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je fus curieux de voir cette cérémonie. Je me rendis dans ce village et remarquai une grande quantité de tonneaux pleins d'eau, 1angés proche de la chapelle, qu'on ne pouvait approcher pour le monde qui les entourait. Ceux qui voulaient être les premiers servis lorsque le prêtre y aurait apporté l'eau bénite, munis de pots d'étain, étaient montés sur ces tonneaux. De tems en tems il venait une poussade et toujours quelqu'un tombait dans les tonneaux. Il s'élevait alors des cris de joie et de ris éclatans que, malgré la solennité de la cérémonie, les gardes ne pouvaient calmer. Ce qui me frappa le plus fut de voir plusieurs femmes et filles furieuses que des hommes tenaient : on me dit qu'elles étaient possédées et que je les verrai guéries lorsqu'elles auraient bu de l'eau grégorienne. Comme la cérémonie était longue, je m'aperçus que les efforts des possédées se ralentissaient, et que les hommes d'abord tout occupés d'elles ne les tenaient plus guères que pour les empêcher de s'échapper. Je m'approchai alors d'une fille d'environ 24 ans, forte et vigoureuse, bien et proprement vêtue, portant au col une croix d'or et aux oreilles des boucles du même métal dites

girandoles. Je me présentai pour lui tenir la main ce quoique je tusse fort jeune, le paysan qui, jusqu'alors avait été chargé de cette besogne, me la quitta sans difficulté de sa part ni de la part de ceux qui comme lui étaient chargés du soin de la patiente. J'eus le tems de l'observer, car

ses efforts ne portèrent jamais de mon côté, et je fus persuadé que ses convulsions n'étaient que feintes. J'avais apperçu à quelques pas de là une vieille qui n'avait pas quitté ma possédée, quoique celleci eut souvent changé de place, je l'accostai quand j'eus été relevé et liai conversation avec elle. Soit qu'elle me crut du secret, soit bêtise, elle me dit qu'à son tour elle avait été possédée, qu'elle avait aussi figuré à Pecquencourt, pendant 15 ou 16 ans, mais qu'à présent elle était trop vieille. Je la fis parler et j'appris que cette scène lui avait valu six francs chaque année et qu'elle n'aurait plus cette fois qu'une petite part dans la même somme qui serait donnée à la fille que j'avais tenue. Elle m'ajouta que cette fille était une servante de fermier d'un village voisin et que les habits et les ornemens qu'elle portait étaient à sa maîtresse. Je fus assez sage pour me taire et faire des vœux pour la suppression de ces scandaleuses impostures qui prirent fin en 1776 sur un ordre et d'après un réquisitoire de M. de Franqueville d'Abancourt, procureur-général au parlement de Flandre.

C'est à Pecquencourt qu'est né le vénérable M. Lévêque, grand doyen de St.-Jacques, à Douai, chevalier de la légion d'honneur, l'un des plus dignes et des plus respectables prêtres du clergé de France.

Pecquencourt compte aussi au nombre de ses enfans, le brave chef de bataillon Derode, qui, partį

pour l'armée à l'aurore de la révolution Française, a suivi nos glorieux drapeaux sur tous les champs de bataille de l'Europe.

Cette commune est renommée par son houblon et surtout par ses haricots dont elle fait un grand commerce et qui rivalisent pour la qualité avec ceux de Soissons, de Hollande, de la Suisse et du Mississipi.

D. (Mémorial de ta Scarpe).

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ON NE MEURT PAS DE CHAGRIN. Les belges se rappellent encore avec plaisir l'un de leurs princes les plus chéris, Philippele-Beau, fils de Marie de Bourgogue et de l'archiduc d'Autriche Maximilien Ier.

Né belge en 1478, élevé parmi nos pères, Philippe en était adoré. Bon enfant, juste, gai, familier avec noblesse, beau comme l'Apollon du Belvédère, les belges ne demandaient qu'à conserver longtems un souverain si aimable.

Il épousa en 1495 l'infante d'Espagne Jeanne, fille de Ferdinandle-Catholique et de la grande Isabelle, Ce fut là le commencement de l'alliance désastreuse qui unit pour trop longtems la Belgique à la couronne espagnole. Nos pères, mus sans doute par de secrets pressentimens, virent ce mariage avec peine; cependant il amenait de brillantes espérances; et Jeanne devint si ardemment éprise de son mari d'elle qu'il que ce n'était pas fallait prendre ombrage,

mérita à jamais l'amour des bel ges, en donnant le jour à un enfant qui naquit à Gand, pendant une fête et qui devint CharlesQuint.

Le second fils de Philippe et de Jeanne, né trois ans plus tard, fut par la suite l'empereur Ferdinand Ier. Ainsi le sang belge croissait pour dominer le monde.

