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cipalement Milord Sunderland et Milord Godolfin, qui ont traité de la part du feu Roy avec les factieux, et qui les ont portés, en ce temps là, à insister sur une chose à laquelle ils les assuroient que le Prince consentiroit à la fin, si on faisoit sa condition bonne.

Il est fort apparent que ce projet est soutenu par des gens qui ne sont pas tout-à-fait hors des affaires. Milord Halifax a toujours une haîne fort vive contre Milord Sunderland, et anime sous main ceux qu'il avoit disposés à lui nuire.

Milord Sunderland a déjà parlé au Roy d'Angleterre pour prévenir le piége qu'on lui voudroit tendre sous prétexte de chasser ceux qu'on appelle les Exclusionnaires; mais si le moyen manque, on en tentera d'autres ; et je crois savoir que Milord Sunderland sera fortement attaqué, tant par la haîne qui reste de lui de son ministère passé, que parce qu'on prévoit qu'il aura beaucoup de part à la confiance de son maître à l'avenir, si sa liaison subsiste avec V. M., et s'il persiste dans le dessein d'établir la religion Catholique.

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Je crois que Milord Rochester sera épargné au commencement par le Parlement. On le croit bon Protestant, et il est regardé comme protecteur du parti épiscopal on le voit à la tête des affaires, et les finances entre les mains; il est, outre cela, beau-frère du Roy: on croiroit en l'attaquant, fournir à sa Majesté Britannique un prétexte de casser le Parlement. Mais on s'imagine pouvoir attaquer les autres ministres impunément, et que peut-être Milord Rochester ne sera pas fâché de ce qui se passera contre ceux qui avoient prévalu sur lui dans les derniers temps, et qui l'avoient réduit à se retirer en Irlande.

Les Catholiques sont ouvertement pour Milord Sunderland; cela rendra encore les esprits de la Chambre Basse plus aisés à exciter contre lui; cependant il a fort bien servi le Roy d'Angleterre, avant qu'il par vint à la couronne, et il a travaillé si utilement à le faire venir d'Ecosse, et à le rétablir dans le conseil, et dans l'amirauté, que je ne crois pas que ce Prince l'abandonne, ne qu'il souffre que le Parlement commence par faire une chose aussi préjudiciable à l'autorité royale, que le seroit celle d'attaquer les ministres.

Madame de Portsmouth croit aussi devoir être attaquée; cela l'oblige à presser son départ avant que le Parlement s'assemble. De la façon dont le Roy d'Angleterre m'a parlé sur son sujet, j'ai lieu de croire qu'elle sera contente de ce qu'il a résolu sur ses affaires.

V. M. peut juger par ce que j'ai l'honneur de lui mander, que les affaires ne seront pas si paisibles dans le Parlement qu'on se l'imagine. Il est vrai que les anciens factieux ne sont pas choisis; mais ceux qui composent le Parlement le deviendront aisément : ils ont presque tous une aversion insurmontable contre la religion Catholique, et la plupart sont ennemis de la France, et jaloux de la grandeur de V. M. Ils connoissent bien que du succés de cette séance dépend l'établissement des affaires de sa Majesté Britannique, c'est pourquoi on n'omettra rien pour lui susciter des embarras.

Il y a des avis que les Anglois réfugiés à Amsterdam veulent envoyer des armes en Ecosse, et on pris des mesures sur cela; c'est l'endroit où il peut plus aisément arriver des désordres, aussi bien que dans le Nord de l'Irlande, qui joint presqu'à l'Ecosse. Le Roy d'Angleterre ne me paroit point inquiet de l'avenir, et croit venir à bout de tout aisément.

Les Ambassadeurs d'Hollande ont eu leur audience du Prince et de la Princesse de Dannémark. Ils m'ont rendu la première visite après la Maison royale. Selon ce qui m'est rapporté par quelques uns de leurs confidents, ils ne sont pas si contents qu'ils le témoignent par leurs lettres. Je ne laisserai pas de redoubler mes soins pour pénétrer ce qui se passera sur ce sujet.

