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que la France lui avait autrefois enlevée. D'un autre côté pour vaincre le scrupule des Flamands qui avait juré sous peine d'excommunication de ne point prendre les armes contre les français, il s'était décidé d'après le conseil d'Artevelde, prendre le titre et les armoiries du roi de France. Il se fondait sur ce qu'étant fils d'Isabelle, sœur des trois derniers monarques français morts sans postérité mále, il se trouvait le plus pres du trône de son aïcul Phhilippe-le-Del. Mais cette prétention tombait devant l'autorité de la loi salique et Philippe-de-Valois bien qu'il fut plus éloigné d'un degré, dût l'emporter au jugement des pairs. Quoi qu'il en soit, Edouard et ses successeurs n'en continuerent

pas moins pendant cinq siecles à faire figu

rer trois fleurs de lys dans leur blason. La susceptibilité francaise à juste droit s'indignait de cette espece de trophée dont les Anglais étaient si fiers. Mais a la fin du siecle dernier, les sages représentations d'un roi malheureux et proscrit obtiarent ce que cent ans de guerres victorieuses n'eussent pu conquérir, et les armoiries britanniques ont été dépouillées de leur plus bel éclat. C'est ainsi que, jusqu'au

fond même de leur exil, les Bourbons furent les sauvegardes de l'honneur français. (Le chev. L. de la B M.)

(3) Le nom de Rewaert ou Rewart, d'apres son acception étymologique, signifie gouverneur. Il vient du celtique Gward. gardien, dont le Flamand a fait waerde.

,

C'est à tort qu'Oudegerst traduit ce mot par Régent. Quand Philippe-le-Bon fut, en 1420, élu á la régence de Hollande, du Hainaut, du Brabant etc., il ne prit aucunement le titre de Rewaert. Jusqu'à la révolution de 89, il y eut à Lille un Rewart: c'était le chef du magistrat. Son autorité supérieure à celle des Mayeurs s'étendait sur toute la province. Les der niers Rewarts de Lille ont été Messires Desfontaines comte de la Barre, et Denis, sire du Péage. (Le chev. L. de la B. M.)

40,000 Flamands et de 20,000 Brabançons, avait investi la ville et coupé toutes les communications en s'emparant des forteresses qui l'environnaient. Le monarque anglais ne fut pas moins surpris de la célérité de ces dispositions stratégiques que charmé de l'ordre admirable qu'il remarqua dans l'armée assiégeante.

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Autrefois le service militaire, se faisant dans la Flandre même. par le système féodal, souffrait beaucoup de l'extrême division des pouvoirs. Chacun était lié par son devoir et son serment en cas d'attaque, chacun, sous peine de fausser sa foi, était obligé de marcher sous sa bannière et de se réunir à son chef. Si Gand par. exemple était menacé, les vassaux de l'abbé de St-Pierre ne pouvaient aller que sous la banière de l'abbaye, et sous les ordres du chef que l'abbé avait avoué. Si ce chef était absent, les hommes du fief ne pouvaient combattre. Ces institutions faisaient que, dans les occasions urgentes, il fallait beaucoup de tems et beaucoup de peines pour rassembler une armée. L'habileté de Jacques d'Artevelde para à ces inconvé→ niens. De la masse des cités et des villages confédérés qui formaient la Fiandre, Jacques d'Artevelde fit une nation. Il soumit tout le pays Flamand à la même loi militaire pour les intérêts communs. Au lieu des mille divisions qui donnaient aux mouvemens de la Flandre tant de lenteur, il avait partagé le pays en trois cercles ou membres dont les chefs

lieux étaient Gand, Bruges et Ypres. Chaque cercle ou membre avait pour directeurs les hautséchevins du chef-lieu, chargés de l'administration civile et de la surintendance de la guerre. Ils avaient droit de lever les milices et de les conduire sous leurs banils faisaient eux-mêmes la nières ; police de leur corps d'armée. Les troupes par ce moyen étaient promptement en armes.

sait avec

Le roi de France était venu avec son armée, pour secourir Tournay. Mais les promptes dispositons d'Artevelde le forcèrent à l'inaction: La ville était cernée de toutes parts'; tous les jours elle subissait des assauts qu'elle repous. un courage héroïque. Cependant, après dix semaines de siège, elle allait se rendre par famine Philippe de Valois, alors chargea sa sœur Jeanne, comtesse douairière de Hainaut et mère de la reine d'Angleterre, de proposer la paix; et Jacques d'Artevelde ne consultant que les intérêts de son pays, obligea Edouard III, à si gner une trève de deux ans. Dans cette transaction, il se fit remettre tous les titres qui pouvaient nuire à la Flandre, toutes les sentences lancées contre les Flamands; il les brûla en public, sur le marché du vendredi à Gand.

Il avait exigé de plus qu'on déchargeât les Flamands de toute réclamation et de toute dette ; qu'on levât l'interdit lancé sur la Flandre et que le roi de France fit serment pour lui et ses successeurs, que jamais à l'avenir, la Flandre ne serait remise en inter

dit.