Isabelle de Castille étant morte en 1504, Philippe et Jeanne furent proclamés roi et reine de Castille, de Léon, de Tolède, de Grenade, des princes d'Aragon et des Deux Siciles, etc., etc., etc. Les belges, fiers cependant de la splendeur de leur souverain, s'alarmèrent un peu de lui voir tant de couronnes. Ils prévirent bien que désormais Philippe ne serait plus. à eux tout entier.

On exigea, en 1506, qu'il allat en Espagne pour prendre possession de ses nouveaux royaumes. Son départ, que lui-même retarda longtems, car il aimait sa patrie, ne s'annonça que sous de mauvais auspices. Et en effet, à la suite d'un grand festin qu'on lui donna à Burgos, capitale de la CastilleVieille, il tomba malade. Ses mé decins belges furent écartés, et il mourut au bout de six jours, le 25 septembre 1506, âgé de vingthuit ans.

Philippe-le-Beau était dans la vigueur de son âge,d'une santé parfaite, d'une constitution robuste. Cette mort presque subite ne fut pas plutôt connu dans les Pays-Bas,

Le 25 février de l'an 1500, elle qu'elle faillit y produire un sou

idolâtrait, elle acconcha d'une fille, et ne se releva de ses couches que pour faire plaindre à ceux qui l'entouraient sa raison égarée. Une douleur sans mesure s'incarna en quelque sorte dans cette pauvre princesse. Il fallait, dit VanderVynckt, l'arracher du tombeau du roi, Elle vivait enfermée, ne parlant point, ne voulant voir personne. Elle ne demandait que la mort. Elle refusa constamment de signer aucune dépêche ; et la junte d'état fut obligée de prendre acte de ce refus pour expédier quelques ordres indispensables.

lèvement. Ce n'étaient partout que désespoir et cris de vengeance. On avait beau dire que le prince avait succombé à une pleurésie, tous les belges prétendaient et peutêtre avaient-ils raison) qu'on l'avait empoisonné. On se rappelait que déjà, en 1502, dans un voyage que Philippe avait fait vers les frontières d'Espagne, on avait tenté sur lui le poison. Ferdinand V, son beau-père, ne dut son surnom de Catholique qu'an zèle qu'il mit à restaurer la puissance formidable de l'inquisition sur les bases sanglantes qui l'ont rendue si horriblement fameuse, tout le monde savait que ce Ferdinand V était le plus fourbe des rois, et tellement infame qu'il se vantait impudemment de ses iniquités: On pensa qu'il voulait conserver l'administration des royaumes échus à sa fille. On cria haine à l'Espagne. Victor Hugo dit, dans Marie Tudor, que les espagnols sont habiles aux poisons qui font mourir. On était imbu de cette persuasion; on désignait tout haut les auteurs et les motifs du meurLe corps de Philippe était resté tre; on se promit bien que déposé à la Chartreuse de Mirajeune Charles n'irait pas de long- flor. La reine y vint un soir, fit

tems en Espagne.

le

Cependant Jeanne de Castille, veuve de Philippe, tomba dans une douleur et un désespoir que rien ne saurait exprimer. Son esprit se frappa; ses facultés s'ébranlèrent, sa tête s'affaiblit. Elle ne faisait que pleurer dans d'affreuses angoisses.

Elle était enceinte. Vingt jours après la mort d'un époux qu'elle

Les belges qui avaient accompagné Philippe, trop indépendans pour ne pas dire tout haut leur pensée, se virent alors si maltraités par les espaguols, qu'ils furent obligés de s'adressur à la reine. Elle les écouta par une petite fenêtre grillée, car on ne l'approchait plus autrement; elle entendit leurs plaintes, et répondit qu'elle n'était plus en état de s'occuper de rien, sinon de prier pour son mari,

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ouvrir le cercueil, malgré tous
ceux qui l'entouraient et qui ne
purent résister à ses emportemens
bile à contempler le
convulsifs, resta longtems immo-
prince qu'elle avait tant aimé,
puis fondant en larmes, elle le
un char de deuil
fit placer sur
qui suivait son carrosse, et se mit
en route sur le champ pour pro-
mener ce corps dans tous les lieux
saints de la Castille.

Elle s'était enflammé l'imagination par quelques histoires miraculeuses, qui lui faisaient espérer qu'à force de prières, des morts pouvaient revenir à la vie. Elle allait en tête de ce convoi funèbre, ensevelie elle-même dans un grand drap noir; le cortège ne, marchait que la nuit, à la lueur des flambeaux que portaient en silence des hommes à pied et à cheval. Elle parcourut ainsi les villages et les villes, s'arrêtant pendant le jour pour faire célébrer dans l'église du lieu l'office des morts par ses chapelains; au retour de la nuit, elle se remettait en marche.

