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ses braves, l'empereur distingua un vieux soldat qui portait les insignes de sergent-major. Il avait des yeux grands et durs qui brillaient comme des flambeaux sur un visage noirci par vingt campagnes. Une barbe énorme, couvrant la moitié de cette figure, la rendait encore plus formidable ou plus bizarre. L'empereur le fit sortir des rangs.

Le cœur du vieux brave, si ferme, si intrépide, ressentit de l'émotion. Une vive rougeur parut

sur ce qu'on pouvait distinguer de ses traits, car il était modeste.

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L'empereur fit un signe. Le sergent-major rentra dans les rangs, et pendant deux minutes Napo

léon s'entretint avec le colonel. Quelques regards lancés sur Noëls pouvaient assez faire penser que l'empereur s'occupait de lui. En effet, c'était un de ces précieux soldats, vaillans et calmes, esclaves du devoir et de la discipline, constans et dévoués, comme les aimait l'empereur. Il s'était distingué dans toutes les affaires, sa modestie, que peut-être il tenait de son pays, ne lui ayant pas permis de solliciter de l'avancement, on

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se

Le soldat, en ce moment, trouvait entre son colonel et son empereur. Il ne sut pas répondre un mot, mais ses grands yeux adorèrent celui qui savait si bien récompenser.

Sur un geste de l'empereur, les tambours battirent un banc, le silence se fit, et le colonel, présen

tant à l'armée le nouveau chevalier de la légion d'honneur, qui tremblait en plaçant avec transport sa croix sur sa poitrine; s'écria d'une voix forte:

- Au nom de l'empereur ! reconnaissez le sergent-major Noëls comme sous-lieutenant dans votre régiment.

Toute la ligne présenta les armes. Noëls, dont tout le cœur s'était ébranlé, entendit ces mots comme le prestige d'un rêve; il voulut se jeter à genoux, mais la figure impassible de l'empereur, qui alors semblait plutôt rendre justice que donner des graces, retint.

le

Sans voir son mouvement, sans faire attention aux sentimens qui agitaient le brave, Napoléon fit battirent un second banc; le coun nouveau signal : les tambours lonel reprit de sa voix puissante :

- Au nom de l'empereur ! reconnaissez le sous-lieutenant Noëls comme lieutenant dans votre régi

ment.

Ce nouveau coup de tonnerre faillit renverser le Belge. Ses genoux le soutenaient à peine : ses yeux, qui depuis vingt ans n'avaient jamais su pleurer, se mouillèrent de grosses larmes : il chancelait, ses lèvres balbutiaient sans parvenir à exprimer aucun son, il ne se reconnaissait déjà plus, lorsqu'un troisième roulement de tambour acheva d'égarer sa tête; et le colonel dit:

- Au nom de l'empereur! réconnaissez le lieutenant Noëls comme capitaine dans votre régiment.

Après cette promotion, l'empereur, avec ce calme supérieur aux passions qui lui donnait tant de majesté, continua gravement et froidement sa revue.

Mais le pauvre Noëls s'était évanoui, les yeux gonflés de larmes, dans les bras de son colonel, en poussant à moitié, d'une voix étouffée, ce cri sacré de vive l'empe

reur.

0.

PARENT-RÉAL.-M. ParentRéal, né à Ardres en avril 1768, est décédé à Paris le 28 avril 1834.

Après avoir fait de bonnes études au collège de St.-Omer, il exerça avec succès dans cette ville la profession d'avocat au commencement de la révolution; partisan des principes modérés, il devint juge de paix du canton d'Ardres, et ayant échappé au régime de la terreur, il fut nommé le 23 novembre 1795, commissaire du directoire-exécutif près l'ad

ministration municipale de St.Omer; il donna sa démission de ces fonctions le 17 septembre 1797, et passa en la même qualité près l'administration centrale du département du Pas-de-Calais, qu'il présida ensuite. Ce fut sous sa présidence que l'adjudication de la célèbre église de St.-Bertin fut prononcée, comme domaine national, à Arras, le 18 mars 1799. Elu, dans le cours de cette année, député au conseil des Cinq-Cens, il fut appelé peu de tems après à faire partie du tribunat. A l'occasion de cette nomination, la commune de St.Omer lui écrivit le 3 janvier 1800, qu'elle se félicitait de compter au nombre de ses enfans adoptifs un citoyen qui l'honorait par sa dignité et sa sagesse. Bientôt de retour à St.-Omer avec une mission

spéciale, il y rétablit l'ordre par sa fermeté. Il paraît qu'on y avait tenté d'organiser, à cette époque cala miteuse, des compagnies d'égorgeurs pour y répéter les désordres d'Aix et de Marseille.