Il vint hier de fort bonnes nouvelles d'Ecosse. Il a été question dans le Parlement, d'accorder à sa Majesté Britannique pour sa vie, les droits de l'excise et des coutumes qui avoient été concédés aussi au feu Roy pour sa vie. Non seulement cela a été fait, mais le Parlement a annexé ces mêmes droits à la couronne pour toujours. C'est le Duc d'Hamilton qui en a fait la proposition aux Seigneurs, et qui l'a fait réussir par son crédit dans le Parlement.

On a arrêté ici un écuyer de M. le Duc de Monmouth; le Roy d'Angle

terre m'a dit qu'il ne s'étoit trouvé chargé de rien, et qu'il ne s'étoit pas caché, qu'ainsi on l'avoit élargi, en donnant caution de se représenter.

Le Duc de Nordfolk a l'ordre de la jarretière; c'est la place qui a vaqué par la mort du feu Roy d'Angleterre. Milord Churchil sera Milord d'Angleterre il l'étoit seulement d'Ecosse. M. Germain sera aussi fait Milord, et le Colonel Talbot sera Comte d'Irlande dès qu'il y sera arrivé. Tout cela sera fait avant l'assemblée du Parlement.

Je suis avec le profond respect que je dois, &c.

M. Barillon au Roi.

17 May, 1685, à Londres. Je vois par la dernière dépêche de V. M. que sa résolution est de secourir le JE Roy d'Angleterre dans ses besoins; c'est dans cette vüe que V. M. envoye ici des sommes considérables. Cependant il me paroît que V. M. n'est pas sans soupçon que le Roy d'Angleterre ne puisse prendre des mesures opposées à ses intérêts, et former des liaisons avec les Etats Généraux et avec le Prince d'Orange. Ma principale application doit être à tâcher de le pénétrer, et je n'omettrai rien de ce qui peut m'éclaircir de ce qui se passe de plus secret ici. Le commerce intime que j'ai avec le Roy d'Angleterre et avec ses ministres me met en tel état, que ce sera ma faute si je suis trompé.

V. M. peut tenir pour assuré que le Roy d'Angleterre n'a point un plan de liaison avec les Etats Généraux, et encore moins avec le Prince d'Orange. Je ne prends pas cette confiance mal-à-propos, mais sur beaucoup de choses qu'il me seroit difficile d'expliquer à V. M. aussi clairement que je les vois. Il faut convenir, cependant, que le Roy d'Angleterre dissimule; et il lui est important de le faire jusque après la séance du Parlement; mais je suis convaincu qu'il lèvera le masque aussitôt après, et qu'il ne se contraindra pas, comme il l'a fait jusqu'à présent, à cacher sa pente pour les intérêts de V. M. et le dessein qu'il a d'établir l'exercice libre de la religion Catholique. Je suis

persuadé qu'il trouvera beaucoup de difficultés dans l'éxecution de ce dessein: il n'y a aucune apparence que le Parlement y consente, je doute même que sa Majesté Britannique l'ôse proposer. Cela dépendra des premières résolutions qui se prendront sur les revenus. Mais par avance je sais que la défiance est fort grande dans les esprits de part et d'autre, et que si le Parlement apporte de la facilité à la concession des revenus, il ne se relâchera point sur ce qui regarde la religion Catholique. C'est ce qui m'a fait insister jusques à-présent auprès de V. M. pour la supplier de ne point ordonner de suspendre les payements auxquels on s'attend ici. Je trouverois même beaucoup d'inconvénient à déclarer au Roy d'Angleterre et à ses ministres, qu'après l'ancien subside payé V. M. ne lui fournira plus rien, à moins qu'il ne se trouve obligé de forcer ses sujets à se conformer à ce qu'il désire, tant à l'égard de ses revenus que du libre exercice de la religion Catholique.