D'autres bataillons flamands, pendant le siège de Tournay étaient allés, sous la conduite de Robert d'Artois, attaquer SaintOmer. Ils remportèrent quelques avantages mais ils ne purent prendre la ville qui était bien défendue, et la trève survint.

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Pour récompenser la ville de Tournay du long courage qu'elle avait déployé dans ce siège, Philippe-de-Valois rendit à cette cité fidèle ses privilèges et ses franchises que depuis longtems on lui avait enlevés.

La Flandre grandit immensement sous le gouvernement d'Artevelde; jamais, dit-on, la prospérité, Flamande ne fut portée si loin que sous ce Rewaert. Il était si puissant de l'affection populaire que les historiens vendus aux intérêts des cours en ont fait un desposte. On lui a reproché jusqu'aux actes de vigueur qui sauvèrent le pays; on lui a fait un crime de la garde d'honneur qui l'accompagnait. Mais ces valets armés, Zweerd Draegers (porteglaives) étaient attachés à sa dignité de doyen des métiers (1). Les

(1) Les Gantois étaient alors divisés en trois classes. ia re se composait des rentiers la seconde, des suppots des 52 corporations des petits metiers, et la troisième des tisserands, qui étaient les plus nombreux et formaient le grand métier. Le premier échevin de la Keure était, de droit, chef des rentiers. Les 52 métiers ayant chacun son doyen particulier avaient en outre un chef Doyen et le Doyen des tisserands était le 3 chef principal de la cité. Ces dignités étaient des especes de consultats dont l'autorité était absolue sur les masses d'artisans armés qui leur étaient soumises. Jacques d'Artevelde, Doyen des Brasseurs était de plus chef Doyen de la

écuyers et soldats qui le suivaient, voulaient bien avoir les anglais

au nombre de cinquante ou soixante, lui rendaient l'honneur qui était dû avant et après lui, à tout capitaine de Gantois. Quelquefois pourtant les partisans de Louis de Nevers, suscitèrent contre son administration des émeutes. La seule remarquable est une querelle sanglante qui eut lieu entre les foulons et les tisserands ; ceux-ci avaient pour doyen Gérard Denys, ennemi d'Artevelde. Le 2 mai 1345, on se battit avec tant d'acharnement sur le marché du vendredi que trois cens foulons y périrent. Ce jour désastreux fut appelé le mauvais lundi. Il était le prélude d'un jour plus lugubre.

Peu après cet événement, le roi Edouard débarqua encore à l'Ecluse, avec une flotte de cent trente voiles. Voulant tout-à-fait détacher la Flandre du parti français il cherchait à faire reconnaître le prince de Galles, son fils, comte de Flandre. Cette proposition séduisit beaucoup de monde. Artevelde qui ne demandait qu'à déposer le pouvoir, y donna luimême les mains. Il représenta aux députés de la Flandre que le prince de Galles, fils d'une princesse Belge, Philippine de Hainaut descendait de Marguerite de Constantinople, mère des d'Avesnes, et qu'ainsi il n'était du pas sang étranger. Mais les flamands qui

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seconde classe, c'est-à-dire des 52 corpon rations el capitaine des Gantois quand les suffrages unanimes de ses concitoyens l'élevèrent à la dignité de REWAERT.

[Le chev. L. de la B. M.]

pour alliés, ne consentaient pas tous à les avoir pour maîtres. Il s'éleva des divisions. Louis de Male était revenu à Bruxellles d'où il dirigeait les intrigues. Gérard Denys, qui était puissant, fut gagné à son parti dont les chefs recommençaient à s'agiter : une conspiration se forme.

L'assassinat seul pouvait faire tomber l'élu du peuple, le 17 juillet 1345 (1344 selon Meyer), Jacques d'Artevelde vit sa maison de la place de la Calandre cernée par une bande nombreuse: Comme il voulait sortir pour se remettre au peuple, les meurtriers l'arrêtèrent en hurlant, et Gérard Denys le poignarda.

Artevelde avait fait une foule de lois sages qui ont péri avec lui. Les chefs de la conspiration avaient tellement arrangé leur complot, que les meurtriers, tenant d'une main le poignard et de l'autre la torche, en même tems qu'ils ôtaient la vie au Rewaert, méttaient le feu à sa chancellerie. Ainsi les précieuses archives des lois conquises au 14° siècle furent

...

réduites en cendres.

(Fastes militaires Belges.)