Jalouse, comme toutes les personnes faibles dans leurs amours, elle conservait même alors un reste de jalousie. Aucune de ses dames ne l'accompagnait dans ce triste pélerinage. Il était défendu à toute femme de s'approcher du cercueil; et le soir pour les monastères qu'on trouvait sur la route, si c'étaient des maisons de religieuses, elle aimait mieux camper avec toute sa suite que d'y entrer. (1)

Après de longues promenades de ce genre, quand le corps de Philippe fut arrivé à Grenade, et qu'il fallut renoncer à l'espoir de lui rendre la vie, car les saints et les reliques n'avaient accordé aucun miracle, ce ne fut que par la violence qu'on put en séparer

(1) Histoire des troubles des Pays-Bas, par Vander Vynckt, 3 vol in 8". Prix 18 fr. à Bruxelles, chez Lacrosse,rue de la Montagne, no 7.

Jeanne. Elle se jeta dans un vieux château, refusant de voir le jour, ne voulant habiter que les souterrains les plus sombres, refusant de manger et de boire, et ne prenant qu'à force d'instances les alimens les plus simples. Le roi d'Arragon son père (Ferdinand V) la vit dans cet état. Malgré la sécheresse de son cœur, il en fut attendri jusqu'aux larmes. Il la décida à prendre pour retraite le château de Tordesillas, du moins exposé à l'air sain; elle y demeura le reste ses jours, servie comme il convenait à l'une des premières reines du monde, avec une cour très nombreuse, mais la plus lumonde y était constamment vêtu gubre qui fut jamais. Tout le de deuil. La reine ne paraissait que voilée de crêpes; et le tems ne séchait pas ses larmes. Ce ne fut que longtems après, par des amusemens bizarres, qu'on parvint à dissiper ou plutôt à adoucir par instans ses noirs chagrins. Quelquefois on réussit à la faire manger devant sa cour; rarement elle prenait l'air dans ses jardins; elle passait les nuits à prier et à pleurer devant le portrait de son époux.

Jamais elle ne voulut voir d'étrangers, ni entendre parler des choses de ce monde. Elle ne soupirait qu'après le moment qui la réunirait à Philippe, et qui eut de Tordesillas. Elle avait soixantelieu le avril 1555, au château

seize ans.

Elle en avait passé quaranteneuf dans de si profondes douleurs et dans un désespoir si vio

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HOTEL D'ARENBERG. parle en ce moment des nouvelles constructions faites à l'hôtel d'A

renberg, sur le terrain de l'église des Petits-Carmes, à Bruxelles ; nous ne pouvons nous dispenser à ce sujet d'entretenir les lecteurs des deux grands patriotes qui y avaient

leurs habitations.

Le premier, Florent de Pallant, comte de Culembourg, possédait un magnifique hôtel au haut du Petit-Sablon. C'était là que l'association des seigneurs brabançons avait été conclue et jurée contre la tyrannie de Philippe II. Cet hôtel avait pour plus proches voisins ceux de Bournonville et d'Egmond. Le comte ayant dû prendre la fuite, ainsi que le prince d'Orange, le duc d'Albe ordonna que son habitation fut rasée jusqu'aux fondemens, ce qui eut lieu en 1568. On érigea sur le lieu une colonne en pierre, avec une inscription latine, relative à l'événement, qu'on trouve dans les OEuvres de Sweerts (Sweertius) qui l'a conservée.

Les carmélites ayant prié les archiducs Albert et Isabelle de faire venir d'Espagne, pour leur assistance et leur conseil, quelques carmes déchaussés de la réforme de SteThérèse que l'infante Isabelle avait particulièrement connue dans ce

royaume, nos souverains deman→ dèrent le vénérable Thomas de Jésus, trés-connu par ses ouvrages mystiques, avec cinp autres religieux. Ils obtinrent en 1610, pour bâtir leur couvent, le terrain de l'hôtel de Culembourg. L'église fut achevée en 1612. Depuis cette époque, la rue dont ce couvent formait l'extrémité méridionale, Carmes; mais comment se nompris le nom de rue des Petitsmait-elle auparavant? voilà ce que nous ignorons. Le duc d'Ation du local qu'occupait l'église, renberg vient de faire l'acquisipour le joindre à son hôtel.

a

Les carmes déchaussés que nous nommions Petits-Carmes, pour les distinguer des carmes chaussés ou grands carmes qui étaient beaucoup plus nombreux, furent supprimés, avec ceux-ci, en 1796,

et leur couvent fut abattu en 1812 et 1813, pour y construire la prison actuelle.

L'hôtel d'Arenberg était celui du comte d'Egmond, décapité si injustement, sur la grande place de Bruxelles, avec son beau-frère, Philippe de Montmorency, comte de Horn, à l'occasion de l'association dont il est parlė plus haut.

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