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Le meilleur moyen, et le plus sur, pour fortifier ce Prince, et le maintenir dans le bon état où il est à l'égard de la religion Catholique, et des intérêts de V. M., est de se voir assuré d'une liaison étroite avecV. M. et dans une entière sûreté d'en être puissamment secouru. Jene fais aucun doute qu'il ne s'engage aussi avant que V. M. le voudra dans la suite, et il croit déjà le faire en recevant des gratifications de V. M. Si je cessois toutes sortes de payements, et que le Roi d'Angleterre et ses ministres prissent le parti de s'expliquer avec froideur sur cela, et de ne pas parler de secours comme d'une chose nécessaire, je ne douterois pas que ce Prince ne se crût en état et en liberté de prendre d'autres mesures. Je ne puis représenter trop fortement à V. M. combien il importe de ne donner au Roi d'Angleterre, et à ses Ministres, aucune occasion de croire que V. M. ne veut pas contribuer à sa grandeur et à son établissement. Je m'appliquerai à rendre un compte si exact de ce qui se passera ici que V. M. verra le fonds de tous les intérêts, autant que je serai capable de les démêler. Cependant, il est, selon mon opinion, très-necessaire que V. M. ne suspende pas les payements, et qu'elle me permette de fournir au Roi d'Angleterre ce que je croirai devoir donner sur les quinze cens mille livres qui resteront après le parfait payement de l'ancien subside; j'ose répondre que cet argent aura un aussi bon effet qu'aucun que V. M.ait pu donner. C'est un coup décisif pour ce que V. M. a d'avantage à cœur, c'est-à-dire, pour l'etablissement d'un exercice libre en faveur de la religion Catholique. Je supplie V. M. de se souvenir, que j'ai ménagé les payements du subside passé, en sorte qu'une année entière a été écoulée sans qu'il en ait été fait mention. Je ne puis avoir d'autres vues en tout cela que l'intérêt de V. M. qui pourroit, par un seul contretemps, ruiner en un jour la confiance qu'elle a établie ici depuis plusieur années, d'une amitié sincère pour le feu Roi et pour celui d'à-présent. J'espère que V. M. me fera la justice d'être persuadé, que je n'abonde pas en mon sens, et que je sais aussi bien que personne obéir aveuglément à ses ordres; mais il est de mon devoir de représenter les choses comme elles sont, et de me soumettre toujours à ce qu'il plaira à V. M. de commander.

Je suis, avec le plus profond respect, &c.

BARILLON

Le Roi à M. Barillon.

9 Mai, 1685.

MONSIEUR BARILLON, je suis bien aise de voir par votre lettre du 30 Avril, que le Roi d'Angleterre reconnoisse quelle a été la sincérité de mes intentions dans la déclaration que le Marquis de Feuquieres a faite par mes ordres au Roi Catholique, et que comme j'ai bien voulu me contenter de la réponse qui lui a été rendue de la part du Roi, elle ait fait cesser aussi toute inquiétude que cette affaire avoit donné à la cour où vous êtes. Je m'assure que comme cette éclaircissement n'aura pas été inutile à l'affermissement de la paix, il contribuera beaucoup aussi à faciliter au Roi d'Angleterre l'exécution de ses desseins, dans la prochaine assemblée du Parlement, et que par la seule disposition des affaires présentes de l'Europe, il obtiendra tout ce qu'il désire, sans avoir besoin à l'avenir d'aucune autre assistance que de celle qu'il tirera de son royaume.

