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Communes a accordé à sa Majesté Britannique, pour sa vie, les mêmes revenus dont le feu Roy son frère jouissoit : la résolution en a été prise d'un comun consentement; M. Seymer seul s'y opposa, et harangua inutilement contre la forme des élections, et sur le péril où l'on est de voir introduire la religion Catholique, et un gouvernement contre les loix. Son discours ne fut suivi ni applaudi de personne.

La Chambre Haute délibéra, en même temps, sur l'affaire des Seigneurs accusés de haute trahison, et cassa un règlement de la même Chambre qui ordonne que les accusations intentées par la Chambre Basse subsisteront d'un parlement à l'autre. Cela s'étoit fait pour perpétuer l'accusation contre le Comte de Danby et les Pairs Catholiques, qui par ce moyen demeureront toujours en état d'être condamnés sur les témoignages rendus contre eux. Ils sont présentement libres de l'accusation, et il faudroit pour les poursuivre recommencer une nouvelle accusation, et une nouvelle procédure. Cette délibération de la Chambre Haute annule tout ce qui a été fait sur la prétendue con spiration des Catholiques, qui sans cela auroit subsisté : c'est un coup fort important à l'égard de sa Majesté Britannique. Les Milords Devanschaer, Anglesey, Claire, et Radnor furent d'un avis contraire, et témoignèrent seulement leur mauvaise volonté.

Le Roy d'Angleterre me parla hier au soir avec beaucoup de chaleur de son attachement pour V. M. et de l'envie qu'il a de conserver son amitié, et d'augmenter, s'il est possible, les liaisons établies. Il me dit qu'il se croyoit encore plus en état de se conduire suivant son inclination at ses intérêts, se trouvant en possession du revenú dont le feu Roy son frère jouissoit; que cependant il auroit toujours un grand besoin de l'amitié et des secours de V. M. pour exécuter les choses qu'il a dans l'esprit, et sans lesquelles il ne peut-être en sûreté ; que V. M. verroit avec quel soin il ménagera l'honneur de ses bonnes graces, et avec quelle fermeté il sera dans ses intérêts. Ce Prince me dit ensuite le détail des nouvelles d'Ecosse; et ajouta, qu'il ne doutoit pas que l'Electeur de Brandebourg et d'autres Princes d'Allemagne n'eussent contribué sous main à l'entreprise du Comte d'Argile, et qu'il seroit soutenu de tous les Protestans de l'Europe; que cela lui montroit le chemin qu'il doit tenir, et à qui il se peut fier. Je lui dis que j'informerois V. M. de ce qui se passoit, et que je pouvois

l'assurer per avance que V. M. n'omettroit rien pour le soutenir, et lui donner des marques essentielles de son amitié.

Les lettres que j'ai reçues de M. d'Avaux, du 29 May, me font voir que les Ambassadeurs d'Hollande qui sont ici, écrivent comme s'ils étoient persuadés que le Roy d'Angleterre est dans une entière disposition à faire une nouvelle et plus étroite alliance avec les Etats Généraux.

V. M. jugera ce qui est à faire ici pour son service dans la conjoncture présente. Je me tiendrai en état d'exécuter ses ordres, sans m'avancer au-delà du payement de l'ancien subside. Je ne doute pas que Milord Rochester, et même le Roy d'Angleterre, ne me pressent bientôt de leur fournir d'autres sommes dont ils sçavent que les fonds sont ici. Il me paroît que le cas contenu dans les ordres de V. M, est à-peu-près arrivé, puis qu'il y a une rébellion formée en Ecosse qui a ses racines et son fondement en Angleterre et en Irlande. J'attendrai ce qu'il plaire à V. M. de m'ordonner; mais ce qui se fera bientôt, et du pur mouvement de V. M., sera, ce me semble, d'un autre poids, et d'un plus grand mérite, que les secours qu'on accordera, lorsqu'ils seront demandés avec empressement.