Je vois que V. M. regarde comme un inconvenient que le Roy d'Angleterre puisse mettre dans son épargne, et augmenter ses fonds d'une somme considérable que V. M. fourniroit dans le temps, qui le mettra en état de subsister commodément; et que son autorité étant établie au-dedans, et ayant obtenu ce qu'il souhaite à l'égard de la religion Catholique, il sera en état de prendre parti sur les alliances qu'il peut faire au-dehors. Si cela étoit ainsi, je croirois que V. M. auroit intérêt de prévenir ce Prince par une gratification, et l'engager insensiblement dans vos intérêts par une somme bien moins considérable que ne seroit celle que V. M. donneroit, si une fois il avoit pris la résolution de se joindre à ceux qui sont jaloux de votre grandeur. Mais les affaires de ce pays-ci sont fort éloignées d'un état si tranquille. V. M. verra que dans la suite le Roy d'Angleterre trouvera des oppositions beaucoup plus grandes qu'on ne le croit. Il y a déjà des mouvements parmi les Montagnards d'Ecosse; le Nord de l'Irlande n'est pas tranquille; les factieux n'ont pas perdu toute espérance, et votre Majesté sait que l'on a pris des mesures en Hollande pour leur envoyer des armes et des munitions.

Si dans le temps que tout est en mouvement, et que l'on fera les plus grands efforts pour détacher le Roy d'Angleterre de l'amitié de votre Majesté, je lui déclarois, et à ses Ministres, que V. M. ne veut plus le secourir, je fournirois un prétexte fort plausible à ceux qui lui veulent faire prendre un chemin

con

opposé à celui qu'il a résolu de tenir. Je doute encore qu'ils en vinssent a bout; mais c'est un péril auquel il n'est pas, ce me semble, nécessaire d'exposer les affaires de ce pays-ci, qui peuvent (si je ne me trompe,) être duites avec une entière sûreté, sans que V. M. hazarde beaucoup. Je vois ce qui se passe; il sera mal-aisé de me le cacher; ainsi je ne donnerai pas mal-à-propos ce que j'aurai pouvoir de donner. J'ose encore supplier V. M. de me permettre (après l'ancien subside payé) de fournir au Roy d'Angleterre, pendant l'assemblée du Parlement, jusques à la somme de deur cent mille écus sur celle de quinze cent trente mille livres qui me restera entre les mains, après que votre Majesté y aura envoyé toute la somme qu'elle a résolu. Je ménagerai cette somme de deux cents mille écus en telle sorte que V. M. connoîtra par la suite qu'elle lui aura été utile.

V. M. me permet par sa dernière dépêche, de donner toute la somme que je pourrai avoir entre les mains, si je vois le Parlement cassé, et que le Roy d'Angleterre soit réduit à contraindre ses sujets par la force à se soumettre. Il n'est pas apparent que les affaires viennent tout d'un coup à une rupture ouverte, et j'aurai toujours assez de temps pour informer V. M. et recevoir ses ordres, pourvu que je puisse cependant fournir quelque somme. Enfin, Sire, les affaires sont ici, selon ce que j'en puis juger, en fort bon état à l'égard de V. M.; mais je n'en répondrois pas, si V. M. m'ôtoit la liberté de faire aucune sorte de payement, après l'ancien subside payé. Il me suffit d'avoir connu ses intentions pour n'aller pas trop loin, quand j'en aurai la permission. Le Roi d'Angleterre se croit en quelque façon juge lui-même de ses besoins; si V. M. veut l'obliger entièrement, et lui témoigner une véritable amitié, elle s'en rapportera à lui. Si je jetois dans son esprit une défiance quoique mal-fondée, j'aurois de la peine à le faire revenir, au lieu que présentement j'ai établi une confiance que rien ne detruira pourvu que V. M. me permette de faire ce que je croirai entièrement nécessaire pour son service. Je ne serois pas assez imprudent pour presser V. M. de faire une chose à laquelle il me paroît qu'elle a de la répugnance, si je n'én connoissois l'importance et (l'utilité) la nécessite. Je ne voudrois pas non plus perdre auprès de V. M. le peu de service que je puis lui avoir rendu en ce pays-ci, en lui conseillant de faire une chose qui pourroit

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