Cependant, je vois par votre lettre que vous êtes persuade qu'il est de mon service non seulement d'achever aussitôt qu'il désirera le payement des subsides que vous aviez promis de ma part au feu Roi, mais même de vous donner la permission de disposer des quinze cens mille livres restants lorsque vous le ju gerez nécessaire, tant pour le fortifier dans la résolution d'établir à quelque prix que ce soit, le libre exercice de notre religion, que pour l'attacher inséparablement à mes intérêts, et l'empêcher de prendre d'autres mesures; mais, pour vous éclaircir encore plus particulièrement de mes intentions, a fin que vous ne puissiez point vous éloigner, je suis bien aise de vous répéter; qu'il est vrai que le principal motif, on, pour mieux dire, le seul et unique, qui m'oblige de vous faire remettre avec tant de diligence une somme aussi considérable qu'est celle de deux millions, pour en secourir le Roi d'Angleterre dans ses plus pressants besoins, c'est le zèle que j'ai pour l'augmentation de notre religion, secondé de mon estime et de mon affection pour le dit Roi; il doit être aussi d'autant plus persuadé de cette vérité, que je ne stipule aucunes conditions de

lui, et que l'intention que j'ai de maintenir la paix dans toute l'Europe ne me laisse pas lieu de croire, que j'y puisse trouver assez d'obstacles pour avoir besoin d'aucune assistance étrangère ; j'ai assez bonne opinion aussi de la fermeté du Roi d'Angleterre dans la profession qu'il fait de la religion Catholique, pour être bien persuadé qu'il employera toute son autorité à en établir le libre éxercice, sans qu'il soit nécessaire de l'y exciter par une distribution d'argent prématurée, et qui ne doit pas être employé si le Parlement lui accorde le même revenu dont jouissoit le feu Roi d'Angleterre, et consent aussi à l'établissement du libre exercice de notre religion; aussi mon intention est que vous continuiez les payements de tout ce qui reste dû des subsides promis au feu Roi, qui monte, suivant le dernier compte que vous m'avez envoyé, à 470 mille livres, ensorte que de la remise qui vous à été faite par mes ordres le 15 Fevrier dernier de la somme de 500 mille livres il ne vous en restera, après les payements faits, que celle de trente mille livres, lesquels joints a toutes les remises qui vous ont été, ou seront faites encore, feront la somme de quinze cens trente mille livres ; et je veux que vous gardiez ce fonds, pour n'en disposer qu'en cas que le Roi d'Angleterre ne pouvant pas obtenir de son Parlement la continuation des mêmes revenus qu'avoit le feu Roi son frère, ou rencontrant trop d'obstacles à l'établissement de la religion Catholique, se trouve obligé de le séparer, et d'employer son autorité et ses forces pour reduire ses sujets à la raison; je consens, en ce cas, que vous l'assistiez pour lors de toute la somme de quinze cens trente mille livres, soit en un ou plusieurs payements, ainsi que vous le jugerez à-propos, et que vous m'en donniez avis dans le même tems, par un courier exprès. Je m'assure que le Roi et ses ministres seront satisfaits dés ordres que je vous donne, au moins n'auront-ils pas raison de se plaindre, que je ne veuille assister qu'en cas dê revolte, et ils verront, au contraire, que j'ai d'autant plus d'interêt que le parlement se porte de lui-même à contenter le dit Roi, qu'il en aura la principale obligation à la bonne intelligence qui est entre moi et lui; et comme il ne seroit pas juste, qu'il tournât à son profit, et mit dans son épargne, les secours que je lui destine par les seuls motifs que je viens de vous écrire, il pourra toujours s'assurer de recevoir les mêmes marques de mon affection en cas que la nécessite de ses affaires l'oblige d'y avoir recours.

Tachez cependant de bien pénétrer quelles seront les négociations qui se

feront à la cour où vous êtes, entre les Ministres du Roi, et les Ambassadeurs d'Hollande pour un traité d'alliance avec les Etats Généraux; et prenez garde, qu'en agissant d'aussi bonne foi que je fais avec la cour où vous êtes, elle ne prenne ailleurs des engagements préjudiciables à mes intérêts.

M. Barillon au Roi.

14 Mai, 1685.

JE

E reçus hier, par un courier exprès, la dépêche de votre Majesté du 9o. Mai. J'aurai le soin que je dois, de ne rien faire au-delà de ce que V. M. me prescrit ; je me contenterai de représenter à V. M. le fait comme il est, et de suivre ensuite ses ordres avec la dernière exactitude.