Je sais que des sommes considérables ne se fournissent pas ordinairement sans des stipulations préalables, et sans des assurances positives de l'effet qu'elles peuvent produire. Je ne fais aucun doute que le Roy d'Angleterre n'entre dans la suite dans tous les engagements que V. M. pourra désirer: je ne me suis point ouvert sur cela, parce que je n'ai pas eu d'ordre positif de V. M. de le faire: j'ai même appréhendé, si j'en commençois le discours, qu'on ne demandât des conditions qui ne lui conviendroient peut-être pas, comme celle de ne point faire, de son côté, d'alliance avec d'autres Princes. Cette égalité n'est pas raisonnable ni admissible entre V. M. et le Roy d'Angleterre, dont la puissance est si différente et si inégale avec la sienne. Mais les Anglois présument toujours d'avantage qu'ils ne doivent, et ceux qui voudroient empêcher ou affoiblir les liaisons entre V. M. et sa Majesté Britannique trouveroient peut-être des prétextes dans les clauses d'un traité pour en éluder les conclusions. Je fais cette réflexion par avance, sur une chose dont il n'est pas encore question, mais qui pourroit venir en son temps.

Il s'agit seulement à-présent de ce que V. M. m'ordonnera de faire de l'argent qu'elle a fait passer ici. Il me paroit que le Roy d'Angleterre s'engage à mesure qu'il reçoit de l'argent de V. M. et que c'est le meilleur et le plus sur moyen de rendre inutiles tous ces efforts qu'on fera pour l'ébranler, et pour lui faire prendre un chemin opposé aux intérêts de V. M. je crois voir cela clairement, et qu'il y auroit du péril à laisser le Roy d'Angleterre sans sécours, dans le temps qu'il peut en avoir plus de besoin. Il est vrai que le Parlement lui a accordé le revenu du feu Roy; il pourra même dans la suite donner quelque chose pour la flotte; mais la guerre civile est commencée en Ecosse, et je vois des gens fort sensés qui sont persuadés que l'entreprise, du Comte d'Argile est plus considérable encore qu'elle ne paroît.

Dès que l'acte des revenus sera passé, les affaires qui regardent la religion seront sur le tapis, et quantité d'autres affaires. J'estime qu'il seroit utile, en ce temps là, pour le service de V. M. de pouvoir ménager quelques gens du Parlement, et leur inspirer une conduite telle qu'il convient aux intérêts de V. M. une somme de quinze cent ou deux mille pièces suffiroit pour conserver à V. M. un crédit dont elle pourroit avoir besoin en d'autres temps. Je ne ferai rien sur cela, quand j'en aurois la permission, qu'avec de grandes pré

cautions.

Milord Montaigu m'est venu trouver avant son départ pour France : il m'a fort pressé d'écrire à V. M. pour le parfait payement de ce qui lui reste dû. Il m'a dit qu'au lieu de cinquante mille écus qui lui sont dus, il se contenteroit d'une pension pendant sa vie ; qu'il prétendoit ne pouvoir être moindre que de vingt mille livres : il croit que ce seroit un moyen de satisfaire à ce qui lui est légitimement dû, sans que V. M. fut obligée de débourser une somme considérable, et que ce seroit même une sûreté de sa conduite dans tous les temps puisque V. M. pourroit faire cesser le payement de la pension, si V. M. n'étoit pas contente de lui. Je n'ai pu me refuser à rendre compte à V. M. de cette proposition. Il est certain que M. de Montaigu a rendu un grand service. Il en doit parler lui-même à M. de Croissy.

Extrait d'une Lettre de M. Barillon au Roi.