Lors des prétentions de St.Omer à la désignation de cheflieu de ce département, il fit tout ce qu'il put auprès du gouvernement pour favoriser cette ville, et si tous ses projets ne furent point couronnés de succès, il contribua du moins à lui faire conserver plusieurs établissemens importans. Ayant alors appris qu'Ardres venait d'être compris dans l'arrondissement de St.-Omer, il s'empressa d'écrire aux administrateurs du chef-lieu de l'arrondissement qu'il se réjouissait d'être

dorénavant, sous tous les rapports, citoyen de leur ville.

M. Parent-Réal fut éliminé du tribunat à cause de son indépendance et de son opposition à la création des tribunaux exceptionnels. Il s'offrit à être le défenseur de Moreau.

Il fut ensuite inscrit sur le tableau des avocats au Conseil d'état et à la Cour de cassation. En 1823 et 1824, il professa la littérature à l'Athénée royal de Paris. Après, il résida de nouveau pendant quelques années dans la ville de St.Omer où il eut l'occasion d'employer utilement ses connaissances en jurisprudence. Il manifesta des vues philantropiques pour sa ville natale, et approuva la demande d'un arrondissement communal pour Calais. Il publia, dans la biographie des contemporains, un grand nombre d'articles sur les hommes recommandables de notre pays; il enrichit l'Indicateur de Calais de plusieurs morceaux de littérature, et fit paraître, en 1851, des questions politiques où il se montra ami éclairé de la monarchie constitutionnelle. Il figurait en dernier lieu au nombre des avocats de la Cour royale de Paris.

H.P.

La

LA RUE ST.-THOMAS. rue St.-Thomas est une de celles qui ont le plus de vieux et nobles souvenirs dans la noble et vieille ville de Saint-Quentin. Sous les romains, et lorsque cette belliqueuse capitale du Vermandois avait pris le nom d'Auguste, cette

appellation, alors si pleine d'honneur, avait été particulièrement les sénateurs, les chevaliers gauaffectée au quartier où logeaient lois et les représentans de la ville premiers tems de l'ère chrétienne, éternelle. Ce quartier, dans les fut insensiblement abandonné par la pieuse population, qui allait se grossir autour du tombeau miraculeux de l'apôtre et martyr St.Quentin, sur lequel s'élève aujourd'hui notre magnifique collégiale. Les souvenirs tout payens dont le vieux quartier était rempli motivent également cet abandon, qui devint complet, lorsque les invasions des barbares ayant passé plusieurs fois sur la ville, le Moustier ou quartier de l'église s'entoura de fortifications, hors desquelles resta nécessairement placé le quartier d'Auguste. De

nouvelles invasions vinrent détruire les derniers vestiges de ces belles constructions romaines qui croulaient et tombaient en poussière, sous les yeux des riches couvens et des triomphantes églises de moustier; et, du passage civilisateur de la grande conquête, plus rien ne resta que quelques tombes romaines, quelques ornemens cinéraires, témoignages éloquens de puissance et de mort.

La ville se reforma, remplit ses vides, s'agrandit ; un nouveau quartier remplaça le quartier disparu; et au nom si beau, si glorieux, si poétique d'Auguste, succéda l'apostolique et modeste nom de St.-Thomas.

Sous Louis XV et Louis XVI,

cette ruc de St.-Thomas reprit une espèce de célébrité, célébrité aristocratique et bourgeoise, et partant prétentieuse et mesquiue. Les riches, les bien-nés, les bien-disant (ce qui n'emporte pas toujours la condition de bien-agissant) s'y installès ent; la rue St.Thomas, nommée le quartier, devint désormais l'asile des beaux salons, des belles manières, des jolies décorations Van-Loo, des rubans, de la poudre, des petits vers, des petits adultères, en un mot des petites mœurs, et de tout cet attirail élégant, mignon et corrompu, que pulvérisera d'un regard l'énergique et sévère quatrevingt-treize; et l'aristocratie de mœurs alla rejoindre l'aristocratie de conquête; aux chevaliers gaulois et aux centurions romains allèrent se réunir les belles dames et les messieurs poudrés.