M. d'Avaux m'a envoye la copie des lettres des Ambassadeurs d'Hollande au Pensionnaire Faigel du 29 Avril: ces lettres portent que Milord Rochester leur a parlé d'une manière qui leur donne des espérances d'une plus étroite liaison entre sa Majesté Britannique et les Etats Généraux. Je crois savoir positivement que la conférence dont il est fait mention dans ces lettres n'a point été tenue; et si on avoit dessein ici de jetter les fondements d'une plus étroite liaison entre sa Majesté Britannique et les Etats Généraux, ce ne seroit pas par une conférence des Ambassadeurs avec plusieurs ministres.

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J'ai peine à croire aussi ce qui est porté par ces lettres, que Milord Preston ait été chargé de parler à V. M. sur le sujet de M. le Prince d'Orange. Le Roi d'Angleterre m'en auroit au moins dit quelque chose, s'il avoit envie que ses offices eussent un bon succès; mais il me parle souvent comme ayant une grande défiance et fort bien fondée de la conduite et des intentions de M. le Prince d'Orange à son égard. Votre Majesté sait bien en quelle manière Milord Preston lui a parlé sur se sujet du Prince d'Orange. Si cet endroit de la lettre des Ambassadeurs est faux, le reste pourroit bien l'être aussi.

Votre Majesté aura vu par les lettres que je me suis donné l'honneur de lui

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écrire, que je crois le Roi d'Angleterre dans toutes les dispositions possibles de conserver une étroite liaison avec Votre Majesté, et que c'est sur ce fondement que roulent tous ses desseins. Cependant, il est certain que toute l'application des Protestans zélés, et des partisans de M. le Prince d'Orange, est de le détacher des intérêts de V. M. On ne lui proposera rien d'abord "qui y soit directement opposé; mais on voudra insensiblement le faire entrer en des mesures secrètes avec le Prince d'Orange seul, ou avec les Etats Généraux. Je ne pense pas qu'on en vienne à bout; et je croirois plutôt que les Ambassadeurs d'Hollande se flattent, et prennent des discours généraux pour des paroles essentielles.

Les affaires du Parlement ne seront pas si faciles qu'on se l'étoit imaginé. Les esprits de ceux qui composent la Chambre des Communes paroissent disposes à accorder la jouissance des revenus. Mais il se fait tous les jours dans les cabales, de nouvelles propositions qui donneront de l'embarras à sa Majesté Britannique et à ses Ministres.

Il y a eu une chose agitée qui est de grande conséquence: l'opinion géneralement répandue est, que Madame de Portsmouth et Milord Sunderland sont les principales causes de la liaison étroite qui a paru depuis quelques années entre V. M. et le feu Roy d'Angleterre. On les a vus, dans les derniers temps de son régné, avec tout le credit; on a vu même Milord Rochester déchu de faveur, et prêt à partir pour l'irlande; cela fait que la principale haîne du passé tombe sur Milord Sunderland et sur Madame de Portsmouth, qu'on sait avoir agi en tout de concert. On y envellope aussi Milord Godolfin. Les factieux prétendent avoir été abandonnés par eux, et leur imputent tous les malheurs dont ils ont été accablés. Sur ce fondement le dessein est de proposer, dès que le Parlement sera assemblé, de chasser de la Chambre des Communes tous ceux qui ont été, dans les autres parlements, d'exclure M. le Duc d'York de la succession. C'est une proposition spécieuse, et qui paroît pleine de respect et de zèle pour le Roy d'Angleterre; mais le dessein en cela est d'aigrir les esprits de toute la nation contre lui, et de faire connoître (s'il y consent) qu'il n'oublie point ce qui a été fait contre ses intérêts, et qu'il a toujours envie de s'en venger. C'est aussi un degré pour attaquer ceux de la Chambre Haute qui ont été d'avis de son exclusion, et prin

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