4 Juin, 1685, à Londres.

Le discours de M. Seymer a fait beaucoup de bruit à Londres, et à la Cour, quoiqu'il n'ait point retardé la résolution de la Chambre Basse pour la concession; mais dans la suite il sera souvent parlé de ce discours, dans lequel les questions importantes ont été traitées à fonds. M. Seymer ne s'est point opposé à ce que l'on donnât au Roy d'Angleterre les revenus dont le feu Roy jouissoit; mais il a proposé qu'on remit à en délibérer jusqu'à ce que les formes dans lesquelles les élections des membres du Parlement ont été faites, eussent été examinées. Il a soutenu qu'elles étoient pour la plupart vicieuses, et faites par cabale, et par autorité, ce qui est directement contraire aux loix d'Angleterre qui établissent une entière liberté sur le sujet des élections, en sorte que la moindre corruption en argent étant prouvée rend l'élection nulle; que les sheriffs et autres officiers qui avoient présidé à ces élections, avoient été tous préposés en vertu des nouvelles chartres accordées depuis peu au lieu des anciennes qui ont été révoquées que l'exemple de ce qui a été fait à l'égard de la ville de Londres, dans la révocation de ses chartres, et de ses privileges, avoit été suivi dans les autres villes et bourgs, quoique selon les loix et l'usage, il ne soit pas au pouvoir du Roi de révoquer ni de rendre nulles des chartres accordées par les Rois ses prédécesseurs, confirmées par un temps immémorial, et par l'approbation expresse et tacite de plusieurs parlements; qu'ainsi le principe des élections étant (vicieux) défectueux, les députés n'étoient pas de véritables membres du parlement choisis par la nation contre la liberté requise et dans les règles usitées; que cependant il n'y avoit pas eu de temps au quel il fut plus nécessaire d'avoir un Parlement composé de gens bien intentionnés et attachés aux loix d'Angleterre, parce que la nation étoit en un péril évident de vour changer ses loix et sa religion : l'aversion des peuples d'Angleterre contre la religion Catholique Romaine, et leur attachement pour leurs loix étoient tellement établis dans les esprits, qu'on ne pouvoit détruire leur religion et leurs loix que par des actes du Par

que

lement, ce qui ne seroit pas difficile, quand un Parlement se trouve entièrement dépendant de ceux qui peuvent avoir de tels desseins; que l'on parloit déjà d'abolir le Test, qui étoit le seul rempart capable d'empêcher l'introduction du Papisme et que dès que cet obstacle seroit levé, les Papistes viendroient aisément à bout de rentrer dans les charges et dans les emplois, et d'établir leur religion sur la déstruction de la religion Protestante; que l'on disoit aussi que l'intention étoit de casser l'acte d'Habeas Corpus, qui est le plus ferme fondement des libertés des Anglois; que si cet acte étoit révoqué, le gouvernement arbitraire se trouveroit bientôt établi; que ce qu'il avançoit étoit connu de tout le monde, et n'avoit pas besoin de preuves; qu'ainsi, avant de prendre aucune résolution de conséquence, il étoit nécessaire d'examiner la validit é des élections, et de décider, selon les règles établies en Angleterre, si les Deputés étoient capables de constituer un véritable et légitime Parlement qui put représenter la Nation.

Ce discours fut prononcé avec beaucoup de force, et eut l'approbation secrète de beaucoup de gens; mais personne ne se leva pour l'aprouver. Ceux de son parti crûrent qu'ils le feroient inutilement, et que la contestation qu'ils formeroient, ne serviroit qu'à montrer leur foiblesse et leur petit nombre, en comparison des autres qui se croyent élus. Ces mêmes questions reviendront souvent dans la suite, et serviront de fondement à tout ce qui sera allégué contre les résolutions du Parlement présentement assemblé. Ceux qui lui contestant son pouvoir n'ont point d'autres juges que les mêmes gens à qui on dispute la validité de leurs élections; c'est ce qui fit mettre à la Tour, pendant un assez longtemps, les Pairs qui voulurent soutenir, il y a quelques années, que le Parlement n'étoit pas un veritable Parlement, et ils furent obligés à la fin de se rétracter.

Le fils aîné du Comte d'Argile, nommé Milord Lorn, est venu se remettre entre les mains du Roy d'Angleterre, et a offert de servir contre son père; il y a un autre de ses enfants avec lui. On croit tous les jours d'avantage ici que cette affaire est considérable.

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