REHABILITATION DE JACNoQUES D'ARTEVELDE. 'tre histoire de Flandre, due à la plume des chroniqueurs étrangers qu dévoués à la maison de Bourgogne, fourmille d'inexactitudes et d'erreurs. Van Artevelde surtout a été dépeint sous des couleurs odieuses. On le représente

comme un misérable, sorti des rangs populaires, un brasseur de bière, un ambitieux qui a souillé son gouvernement par les plus horribles exactions ; et cependant Van Artevelde n'était point Brasseur il n'avait pris la qualification de Brouwer que comme doyen de cette corporation. Il était d'une extraction poble, illustre, alliée à des maisons souveraines ; il avait épousé Christine de Tronchiennes de l'antique maison de Baronaige et Philippine de Hainaut, reine d'Angleterre, n'avait point cru déroger à la dignité royale, en tenant son fils Philippe sur les fonds baptismaux et en lui donnant son propre nom. De l'Espinoy, qu'on ne saurait accuser de partialité envers ce héros, dit, en parlant de lui, p. 76: « en l'an 1337, fut par ceux de Gand, commis au gouvernement de Flandre, noble bourgeois de la ville de Gand > nommé Sire Jacques d'Artevelde, qui estoit sage, hardy, et vaillant homme, et gouverna ledit pays, fort heureusement par l'espace de sept ans...... et porta ledict de Artevelde de sable à trois couronnes ou chapelets d'argent, ce qui fut à la façon des vieux romains, lesquels donnoyent semblables couronnes aux plus preux et vaillants soldats. >>

un

Artevelde doué d'une instruction supérieure, d'une éducation chevaleresque et brillante, d'une fortune immense, avait été dans

sa jeunesse admis à la cour de France. Il y avait pris le ton exquis, les manières distinguées qui furent en tous tems l'apanage de la noblesse française. Magnifique jusqu'à la profusion, il avait avec les grands la dignité et l'élévation d'un souverain. Homme d'état habile, politique profond avec les diplomates, simple et populaire avec ses concitoyens, la souplesse de son génie le rendait partout et dans les circonstances un sujet d'étonnement et d'admiration. Orateur entraînant, soit qu'il s'adressât aux populations que sa voix avait rendues dociles, soit qu'il traitât devant le sénat les matières administratives ou qu'il agitât avec des têtes couronnées les questions d'où dépendait le sort des états, son éloquence incisive obtenait partout le succès, parce que partout il persuadait que ses vœux, ses désirs et son but étaient ceux du bien public, des intérêts de ses concitoyens et la conservation des priviléges de son pays.

Le seul reproche fondé que l'on ait pu faire à Jacques d'Artevelde, consiste en son insurrection con

tre Louis de Crécy, son légitime maître; certes nous ne sommes pas de ceux qui approuvent ou même excusent de pareils actes. Nous dirons au contraire avec Philippe de l'Espinoy, en parlant de sa fin malheureuse : « C'est ce qu'advint ordinairement à ceulx qui par une commune populace sont esleuez à de graudes dignitez

et est le salaire de ceulx qui sont desloyaux à leur seigneur et prince naturel. »

Cependant examinons si d'Artevelde était bien aussi coupable que quelques-uns ont voulu le persuader.

La Flandre, telle qu'elle était alors constituée, était moins une monarchie qu'une république, dont le sénat tout puissant non seulement balançait l'autorité du prince, mais encore formait le seul pouvoir souverain, aux yeux d'un peuple dont toutes les classes organisées comme nous l'avons dit étaient toujours disposées à recourir aux moyens hostiles pour faire respecter ses droits, ses franchises et ses libertés. Or, ce qui

dans une monarchie serait un crime, devient quelquefois une vertu sous un gouvernement popu

laire.

L'article premier de l'antique charte de Flandre, octroyée en 1192, par le célèbre Baudouin de Constantinople, est ainsi conçu :

Les Gantois doivent à leur comte dévouement et fidélité, autant qu'il les traite conformément à la justice et à la raison. etc.

Or, le comte de Flandre avait agi contre la raison, en repoussant aveuglement la proposition d'une alliance avec l'Angleterre que sollicitaient également les vœux et les intérêts du peuple flamand: il avait manqué à la jus tice en fesant arrêter en 1337, le vénérable Sohier, le Courtoisien capitaine des Gantois et l'un des plus braves chevaliers de son tems.

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Le seul crime de ce noble vieillard qui, douze ans auparavant lui avait sauvé la vie et la liberté, en l'arrachant aux main des Brugeois rebelles, après les avoir vaincus, était de s'être rendu l'écho du cri général, en proclamant la nécessité de l'alliance avec les anglais. Sohier fut conduit à Ruppelmonde où il fut décapité par l'ordre du même comte Louis de Crécy!

Cette exécution mis le comble à l'exaspération des Gantois, qui idolâtraient le brave Sohier; ils élisent d'Artevelde leur capour pitaine et bientôt à sa voix, le peuple s'émeut, il court aux arleurs voisins, pour chasser leur mes, les Brugeois s'unissent à comte, toute la Flandre se soulève et Jacques d'Artevelde en est proclamé le Rewaert.

Maintenant si l'on considère que Sohier le Courtoisien, était l'aïeul de ce même d'Artevelde, on comprendra la haine qu'il avait vouée à la maison de Nevers et l'on n'aura ni l'injustice, ni la force de blâmer en lui un sentiment de vengeance ennobli par les lois de la nature et par l'amour de la patrie.

Quoiqu'en aient dit quelques historiens, le nom d'Artevelde n'a jamais cessé d'être en honneur parmi les Gantois. En France, d'une justice ou d'une celui qui avait à se plaindre

vexa

tion, fesait entendre cette exclamation de confiance: Ah! si le roi le savait !.. de même en Flandre,

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