Puis l'aristocratie marchande est

venue, à St-Quentin plus qu'ailleurs, mais elle a dédaigné longtems la rue St.-Thomas; elle s'est assise tout le long de la grande rue du Gouvernement, juste sur la ligne des boulevards qui ceignaient le quartier privilégié des chanoines; et, remplaçant à son tour l'aristocratie ecclésiastique, elle est venue témoigner aussi de l'instabilité des choses humaines.

Donc la rue St.-Thomas n'a

plus aujourd'hui que ses souvenirs, quelques belles maisons neuves inais toujours commerciales, cinq ou six maisons anciennes, aux formes opulentes et toujours fières; elle se termine, comme cer

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Lorsque les français, en 1791, rent installé la république à Bruxelles, avec toutes ses libertés, qui n'étaient ni la liberté de la presse, ni la liberté individuelle, ni la liberté des cultes, on n'exigea pourtant pas aussi rigoureusement qu'à Paris que tout citoyen qui passait une des portes pour entrer dans la ville se présentât avec une carte de civisme. On se connait généralement de vue à Bruxelles ; et peu à peu les employés de la porte de Ninove s'étaient bornés à demander seulement les noms des personnes qui entraient dans la ville.

'Or, un bon flamand se trou→ vant à un quart de lieue de Bruxelles, dans un cabaret, avec trois de ses amis, ils résolurent de lui jouer une petite farce, quoique l'époque ne fut pas précisément tournée à la plaisanterie. Ce flamand qui allait rentrer dans Bruxelles se nommait Vierstaf, nom qui signifie en flamand quatre bálons.

Le premier de ses amis entra par la porte de Ninove; et comme ou lui eut demandé son nom, il répondit Eenstaf (un bâton); on le laissa passer.

Le second vint dix minutes après, et à la même demande, il répon→ dit Tweestaf (deux bâtons); l'offi

mais il ne

vier de garde parut un peu frappé l'attention, mais cependant il était de ce second bâton; traité avec beaucoup de distincdit mot. tion de la part des chefs de l'ar

Le troisième buveur ayant laissé le flamand en arrière, parut bientôt ; et sur l'interpellation qu'on lui fit, il répondit qu'il se nommait Driestaf(trois bâtons). L'entployé fit répéter ce nom. Est-ce qu'on se moquerait de moi, se demanda-t-il, tout prêt à s'emporter? Cependant, après un moment de réflexion, il reconnut que cette bizarrerie n'était pas impossible, et il laissa aller.

Mais cinq minutes ne s'étaient pas écoulées que le flamand arriva. Votre nom! lui cria l'officier du poste. Vierstaf (quatre bâtons), Mynheer!

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Rien n'inspire des idées vagues de tristesse comme une promenade dans des lieux que l'on sait avoir été le théâtre de ces sanglans combats, où les hommes qui ne se connaissent pas, qui n'ont nul motif d'animosité personnelle, s'entretuent avec fureur pour des intérêts qui trop souvent ne sont pas les leurs. Le contraste de ces lieux, maintenant si calmes, si déserts, avec ce qu'ils étaient aux jours où ils retentissaient des éclats de l'artillerie, du cri des combattans, du râle des mourans, conduit à une série indéfinie de réflexions de toute nature. Les souvenirs historiques se confondent avec les événemens possibles. On cherche à s'approprier aux sites que l'on préfère les belles actions ou les scènes intéressantes dont le réA Paris, c'eut été plus dange- bres des vieux guerriers qui se sicit a frappé. On invoque les om

Ah! ceci passe la plaisanteterie, s'écria l'employé, tu payeras pour les autres!...

Et sans vouloir écouter les ré-, clamations du bon homme, il le fit mettre au violon da corps de garde, où il resta jusqu'à ce que ses amis, contens de la mystification, vinrent le réclamer en se faisant connaître.

reux.

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J. L.

MARION - DELORME A ARRAS. Parmi les braves gens qui délivrèrent Arras des Espagnols, ily aura bientôt 180 ans, se trouvait un jeune et beau soldat de fortune; sa naissance était inconnue, il portait un de ces noms obscurs, peu propres à éveiller

gnalèrent sur celle terre abreuvée du sang humain, et l'on assiste ainsi à un de ces combats. fantastiques écrits avec tant de charmes et de sombre mélancolie par le fils de Fingal.

Les personnes qui connaissent la ville d'Arras ont sans doute remar qué à l'Est de l'enceinte intérieure

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