de Cantorbéry (2).

Mais, à part l'inquiétude causée par l'alliance du roi d'Angleterre et de l'empereur, la dépêche impériale ne semble pas avoir produit en France l'effet

(1) D. Bouquet, XVI, 692-693. (2) D. Bouquet, XVI, 524 A.

que Frédéric avait sans doute en vue. Nous ne sachons pas qu'elle ait donné à l'antipape un seul partisan de plus. Au contraire, Henri le Libéral paraît avoir à cette époque reconnu la légitimité du pape Alexandre III.

Dans sa fureur contre le saint archevêque de Cantorbéry qui alors habitait l'abbaye cistercienne de Pontigny, le roi d'Angleterre menaça de saisir tous les biens de l'ordre de Citeaux en Angleterre, en Normandie, en Anjou, en Poitou et en Guienne, si Thomas n'était pas expulsé de son asile. Les lettres du monarque anglais furent lues à Cîteaux, dans une séance du chapitre général qui s'ouvrit le 13 septembre 1166, et Thomas fut obligé de se retirer à l'abbaye de Sainte-Colombe de Sens, le 11 novembre suivant (1).

Le roi de France témoigna dans cette circonstance une très-vive sympathie à l'archevêque exilé; notre comte paraît avoir agi de même, et à cette occasion il reçut d'Alexandre III la lettre que voici :

<< Parmi les actes où se manifeste l'opération di>> vine, il en est un que nous considérons comme » très-agréable à Dieu et à nous, c'est que, dans les >> angoisses et les anxiétés de notre vénérable frère

l'archevêque de Cantorbéry, vous l'avez regardé » avec un visage serein, et qu'avec votre bonté or>> dinaire vous lui avez donné les consolations de

(1) Gervasius Dorobernensis, Chronicon de regibus Anglica, ap. D. Bouquet, XIII, 129-130; Radulfus de Diceto, Imagines historiarum, ibid., 187 C; Rogerus de Hoveden, Annales, ibid., 208 A B.

» vos bonnes grâces et de votre faveur. Maintenant, >> surtout, il a besoin de secours et de conseils. » Aussi, nous adressons à votre magnificence, par >> ces lettres apostoliques, une prière, un avertisse>> ment et une exhortation dans le Seigneur : Pour >> la rémission de vos péchés, nous vous enjoignons » de donner à lui et aux siens des marques d'hon» neur et d'affection par amour pour Dieu, par res» pect pour saint Pierre et pour nous, et en consi» dération de la piété et du caractère de ce prélat. >> Accordez-leur dans leurs adversités le soulage» ment de votre appui, et vous obtiendrez du Dieu » tout-puissant une récompense éternelle. Quant à »> nous, considérant vos bienfaits comme reçus par »> nous-même, nous devrons à Votre Grandeur des » grâces abondantes (1). »

Cependant Henri n'avait pas rompu avec l'empereur. L'année suivante, c'est-à-dire pendant l'hiver 1167-1168, Frédéric, après s'être emparé de Rome et avoir été obligé par la maladie et la désertion à battre en retraite vers le nord de l'Italie, se trouva presque sans soldats en face d'une armée de 20,000 Lombards, qui faillit le faire prisonnier et l'obligea de regagner l'Allemagne. Il avait avec lui, dans ce moment de détresse, des ambassadeurs du comte Henri (2). Ces ambassadeurs avaient été envoyés, à ce qu'il semble, pour négocier le mariage du jeune fils de Louis, c'est-à-dire de Philippe-Auguste, alors

(1) D. Bouquet, XVI, 270DE.

(2) Epistola Joannis Saresberiensis ad Baldevvinum Exoniensem archidiaconum, ap. D. Bouquet, XVI, 582 D.

âgé d'un peu plus de deux ans (1), avec Sophie, fille de Frédéric. Henri prenait fort à cœur la réalisation de ce projet que les hommes dévoués aux intérêts de l'Eglise voyaient avec une vive inquiétude et dont ils redoutèrent un instant le succès. Jean de Salisbury l'écrivait à maître Lombard, un des compagnons de Thomas Becket : « Je crains, » dit-il, « que le roi » très-chrétien n'ait pris la résolution irrévocable de » se rendre aux prières de l'empereur et qu'un ma>> riage ne se conclue entre les enfants des deux sou» verains; c'est le comte Henri qui négocie cette >> union et il espère en venir à ses fins (2). » Nous avons encore une lettre adressée par notre comte à Louis VII et qui est, ce nous semble, relative à cette affaire. Il parle au roi d'ambassadeurs et d'une dépêche qu'il a reçue de l'empereur, et lui annonce l'envoi de cette dépêche (3). Les espérances d'Henri

(1) Il était né le 22 août 1165. (2) D. Bouquet, XVI, 592 C.

(3) D. Bouquet, XVI, 68 C. Cette lettre est la 215 du registre de Louis VII; l'éditeur la date de 1163, mais de la note d il résulte qu'on peut la dater aussi de 1168. En effet, il est dans cette lettre question d'une expédition lointaine qu'allait entreprendre Guillaume IV, comte de Nevers. Ces expressions peuvent s'appliquer soit au pèlerinage que Guillaume fit à Notre-Dame-du-Puy en 1163, soit à son voyage en Terre-Sainte qui date de 1168. Nous rejetons la première hypothèse pour deux raisons : la première, c'est que dans la suscription de cette lettre le comte Henri traite Louis VII de père; or, il ne devint que l'année suivante gendre de ce prince; la seconde raison est que les termes employés dans le texte, expeditionem longinquam, nous paraissent beaucoup plus appliquables à un voyage en Terre-Sainte qu'à une promenade au Puy.

« VorigeDoorgaan »